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12/01/2001 | SUISSE | N°U.186/00

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 12 janvier 2001, U.186/00


«AZA 7»
U 186/00 Rl

IIe Chambre

composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, Meyer
et Ferrari; Addy, Greffier

Arrêt du 12 janvier 2001

dans la cause

La Vaudoise Générale, Compagnie d'assurances SA, Place de
Milan, Lausanne, recourante,

contre

Société d'assurance dommages FRV, Avenue du Casino 13,
Montreux, intimée,

et

Tribunal administratif du canton de Fribourg, Givisiez

A.- a) Au bénéfice d'un permis saisonnier, A.________
a travaillé d

ès le mois de mars 1994 comme ouvrier agricole
dans l'exploitation de H.________. A ce titre, il était
assuré contre le risque d'acci...

«AZA 7»
U 186/00 Rl

IIe Chambre

composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, Meyer
et Ferrari; Addy, Greffier

Arrêt du 12 janvier 2001

dans la cause

La Vaudoise Générale, Compagnie d'assurances SA, Place de
Milan, Lausanne, recourante,

contre

Société d'assurance dommages FRV, Avenue du Casino 13,
Montreux, intimée,

et

Tribunal administratif du canton de Fribourg, Givisiez

A.- a) Au bénéfice d'un permis saisonnier, A.________
a travaillé dès le mois de mars 1994 comme ouvrier agricole
dans l'exploitation de H.________. A ce titre, il était
assuré contre le risque d'accident professionnel et non

professionnel auprès de la Vaudoise Générale Compagnie
d'assurances SA (ci-après : la Vaudoise).
Le 25 juin 1994, l'assuré a été victime d'un accident
non professionnel en chutant dans les escaliers d'un res-
taurant. Il a subi de multiples contusions ainsi qu'une
entorse acromio-claviculaire à gauche. Ces lésions ont
entraîné un arrêt de travail total du jour de l'accident
jusqu'au 26 juillet 1994, puis partiel (50 %) pour la pé-
riode du 27 juillet au 28 août 1994. Le cas a été pris en
charge par la Vaudoise.
Par la suite, des douleurs à l'épaule gauche, irra-
diantes jusque dans le bras, sont progressivement réappa-
rues, entraînant une incapacité de travail dès le 11 novem-
bre 1994. Ayant mis en évidence des déchirures ligamen-
taires, le docteur B.________, chirurgien orthopédiste FMH
a pratiqué une plastie de l'articulation acromio-clavicu-
laire en mars 1995. A la suite de cette opération, la
reprise du travail s'est graduellement faite à partir du
mois de juillet 1995, malgré une brève interruption néces-
sitée par une nouvelle intervention chirurgicale en septem-
bre 1995 (ablation d'une «plaque de Bâle» posée lors de la
plastie en mars 1995).

b) Le 1er mars 1996, A.________ a changé d'employeur.
Il est entré au service, toujours comme employé agricole,
de C.________. Dès ce moment, les prestations de la
Vaudoise se sont limitées à la prise en charge de contrôles
médicaux réguliers, l'assuré ayant recouvré une pleine
capacité de travail. Les médecins ont néanmoins fait état
de l'existence d'un dommage permanent dû à une paralysie du
nerf du grand dentelé, en laissant entrevoir la nécessité
d'effectuer, à moyen terme, une nouvelle intervention
chirurgicale sous la forme, par exemple, d'une fixation de
l'omoplate au niveau thoracique (rapports des docteurs
S.________, neurologue et B.________, chirurgien,
respectivement des 28 octobre 1996 et 24 mars 1997).

Entre-temps, l'assuré, qui percevait une demi-rente
d'invalidité depuis le mois de juin 1995, a vu cette
prestation supprimée avec effet au 1er mars 1997 (décision
de l'Office AI du canton de Vaud du 7 janvier 1997).
Le 22 avril 1997, le nouvel employeur de A.________ a
rempli une déclaration d'accident LAA, dans laquelle il a
exposé qu'«en réparant une machine, M. A.________ s'(était)
fait mal à son épaule déjà accidentée en juin 94». L'assuré
a été déclaré incapable de travailler. Initialement pris en
charge par la Vaudoise comme s'il s'agissait d'une rechute,
le cas a été transmis dans le courant du mois d'octobre
1997 à la Société d'assurance dommages FRV (ci-après : la
FRV), auprès de laquelle A.________ était affilié depuis
son entrée au service de C.________, le 1er mars 1997.
Après un entretien avec l'assuré le 30 septembre 1997, la
Vaudoise a en effet estimé que, vu son déroulement et ses
conséquences, l'accident survenu le 15 avril 1997 devait
être considéré comme un nouveau cas d'assurance du ressort
de la FRV.

c) Par décision du 3 août 1998, la FRV a refusé de
répondre du cas, en faisant valoir que les lésions présen-
tées par l'assuré et l'incapacité de travail qui en décou-
lait étaient entièrement imputables au premier accident
survenu le 25 juin 1994. Saisie d'une opposition de la
Vaudoise, la FRV a confirmé son point de vue dans une nou-
velle décision du 18 septembre 1998.

B.- La Vaudoise a déféré cette décision devant la Cour
des assurances sociales du Tribunal administratif du canton
de Fribourg, en concluant à ce que la FRV fût tenue à pres-
tations pour toutes les séquelles accidentelles constatées
après le 15 avril 1997, que celles-ci fussent causées par
le premier ou le second des accidents assurés. La Vaudoise
soutenait qu'aux termes de la loi, «dès le second accident,

toute la gestion du cas incombait au second assureur, à
charge pour lui de trancher à satisfaction de droit les
questions de causalité entre les divers événements et d'ef-
fectuer la répartition des frais entre les assureurs inté-
ressés».
A titre principal, la FRV a conclu au rejet du
recours, au motif qu'il n'y avait, selon elle, pas de lien
de causalité entre le second accident du 15 avril 1997 et
les lésions de l'assuré. Subsidiairement, elle a prié le
tribunal, pour le cas où celui-ci retiendrait l'existence
d'un tel lien de causalité, «d'imposer aux parties l'éta-
blissement d'une convention au sens de l'art. 100 alinéa in
fine 2 OLAA». Cette convention devait prévoir que l'ensem-
ble des prestations d'assurance découlant des deux acci-
dents étaient dues par la Vaudoise, la FRV étant seulement
tenue au remboursement de la part du dommage lui incombant
dans une mesure qui serait définie par le tribunal.
Par jugement du 6 avril 2000, le tribunal a partiel-
lement admis le recours, en ce sens qu'il a condamné la FRV
au versement des prestations assurées, mais seulement pour
la période du 15 avril 1997 au 15 juillet 1997, date à
partir de laquelle la Vaudoise était tenue de prendre le
relais.

C.- La Vaudoise interjette recours de droit adminis-
tratif contre ce jugement dont elle requiert l'annulation,
en reprenant ses conclusions de première instance.
La FRV conclut au rejet du recours, tandis que
l'Office fédéral des assurances sociales (OFAS) ne s'est
pas déterminé.

Considérant en droit :

1.- Le litige porte sur le point de savoir qui, de la
Vaudoise ou de la FRV, est tenue à prestations après

l'accident du 17 avril 1997, qui faisait suite à un précé-
dent accident survenu le 25 juin 1994.

2.- a) L'art. 77 al. 3 LAA délègue au Conseil fédéral
la compétence d'édicter des prescriptions sur l'obligation
d'allouer des prestations et sur la collaboration des assu-
reurs dans divers cas spéciaux, par exemple lorsqu'un
nouvel accident se produit, notamment en cas de perte d'un
organe pair ou d'autres modifications du degré d'invalidité
(let. b).
Sur la base de cette délégation de compétence, le
Conseil fédéral a édicté l'art. 100 OLAA qui, à son
deuxième alinéa, dispose ceci :

«Si l'assuré est victime d'un accident alors qu'il est
en traitement pour un ou plusieurs accidents, mais après
qu'il a repris une activité soumise à l'assurance, l'assu-
reur tenu de lui verser les prestations pour le nouvel
accident alloue aussi les prestations pour les accidents
précédents dans la mesure où le nouvel accident donne droit
à des indemnités journalières. Les autres assureurs inté-
ressés lui remboursent ces prestations, sans allocations de
renchérissement, selon le dommage leur incombant; ils se
libèrent ainsi de leur obligation d'allouer des presta-
tions. Les assureurs intéressés peuvent déroger par conven-
tion à cette règle, notamment si le nouvel accident a des
conséquences considérablement moins graves que le précé-
dent».

b) Au vu des pièces médicales au dossier, les premiers
juges ont considéré que le statu quo ante était déjà
rétabli, s'agissant de l'accident du 15 avril 1997, trois
mois après la survenance de celui-ci. Aussi bien ont-ils
conclu que l'obligation de la FRV d'allouer des prestations
se limitait à la période comprise entre le 15 avril et le
15 juillet 1997, après quoi la Vaudoise devait «reprendre
ses prestations pour les suites de l'accident du 25 juin
1994». Estimant que «l'obligation des deux assureurs
d'allouer leurs prestations ne se superpose pas, mais se
succède sur deux périodes délimitées», ils n'ont pas appli-
qué l'art. 77 al. 3 let. b LAA.

c) En l'espèce, l'assuré était régulièrement suivi sur
le plan médical et les médecins consultés envisageaient
même sérieusement l'opportunité de pratiquer, à moyen
terme, une intervention chirurgicale à l'épaule gauche,
lorsque s'est produit l'accident du 15 avril 1997 (cf. rap-
ports des docteurs S.________ et B.________ respectivement
des 28 octobre 1996 et 24 mars 1997). Cet accident a par
ailleurs provoqué, comme l'ont constaté les premiers juges,
une incapacité de travail d'une certaine durée. C'est en
tout cas ce qui ressort des renseignements médicaux dispo-
nibles, en particulier du rapport du docteur B.________ du
25 juin 1998, selon lequel les lésions subies par l'assuré
(importante contusion de l'épaule gauche ainsi qu'un proba-
ble étirement de la coiffe des rotateurs) entraînent ordi-
nairement - c'est-à-dire abstraction faite de tout état
pathologique préexistant - un arrêt de travail de six
semaines à trois mois. En instance fédérale, l'intimée ne
conteste d'ailleurs plus que l'accident du 15 avril 1997 a
provoqué une période, si courte soit-elle, d'incapacité de
travail.
Dans ces conditions et contrairement à l'opinion des
premiers juges, les circonstances du cas d'espèce réalisent
pleinement l'hypothèse visée par l'art. 100 al. 2, 1ère
phrase OLAA, à savoir que l'assuré a été victime d'un acci-
dent donnant droit à des indemnités journalières alors
qu'il était encore en traitement pour un précédent accident
et qu'il avait repris une activité lucrative soumise à
l'assurance. Comme assureur tenu de répondre des conséquen-
ces du nouvel accident, la FRV doit dès lors également
allouer les prestations dues pour le précédent accident du
25 juin 1994.

d) Cette solution peut certes s'avérer rigoureuse dans
certains cas, notamment lorsque, comme en l'espèce, le
second accident assuré a des conséquences moins graves que
le premier. Mais cela ne permet toutefois pas de conclure,

comme le voudrait l'intimée, que le Conseil fédéral serait
sorti du cadre légal en édictant l'art. 100 al. 2 OLAA. Car
l'art. 77 al. 3 let. b OLAA délègue à l'autorité exécutive
la compétence de légiférer, en cas d'accidents successifs,
sur l'obligation d'allouer les prestations et sur la colla-
boration des assureurs, non pas seulement dans les cas
spéciaux mentionnés dans la loi (perte d'un organe pair ou
autres modifications du degré d'invalidité), mais à titre
général (ATF 120 V 72 sv. consid. 5b). A cela s'ajoute que
le but visé par l'art. 77 al. 3 LAA n'est autre que
d'éviter aux travailleurs qui sont dans une relation
d'assurance avec différents assureurs d'avoir à présenter
plusieurs fois une même prétention (FF 1976 III 143 sv.).
L'art. 100 al. 2, 1ère phrase OLAA est donc en accord avec
la volonté du législateur lorsqu'il prévoit que l'assureur
tenu de verser des prestations pour un nouvel accident
alloue aussi les prestations dues pour les suites d'un pré-
cédent accident. Peu importe à cet égard que le nouvel
accident, survenu alors que l'assuré était encore en
traitement pour le précédent accident, ait finalement eu
des conséquences moins graves que ce dernier. Ce qui est
décisif, selon le texte clair de la norme réglementaire en
cause, c'est que le nouvel accident donne droit à des in-
demnités journalières (pour compar. ATF 125 V 328
consid. 3). Au demeurant, les assureurs intéressés peuvent,
s'ils le jugent opportun, déroger à cette règle par conven-
tion (art. 100 al. 2, 3ème phrase), sous réserve de veiller
à ce que l'assuré n'ait à traiter, conformément à la volon-
té du législateur, qu'avec un seul des assureurs en cause
(Maurer, Schweizerisches Unfallversicherungsrecht, Berne
1985, p. 72).

3.- a) Il résulte de ce qui précède que le recours est
bien fondé et que le jugement ainsi que la décision atta-
qués doivent être annulés, la cause étant renvoyée à
l'intimée afin qu'elle se prononce sur les prestations

revenant à l'assuré, aussi bien pour les conséquences du
premier que pour celles du second des accidents assurés.

b) Ceci fait, la FRV pourra demander à la Vaudoise le
remboursement des prestations qui découlent de l'accident
du 25 juin 1994 (art. 100 al. 2, 2ème phrase OLAA). En cas
de désaccord entre les assureurs, il appartiendra à l'OFAS
de trancher, conformément à la procédure prévue à
l'art. 78a LAA, que les premiers juges ont méconnue. C'est
en effet le lieu de rappeler qu'un assureur social, singu-
lièrement un assureur-accidents, n'a pas de pouvoir de
décision à l'égard d'un autre assureur de même rang (ATF
120 V 491 consid. 1a). Certes l'intimée pouvait-elle se
déclarer incompétente au moyen d'une décision, comme elle
l'a fait le 3 août 1998, bien qu'elle eût normalement dû
notifier celle-ci à l'assuré et non à la Vaudoise (ATF
125 V 327 consid. 1b); cette informalité est toutefois sans
conséquence puisque la Vaudoise pouvait faire opposition à
cette décision puis, si nécessaire, déférer la décision sur
opposition devant la juridiction cantonale. En revanche,
les premiers juges ne pouvaient étendre l'objet de la con-
testation, déterminé par la décision sur opposition du
18 septembre 1998, à la question de la répartition du dom-
mage entre les assureurs, car cela reviendrait à faire fi
de la procédure prévue à l'art. 78a LAA.
L'annulation du jugement entrepris se justifie pour ce
motif également.

4.- S'agissant d'un litige entre assureurs, il y a
lieu de faire exception à la règle de l'art. 134 OJ concer-
nant la gratuité de la procédure (ATF 120 V 494 consid. 3).
L'intimée supportera donc les frais de justice (art. 156
al. 1 OJ).

Par ces motifs, le
Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est admis. Le jugement du 6 avril 2000 du
Tribunal administratif du canton de Fribourg ainsi que
la décision sur opposition du 18 août 1998 sont annu-
lés et la cause est renvoyée à l'intimée pour qu'elle
procède conformément aux motifs.

II. Les frais de justice, d'un montant de 3000 fr., sont
mis à la charge de l'intimée.

III. L'avance de frais effectuée par la recourante, d'un
montant de 3000 fr., lui est restituée.

IV. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, à la
Cour des assurances sociales du Tribunal administratif
du canton de Fribourg, à Juan de Dios Amorin Vieira,
et à l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 12 janvier 2001

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la IIe Chambre :

Le Greffier :


Synthèse
Numéro d'arrêt : U.186/00
Date de la décision : 12/01/2001
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-01-12;u.186.00 ?
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