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05/01/2001 | SUISSE | N°4C.289/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 05 janvier 2001, 4C.289/2000


«AZA 1/2»

4C.289/2000

Ie C O U R C I V I L E
************************

5 janvier 2001

Composition de la Cour: M. Walter, président, M. Leu,
M. Corboz, Mme Klett et Mme Rottenberg Liatowitsch, juges.
Greffière: Mme Aubry Girardin.

___________

Dans la cause civile pendante
entre

A l B a n k A l S a u d i A l H o l l a n d i, à Riyad
(Arabie Saoudite), demanderesse et recourante, représentée
par Me Michelle Wenger, avocate à Pully,

et

Ibrahim Abdullatif A

l - I s s a, à Montréal (Canada), dé-
fendeur et intimé, représenté par Me Rémy Wyler, avocat à
Lausanne;

(droit inte...

«AZA 1/2»

4C.289/2000

Ie C O U R C I V I L E
************************

5 janvier 2001

Composition de la Cour: M. Walter, président, M. Leu,
M. Corboz, Mme Klett et Mme Rottenberg Liatowitsch, juges.
Greffière: Mme Aubry Girardin.

___________

Dans la cause civile pendante
entre

A l B a n k A l S a u d i A l H o l l a n d i, à Riyad
(Arabie Saoudite), demanderesse et recourante, représentée
par Me Michelle Wenger, avocate à Pully,

et

Ibrahim Abdullatif A l - I s s a, à Montréal (Canada), dé-
fendeur et intimé, représenté par Me Rémy Wyler, avocat à
Lausanne;

(droit international privé)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- En 1989, la banque "Al Bank Al Saudi Al Hol-
landi" (ci-après: la Banque), à Riyad en Arabie Saoudite, a
accordé une ligne de crédit à la société Alissa Trading &
Contracting Co. Ltd. (ci-après: la Société), également en
Arabie Saoudite, qui est présidée par Ibrahim Abdullatif
Al-Issa.

Par acte du 15 novembre 1989 intitulé "garantie
personnelle", Ibrahim Abdullatif Al-Issa s'est engagé à cou-
vrir, à concurrence de 25 millions de riyals saoudiens (ci-
après: RAS) les dettes de la Société à l'égard de la Banque.
Ce document, signé par Al-Issa, contenait une clause de pro-
rogation de for en faveur des tribunaux d'Arabie Saoudite.

La Banque a dénoncé le crédit et a cherché en vain
à obtenir le remboursement des fonds prêtés tant auprès de
la
Société que d'Ibrahim Abdullatif Al-Issa.

Par demande du 21 novembre 1995, la Banque a saisi
le Comité pour le règlement des litiges bancaires d'Arabie
Saoudite, en concluant au remboursement par Ibrahim Abdul-
latif Al-Issa de 6'266'239,30 RAS, équivalant à
2'522'566,80 CHF.

Le 23 avril 1997, la Banque a obtenu le séquestre
de biens immobiliers, situés à Rolle, appartenant à Ibrahim
Abdullatif Al-Issa. A la suite de l'opposition formée par
celui-ci, le Président du Tribunal du district de Rolle a
maintenu le séquestre, ce qu'a confirmé la Cour des poursui-
tes et faillites le 12 juin (recte: novembre) 1998.

B.- Le 23 avril (recte: novembre) 1998, la Banque
a ouvert une action en validation de séquestre auprès de la
Cour civile du Tribunal cantonal vaudois, en requérant la
constatation qu'Ibrahim Abdullatif Al-Issa est le débiteur
et
lui doit immédiatement la somme de 2'522'566,80 CHF avec in-
térêt.

Le 22 février 1999, Ibrahim Abdullatif Al-Issa a
formé une requête incidente en déclinatoire, concluant à ce
que la Banque soit éconduite de l'instance ouverte le 23 no-
vembre 1998. La Banque a conclu principalement au rejet de
la
requête incidente et, à titre subsidiaire, à la suspension
de
la cause jusqu'à droit connu sur la procédure pendante en
Arabie Saoudite.

Par jugement incident du 7 juillet 1999, le Juge
instructeur de la Cour civile a rejeté la requête en déclina-
toire et a donné suite à la demande subsidiaire de la
Banque,
en suspendant la cause jusqu'à droit connu sur la procédure
entre les parties pendante devant le Comité pour le
règlement
des litiges bancaires d'Arabie Saoudite.

Par arrêt du 29 mars 2000, la Chambre des recours
du Tribunal cantonal a admis le recours formé par Ibrahim
Abdullatif Al-Issa à l'encontre du jugement du 7 juillet
1999
et l'a réformé. Elle a prononcé l'admission de la requête en
déclinatoire du défendeur et a déclaré la Banque éconduite
d'instance, avec suite de frais et dépens.

C.- Contre l'arrêt de la Chambre des recours du 29
mars 2000, la Banque (la demanderesse) interjette un recours
en réforme au Tribunal fédéral. Elle conclut principalement
à
la réforme de l'arrêt attaqué dans le sens du rejet du re-
cours formé par Ibrahim Abdullatif Al-Issa contre le
jugement
incident du 7 juillet 1999 et requiert la suspension de la

cause pendante entre les parties devant la Cour civile du
Tribunal cantonal jusqu'à l'issue du procès en Arabie Saoudi-
te. A titre subsidiaire, elle demande le renvoi de la cause
à
la Chambre des recours pour nouvelle décision.

Ibrahim Abdullatif Al-Issa (le défendeur) propose
le rejet du recours dans la mesure de sa recevabilité.

Parallèlement à son recours en réforme la Banque a
également interjeté un recours de droit public au Tribunal
fédéral à l'encontre de l'arrêt du 29 mars 2000.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- Selon l'art. 57 al. 5 OJ, lorsque la décision
attaquée est en même temps l'objet d'un recours en réforme
et
d'un recours de droit public, il est sursis en règle
générale
à l'arrêt sur le premier recours jusqu'à droit connu sur le
second. Il peut toutefois être dérogé à ce principe, notam-
ment lorsque le recourant invoque dans son recours de droit
public une violation du droit fédéral qui pourrait être rete-
nue dans l'examen du recours en réforme, ce qui rendrait le
premier sans objet et même irrecevable eu égard à sa subsi-
diarité (ATF 107 II 499 consid. 1; 99 II 297 consid. 1; Jean-
François Poudret, COJ II, Berne 1990, art. 57 OJ no 5 p.
464).

En l'espèce, la demanderesse développe en défini-
tive le même grief dans ses deux recours: elle reproche à la
cour cantonale d'avoir dénié sa compétence, sans être entrée
en matière sur l'exception de litispendance qu'elle avait
soulevée en vue d'obtenir la suspension de la cause jusqu'à
l'issue du procès pendant en Arabie Saoudite. Dans son re-
cours de droit public, elle invoque à ce propos un déni de

justice formel et une violation des exigences de motivation,
reprochant aux juges de ne pas avoir exposé suffisamment
clairement et complètement les motifs les ayant amenés à
rejeter cette exception. Elle soutient également qu'en exa-
minant uniquement l'exception d'incompétence soulevée par
l'intimé, la cour cantonale a porté atteinte aux garanties
minimales de procédure et écarté de manière arbitraire
l'art.
9 al. 1 de la loi fédérale du 18 décembre 1987 sur le droit
international privé (ci-après: LDIP). Dans son recours en
réforme, la demanderesse considère en substance qu'en n'ap-
pliquant pas cette même disposition, l'autorité cantonale a
violé le droit fédéral.

Dans ce contexte, il convient, en dérogation à la
règle de l'art. 57 al. 5 OJ, d'examiner en premier lieu le
recours en réforme, dès lors que, si la Cour de céans par-
vient à la conclusion qu'en n'appliquant pas l'art. 9 al. 1
LDIP, l'autorité cantonale a méconnu le droit fédéral, le re-
cours de droit public deviendrait alors sans objet, puisque
tous les moyens développés à son appui sont précisément di-
rigés contre le refus de la cour cantonale de prendre en
compte cette disposition.

2.- Dans la décision attaquée, rendue en dernière
instance, la cour cantonale a admis l'exception d'incompé-
tence (déclinatoire) invoquée par le défendeur et a invalidé
l'instance introduite par la demanderesse. Peu importe que
l'on qualifie une telle décision de finale au sens de l'art.
48 al. 1 OJ (cf. en ce sens: ATF 115 II 237 consid. 1b;
Bernard Corboz, Le recours en réforme au Tribunal fédéral,
SJ
2000 II p. 1 ss, 11) ou d'incidente (cf. Poudret, op. cit.
art. 49 OJ no 1.2 p. 327 s.), car le recours en réforme est
ouvert non seulement dans la première, mais également dans
la
seconde hypothèse. En effet, selon l'art. 49 al. 1 OJ, le re-
cours est recevable contre les décisions préjudicielles ou

incidentes prises séparément du fond pour violation de pres-
criptions de droit fédéral sur la compétence. Or, en repro-
chant à la cour cantonale de ne pas avoir appliqué l'art. 9
al. 1 LDIP, la demanderesse invoque la violation d'une pres-
cription sur la compétence au sens de l'art. 49 al. 1 OJ
(cf.
ATF 126 III 327 consid. 1c p. 329; en ce sens également, ATF
123 III 414 consid. 2).

Interjeté par la partie qui n'a pu faire valoir ses
conclusions en paiement portant sur une contestation civile
dont la valeur litigieuse atteint le seuil de 8'000 fr.
(art.
46 OJ), le recours en réforme est donc en principe
recevable,
puisqu'il a été déposé en temps utile (art. 54 al. 1 OJ) et
dans les formes requises (art. 55 OJ).

3.- La demanderesse reproche à la cour cantonale
d'avoir violé le droit fédéral en refusant d'entrer en matiè-
re sur l'exception de litispendance découlant de l'art. 9
al.
1 LDIP qu'elle avait invoquée.

a) Il ressort de l'art. 1 de cette loi que, sous
réserve des traités internationaux, la compétence des autori-
tés judiciaires suisses en matière internationale est régie
par la LDIP.

Dès lors qu'aucun traité international n'est appli-
cable à la présente cause, il convient d'examiner la compé-
tence des autorités cantonales saisies sous l'angle de la
LDIP exclusivement.

b) Selon l'art 4 LDIP, lorsque la loi ne prévoit
aucun autre for en Suisse, l'action en validation de séques-
tre peut être introduite au for suisse du séquestre. Le for
suisse du séquestre n'est cependant pas exclusif. Une élec-
tion de for, au sens de l'art. 5 LDIP, est donc admissible

(ATF 119 II 66 consid. 2a), à la condition toutefois que le
jugement rendu au for élu puisse être reconnu en Suisse (ATF
118 II 188 consid. 3a et les références citées). L'art. 5
al.
1 in fine LDIP prévoit que, sauf stipulation contraire,
l'élection de for est exclusive, ce qui signifie que le tri-
bunal suisse saisi malgré une clause de prorogation de for
désignant une autre autorité doit en principe se dessaisir,
à
moins que la partie défenderesse procède au fond sans formu-
ler de réserve (art. 6 LDIP; François Knoepfler/Philippe
Schweizer, Droit international privé suisse, 2e éd., Berne
1995, no 614). Cette exclusivité n'empêche cependant pas le
juge suisse de suspendre la procédure si les conditions de
l'art. 9 al. 1 LDIP sont réunies (admis implicitement in:
ATF
118 II 188 consid. 3b et c; cf. Paul Volken, IPRG Kommentar,
Zurich 1993, art. 5 LDIP no 32; Bernard Dutoit, Commentaire
de la loi fédérale du 18 décembre 1987, 2e éd., Bâle 1997,
art. 5 LDIP no 9). Cette disposition prévoit que, lorsqu'une
action ayant le même objet est déjà pendante entre les mêmes
parties à l'étranger, le tribunal suisse suspend la cause
s'il est à prévoir que la juridiction étrangère rendra, dans
un délai convenable, une décision pouvant être reconnue en
Suisse.

Il résulte des faits retenus, d'une manière qui lie
le Tribunal fédéral en instance de réforme (art. 63 al. 2
OJ), que la garantie du 15 novembre 1989 signée par le défen-
deur en faveur de la demanderesse prévoyait une prorogation
de for en faveur de l'Arabie Saoudite, ce que les parties ne
contestent pas. Il est également établi qu'une procédure por-
tant sur la même créance que celle faisant l'objet de la pro-
cédure ouverte en Suisse et opposant les mêmes parties a été
introduite antérieurement en Arabie Saoudite. La question li-
tigieuse consiste donc à se demander si l'autorité
judiciaire
cantonale pouvait, dans ces circonstances, se contenter de
mettre fin à l'instance en se déclarant incompétente en
vertu
de l'art. 5 LDIP ou si elle devait se prononcer sur une éven-

tuelle suspension de la procédure au sens de l'art. 9 al. 1
LDIP.

c) La cour cantonale a refusé d'entrer en matière
sur la suspension en indiquant en substance que c'est seule-
ment si le juge se reconnaît compétent qu'il doit examiner
la
litispendance. Or, comme la clause de prorogation de for ex-
cluait sa compétence dans le cas d'espèce, elle n'avait pas
à
appliquer l'art. 9 al. 1 LDIP. En outre, les juges ont préci-
sé qu'ils pouvaient s'écarter de l'ATF 118 II 188, puisque
cette jurisprudence visait le cas où l'exception de litispen-
dance avait été soulevée par le défendeur, alors qu'en l'es-
pèce celui-ci n'avait invoqué que le déclinatoire, l'excep-
tion de litispendance émanant de la demanderesse.

d) Dans l'arrêt cité par la cour cantonale, le Tri-
bunal fédéral s'est prononcé dans un contexte absolument
identique au cas d'espèce, à savoir celui où une action au
for du séquestre a été ouverte en Suisse, bien qu'une procé-
dure soit déjà pendante à l'étranger, au for élu par les par-
ties. Il a tout d'abord rappelé qu'en matière de validation
de séquestre, la prompte sauvegarde de prétentions compromi-
ses est d'une importance primordiale. Puis, examinant la por-
tée de l'art. 9 LDIP, il a relevé que la suspension de la
cause en cas de litispendance, préconisée par la doctrine,
était désormais la règle et devait être ordonnée chaque fois
que l'on ne pouvait raisonnablement exclure que la procédure
pendante entre les mêmes parties à l'étranger débouche, dans
un délai convenable, sur une décision susceptible d'être re-
connue en Suisse (cf. ATF 118 II 188 consid. 3b p. 191 et
les
références citées). La jurisprudence a récemment précisé
que,
selon l'art. 9 al. 1 LDIP, les conséquences juridiques de la
litispendance consistent en premier lieu dans la suspension
de la cause, le tribunal suisse ne se dessaisissant pas de
l'affaire. Il ne le fera qu'ultérieurement, pour autant
qu'une décision étrangère pouvant être reconnue en Suisse
lui

soit présentée (art. 9 al. 3 LDIP) (ATF 126 III 327 consid.
1c p. 329 et les références citées).

Contrairement à ce que soutient la cour cantonale,
les règles jurisprudentielles précitées s'appliquent, que
l'exception de litispendance émane du défendeur, du
demandeur
ou même qu'elle n'ait pas été soulevée par les parties. En
effet, lorsque les faits en sa possession laissent
apparaître
qu'une procédure est pendante à l'étranger, le juge suisse a
l'obligation de vérifier d'office s'il y a litispendance au
sens
de l'art. 9 al. 1 LDIP (en ce sens: Ivo Schwander, Ein-
führung in das internationale Privatrecht, vol. I:
Allgemeiner
Teil, 3e éd., St.-Gall 2000, p. 308 no 643; Paolo M.
Patocchi
& Elliott Geisinger, Code DIP annoté, Lausanne 1995, art. 9
LDIP no 2; Martina Wittibschlager, Rechtshängigkeit in inter-
nationalen Verhältnissen, thèse Bâle 1992, p. 133; Oscar
Vogel, Rechtshängigkeit und materielle Rechtskraft im inter-
nationalen Verhältnis, SJZ 1990 p. 77 ss, 83; Anton K. Schny-
der, Das neue IPR-Gesetz, 2e éd., Zurich 1990, p. 27). Le
fait que seule la demanderesse se soit prévalue de la suspen-
sion n'autorisait donc pas la cour cantonale à refuser
l'examen des conditions d'application de l'art. 9 al. 1
LDIP.
Cette exigence s'impose d'autant plus qu'en matière de
séquestre, l'importance attachée à la sauvegarde des préten-
tions suppose que le juge saisi en Suisse d'une demande en
validation soit particulièrement attentif à la litispendance.

En outre, comme le caractère exclusif de la proro-
gation de for prévu à l'art. 5 al. 1 LDIP n'empêche pas
l'application de l'art. 9 al. 1 LDIP (cf. supra let. b), le
juge ne peut se déclarer incompétent et mettre fin à l'ins-
tance au motif qu'une clause de prorogation de for a été va-
lablement conclue en faveur d'un tribunal étranger, alors
qu'il ressort des faits de la cause qu'une procédure portant
sur un objet à première vue identique est pendante au for dé-
signé par les parties. Il doit alors se demander s'il n'y a
pas lieu de suspendre la procédure conformément à l'art. 9
al. 1 LDIP.

Enfin, la solution résultant de l'arrêt attaqué re-
vient à exclure la suspension de l'art. 9 al. 1 LDIP dès que
l'on est en présence d'une clause d'élection de for valable-
ment conclue, ce qui fait perdre tout sens à cette disposi-
tion, puisqu'elle vise justement à coordonner les
compétences
dans des situations où plusieurs fors (alternatifs ou subsi-
diaires) coexistent (cf. Volken, op. cit., art. 9 LDIP no 2;
Dutoit, op. cit., art. 9 LDIP no 1).

En mettant fin à l'instance sans entrer en matière
sur une éventuelle suspension de la procédure selon l'art. 9
al. 1 LDIP, la cour cantonale a, par conséquent, violé le
droit fédéral.

e) Dans ces circonstances, il convient d'annuler
l'arrêt attaqué et de renvoyer l'affaire à l'autorité canto-
nale pour qu'elle complète le dossier au besoin et qu'elle
statue à nouveau (art. 64 al. 1 OJ). Il lui appartiendra
d'examiner si les conditions d'application de l'art. 9 al. 1
LDIP sont réunies, ce qui l'amènera à examiner si la procé-
dure auprès du Comité pour le règlement des litiges
bancaires
d'Arabie Saoudite est toujours pendante. Si tel est le cas,
la cour cantonale devra encore rechercher si l'on peut exclu-
re, avec une vraisemblance confinant à la certitude, que la
juridiction saisie puisse rendre, dans un délai convenable,
une décision susceptible d'être reconnue en Suisse. S'il sub-
siste un doute légitime à ce propos, la cause devra alors
être suspendue en application de l'art. 9 al. 1 LDIP (cf.
ATF
118 II 188 consid. 3c p. 193), comme l'avait du reste fait
l'autorité de première instance. Si un jugement a été entre
temps rendu au for élu et qu'il peut être reconnu en Suisse
(cf. art. 25 ss LDIP), alors la cour cantonale devra se des-
saisir conformément à l'art. 9 al. 3 LDIP. Enfin, s'il n'y a
aucune chance pour que la juridiction étrangère rende dans
un
délai convenable une décision susceptible d'être reconnue en
Suisse, la cour cantonale devra alors entrer en matière,
l'élection de for dérogeant au for suisse du séquestre ne
pouvant, dans cette hypothèse, être admise (cf. ATF 118 II
188 consid. 3a et la jurisprudence citée).

4.- Le défendeur, qui succombe, sera condamné au
paiement de l'émolument judiciaire et versera à la demande-
resse une indemnité à titre de dépens (art. 156 al. 1 et 159
al. 1 OJ).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Admet le recours, annule l'arrêt attaqué et ren-
voie la cause à la cour cantonale pour nouvelle décision
dans
le sens des considérants;

2. Met un émolument judiciaire de 15'000 fr. à la
charge du défendeur;

3. Dit que le défendeur versera à la demanderesse
une indemnité de 20'000 fr. à titre de dépens;

4. Communique le présent arrêt en copie aux manda-
taires des parties et à la Chambre des recours du Tribunal
cantonal vaudois.

__________

Lausanne, le 5 janvier 2001
ECH

Au nom de la Ie Cour civile
du TRIBUNAL FÉDÉRAL SUISSE:
Le Président,

La Greffière,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4C.289/2000
Date de la décision : 05/01/2001
1re cour civile

Analyses

Art. 4, 5 et 9 al. 1 LDIP; action en validation de séquestre; élection de for et litispendance. Si une action a été introduite en Suisse au for du séquestre, malgré une prorogation de for en faveur de tribunaux étrangers, le juge suisse a l'obligation de vérifier d'office s'il y a litispendance au sens de l'art. 9 al. 1 LDIP, lorsque les faits en sa possession laissent apparaître qu'une procédure est pendante au for élu. Dans cette hypothèse, il doit en principe suspendre la procédure (consid. 3).


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-01-05;4c.289.2000 ?
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