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04/01/2001 | SUISSE | N°1A.254/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 04 janvier 2001, 1A.254/2000


«/2»

1A.254/2000

Ie C O U R D E D R O I T P U B L I C
**********************************************

4 janvier 2001

Composition de la Cour: MM. les Juges Aemisegger, Président,
Vice-président du Tribunal fédéral, Féraud, Catenazzi et
Favre, ainsi que Mme Pont Veuthey, Juge suppléant.
Greffier: M. Zimmermann.

Statuant sur la qualité de partie de

L.________, représentée par Me Yves Burnand, avocat à
Lausanne,

dans le cadre du recours de droit administratif
formé
r> P.________, représentée par Me Pierre-Dominique Schupp,
avocat à Lausanne,

contre

l'arrêt rendu le 22 août 200...

«/2»

1A.254/2000

Ie C O U R D E D R O I T P U B L I C
**********************************************

4 janvier 2001

Composition de la Cour: MM. les Juges Aemisegger, Président,
Vice-président du Tribunal fédéral, Féraud, Catenazzi et
Favre, ainsi que Mme Pont Veuthey, Juge suppléant.
Greffier: M. Zimmermann.

Statuant sur la qualité de partie de

L.________, représentée par Me Yves Burnand, avocat à
Lausanne,

dans le cadre du recours de droit administratif
formé

P.________, représentée par Me Pierre-Dominique Schupp,
avocat à Lausanne,

contre

l'arrêt rendu le 22 août 2000 par le Tribunal d'accusation
du
Tribunal cantonal du canton de Vaud;

(entraide judiciaire; art. 80b EIMP; 110 OJ;
qualité de partie du plaignant)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- Le 16 juin 1999, le Ministère de la justice de
la République hellénique a transmis à l'Office fédéral de la
police (ci-après: l'Office fédéral) une demande d'entraide
judiciaire fondée sur la Convention européenne d'entraide
judiciaire en matière pénale, conclue à Strasbourg le 20
avril 1959, entrée en vigueur le 12 juin 1962 pour la Grèce
et le 20 mars 1967 pour la Suisse (CEEJ; RS 0.351.1).

Cette demande était présentée pour les besoins de la
procédure conduite par Dionysios Palladinos, Juge de la 8ème
Chambre d'instruction du Tribunal d'Athènes, contre
P.________ et H.________, pour fraude et complicité de frau-
de, ainsi que pour soustraction, délits réprimés par les 13
al. 6, 46 par. 18, 94 par. 1, 98, 375 par. 1b-a et 2, 378
let. a et 386 par. 1b-a et 3 du Code pénal grec. A la
demande
était joint un exposé des faits, daté du 17 mai 1999 et rédi-
gé par le Juge Palladinos. Selon ce document, L.________ et
P.________ sont soeurs et un litige est survenu entre elles
au sujet de l'héritage de leur père, M.________. L.________
avait déposé plainte pénale contre P.________, en accusant
celle-ci d'avoir détourné une partie de la fortune paternel-
le, au détriment d'elle-même et de leur mère, avec la compli-
cité de H.________. Des fonds détournés auraient été achemi-
nés sur des comptes bancaires en Suisse. L'enquête avait per-
mis de déterminer que les comptes ouverts au nom de
M.________ auprès de la Société de Banque Suisse (devenue
dans l'intervalle UBS, ci-après: la Banque) avaient été fer-
més depuis 1993 et que les fonds se trouvant sur ces comptes
avaient été transférés sur d'autres comptes ouverts auprès
de
la même banque (désignés sous les nos aaa, bbb, ccc, ddd,
eee, fff, ggg, hhh, iii, jjj, kkk et lll). La demande
tendait
à la détermination de tous les mouvements opérés sur ces
comptes depuis 1993, à l'identification des ayants droit et
titulaires de ces comptes, des personnes ayant procédé à des
versements ou à des retraits sur ces comptes, ainsi que des
personnes, physiques ou morales, dominées par P.________ ou
H.________, qui auraient participé à ces mouvements de fonds.

Le 8 juillet 1999, l'Office fédéral de la police a
transmis la demande au Juge d'instruction du canton de Vaud,
pour exécution.

Le 13 juillet 1999, le Juge d'instruction est entré
en matière.

Le 20 juillet 1999, le Ministère grec de la justice
a complété la demande. Il s'est référé à une requête établie
le 6 juillet 1999 par le Juge Palladinos, demandant que
soient remis les documents relatifs à tous les comptes décou-
verts, jusqu'à leur clôture, y compris pour la période anté-
rieure à 1993.

Le Juge d'instruction a ordonné la production des
pièces relatives aux comptes visés par la demande. La Banque
a obtempéré les 27 septembre 1999, 30 novembre 1999 et 12
février 2000. Il ressort de ces pièces que L.________ avait
été titulaire, avec M.________ et N.________, du compte
no hhh.

Le 27 septembre 1999, la demande a été complétée une
nouvelle fois, le Juge Palladinos informant les autorités
suisses que la procédure était secrète selon le droit grec.

Le 17 décembre 1999, se prévalant de sa qualité de
plaignante dans la procédure grecque, L.________ est interve-
nue auprès du Juge d'instruction pour demander d'être admise
à la procédure et de pouvoir consulter le dossier. Elle est
revenue à la charge, les 12 janvier et 1er février 2000.

Le 2 février 2000, le Juge d'instruction a indiqué à
L.________ qu'il la considérait comme partie uniquement pour
ce qui concernait le compte no hhh. Il a rejeté la demande
de
consultation du dossier, en tant qu'elle visait les autres
comptes et indiqué à L.________ qu'elle ne serait pas légiti-
mée à recourir contre la décision de clôture qu'il rendrait
ultérieurement.

Le 15 juin 2000, le nouveau mandataire de L.________
a réitéré sa demande de consultation de l'intégralité du dos-
sier.

Le 16 juin 2000, le Juge d'instruction a rendu une
décision de clôture au sens de l'art. 80d de la loi fédérale
sur l'entraide internationale en matière pénale, du 20 mars
1981 (EIMP; RS 351.1). Il a ordonné la transmission à l'Etat
requérant de toute la documentation remise par la Banque.
Cette décision a été notifiée aux mandataires de P.________
et de L.________.

Le 18 juillet 2000, P.________ a recouru auprès du
Tribunal d'accusation du canton de Vaud. Elle a conclu à
l'annulation de la décision du 16 juin 2000 et au rejet de
la
demande d'entraide.

Le 3 août 2000, L.________ s'est adressée au Tribu-
nal d'accusation pour demander à pouvoir consulter le
dossier
dans son intégralité.

Le 3 août 2000, le Tribunal d'accusation a rejeté
cette requête.

Par arrêt du 22 août 2000, le Tribunal d'accusation
a rejeté le recours et confirmé la décision du 16 juin 2000.
Le Tribunal d'accusation a considéré que les intérêts de
L.________ n'étaient touchés que dans la mesure où la procé-

dure portait sur le compte dont elle avait été titulaire, à
l'exclusion des autres pièces du dossier. Le Tribunal d'accu-
sation a notifié son arrêt à L.________.

B.- Agissant par la voie du recours de droit admi-
nistratif, P.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler
l'arrêt du 22 août 2000 et de rejeter la demande d'entraide
judiciaire. Elle allègue que celle-ci serait abusive. Elle
invoque les principes de la proportionnalité et de la spécia-
lité.

C.- Le 20 octobre 2000, le Président de la Ie Cour
de droit public a invité les mandataires de P.________ et de
L.________, ainsi que le Tribunal d'accusation, le Juge
d'instruction cantonal et l'Office fédéral de la justice (le-
quel a repris dans l'intervalle les fonctions de l'Office fé-
déral de la police dans le domaine de la coopération judi-
ciaire internationale en matière pénale, ci-après: l'Office
fédéral) à se déterminer sur la qualité de partie de
L.________.

L'Office fédéral a produit des observations.

L.________ a demandé que soit reconnue sa qualité de
partie ou de partie intéressée au sens de l'art. 110 al. 1
OJ, de pouvoir répondre au recours et consulter
l'intégralité
du dossier de la procédure.

P.________ propose de dénier la qualité de partie à
L.________.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- La détermination de la qualité de partie (ou de
partie intéressée) de L.________ influe sur la suite de la

procédure. Il se justifie de trancher par un arrêt partiel
ce
point que le Tribunal fédéral examine d'office et avec une
cognition pleine.

2.- La CEEJ régissant l'entraide judiciaire entre la
République hellénique et la Confédération ne règle pas la
qualité de partie à la procédure dans l'Etat requis. Seul
s'applique le droit interne de celui-ci.

3.- a) Avant la révision du 4 octobre 1996, entrée
en vigueur le 1er février 1997, l'art. 79 al. 3 aEIMP pré-
voyait que les art. 6, 26 et 27 PA s'appliquaient pour la
consultation du dossier dans la procédure cantonale; si la
sauvegarde de ses droits l'exigeait, l'ayant droit pouvait
également consulter la demande d'entraide et les pièces pré-
sentées à l'appui de celle-ci; ce droit n'appartenait à l'in-
culpé qui n'était pas touché personnellement par la mesure
d'entraide que s'il résidait habituellement en Suisse et que
la consultation du dossier était nécessaire à la sauvegarde
de ses droits dans la procédure pénale étrangère. L'art. 9
de
la loi fédérale relative au traité conclu avec les
Etats-Unis
d'Amérique sur l'entraide judiciaire en matière pénale, du 3
octobre 1975 (LTEJUS; RS 351.93), dans sa version antérieure
à la révision du 4 octobre 1976, avait une teneur analogue à
celle de l'art. 79 al. 3 aEIMP.

Sous l'empire de ces dispositions, le Tribunal fédé-
ral avait reconnu le droit de consulter le dossier et de par-
ticiper à l'exécution de la demande étrangère à la personne
poursuivie, si elle était touchée directement par les
mesures
de contrainte (ATF 110 Ib 387 consid. 2c p. 389), ainsi qu'à
la personne physique ou morale titulaire de comptes sur les-
quels des fonds de provenance délictueuse ont été versés,
pour autant que les actes de contrainte la touchaient direc-
tement dans ses intérêts juridiques ou de fait (ATF 116 Ib
190 et 113 Ib 157 consid. 6 p. 168).

b) La révision du 4 octobre 1996 a notamment eu pour
effet de modifier les art. 79 al. 3 aEIMP et 9 aLTEJUS. Dé-
sormais, selon l'art. 80b EIMP, les ayants droit peuvent par-
ticiper à la procédure et consulter le dossier, si la sauve-
garde de leurs intérêts l'exige (al. 1); ces droits peuvent
en outre être limités si des intérêts prépondérants s'y oppo-
sent (al. 2). La nouvelle teneur de l'art. 9 LTEJUS a été
calquée sur celle de l'art. 80b EIMP. La jurisprudence déve-
loppée sous l'empire du nouveau droit s'est tenue aux prin-
cipes établis sous l'ancien droit (cf. les arrêts non
publiés
S. du 10 juillet 2000; F. du 7 septembre 1999; S. du 27 fé-
vrier 1998 et R. du 29 septembre 1997).

c) Aux termes de l'art. 21 al. 2 EIMP, lors du trai-
tement de la demande, les autres personnes concernées par
une
mesure d'entraide ou le lésé qui assiste à des
investigations
peuvent se faire assister par un mandataire, si la
sauvegarde
de leurs intérêts l'exige, et se faire représenter par lui,
si l'objet de l'enquête n'est pas compromis. Cette disposi-
tion n'a pas été modifiée lors de la révision du 4 octobre
1996, entrée en vigueur le 1er février 1997, hormis une rec-
tification rédactionnelle mineure (cf. le Message du Conseil
fédéral du 29 mars 1995, FF 1995 III p. 1ss, p. 19).

Au regard de l'art. 21 al. 2 aEIMP (souvent combiné
avec l'art. 79 al. 3 aEIMP), le Tribunal fédéral a parfois
reconnu au lésé la qualité de partie à la procédure d'entrai-
de. Tel a été notamment le cas de la Commune de Milan, lésée
dans la procédure italienne, dans la mesure où elle s'oppo-
sait à la limitation des documents bancaires à remettre aux
autorités italiennes (arrêt non publié du 29 juin 1993). De
même, le Tribunal fédéral avait admis que puissent
participer
à la procédure (notamment à l'audition de témoins) les repré-
sentants de personnes morales dont les comptes bancaires
avaient été saisis, mais uniquement en relation avec cette

mesure de contrainte (arrêt non publié R. du 29 septembre
1997).

d) S'il n'est exclu d'emblée de reconnaître au lésé
la qualité de partie, encore faut-il que la sauvegarde de
ses
intérêts l'exige et que n'y fassent pas obstacle des
intérêts
opposés et prépondérants, comme le rappellent les art. 21
al.
2 et 80b EIMP.

En l'occurrence, le Juge d'instruction et le Tribu-
nal d'accusation ont reconnu la qualité de partie à
L.________ uniquement dans la mesure où la procédure d'en-
traide concernait le compte no HHH. Ils lui ont dénié la
qualité de partie à la procédure d'exécution de la demande
d'entraide pour les autres points visés par celle-ci, comme
cela ressort des décisions des 2 février et 3 août 2000. Le
raisonnement suivi sur ce point par les autorités cantonales
n'est pas entièrement convaincant. Si L.________ entend par-
ticiper à la procédure d'entraide, ce n'est pas parce
qu'elle
s'opposerait aux mesures de contrainte ordonnées par le Juge
d'instruction, mais bien - au contraire - parce qu'elle veut
que l'entraide soit accordée dans toute l'étendue nécessaire
pour une défense optimale de ses intérêts dans la procédure
étrangère. De sa qualité de plaignante et de partie civile,
elle prétend ainsi déduire un droit d'intervention illimité
dans le dossier de la procédure, tant pour ce qui concerne
l'exécution de la demande d'entraide que pour les recours
cantonal et fédéral, comme elle l'indique dans sa détermina-
tion du 13 novembre 2000.

Cette conception ne peut être partagée.

La procédure d'entraide, de nature administrative
(ATF 120 Ib 112 consid. 4 p. 119; 118 Ib 436 consid. 4 a p.
440; 117 IV 209 consid. 1d p. 212), met en jeu les relations
d'Etat à Etat; elle ne constitue pas le simple prolongement,

sur le territoire de l'Etat requis, de la procédure pénale
ouverte dans l'Etat requérant. Il ne suffit donc pas, comme
le fait L.________, d'affirmer sa qualité de plaignante et
de
partie civile dans la procédure étrangère, pour en tirer un
droit absolu de participer à l'exécution de la demande. La
défense des intérêts de la justice grecque est assumée en
premier lieu par les autorités de l'Etat requérant, auxquel-
les il incombe de préciser leur requête dans toute la mesure
nécessaire pour leur procédure. Il n'appartient pas à la
Suisse, comme Etat requis, de se substituer sur ce point à
l'autorité étrangère (cf. ATF 122 II 367 consid. 2c p. 371;
121 II 241 consid. 3a p. 242/243; 120 Ib 251 consid. 5c p.
255). L'autorité suisse
doit aussi vérifier qu'il n'existe
pas des motifs commandant de rejeter la demande ou de
limiter
l'étendue de l'entraide accordée. Reconnaître d'emblée et in-
conditionnellement la qualité de partie au lésé présente le
risque de voir celui-ci prendre connaissance prématurément
d'éléments que l'autorité suisse, pour l'une ou l'autre rai-
son qui vient d'être évoquée, pourrait, en fin de compte, ne
pas transmettre à l'Etat requérant. Pour le surplus,
L.________ n'allègue aucun fait ou motif juridique laissant
à
penser qu'elle ne bénéficierait pas, dans la procédure grec-
que, de droits procéduraux suffisants pour assurer la
défense
optimale de ses intérêts. Elle ne prétend pas davantage
qu'elle serait empêchée de requérir du juge grec qu'il adres-
se une demande d'entraide complémentaire, pour le cas où les
renseignements fournis lui sembleraient insuffisants ou lacu-
naires (cf. aussi l'arrêt non publié A. du 10 mai 1989). En-
fin, le seul fait que L.________ soit cotitulaire du compte
no hhh, visé dans la demande, ne suffit pas pour lui
conférer
la qualité de partie. On peut en effet exiger de L.________,
plaignante dans la procédure grecque, de collaborer à l'ac-
tion pénale qu'elle a fait engager, notamment en fournissant
au Juge Palladinos tous les éléments nécessaires à l'appui
de
sa plainte, y compris les données relatives au compte no hhh
qu'elle connaît. On ne voit pas comment elle pourrait, de
bonne foi, s'opposer à la transmission de renseignements
concernant ce compte.

La sauvegarde des intérêts de L.________ ne comman-
dait ainsi pas de l'admettre comme partie à la procédure
d'exécution de la demande, comme l'a fait le Juge d'instruc-
tion, ni comme partie (dans une mesure limitée) à la procé-
dure de recours cantonale, comme l'a fait le Tribunal d'accu-
sation.

On peut d'ailleurs se demander si les décisions pri-
ses le 2 février 2000 par le Juge d'instruction et le 3 août
2000 par le Tribunal d'accusation, limitant le droit d'inter-
vention de L.________ à la procédure, ne constituaient pas
des décisions incidentes au sens de l'art. 80e let. b EIMP,
que L.________ aurait dû entreprendre comme telles auprès du
Tribunal d'accusation, puis du Tribunal fédéral, avec la
conséquence qu'elle serait forclose sur ce point. Compte
tenu
de l'issue de la cause, ce point peut rester indécis.

Il convient de souligner en outre que l'Etat requé-
rant a, dans sa demande complémentaire du 27 septembre 1999,
signalé aux autorités suisses que sa procédure était
secrète,
selon les normes applicables du droit grec. Même si l'Etat
requérant n'a pas formellement requis la confidentialité de
la procédure, il a néanmoins fait valoir une exigence qu'il
convient de prendre en considération pour déterminer le cer-
cle des parties admises à la procédure.

e) Le défaut de qualité de partie à la procédure
cantonale prive ipso facto L.________ de la qualité de
partie
à la procédure du recours de droit administratif (exigence
du
"formelle Beschwer"; ATF 123 II 115 consid. 2a p. 117).

4.- Il reste à examiner si L.________ peut être
considérée comme une partie intéressée à la procédure du

recours de droit administratif au sens de l'art. 110 al. 1
OJ, à teneur duquel le Tribunal fédéral peut autoriser des
tiers intéressés à la procédure à répondre au recours et à
participer à un éventuel échange ultérieur d'écritures.
Encore faut-il que ces tiers soient touchés dans leurs inté-
rêts juridiques par l'issue de la cause, de sorte qu'il se
justifie d'étendre à leur égard les effets de l'arrêt qui
sera rendu (ATF 118 Ib 356 consid. 2c p. 360; décision non
publiée S. du 6 avril 1998 consid. 3a et les arrêts cités).

a) Selon la jurisprudence, l'art. 110 al. 1 OJ doit
être appliqué de manière restrictive dans le domaine de la
coopération judiciaire internationale. Ne sont admises à par-
ticiper à la procédure du recours de droit administratif que
les personnes touchées directement et personnellement par la
mesure d'entraide et qui disposeraient ainsi de la qualité
pour agir au sens de l'art. 80h let. b EIMP ou qui seraient
recevables à recourir si l'autorité inférieure avait tranché
dans un sens inverse (décisions non publiées concernant la
République fédérale démocratique d'Ethiopie, du 5 juin 1998,
S., précitée, et R. du 29 juin 1990).

Tel n'est pas le cas en l'espèce. Si le Juge d'ins-
truction ou le Tribunal d'accusation avaient rejeté la de-
mande d'entraide, seul l'Office fédéral aurait pu recourir
contre une telle décision (art. 80h let. a EIMP). L.________
n'aurait pu agir; elle ne peut donc se voir reconnaître la
qualité de partie intéressée au sens de l'art. 110 al. 1 OJ,
selon la jurisprudence qui vient d'être rappelée.

b) Celle-ci doit être précisée en ce sens que la
qualité de partie à la procédure d'entraide doit être
alignée
sur la qualité pour agir définie par l'art. 80h let. b EIMP.
Pour être admis comme partie à la procédure, il faut, en
d'autres termes, être touché directement et personnellement
par une mesure d'entraide et avoir un intérêt digne de pro-

tection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée. L'art. 80h
let. b EIMP produit dans ce domaine un effet général qui ex-
clut l'application, à titre subsidiaire, de l'art. 110 al. 1
OJ.

En l'espèce, L.________ était certes touchée direc-
tement et personnellement parce que le Juge d'instruction
avait ordonné la saisie du compte no hhh dont elle était la
cotitulaire. En revanche, comme on l'a vu (consid. 3d ci-
dessus), elle ne disposait d'aucun intérêt digne de protec-
tion à l'annulation ou à la modification de la décision de
clôture, dans la mesure où elle était touchée par celle-ci.
Partant, elle n'aurait pas été recevable à recourir, comme
le
Juge d'instruction l'a pertinemment rappelé dans sa décision
du 2 février 2000, avec la conséquence qu'elle ne pouvait
être admise à la procédure d'exécution de la demande d'en-
traide.

5.- La qualité de partie à la procédure doit être
déniée à L.________. Celle-ci ayant présenté des conclusions
contraires, elle doit prendre en charge les frais de la pro-
cédure (art. 156 al. 1 OJ), ainsi qu'une indemnité à verser
à
P.________ à titre de dépens (art. 159 al. 1 OJ).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Dénie à L.________ la qualité de partie à la pro-
cédure.

2. Met à la charge de L.________ un émolument judi-
ciaire de 2'000 fr., ainsi qu'une indemnité de 1'000 fr. en
faveur de P.________, à titre de dépens.

3. Communique le présent arrêt en copie aux manda-
taires des parties, au Juge d'instruction et au Tribunal
d'accusation du Tribunal cantonal du canton de Vaud, ainsi
qu'à l'Office fédéral de la justice (B 116230).

Lausanne, le 4 janvier 2001
ZIR/col

Au nom de la Ie Cour de droit public
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président,

Le Greffier,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 1A.254/2000
Date de la décision : 04/01/2001
1re cour de droit public

Analyses

Art. 21 al. 2, art. 80b et art. 80h let. b EIMP; art. 110 OJ; qualité de partie dans la procédure d'entraide judiciaire. La qualité de partie à la procédure d'entraide dans l'Etat requis s'apprécie au seul regard du droit interne de celui-ci (consid. 2). La qualité de plaignant ou de partie civile dans la procédure pénale étrangère pour les besoins de laquelle l'entraide est demandée, ne confère pas, ipso facto, la qualité de partie à la procédure d'exécution de la demande d'entraide dans l'Etat requis, ni, partant, la qualité de partie dans la procédure de recours (consid. 3). La qualité de partie doit être alignée sur la qualité pour agir au sens de l'art. 80h let. b EIMP; cette norme produit un effet général qui exclut l'application, à titre subsidiaire, de l'art. 110 al. 1 OJ définissant la qualité de partie intéressée à la procédure du recours de droit administratif (précision de la jurisprudence; consid. 4).


Références :

31.01.2001 1A.254/2000


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-01-04;1a.254.2000 ?
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