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20/12/2000 | SUISSE | N°K.67/00

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 20 décembre 2000, K.67/00


«AZA 7»
K 67/00 Mh

Ière Chambre

composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, Schön,
Borella, Spira et Rüedi; Frésard, Greffier

Arrêt du 20 décembre 2000

dans la cause

C.________, recourant, représenté par Maître Daniel
Perdrizat, avocat, rue du Concert 2, Neuchâtel,

contre

La Caisse Vaudoise, Assurance maladie et accidents, rue
Caroline 11, Lausanne, intimée,

et

Tribunal administratif du canton de Neuchâtel, Neuchâtel

A.- Dès le 1er févr

ier 1996, C.________ a été affilié
à la Caisse Vaudoise, Assurance maladie et accidents, pour
une indemnité journalière en cas de maladi...

«AZA 7»
K 67/00 Mh

Ière Chambre

composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, Schön,
Borella, Spira et Rüedi; Frésard, Greffier

Arrêt du 20 décembre 2000

dans la cause

C.________, recourant, représenté par Maître Daniel
Perdrizat, avocat, rue du Concert 2, Neuchâtel,

contre

La Caisse Vaudoise, Assurance maladie et accidents, rue
Caroline 11, Lausanne, intimée,

et

Tribunal administratif du canton de Neuchâtel, Neuchâtel

A.- Dès le 1er février 1996, C.________ a été affilié
à la Caisse Vaudoise, Assurance maladie et accidents, pour
une indemnité journalière en cas de maladie de 135 francs.

Le 10 juin 1998, C.________ a demandé à la caisse de
réduire à 124 francs le montant de l'indemnité journalière,
afin de l'adapter à son salaire de l'époque (3'700 francs
par mois). Selon un nouveau contrat d'assurance, le montant
de l'indemnité journalière fut finalement fixé, à compter
du 1er juin 1998, à 121 francs dès le 31e jour d'incapacité
de travail.
Le 24 mai 1999, l'assuré a fait savoir à la caisse
qu'il désirait augmenter à 172 fr. 50 le montant de l'in-
demnité journalière, avec effet au 1er juin 1999.
Après un échange de correspondance entre les parties,
la caisse a rendu une décision, le 12 novembre 1999, par
laquelle elle a refusé d'augmenter le montant de l'indemni-
té assurée. Elle a fait valoir que ses conditions générales
de l'assurance facultative d'indemnités journalières, en-
trées en vigueur le 1er janvier 1997, limitaient à
10 francs par jour au maximum le montant de l'indemnité
assurée. En vertu d'une disposition transitoire, cette
clause n'était cependant pas applicable aux assurés qui é-
taient au bénéfice d'une couverture supérieure à ce montant
à la date du 31 décembre 1996. Pour ces affiliés, le der-
nier montant assuré était garanti (en l'occurrence
121 francs), sans possibilité d'augmentation. La caisse a
par ailleurs indiqué qu'une augmentation de la couverture
d'assurance serait possible, dans le cas particulier, par
la conclusion d'une assurance complémentaire soumise à la
loi fédérale sur le contrat d'assurance. En l'espèce, elle
refusait toutefois de conclure un tel contrat, car l'assuré
était âgé de plus de 50 ans.
L'assuré a formé une opposition, que la caisse a reje-
tée par une nouvelle décision, du 22 décembre 1999.

B.- Statuant le 27 mars 2000, le Tribunal administra-
tif du canton de Neuchâtel a rejeté le recours formé contre
cette dernière décision par l'assuré.

C.- C.________ interjette un recours de droit admi-
nistratif dans lequel il demande au Tribunal fédéral des
assurances, sous suite de dépens, d'annuler le jugement
cantonal et de dire que sa couverture d'assurance faculta-
tive d'indemnités journalières doit être à nouveau augmen-
tée, jusqu'à concurrence de 135 francs par jour (soit le
montant assuré au 31 décembre 1996).
La Caisse Vaudoise conclut au rejet du recours. Quant
à l'Office fédéral des assurances sociales, il ne s'est pas
déterminé à son sujet.

Considérant en droit :

1.- La décision litigieuse n'ayant pas pour objet
l'octroi ou le refus de prestations d'assurance, le Tribu-
nal fédéral des assurances doit se borner à examiner si les
premiers juges ont violé le droit fédéral, y compris par
l'excès ou par l'abus de leur pouvoir d'appréciation, ou si
les faits pertinents ont été constatés d'une manière mani-
festement inexacte ou incomplète, ou s'ils ont été établis
au mépris de règles essentielles de procédure (art. 132 en
corrélation avec les art. 104 let. a et b et 105 al. 2 OJ).

2.- a) Aux termes de l'art. 67 al. 1 LAMal, toute
personne domiciliée en Suisse ou qui y exerce une activité
lucrative, âgée de quinze ans révolus, mais qui n'a pas
atteint 65 ans, peut conclure une assurance d'indemnités
journalières avec un assureur au sens de l'art. 68 LAMal.
L'assureur convient avec le preneur d'assurance du montant
des indemnités journalières assurées; ils peuvent limiter
la couverture aux risques de la maladie et de la maternité
(art. 72 al. 1 LAMal).
Il est unanimement admis par la doctrine que l'assu-
rance facultative d'indemnités journalières selon la LAMal

trouve son fondement dans un contrat d'assurance de droit
public (Vincent Brulhart, Quelques remarques relatives au
droit applicable aux assurances complémentaires dans le
nouveau régime de la LAMal, in : LAMal-KVG, Recueil de tra-
vaux en l'honneur de la Société suisse de droit des assu-
rances, Lausanne 1997 [cité ci-après : LAMal-KVG], p. 741;
Ueli Kieser, Die Stellung der Nichterwerbstätigen in der
freiwilligen Taggeldversicherung [Artikel 67 ff. KVG],
in : LAMal-KVG, p. 613; Alfred Maurer, Das neue Krankenver-
sicherungsrecht, Bâle/Francfort-sur-le-Main 1996, p. 113;
Gebhard Eugster, Zum Leistungsrecht der Taggeldversicherung
nach KVG, in : LAMal-KVG, p. 551). C'est ainsi que les
parties fixent en toute liberté le montant de l'indemnité
journalière assurée (ATF 124 V 207 consid. 4d). En tant
qu'institutions chargées d'appliquer l'assurance-maladie
sociale, les assureurs-maladie sont néanmoins tenus - comme
c'était le cas sous le régime de la LAMA - de se conformer
aux principes généraux régissant toute activité
administrative, ce qui implique notamment le respect de
l'égalité de traitement (art. 8 Cst.; voir par exemple ATF
117 V 64 consid. 3a).

b) L'art. 68 al. 1 LAMal, selon lequel les assureurs
au sens de l'art. 11 LAMal doivent admettre, dans les limi-
tes de leur rayon territorial, toute personne en droit de
s'assurer, impose aux assureurs une obligation de contrac-
ter. Cette obligation a toutefois une portée limitée dans
la mesure où l'assureur n'est pas tenu d'accorder au candi-
dat une couverture d'assurance qui corresponde au montant
de sa perte de gain présumée en cas d'incapacité de tra-
vail. En effet, le législateur n'a pas voulu reconnaître au
preneur d'assurance le droit d'obtenir une couverture indi-
viduelle adaptée à ses besoins. Nombre d'assureurs-maladie
ont ainsi limité la couverture d'assurance à une indemnité
journalière minime (30 francs, voire 10 francs ou même
6 francs). Parallèlement, ces mêmes assureurs ou du moins
certains d'entre eux pratiquent - comme la loi le permet

(art. 12 al. 2 LAMal) - l'assurance d'une indemnité
journalière au titre d'une assurance complémentaire régie
par les dispositions de la LCA, jugées moins contraignantes
que la réglementation de la LAMal en ce domaine. En matière
de couverture de la perte de gain en cas de maladie, il
s'est donc produit un transfert de l'assurance-maladie
sociale vers l'assurance privée (sur ces questions, voir
Eugster, in LAMal-KVG, p. 507 ss; Jean-Marie Agier,
L'assurance collective perte de gain en cas de maladie
avant l'entrée en vigueur de la LAMal et après,
in : LAMal-KVG, p. 572 ss).

c) Il en résulte qu'un assuré ne saurait déduire de la
LAMal un droit à une augmentation de sa couverture d'assu-
rance en fonction de sa perte de gain présumée. Une partie
de la doctrine exprime certes l'avis qu'un assureur qui
pratique l'assurance d'indemnités journalières selon la
LAMal ne peut se contenter d'offrir à ses assurés, de
manière générale, une couverture réduite à une indemnité
d'un montant minime ou symbolique, car un tel procédé dé-
nature le sens et le but d'une assurance de ce genre
(Maurer, op. cit., p. 113; Eugster, Krankenversicherung,
in : Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR], Soziale
Sicherheit, no 359; Largier/Schiavi, Krankentaggeld :
Praxis rechtswidrig, in: plädoyer 2/1997 p. 17 sv.). Cette
question n'a toutefois pas à être examinée ici. En effet,
le montant maximum de l'indemnité que la caisse accepte
d'assurer dans le cas particulier (121 francs) ne peut être
qualifié de minime; il est au contraire bien supérieure au
montant maximum cité de 30 francs par jour.

3.- Il reste à se demander si la prétention du recou-
rant peut se fonder sur les conditions d'assurance de la
caisse intimée.

a) Selon les conditions d'assurance de l'intimée qui
ont été en vigueur dès le 1er janvier 1996, le candidat
avait la possibilité de s'assurer pour une indemnité jour-
nalière de 2 francs à 300 francs. Conformément aux
conditions d'assurance applicables à partir du 1er janvier
1997, la caisse alloue, en cas d'incapacité de travail
attestée par un médecin ou un chiropraticien et pour autant
qu'une perte de gain correspondante soit prouvée, une in-
demnité journalière de 2 francs au minimum et de 10 francs
au maximum (art. 7 ch. 1). Une exception est prévue pour
les apprentis, pour lesquels l'étendue de la couverture se
fonde sur les dispositions cantonales en vigueur (art. 7
ch. 6). Par ailleurs, un assuré qui augmente, réduit ou
cesse son activité doit en aviser immédiatement la caisse
pour permettre la modification de l'indemnité journalière
assurée et de ses primes (art. 7 ch. 3).
L'art. 29 ch. 2 des mêmes conditions d'assurance con-
tient la réglementation transitoire suivante :

«La limite de Fr. 10.- n'est pas applicable aux assurés qui
étaient assurés au 31 décembre 1996 pour une indemnité
journalière supérieure. Le dernier montant assuré est ga-
ranti, sans possibilité d'augmentation».

Selon les premiers juges, l'assuré au bénéfice de
cette règle transitoire et dont la couverture d'assurance a
été réduite après le 31 décembre 1996 n'a plus la possibi-
lité d'obtenir ensuite le rétablissement de la couverture
qui était la sienne à la même date. Par conséquent, dans le
cas particulier, le recourant ne peut prétendre une aug-
mentation de sa couverture d'assurance jusqu'à concurrence
du montant de l'indemnité journalière qui était assuré au
moment de l'entrée en vigueur de la modification des
conditions générales, le 1er janvier 1997 (135 francs).
D'après le recourant, l'art. 29 ch. 2 susmentionné
limite certes la couverture possible au montant assuré au

31 décembre 1996, mais il n'exclut pas, dans le cadre ainsi
fixé, qu'une augmentation puisse intervenir lorsque, posté-
rieurement à cette date, l'indemnité a été réduite en ap-
plication de l'art. 7 ch. 3 des conditions d'assurance. En
tout cas, toujours selon le recourant, l'art. 29 ch. 2 de
ces conditions est une clause peu claire qui est sujette à
interprétation. Conformément au principe de la confiance,
une telle règle doit être interprétée au détriment de la
partie qui l'a rédigée. Elle devrait être comprise dans un
«sens social», autrement dit dans l'intérêt de l'assuré.
Enfin, le recourant voit une inégalité de traitement dans
le fait que seuls les assurés qui n'ont pas subi de diminu-
tion de salaire après le 1er janvier 1997 peuvent continuer
à bénéficier pleinement de la garantie offerte par cette
clause transitoire.

b) A la différence de ce qui est prévu pour l'assuran-
ce obligatoire des soins (art. 102 al. 2 LAMal), la LAMal
ne contient pas de norme de droit transitoire en ce qui
concerne l'adaptation des dispositions internes sur l'assu-
rance facultative d'indemnités journalières selon les
art. 67 ss LAMal (voir ATF 126 III 349 consid. 3, 125 V 116
consid. 2e; Raymond Spira, Le nouveau régime de l'assu-
rance-maladie complémentaire, in: RSA 63 [1995] p. 194 ss).
Comme le relève avec raison l'intimée, les assureurs-
maladie étaient donc en droit de poursuivre les rapports
d'assurance existants tout en les soumettant au nouveau
droit. Interprétée selon le principe de la confiance,
autrement dit selon le sens que les parties pouvaient lui
attribuer raisonnablement et de bonne foi (ATF 125 III 308
consid. 2b, 436 consid. 2a/aa, 117 II 621 consid. 6c; cf.
aussi ATF 106 V 33 consid. 4, 104 V 18 consid. 4), la ré-
glementation transitoire invoquée ne contient rien qui
permettrait de conclure à l'existence, en faveur du recou-
rant, d'une garantie d'obtenir, pour le futur et pendant

toute la durée de l'affiliation, le rétablissement de la
situation existant au 1er janvier 1997. Il s'agissait uni-
quement de permettre le maintien d'une couverture d'assu-
rance de même étendue que la protection offerte avant
l'entrée en vigueur de la LAMal, de manière analogue à la
garantie de droit transitoire offerte par l'art. 102 al. 2
LAMal. Une garantie de ce genre n'apparaît pas comme étant
acquise une fois pour toutes. Au contraire, en cas de ré-
duction de l'étendue de sa couverture d'assurance, le
preneur perd cette garantie dans la mesure correspondante.

Le recourant se prévaut en vain de la règle d'inter-
prétation «in dubio contra stipulatorem», qui découle du
principe de la confiance. Cette règle vaut spécialement
pour les clauses ambiguës, qui peuvent, en toute bonne foi,
être comprises de différentes manières (ATF 118 II 344
consid. 1a; SVR 2000 BVG 6 p. 33 consid. 4c); il ne s'agit
pas, au demeurant, de s'en tenir d'emblée à la solution la
plus favorable à l'assuré (Maurer, Schweizerisches Privat-
versicherungsrecht, 3e édition, Berne 1995, p. 160 ss).
Dans le cas particulier, on peut pas comprendre de
différentes façons la disposition transitoire en cause.
L'argumentation du recourant repose bien plutôt sur une
interprétation extensive qui ne ressort pas du texte cette
disposition.
Peu importe, en définitive, les raisons qui ont poussé
le recourant à demander une réduction de sa couverture
d'assurance. Il n'est pas décisif, en particulier, que le
motif de cette réduction réside dans une baisse du salaire.
Il n'y a pas d'inégalité de traitement entre assurés qui
ont bénéficié de la disposition transitoire en question,
puisque dans une situation semblable (réduction de la cou-
verture d'assurance ensuite d'une diminution du revenu),
ces assurés n'ont pas la possibilité d'exiger de la caisse
qu'elle rétablisse la couverture d'assurance antérieure, en
cas
d'augmentation ultérieure de revenu.

Dans ces circonstances, la caisse était en droit de
refuser d'augmenter le montant de l'indemnité litigieuse.
Le recours de droit administratif est dès lors mal fondé.

4.- Compte tenu de l'issue du litige, les frais de la
procédure, qui n'est pas gratuite en l'occurrence
(art. 134 OJ a contrario), seront supportés par le recou-
rant part. 156 al. 1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est rejeté.

II. Les frais de la cause, d'un montant de 500 fr., sont
mis à la charge du recourant et sont compensés avec
l'avance de frais qu'il a versée.

III. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au
Tribunal administratif du canton de Neuchâtel et à
l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 20 décembre 2000

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la Ière Chambre :

Le Greffier :


Synthèse
Numéro d'arrêt : K.67/00
Date de la décision : 20/12/2000
Cour des assurances sociales

Analyses

Art. 67 et 68 LAMal: Montant de la couverture d'assurance. Un assuré ne saurait déduire de la LAMal un droit à une augmentation de sa couverture d'assurance en fonction de sa perte de gain présumée. Art. 67 ss LAMal: Interprétation des conditions d'assurance pour l'assurance facultative d'indemnités journalières. Interprétation d'une disposition transitoire d'une caisse, selon laquelle la limite maximale de l'indemnité assurable (10 francs par jour) n'est pas applicable aux personnes qui étaient assurées au 31 décembre 1996 pour une indemnité journalière supérieure.


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-12-20;k.67.00 ?
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