La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/12/2000 | SUISSE | N°6S.585/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 19 décembre 2000, 6S.585/2000


«/2»
6S.585/2000/ROD

C O U R D E C A S S A T I O N P E N A L E
*************************************************

19 décembre 2000

Composition de la Cour: M. Schubarth, Président, Président
du Tribunal fédéral, MM. Wiprächtiger, Schneider, Kolly et
Mme Escher, Juges. Greffière: Mme Paquier-Boinay.
___________

Statuant sur le pourvoi en nullité
formé par

X.________, représenté par Me Jean-Marie Brahier, avocat
à Moutier,

contre

l'arrêt rendu le 23 février 2000 pa

r la IIème Chambre
pénale de la Cour suprême du canton de Berne dans la
cause qui oppose le recourant au Procureur général...

«/2»
6S.585/2000/ROD

C O U R D E C A S S A T I O N P E N A L E
*************************************************

19 décembre 2000

Composition de la Cour: M. Schubarth, Président, Président
du Tribunal fédéral, MM. Wiprächtiger, Schneider, Kolly et
Mme Escher, Juges. Greffière: Mme Paquier-Boinay.
___________

Statuant sur le pourvoi en nullité
formé par

X.________, représenté par Me Jean-Marie Brahier, avocat
à Moutier,

contre

l'arrêt rendu le 23 février 2000 par la IIème Chambre
pénale de la Cour suprême du canton de Berne dans la
cause qui oppose le recourant au Procureur général du
canton de B e r n e;

(infraction à la LCR)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- Par jugement du 16 juillet 1999, le Prési-
dent 3 de l'arrondissement judiciaire I de Courtelary-
Moutier-La Neuveville a reconnu X.________ coupable
d'escroquerie ainsi que d'infraction à la LCR et l'a
condamné à 20 jours d'emprisonnement avec sursis pendant
2 ans.

B.- Statuant le 23 février 2000 sur appel du
condamné, la IIème Chambre pénale de la Cour suprême du
canton de Berne l'a libéré de la prévention d'escroquerie
mais déclaré coupable d'avoir fait usage d'un permis de
circulation et de plaques de contrôle qui n'étaient des-
tinés ni à lui-même ni à son véhicule et l'a condamné à
une amende de 400 fr. à inscrire au casier judiciaire
pendant 1 an.

Les faits suivants sont à l'origine de cette
condamnation. En juin 1998, X.________ a acheté, pour le
prix de 1'500 fr., la voiture de Y.________. Cette
dernière a rempli les formulaires destinés à l'assurance
et au service des automobiles et il a été convenu que
X.________ entreprendrait les démarches nécessaires
auprès de ces organismes en vue de la modification du nom
du détenteur du véhicule. Quelques jours plus tard,
Y.________ a revu X.________, qui l'a assurée que tout
était en ordre. Elle s'est toutefois rendu compte que le
transfert n'avait pas été effectué lorsqu'elle a reçu, à
son nom, au mois d'octobre 1998, deux amendes d'un
montant total de 80 fr. Elle a alors déposé plainte
contre X.________, qui a confirmé qu'il devait déposer
les plaques du véhicule mais à fin 1998 seulement, ce

qu'il n'a au demeurant pas fait puisqu'il a encore roulé
avec cette voiture en janvier 1999.

La cour cantonale estime que X.________ a
sciemment utilisé pendant plus de six mois plaques et
permis alors qu'il savait qu'il n'en avait pas le droit
et qu'il s'est ainsi rendu coupable d'infraction à l'art.
97 ch. 1 LCR. Elle admet en outre que son comportement a
également violé l'art. 99 ch. 2 LCR mais que la première
infraction englobe la seconde, de sorte qu'elle ne le
reconnaît coupable que de violation de l'art. 97 ch. 1
LCR. S'agissant de la mesure de la peine, elle relève
qu'il a agi par pur égoïsme et sans scrupules; elle note
également qu'il s'est comporté correctement tout au long
de la procédure, que ses antécédents ne sont pas mauvais
et, enfin, qu'il se trouvait dans une situation difficile
au moment des faits.

C.- Agissant par l'entremise de son avocat,
X.________ s'est pourvu en nullité le 20 mars 2000 contre
cet arrêt dont le dispositif lui a été communiqué le 13
mars 2000. L'arrêt motivé lui ayant été notifié le 21
juillet 2000, il a motivé son pourvoi par un courrier
portant le timbre postal du 11 août 2000. Comme le délai
de 20 jours prévu à l'art. 272 al. 2 PPF venait à
échéance le 10 août 2000, le mandataire du recourant
produit une déclaration par laquelle deux témoins at-
testent l'avoir vu, le 10 août 2000 à 20 h. 15, déposer
dans une boîte à lettres, à Moutier, une enveloppe
adressée à la IIème Chambre pénale de la Cour d'Appel à
Berne.

Le recourant soutient que c'est en application de
l'art. 99 ch. 2 LCR et non de l'art. 97 ch. 1 al. 1 LCR
qu'il aurait dû être condamné, de sorte que seule une

amende d'ordre aurait dû être prononcée. Partant, il
conclut, avec suite de frais et dépens, à l'annulation de
l'arrêt attaqué dans la mesure où il le reconnaît cou-
pable d'infraction aux dispositions de l'art. 97 ch. 1
al. 1 LCR et le condamne à une amende de 400 fr. et à des
frais judiciaires afférents aux deux instances canto-
nales.

D.- Le Procureur général du canton de Berne n'a
pas déposé d'observations dans le délai qui lui a été
imparti à cet effet.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- a) Le Tribunal fédéral examine d'office et
librement la recevabilité des recours dont il est saisi
(ATF 126 I 81 consid. 1; 126 IV 107 consid. 1; 125 I 253
consid. 1a p. 254, 412 consid. 1a p. 414, 125 II 293
consid. 1a p. 299 et les arrêts cités).

b) Conformément à l'art. 272 al. 2 PPF, le recou-
rant doit motiver son pourvoi par écrit dans les 20 jours
dès la réception de la décision écrite. Le jour duquel le
délai court n'est pas compté (art. 32 al. 1 OJ). Le délai
est considéré comme observé si la motivation a été remise
au plus tard le dernier jour du délai soit à l'autorité
compétente pour la recevoir soit à un bureau de poste
suisse ou encore à une représentation diplomatique ou
consulaire suisse.

c) En l'espèce, la motivation de l'arrêt attaqué
a été notifiée au recourant le 21 juillet 2000, de sorte

que le délai a commencé de courir le 22 juillet 2000 et a
expiré 20 jours plus tard, savoir le 10 août 2000. Or
l'enveloppe ayant contenu le mémoire porte le timbre pos-
tal du 11 août 2000. L'avocat du recourant a toutefois
produit une déclaration par laquelle deux témoins attes-
tent l'avoir vu, le 10 août 2000 à 20 h. 15, déposer dans
une boîte à lettres, à Moutier, une enveloppe adressée à
la IIème Chambre pénale de la Cour d'Appel à Berne, qui
est l'autorité à laquelle le mémoire devait être adressé
conformément à l'art. 272 al. 1 et 2 PPF.

On considère en règle générale que la date du
sceau postal correspond à celle du dépôt de l'acte. Cette
présomption n'est toutefois pas irréfragable, la partie
ayant le droit de prouver, par tous moyens utiles, en
particulier par témoins, que le pli a été déposé en temps
utile dans une boîte postale (ATF 109 Ia 183, voir égale-
ment ATF 115 Ia 8; Poudret, Commentaire de la loi fédé-
rale d'organisation judiciaire, n. 4.6 ad art. 32 OJ et
les références citées; Thomas Geiser, Grundlagen, in:
Geiser/Münch, Prozessieren vor Bundesgericht, 2e éd.
1998, p. 35, n. 1.68).

En l'espèce, la déclaration de deux témoins
produite par le mandataire du recourant est propre à
établir que le mémoire a effectivement été déposé dans
une boîte postale suisse le dernier jour du délai; le
recours est donc recevable.

d) Le pourvoi en nullité à la Cour de cassation
pénale du Tribunal fédéral, qui a un caractère cassa-
toire (art. 277ter al. 1 PPF), ne peut être formé que
pour violation du droit fédéral, à l'exception de la
violation directe d'un droit de rang constitutionnel
(art. 269 PPF).

La Cour de cassation n'est pas liée par les
motifs invoqués, mais elle ne peut aller au-delà des
conclusions du recourant (art. 277bis PPF). En revanche,
elle est liée par les constatations de fait de l'auto-
rité cantonale, sous réserve de la rectification d'une
inadvertance manifeste (art. 277bis al. 1 PPF).

2.- Selon le recourant, sa condamnation en vertu
de l'art. 97 ch. 1 al. 1 LCR viole le droit fédéral car
c'est l'art. 99 ch. 2 LCR qui devait trouver application.

Aux termes de l'art. 97 ch. 1 al. 1 LCR, celui
qui aura fait usage de permis ou de plaques de contrôle
qui n'étaient destinés ni à lui-même ni à son véhicule
sera puni de l'emprisonnement ou de l'amende.

Comme le texte italien, selon lequel "chiunque
usa licenze o targhe di controllo che non sono state
rilasciate per lui nè per il suo veicolo ...", la version
française du texte légal indique clairement le caractère
cumulatif de la double condition, à savoir que tant le
détenteur que le véhicule ne doivent pas être ceux
auxquels étaient destinés le permis ou les plaques dont
il a été fait usage. La version allemande de l'art. 97
ch. 1 al. 1 LCR, qui prévoit que "wer Ausweise oder
Kontrollschilder verwendet, die nicht für ihn oder sein
Fahrzeug bestimmt sind ...", donne plutôt à penser que
ces conditions seraient alternatives. On ne saurait donc
conclure d'emblée que cette disposition n'est pas appli-
cable en l'espèce pour le seul motif que si le permis et
les plaques dont le recourant s'est servi n'avaient pas
été établis pour lui-même ils l'avaient en revanche été
pour le véhicule qu'il a racheté à Y.________.

Néanmoins, l'art. 97 ch. 1 al. 1 LCR ne vise pas
le cas où le nouveau détenteur d'un véhicule automobile
omet de faire établir un nouveau permis (Schultz, Die
Strafbestimmungen des Bundesgesetzes über den Strassen-
verkehr, Berne 1964, p. 293). Ce cas est visé expressé-
ment par l'art. 99 ch. 2 LCR, selon lequel est passible
d'une amende de 100 fr. au maximum celui qui, après avoir
repris un véhicule d'un autre détenteur, ne sollicite pas
à temps un nouveau permis. Cette disposition constitue la
sanction de la violation de l'obligation, imposée par
l'art. 11 al. 3 LCR, de solliciter un nouveau permis de
circulation notamment lorsqu'un véhicule change de
détenteur (Bussy/Rusconi, Code suisse de la circulation
routière, commentaire, 3e éd., Lausanne 1996, n. 2.1 ad
art. 11 LCR; Giger, Strassenverkehrsgesetz, 5e éd.,
Zurich 1996, n. 2 ad art. 99 LCR). Or, cette situation
est précisément celle du cas d'espèce, de sorte que c'est
bien l'art. 99 ch. 2 LCR qui devait être appliqué. L'ar-
rêt doit dès lors être annulé et la cause renvoyée à
l'autorité cantonale afin qu'elle statue à nouveau.

3.- Vu l'issue de la procédure, il ne sera pas
perçu de frais et une indemnité sera allouée au recou-
rant.

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l ,

1. Admet le pourvoi;

2. Annule l'arrêt attaqué et renvoie la cause à
l'autorité cantonale pour qu'elle statue à nouveau;

3. Dit qu'il n'est pas perçu de frais;

4. Dit que la Caisse du Tribunal fédéral versera
au recourant une indemnité de 2200 fr. à titre de dépens;

5. Communique le présent arrêt en copie au man-
dataire du recourant, au Procureur général et à la IIème
Chambre pénale de la Cour suprême du canton de Berne.
__________

Lausanne, le 19 décembre 2000

Au nom de la Cour de cassation pénale
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président,

La Greffière,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 6S.585/2000
Date de la décision : 19/12/2000
Cour de cassation pénale

Analyses

Art. 99 ch. 2 LCR. Celui qui, après avoir repris un véhicule d'un autre détenteur, ne sollicite pas à temps un nouveau permis contrevient à l'art. 99 ch. 2 LCR qui prévoit expressément ce cas et non à l'art. 97 ch. 1 al. 1 LCR qui sanctionne l'usage abusif de permis ou de plaques (consid. 2).


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-12-19;6s.585.2000 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award