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15/12/2000 | SUISSE | N°I.524/00

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 15 décembre 2000, I.524/00


«AZA 7»
I 524/00
I 534/00 Mh

IIIe Chambre

composée des Juges fédéraux Schön, Spira et Widmer;
Frésard, Greffier

Arrêt du 15 décembre 2000

dans la cause

K.________, recourant, représenté par Maître Pierre-Bernard
Petitat, avocat, rue Patru 2, Genève,

contre

Office de l'assurance-invalidité du canton de Genève,
Boulevard du Pont-d'Arve 28, Genève, intimé,

et

Office de l'assurance-invalidité du canton de Genève,
Boulevard du Pont-d'Arve 28, Genève, r

ecourant,

contre

K.________, intimé, représenté par Maître Pierre-Bernard
Petitat, avocat, rue Patru 2, Genève,

et

Co...

«AZA 7»
I 524/00
I 534/00 Mh

IIIe Chambre

composée des Juges fédéraux Schön, Spira et Widmer;
Frésard, Greffier

Arrêt du 15 décembre 2000

dans la cause

K.________, recourant, représenté par Maître Pierre-Bernard
Petitat, avocat, rue Patru 2, Genève,

contre

Office de l'assurance-invalidité du canton de Genève,
Boulevard du Pont-d'Arve 28, Genève, intimé,

et

Office de l'assurance-invalidité du canton de Genève,
Boulevard du Pont-d'Arve 28, Genève, recourant,

contre

K.________, intimé, représenté par Maître Pierre-Bernard
Petitat, avocat, rue Patru 2, Genève,

et

Commission cantonale de recours en matière d'AVS/AI, Genève

A.- K.________ est entré en Suisse le 30 mai 1985. Il
a déposé une demande d'asile le 12 juin 1985, qui a été
rejetée le 17 mai 1991. Depuis cette date, il a cependant
bénéficié d'une admission provisoire. Il a été naturalisé
suisse le 5 juin 1998.

Depuis son enfance, K.________ souffre des séquelles
d'une poliomyélite, qui limite sa mobilité. Le 13 juillet
1998, il a déposé une demande de prestations de l'assu-
rance-invalidité tendant notamment à la remise de moyens
auxiliaires (prothèses et fauteuil roulant). Son médecin
traitant, la doctoresse V.________ a indiqué à l'intention
de l'Office cantonal genevois de l'assurance-invalidité que
son patient se déplaçait avec des cannes anglaises
lorsqu'il portait des orthèses des jambes ou en fauteuil
roulant pour la pratique de la compétition de tennis en
fauteuil (rapport du 22 juillet 1998).
Par décision du 27 octobre 1998, l'office de l'assu-
rance-invalidité a rejeté la demande, au motif que le re-
quérant n'était pas assuré à l'assurance-invalidité suisse
au moment où le besoin de moyens auxiliaires s'était fait
sentir pour la première fois, en 1973 selon l'office.

B.- L'assuré a recouru contre cette décision.
Par jugement du 14 juillet 2000, la Commission canto-
nale genevoise de recours en matière d'AVS/AI, après avoir
recueilli des renseignements complémentaires auprès de la
doctoresse V.________, a partiellement admis le recours.
Elle a statué que l'assuré n'avait pas droit à la prise en
charge par l'assurance-invalidité d'orthèses. En revanche,
il pouvait prétendre la remise par l'assurance d'un fau-
teuil roulant.

C.- K.________ et l'Office cantonal genevois de
l'assurance-invalidité ont chacun formé un recours de droit
administratif contre ce jugement.
Dans son recours (cause I 524/00), K.________ conclut,
sous suite de dépens, à l'annulation partielle de ce
jugement et à la prise en charge par l'assurance-invali-
dité, en plus d'un fauteuil roulant, d'orthèses des jambes.

Il demande, en outre, à bénéficier de l'assistance judi-
ciaire pour la procédure devant le Tribunal fédéral des
assurances. L'office de l'assurance-invalidité conclut au
rejet du recours.
Dans son recours (cause I 534/00), l'office de l'assu-
rance invalidité conclut à l'annulation du jugement canto-
nal, dans la mesure où celui-ci concerne la prise en charge
d'un fauteuil roulant. K.________ conclut, sous suite de
dépens, au rejet de ce recours, tout en demandant à béné-
ficier de l'assistance judiciaire pour cette procédure
également.
L'Office fédéral des assurances sociales ne s'est dé-
terminé sur aucun des deux recours.

Considérant en droit :

1.- Les deux recours sont dirigés contre le même juge-
ment cantonal. Ils opposent les mêmes parties et soulèvent
les mêmes questions de droit. Il y a dès lors lieu de pro-
noncer la jonction des causes et de statuer sur les mérites
des deux recours par un seul et même arrêt (ATF 123 V 215
consid. 1).

2.- Selon l'art. 6 al. 1 LAI, les ressortissants suis-
ses, les étrangers et les apatrides ont droit aux presta-
tions conformément aux dispositions ci-après de la loi,
s'ils sont assurés lors de la survenance de l'invalidité
(première phrase). Sauf cas particuliers qui n'entrent pas
en considération en l'espèce, les personnes physiques sont
considérées comme assurées à l'AVS/AI soit en raison de
leur domicile en Suisse, soit en raison de l'exercice d'une
activité lucrative en Suisse (art. 1er al. 1 let. a et b
LAVS, applicable par analogie en matière d'assurance-in-
validité en vertu de l'art. 1er LAI).
D'autre part, selon l'art. 4 al. 2 LAI, l'invalidité
est réputée survenue dès qu'elle est, par sa nature et sa

gravité, propre à ouvrir droit aux prestations entrant en
considération. Ce moment doit être déterminé objectivement,
d'après l'état de santé; des facteurs externes fortuits
n'ont pas d'importance. Il ne dépend en particulier ni de
la date à laquelle une demande a été présentée, ni de celle
à partir de laquelle une prestation a été requise, et ne
coïncide pas non plus nécessairement avec le moment où
l'assuré apprend, pour la première fois, que l'atteinte à
sa santé peut ouvrir droit à des prestations (ATF 126 V 9
consid. 2b et les références).
Quand des moyens auxiliaires doivent être remis, l'in-
validité est réputée survenue lorsque l'atteinte à la santé
rend objectivement nécessaire, pour la première fois, de
tels appareils; ce moment ne doit pas forcément coïncider
avec celui où le besoin d'un traitement est apparu pour la
première fois (ATF 108 V 63 consid. 2b, 105 V 60 con-
sid. 2a; RCC 1992 p. 384 consid. 2). Si plusieurs moyens
auxiliaires entrent en considération, le moment de la sur-
venance de l'invalidité doit est déterminé au regard de
chacun d'entre eux, même s'ils remplissent la même fonction
ou une fonction analogue. Ainsi le fait qu'un fauteuil
roulant remplit le même but de mobilité que des prothèses
pour les jambes ne change rien à la circonstance qu'il
s'agit de prestations différentes, pour lesquelles la con-
dition d'assurance posée par l'art. 6 al. 1 LAI doit être
examinée séparément (RCC 1992 p. 384 consid. 3).

3.- Les premiers juges considèrent, sur la base des
pièces médicales figurant au dossier, que l'assuré avait
besoin d'orthèses des jambes depuis 1972. A cette époque,
il n'était pas domicilié en Suisse et n'y exerçait pas non
plus d'activité lucrative. Il n'était donc pas assuré à
l'AVS/AI suisse. N'ayant pas été assuré au moment de la
survenance de l'invalidité, il ne peut, conclut la commis-
sion de recours, prétendre le remplacement du moyen auxi-
liaire en question.

Dans son recours, l'assuré n'apporte aucun élément qui
serait de nature à remettre en cause cette conclusion. Il
se contente d'affirmer qu'il a besoin d'orthèses pour tous
ses déplacements, même s'il pourra à l'avenir utiliser da-
vantage un fauteuil roulant, en particulier pour ses longs
déplacements. Il fait aussi valoir que la durée de vie
d'une orthèse se limite à quelques années et que l'appareil
doit être réparé plusieurs fois. Mais ce sont là des élé-
ments qui ne sont pas décisifs quant il s'agit, comme en
l'espèce, de se prononcer sur le point de savoir si la
condition d'assurance est ou non remplie. Le recours de
l'assuré, manifestement infondé, doit être liquidé selon la
procédure prévue à l'art. 36a OJ.

4.- Reste à se prononcer sur la question de la remise
d'un fauteuil roulant, qui fait l'objet du recours de l'of-
fice de l'assurance-invalidité.

a) En réponse à un questionnaire que lui a adressé la
commission de recours, la doctoresse V.________ a apporté
les précisions suivantes à propos de la nécessité pour
l'assuré de disposer d'un fauteuil roulant pour les
besoins de la vie quotidienne (lettre du 10 juillet 1999) :

«Je ne connais Monsieur K.________ que depuis environ
5 ans, mais j'ai toujours pu constater qu'il utilisait un
fauteuil roulant pour ses longs déplacements, en particu-
lier dans la rue souvent.

Il a souffert d'une maladie dans la petite enfance, avec
une paralysie partielle de l'hémicorps droit consécutive.
Il a donc eu besoin de longue date de moyens auxiliaires et
leur utilisation n'est nullement due à une péjoration ré-
cente. Les orthèses sont devenues insuffisantes lors de
déplacements prolongés en position debout il y a quelques
années déjà (avec la croissance, une prise pondérale phy-
siologique s'est opérée et il faut encore ajouter à ce
phénomène des déformations osseuses dues à l'utilisation
accrue obligatoire des membres supérieurs). C'est elle qui
est probablement responsable à la longue des douleurs du
poignet droit ayant conduit Monsieur K.________ à se faire
opérer.

La chronologie exacte des faits est la suivante :

1966 : naissance;
1968 : maladie et handicap;
1972 environ : utilisation d'orthèses;
1985 : venue en Suisse avec mise à disposition de moyens
auxiliaires performants en 1989 environ. Depuis lors, dor-
salgies et fatigabilité accrue».

b) Sur la base de ces informations médicales, les pre-
miers juges étaient fondés à considérer, comme ils l'ont
fait, que le besoin d'un fauteuil roulant s'est en l'occur-
rence fait sentir, pour les déplacements courants, posté-
rieurement à l'entrée en Suisse de l'assuré et pas avant
les années 1988/1989. Ils relèvent, à juste titre, que ce
besoin s'est manifesté en raison de dorsalgies et d'une
fatigabilité accrue ainsi que des douleurs des membres
supérieurs (comp. avec l'arrêt publié dans la RCC 1992
p. 382, concernant un paraplégique qui ne pouvait plus
utiliser un fauteuil roulant ordinaire, en raison d'une
limitation fonctionnelle des bras et des épaules, et qui a
obtenu pour cette raison la remise d'un fauteuil élec-
trique).
L'office de l'assurance-invalidité invoque l'avis de
son médecin-conseil, le docteur C.________ (note du
18 février 1999), selon lequel «on peut admettre que, dans
les années qui ont suivi la survenance de la paralysie,
l'assuré avait besoin d'une orthèse et d'un fauteuil
roulant»; ces moyens auxiliaires lui auraient certainement
été accordés s'il avait séjourné en Suisse à cette époque.
Ces déclarations n'apparaissent toutefois pas aussi caté-
goriques que paraît le croire l'office. Au demeurant, quand
le docteur C.________ s'est exprimé, il n'avait pas con-
naissance des précisions apportées ultérieurement par la
doctoresse V.________ en cours de procédure cantonale,
laquelle a expliqué, de façon convaincante, les motifs pour
lesquels l'assuré n'a pas eu un besoin simultané d'orthèses
et d'un fauteuil roulant. L'avis du médecin-conseil ne
remet donc pas en cause l'appréciation des premiers juges.

L'office insiste sur les déclarations faites par l'as-
suré dans sa demande de prestations. Celui-ci a répondu par
l'affirmative à la question lui demandant s'il disposait
déjà de moyens auxiliaires. Sous la rubrique «Désignation
exacte» il a en outre indiqué : «prothèse et fauteuil rou-
lant». En réponse à la question : «Depuis quand?», il a
précisé : «1973». Mais on ne peut pas en déduire, contrai-
rement à ce que suggère l'office, que l'assuré disposait
- et avait besoin - depuis 1973 de prothèses et d'un fau-
teuil roulant. D'ailleurs, il ne semble pas qu'il ait été
muni d'un fauteuil roulant quand il est arrivé en Suisse et
dans les années qui ont suivi (jusqu'en 1988 en tout cas).

c) Dans ces circonstances, on peut se rallier aux
considérants du jugement attaqué et admettre que l'invali-
dité est survenue, en ce qui concerne la remise d'un fau-
teuil roulant, à une époque où l'intéressé était assuré à
l'AVS/AI. Il n'est d'autre part pas contesté qu'il remplit
- indépendamment de la clause d'assurance - les conditions
dont dépend la remise de ce moyen auxiliaire. Il s'ensuit
que le recours de l'office de l'assurance-invalidité est
mal fondé.

5.- L'assuré a demandé à bénéficier de l'assistance
judiciaire pour les deux procédures (comme recourant et
comme intimé).
En ce qui concerne la procédure de recours de droit
administratif qu'il a engagée (I 524/00), la demande d'as-
sistance judiciaire doit être refusée. En effet, selon la
loi (art. 152 al. 1 OJ), l'octroi de l'assistance judi-
ciaire gratuite suppose, entre autres conditions, que les
conclusions du recours ne paraissent pas vouées à l'échec.
Or, compte tenu de ce qui a été dit plus haut (supra con-
sid. 3), cette condition n'est pas remplie.
Pour ce qui est du recours formé par l'office de l'as-
surance-invalidité (I 534/00), K.________, qui obtient gain
de cause, a droit à une indemnité de dépens

(art. 159 al. 1 OJ). La demande d'assistance judiciaire
qu'il a déposée dans cette procédure est dès lors sans
objet.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Les causes I 524/00 et I 534/00 sont jointes.

II. Les recours sont rejetés.

III. Il n'est pas perçu de frais de justice.

IV. La demande d'assistance judiciaire dans la cause
I 524/00 est rejetée. La demande du même genre
présentée dans la cause I 534/00 est sans objet.

V. L'Office cantonal genevois de l'assurance-invalidité
versera à K.________ une indemnité de dépens de
2000 fr. (y compris la taxe à la valeur ajoutée) pour
la procédure fédérale.

VI. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, à la
Commission cantonale genevoise de recours en matière
d'assurance-vieillesse, survivants et invalidité et à
l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 15 décembre 2000

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la IIIe Chambre :

Le Greffier :


Synthèse
Numéro d'arrêt : I.524/00
Date de la décision : 15/12/2000
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-12-15;i.524.00 ?
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