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12/12/2000 | SUISSE | N°5P.328/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 12 décembre 2000, 5P.328/2000


«/2»
5P.328/2000

IIe C O U R C I V I L E
*************************

12 décembre 2000

Composition de la Cour: M. Reeb, Président, M. Raselli et
Mme Nordmann, Juges. Greffière: Mme Jordan.

Statuant sur le recours de droit public
formé par

X.________, représenté par Me Eric Stampfli, avocat à
Genève,

contre

l'arrêt rendu le 23 juin 2000 par la Chambre civile de la
Cour de justice du canton de Genève dans la cause qui oppose
le recourant à la République et canton de Genèv

e,
représentée
par Me Daniel Perren, avocat à Genève, et la société anonyme
Y.________, représentée par Me Mike Hornung...

«/2»
5P.328/2000

IIe C O U R C I V I L E
*************************

12 décembre 2000

Composition de la Cour: M. Reeb, Président, M. Raselli et
Mme Nordmann, Juges. Greffière: Mme Jordan.

Statuant sur le recours de droit public
formé par

X.________, représenté par Me Eric Stampfli, avocat à
Genève,

contre

l'arrêt rendu le 23 juin 2000 par la Chambre civile de la
Cour de justice du canton de Genève dans la cause qui oppose
le recourant à la République et canton de Genève,
représentée
par Me Daniel Perren, avocat à Genève, et la société anonyme
Y.________, représentée par Me Mike Hornung, avocat à Genève;

(art. 9 et 29 al. 2 Cst.; responsabilité de l'Etat
pour acte illicite)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- a) La société immobilière Z.________ était pro-
priétaire de la parcelle XXXX, feuillet 15 de la Commune de
Chêne-bourg. L'immeuble était grevé, en premier rang, de
deux
cédules hypothécaires de respectivement 8'000'000 fr. et
2'000'000 fr. dont la Caisse d'épargne de Genève (ci-après:
CEG) était le porteur. En second rang étaient notamment ins-
crites une cédule de 200'000 fr. et cinq cédules de 100'000
fr. dont le porteur était X.________.

b) Le bien-fonds a fait l'objet de deux poursuites
en réalisation de gage immobilier. L'une a été introduite le
5 octobre 1992 par la CEG, qui a déclaré, le 23 novembre sui-
vant, ne pas souhaiter requérir, "en l'état", la gérance lé-
gale de l'immeuble; la banque invoquait à cet égard que la
gestion de ce dernier était déjà assurée par la société
R.________ SA et qu'elle-même était au bénéfice d'une
cession
de loyers selon acte du 14 février 1992. L'autre poursuite a
été requise le 8 juillet 1993 par X.________, qui a, quant à
lui, demandé la gérance légale.

Le 13 août 1993, l'Office des poursuites a délégué
la gérance légale de l'immeuble à la régie R.________ SA,
l'invitant à adresser aux locataires le formulaire officiel
ainsi qu'une lettre explicative leur indiquant leurs obliga-
tions quant au versement des loyers. R.________ SA n'a appa-
remment pas suivi ces directives.

Le 21 janvier 1994, la CEG, devenue la Banque canto-
nale de Genève (ci-après: la BCG), a requis la vente de la
parcelle susmentionnée.

c) La faillite de Z.________ a été prononcée le 9
mars 1994.

X.________ a produit ses créances totalisant 703'330
fr., tout en précisant vouloir être désintéressé de préféren-
ce aux autres créanciers au moyen des loyers encaissés dans
le cadre de la gérance légale depuis le 8 juillet 1993 jus-
qu'à la réalisation du bien-fonds. Le 27 avril 1994, il a
été
avisé du dépôt de l'état de collocation. Le 3 mai suivant,
il
s'est plaint de ne pas avoir reçu copie de l'état locatif,
qui devait être joint à l'état des charges, et s'est réservé
le droit de contester l'état de collocation après réception
de ce document. N'ayant reçu aucune réponse, il a relancé en
vain l'office le 30 mai 1994.

d) Le 6 septembre 1995, l'Office des poursuites a
informé X.________ de la clôture du dossier de poursuite en
réalisation de gage immobilier à la suite de la faillite de
la débitrice; il lui a en outre restitué l'avance de frais
effectuée en vue de la gérance légale.

e) Le 18 juin 1997, X.________ a derechef sollicité
de l'Office l'envoi de l'état locatif et demandé qu'il se
prononce formellement sur l'étendue de son droit de gage.
Insatisfait des explications, il a déposé plainte auprès de
l'Autorité de surveillance, le 25 juillet 1997; il a notam-
ment conclu à un nouveau dépôt de l'état de collocation et
de
l'état des charges après décision sur son droit de gage et
l'étendue de celui-ci sur les loyers.

Le 29 septembre 1997, l'Office a fait savoir à
X.________ qu'il n'avait pas encaissé les loyers pendant la
période précédant la faillite de Z.________, en raison de la
cession consentie le 14 février 1992 à la BCG par le proprié-
taire de l'immeuble. Il a par ailleurs précisé que, même en
l'absence de toute cession, la banque aurait eu droit aux

montants litigieux en vertu de son rang préférable.

Le 10 octobre 1997, X.________ a déposé une seconde
plainte tendant à ce que l'Office lui communique le montant
des loyers encaissés jusqu'à l'ouverture de la faillite et,
le cas échéant, les lui verse.

L'Autorité de surveillance a joint les deux plain-
tes et les a rejetées le 28 janvier 1998.

f) La vente de l'immeuble, le 13 février 1998, a
rapporté 7'160'000 fr. Cette somme, ainsi que les loyers en-
caissés depuis la faillite (1'456'609 fr.), a servi exclusi-
vement au remboursement de la banque. Le 27 juillet 1998,
X.________ s'est vu délivrer un acte de défaut de biens pour
le montant de 913'000 fr.

B.- X.________ a fait notifier à l'Etat de Genève un
commandement de payer 424'856 fr.80, avec intérêts à 5% l'an
dès le 9 mars 1994. Comme titre de créance, il a indiqué:
"Dommages-intérêts pour inexécution fautive par l'office des
poursuites et des faillites de Genève d'une gérance légale
dans le cadre de la poursuite en réalisation de gage immobi-
lier [...] requise le 08.07.93". Le montant réclamé corres-
pondait à la somme des loyers qui auraient dus être
encaissés
en sa faveur du 8 juillet 1993 au 9 mars 1994.

Le poursuivi ayant formé opposition, X.________ a
ouvert une action en reconnaissance de dette et mainlevée
d'opposition, le 19 octobre 1998. Le défendeur s'est opposé
à
la demande et, par assignation du 29 avril 1999, a appelé en
cause la Y.________ SA, anciennement R.________ SA,
concluant
à ce que celle-ci soit condamnée à le relever et à le garan-
tir de toute condamnation dont il pourrait faire l'objet.

Le 4 novembre 1999, le Tribunal de première instance
du canton de Genève a débouté X.________ de toutes ses con-
clusions. En substance, il a considéré que le demandeur n'a
subi aucun dommage puisqu'en sa qualité de créancier gagiste
de second rang il n'aurait pu prétendre au versement des
loyers ni dans le cadre de la procédure en réalisation de
gage ni dans la faillite.

Statuant sur l'appel de X.________ le 23 juin 2000,
la Chambre civile de la Cour de justice a confirmé ce juge-
ment par substitution de motifs.

C.- X.________ forme un recours de droit public au
Tribunal fédéral, concluant à l'annulation de l'arrêt canto-
nal, sous suite de dépens, et au déboutement des intimés "de
toutes autres ou contraires conclusions". Il sollicite en
outre le bénéfice de l'assistance judiciaire.

L'autorité cantonale et les intimés n'ont pas été
invités à répondre.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- a) Formé en temps utile - compte tenu des féries
d'été (art. 34 al. 1 let. b OJ) - contre une décision finale
prise en dernière instance cantonale, en application de la
loi genevoise sur la responsabilité de l'Etat et des
communes
(LREC; cf. ATF 120 Ia 377), le recours est recevable du chef
des art. 84, 86 al. 1 et 89 OJ.

b) Les conclusions qui excèdent la seule annulation
de la décision attaquée - en particulier celles qui tendent
au déboutement des intimés - sont irrecevables (ATF 125 I
104
consid. 1b p. 107 et la jurisprudence citée).

2.- La Cour de justice - substituant sa propre moti-
vation à celle du Tribunal de première instance - a rejeté
la
demande en dommages-intérêts dirigée contre l'Etat de
Genève,
pour le motif que le procès en responsabilité ne peut servir
à faire annuler des décisions passées en force, ce que ten-
tait précisément de faire le recourant.

a) Le recourant soutient que l'autorité cantonale a
commis un déni de justice formel. En considérant que, par
son
action, il remettait en cause la légalité ou la licéité de
décisions passées en force, les juges cantonaux auraient en
effet refusé d'examiner ses griefs et, partant, d'entrer en
matière sur la question de la responsabilité de l'Etat. Sous
le couvert de l'interdiction du déni de justice, le
recourant
ne cherche toutefois qu'à démontrer que l'arrêt cantonal se-
rait arbitraire (cf. infra). En tout cas, on ne voit pas en
quoi les magistrats intimés auraient refusé de statuer.

b) Le recourant taxe d'arbitraires les considéra-
tions de la Chambre civile selon lesquelles, par son action
en responsabilité, il remet en cause la légalité ou la licéi-
té de décisions entrées en force. Il reproche à cette autori-
té d'avoir ainsi jugé de façon insoutenable que la question
de la responsabilité a déjà été tranchée, alors même que les
décisions en cause n'ont jamais porté sur ce point.

En se référant à l'état de collocation, à la lettre
de l'Office du 6 septembre 1995 ainsi qu'à la décision sur
plainte du 28 janvier 1998, la cour cantonale n'a nullement
considéré que la responsabilité de l'Etat de Genève aurait
déjà fait l'objet de décisions définitives. Ces renvois
n'avaient pas d'autre but que de montrer que les autorités
concernées ont rejeté, implicitement ou explicitement, la de-
mande du recourant tendant au versement des loyers et lui
ont
ainsi refusé tout droit préférentiel sur ces derniers, et ce
même dans l'hypothèse où la gérance légale aurait été ordon-

née. Comme le recourant fondait précisément son action en
responsabilité sur l'existence d'un tel droit, il n'était
pas
arbitraire de soutenir que, par sa demande, il remettait en
cause des décisions préalables, entrées en force.
L'admission
de son argumentation aurait en effet nécessairement conduit
au constat qu'il disposait d'un droit préférentiel à
recevoir
les loyers encaissés dans le cadre de la gérance légale si
celle-ci avait été instaurée par l'Office des poursuites,
droit qui aurait primé celui de l'établissement bancaire,
qui
était porteur de deux cédules en premier rang et
cessionnaire
des loyers.

c) Le recourant prétend en outre qu'il est abusif de
le blâmer pour n'avoir pas réagi au courrier du 6 septembre
1995 de l'Office l'informant de la clôture du dossier de
poursuite en réalisation de gage ainsi que de la restitution
de l'avance de frais effectuée en vue de la gérance légale,
et pour n'avoir pas contesté l'état de collocation ni
recouru
contre l'arrêt sur plainte du 28 janvier 1998.

On peut se passer d'examiner la pertinence de ces
griefs. La cour cantonale a rejeté l'action en
responsabilité
pour le motif qu'elle est liée par les décisions passées en
force de l'Office et de l'Autorité de surveillance. Sur ce
point, après avoir constaté que la LREC ne dit mot de la pos-
sibilité de mettre en cause la légalité d'une décision dans
le cadre d'une action en responsabilité, elle a passé en re-
vue les avis de divers auteurs pour finalement faire sienne
l'opinion de Moor; selon ce dernier, dans les cantons dont
la
législation ne règle pas le problème, il convient de lier le
juge de la responsabilité aux décisions définitives rendue
par le juge administratif ou qui auraient pu être portées
devant lui (Moor, Droit administratif, vol. II, 1991, p.
470-471). Or, en se bornant à soutenir qu'il est abusif de
lui reprocher de ne pas avoir usé de toutes les voies de

recours, le recourant ne remet pas vraiment en cause cette
interprétation de la loi cantonale.

3.- Le recours étant d'emblée dénué de toute chance
de succès, la demande d'assistance judiciaire du recourant
doit être rejetée (art. 152 OJ). Partant, celui-ci
supportera
les frais de la procédure (art. 156 al. 1 OJ). Il n'y a pas
lieu d'allouer de dépens (art. 159 al. 1 et 2 OJ; Poudret,
Commentaire de la loi fédérale d'organisation judiciaire,
vol. V, n. 2 ad art. 159 OJ).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Rejette le recours dans la mesure où il est rece-
vable.

2. Rejette la demande d'assistance judiciaire du re-
courant.

3. Met à la charge du recourant un émolument judi-
ciaire de 2'000 fr.

4. Communique le présent arrêt en copie aux manda-
taires des parties et à la Chambre civile de la Cour de jus-
tice du canton de Genève.

Lausanne, le 12 décembre 2000
JOR/frs
Au nom de la IIe Cour civile
du TRIBUNAL FÉDÉRAL SUISSE,
Le Président, La Greffière,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 5P.328/2000
Date de la décision : 12/12/2000
2e cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-12-12;5p.328.2000 ?
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