La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/12/2000 | SUISSE | N°5C.195/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 12 décembre 2000, 5C.195/2000


«/2»
5C.195/2000

IIe C O U R C I V I L E
**************************

12 décembre 2000

Composition de la Cour: MM. les Juges Reeb, président, Bian-
chi et Gardaz, juge suppléant. Greffier: M. Fellay.

Dans la cause civile pendante

entre

X.________, demandeur et recourant, représenté par Me
Nicolas
Jeandin, avocat à Genève,

et

Y.________, défenderesse et intimée, représentée par Me
Catherine Gavin, avocate à Genève;

(modification de jugement de divorce)



Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- X.________, né le 8 février 1933, et
Y.________...

«/2»
5C.195/2000

IIe C O U R C I V I L E
**************************

12 décembre 2000

Composition de la Cour: MM. les Juges Reeb, président, Bian-
chi et Gardaz, juge suppléant. Greffier: M. Fellay.

Dans la cause civile pendante

entre

X.________, demandeur et recourant, représenté par Me
Nicolas
Jeandin, avocat à Genève,

et

Y.________, défenderesse et intimée, représentée par Me
Catherine Gavin, avocate à Genève;

(modification de jugement de divorce)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- X.________, né le 8 février 1933, et
Y.________, née le 20 octobre 1935, mariés depuis le 8 juin
1957, ont divorcé le 10 décembre 1984. Le jugement de
divorce
a entériné l'engagement du mari de verser à son épouse, sur
la base des art. 151 et 152 CC, les sommes suivantes, in-
dexées selon le système d'indexation des banques privées
genevoises:

- 1'075 fr. par mois jusqu'à la fin des études des
enfants, puis
- 2'075 fr. par mois après la fin des études des
enfants,
- 3'600 fr. le 30 juin de chaque année,
- 3'600 fr. le 31 décembre de chaque année,
- 10'000 fr. chaque année entre le 31 janvier et le
15 février.

B.- Le 12 février 1999, le mari a ouvert action en
modification du jugement de divorce afin de faire supprimer
la contribution due à son ex-épouse, vu la notable
diminution
de ses revenus depuis sa retraite. Par jugement du 27
janvier
2000, le Tribunal de première instance de Genève a rejeté
l'action.

En appel, la Chambre civile de la Cour de justice
genevoise a condamné le demandeur, par arrêt du 23 juin
2000,
à payer à son ex-épouse 2'800 fr. par mois dès le 12 février
1999, montant indexé dans la mesure où ses revenus
l'étaient,
et a confirmé le jugement de divorce du 10 décembre 1984
pour
le surplus. Elle a considéré que le revenu mensuel net du de-
mandeur avait passé de 13'085 fr. en 1984 à 10'184 fr. en
1999, ce qui justifiait de réduire sa contribution mensuelle
- alors de 3'508 fr. - à 2'800 fr.

C.- Par acte du 28 août 2000, le demandeur a inter-
jeté un recours en réforme au Tribunal fédéral tendant à ce
qu'il lui soit donné acte de son engagement de verser 1'000
fr. par mois à l'intimée, seul le quart de ladite somme de-
vant être indexé en fonction de l'adaptation définie par le
Conseil fédéral en application de l'ordonnance sur les
rentes
AVS/AI.

L'intimée n'a pas été invitée à répondre.

D.- Par arrêt de ce jour, la IIe Cour civile du
Tribunal fédéral a rejeté, dans la mesure de sa
recevabilité,
le recours de droit public connexe formé par le demandeur
contre le même arrêt cantonal.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- Selon l'art. 7a al. 3 Tit. fin. CC, la modifi-
cation du jugement de divorce rendu selon le droit antérieur
à la novelle du 26 juin 1998 est régie par ce droit, sous ré-
serve des dispositions relatives aux enfants et à la procédu-
re. La présente cause est dès lors régie par l'ancien droit.

2.- L'action fondée sur l'art. 153 al. 2 aCC est
une contestation civile de nature pécuniaire (cf. ATF 95 II
68 consid. 2d p. 75 et arrêt cité; Poudret, Commentaire de
la
loi fédérale d'organisation judiciaire, vol. II, n. 1.2 ad
art. 46; Messmer/Imboden, Die eidgenössischen Rechtsmittel
in
Zivilsachen, n. 58, p. 80, note 5). En l'occurrence, les
droits contestés dans la dernière instance cantonale attei-
gnaient 8'000 fr. Interjeté en temps utile contre une déci-
sion finale rendue par le tribunal suprême du canton, le re-
cours est donc recevable au regard des art. 46, 48 al. 1 et
54 al. 1 OJ.

3.- Selon l'art. 63 al. 2 OJ, le Tribunal fédéral
fonde son arrêt sur les faits tels qu'ils ont été constatés
par la dernière autorité cantonale, sous réserve de deux ex-
ceptions: la violation de dispositions fédérales en matière
de preuve, dans la mesure où elle est soulevée conformément
à
l'art. 55 al. 1 let. c OJ, et la rectification d'office des
faits reposant sur une inadvertance manifeste, autant que
celle-ci est alléguée dans les formes prescrites par l'art.
55 al. 1 let. d OJ. L'art. 64 OJ réserve en outre le complè-
tement des constatations de fait lacunaires. Pour le reste,
il ne peut être présenté de griefs ni contre les constata-
tions de fait (art. 55 al. 1 let. c OJ), ni contre l'appré-
ciation des preuves à laquelle s'est livrée l'autorité can-
tonale (ATF 122 III 26 consid. 4a/aa p. 32; 120 II 97
consid.
2b p. 99; 119 II 84); les faits et preuves nouveaux sont ir-
recevables (art. 55 al. 1 let. c OJ).

Les faits qui ne ressortent pas de l'arrêt entrepris
et que le recourant invoque sans pouvoir se prévaloir de
l'une ou l'autre des exceptions susmentionnées sont donc ir-
recevables. Ainsi en va-t-il de son salaire pour la période
postérieure au 1er février 1992, de la prétendue
renonciation
de l'intimée aux contributions autres que celle de 2'075 fr.
par mois ou de la date de son remariage.

4.- Le recourant se plaint d'une violation de
l'art. 153 al. 2 aCC et de la jurisprudence relative à cette
disposition.

Préalablement, il convient de déterminer la nature
de la rente allouée par le jugement de divorce "sur la base
des articles 151 et 152 CCS", car si le principe d'une modi-
fication (diminution ou suppression) d'une rente
indemnitaire
(art. 151 aCC) ou d'une pension alimentaire (art. 152 aCC)
est régi par les mêmes critères (ATF 118 II 229 consid. 2 p.

230 ss; 117 II 211), sa quotité obéit à des règles différen-
tes, dès lors que la pension d'assistance ne tend en
principe
qu'à éviter le dénuement du bénéficiaire (ATF 118 II 229 con-
sid. 2 p. 231; 96 II 301 consid. 5 p. 304). Si cette nature
n'a pas été spécifiée lors du divorce, il incombe au juge
saisi d'une action en modification fondée sur l'art. 153 al.
2 aCC de la déterminer préjudiciellement, en tenant compte
des circonstances existant au moment du divorce (ATF 104 II
237 consid. 5 p. 243; Bühler/Spühler, Berner Kommentar, n.
15
et 16 ad art. 153 aCC).

En l'espèce, le jugement de divorce ne donne guère
d'indications de nature à qualifier la contribution due à
l'intimée. Si celle-ci a exposé, en comparution personnelle,
que l'union n'était plus heureuse en raison du fait qu'elle
avait été délaissée par son mari qui avait eu une liaison,
le
divorce n'en a pas moins été prononcé en application de
l'art. 142 aCC et le tribunal a expressément renoncé à re-
chercher lequel des deux époux devait supporter la responsa-
bilité prépondérante de la rupture du lien conjugal. Le
terme
utilisé pour désigner la contribution ("sommes") n'est par
ailleurs d'aucun secours.

Il n'est cependant pas inutile de rappeler que la
rente indemnitaire de l'art. 151 aCC est allouée surtout
pour
compenser la perte du droit à l'entretien de l'épouse (Des-
chenaux/Tercier/Werro, Le mariage et le divorce, 4e éd., p.
140 n. 695) et que la pension d'assistance de l'art. 152 aCC
tend, comme on l'a déjà relevé, à éviter que l'épouse tombe
dans le dénuement, c'est-à-dire se trouve dans l'incapacité
de subvenir seule à son entretien et celui des personnes à
sa
charge, dans la mesure du minimum vital, par son travail, sa
fortune ou d'autres revenus, y compris ceux qui résultent de
la liquidation du régime matrimonial et de l'indemnisation
due en vertu de l'art. 151 aCC (idem, p. 152 n. 760). La pen-
sion d'assistance de l'art. 152 aCC revêt donc un caractère
subsidiaire et elle est par conséquent exclue lorsque le dé-
nuement n'existe plus à la suite de l'allocation d'une indem-
nité sur la base de l'art. 151 aCC (ATF 117 II 359 consid. 3
p. 362; 108 II 81 consid. 3 p. 82-83; 90 II 69 consid. 5 p.
75). On peut déduire des circonstances relevées dans le juge-
ment de divorce, notamment du fait que les époux ont trouvé
un terrain d'entente et pris des conclusions concordantes
sur
les effets accessoires de leur divorce, que les sommes al-
louées pour la perte d'entretien de l'épouse l'ont été d'une
manière suffisante et, partant, au titre de rente indemnitai-
re selon l'art. 151 aCC.

5.- L'action prévue par l'art. 153 al. 2 aCC permet
d'adapter le premier jugement aux circonstances nouvelles
(ATF 117 II 368 consid. 4b p. 369). La modification doit
être
sensible et durable et ne devait pas pouvoir être prévue au
moment du divorce (ATF 117 II 211 consid. 5a p. 217; 117 II
359 consid. 6 p. 367). La rente de l'art. 151 aCC étant une
"équitable indemnité", sa fixation relève du pouvoir d'appré-
ciation du juge, qui se prononce en tenant compte de toutes
les circonstances importantes, selon les règles du droit et
de l'équité (art. 4 CC). Le Tribunal fédéral se montre réser-
vé en la matière: il n'intervient que si l'autorité
cantonale
s'est fondée sur des éléments qui ne sont pas pertinents, ou
a omis de tenir compte de facteurs essentiels, ou bien
encore
si le montant arrêté paraît manifestement inéquitable dans
le
cas particulier (ATF 107 II 406 consid. 2c p. 410).

a) On peut se demander si les conditions pour admet-
tre une modification (diminution) de la rente étaient réali-
sées dans le cas particulier, dès lors que les circonstances
nouvelles invoquées (retraite du débirentier avec changement
de la situation économique des parties) étaient vraisembla-
blement prévisibles au moment du divorce. L'intimée n'ayant
pas contesté ce point en recourant elle-même en réforme, la
question n'a pas à être tranchée.

b) Le recourant s'est engagé à payer des rentes
d'un
montant total de 3'508 fr. par mois en fonction d'un revenu
mensuel net de 13'085 fr. Son revenu mensuel actuel est de
9'184 fr., montant auquel s'ajoute le revenu de sa fortune.
Dans ces circonstances, la réduction de la rente de 3'500
fr.
à 2'800 fr. s'avère correcte. Elle se fonde sur des éléments
pertinents, tient compte des facteurs essentiels et ne sau-
rait être qualifiée de manifestement inéquitable. On relève
au surplus que la situation de l'intimée n'est pas telle
qu'elle justifierait une réduction plus importante.
L'intimée
subit en effet un déficit de prévoyance professionnelle qui
doit être compensé par le maintien d'une rente importante
après l'âge de la retraite.

Il résulte de ce qui précède que le recours doit
être rejeté dans la mesure de sa recevabilité.

6.- Le recourant, qui succombe, doit supporter les
frais de la procédure (art. 156 al. 1 OJ). Il n'y a pas lieu
d'allouer de dépens à l'intimée, qui n'a pas été invitée à
procéder.

Par ces motifs,

le T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Rejette le recours dans la mesure où il est rece-
vable et confirme l'arrêt entrepris.

2. Met à la charge du recourant un émolument judi-
ciaire de 2'000 fr.

3. Communique le présent arrêt en copie aux manda-
taires des parties et à la Chambre civile de la Cour de jus-
tice du canton de Genève.

__________

Lausanne, le 12 décembre 2000
FYC/frs

Au nom de la IIe Cour civile
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE :
Le Président,

Le Greffier,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 5C.195/2000
Date de la décision : 12/12/2000
2e cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-12-12;5c.195.2000 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award