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11/12/2000 | SUISSE | N°2A.333/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 11 décembre 2000, 2A.333/2000


«/2»
2A.333/2000

IIe C O U R D E D R O I T P U B L I C
***********************************************

11 décembre 2000

Composition de la Cour: MM. les Juges Wurzburger, président,
Hartmann et Berthoud, suppléant. Greffière: Mme Dupraz.

Statuant sur le recours de droit administratif
formé par

A.________, née le 17 janvier 1962, représentée par Me Béné-
dict Fontanet, avocat à Genève,

contre

la décision prise le 29 février 2000 par la Commission can-
tonale de recou

rs de police des étrangers du canton de Genè-
ve, dans la cause qui oppose la recourante à l'Office canto-
nal de la po...

«/2»
2A.333/2000

IIe C O U R D E D R O I T P U B L I C
***********************************************

11 décembre 2000

Composition de la Cour: MM. les Juges Wurzburger, président,
Hartmann et Berthoud, suppléant. Greffière: Mme Dupraz.

Statuant sur le recours de droit administratif
formé par

A.________, née le 17 janvier 1962, représentée par Me Béné-
dict Fontanet, avocat à Genève,

contre

la décision prise le 29 février 2000 par la Commission can-
tonale de recours de police des étrangers du canton de Genè-
ve, dans la cause qui oppose la recourante à l'Office canto-
nal de la population du canton de G e n è v e;

(art. 17 al. 2 LSEE: autorisation d'établissement/de séjour)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- Ressortissante marocaine née le 17 janvier 1962,
A.________ est arrivée en Suisse le 26 août 1992 et y a
épousé, le 11 novembre 1992, B.________, ressortissant ma-
rocain né le 31 mai 1970, qui bénéficiait d'une autorisation
d'établissement en Suisse. L'intéressée s'est alors vu oc-
troyer une autorisation de séjour à l'année qui a été régu-
lièrement prolongée, la dernière fois jusqu'au 10 novembre
1997.

Le 30 octobre 1998, l'Office cantonal de la population
du canton de Genève (ci-après: l'Office cantonal) a refusé
de renouveler l'autorisation de séjour de A.________ et im-
parti à l'intéressée un délai échéant le 15 janvier 1999
pour quitter le territoire genevois. Il a estimé qu'il exis-
tait des indices suffisants pour considérer que les époux
B.________ avaient conclu un mariage de complaisance dans le
seul but de procurer à A.________ une autorisation de séjour
et de travail en Suisse.

B.- A.________ a alors porté sa cause devant la Commis-
sion cantonale de recours de police des étrangers du canton
de Genève (ci-après: la Commission cantonale de recours).

Durant cette procédure, le Tribunal de première ins-
tance du canton de Genève a prononcé le divorce des époux
B.________ par jugement du 4 janvier 1999, exécutoire depuis
le 12 février 1999.

Le 29 février 2000, la Commission cantonale de recours
a rejeté le recours de A.________ contre la décision de
l'Office cantonal du 30 octobre 1998 et confirmé ladite dé-
cision. Elle a retenu en particulier que l'intention des

époux B.________ au moment du mariage visait à éluder les
prescriptions en matière de police des étrangers.

C.- Agissant par la voie du recours de droit adminis-
tratif, A.________ demande au Tribunal fédéral, sous suite
de frais et dépens, d'annuler la décision de la Commission
cantonale de recours du 29 février 2000 et de constater que
le canton de Genève doit lui délivrer principalement une au-
torisation d'établissement et subsidiairement une autorisa-
tion de séjour; plus subsidiairement, elle demande de pou-
voir prouver par toute voie de droit la véracité des faits
qu'elle allègue. Elle reproche en substance à l'autorité in-
timée d'être tombée dans l'arbitraire et d'avoir commis un
abus, voire un excès, de son pouvoir d'appréciation. Elle se
plaint aussi de violation du droit d'être entendu.

La Commission cantonale de recours a expressément re-
noncé à formuler des observations sur le recours. L'Office
cantonal conclut au rejet du recours dans la mesure où il
est recevable. L'Office fédéral des étrangers propose de dé-
clarer le recours irrecevable.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- La recourante demande subsidiairement de pouvoir
prouver "la véracité des faits allégués" dans son mémoire.
Elle ne précise cependant pas quels faits elle aimerait
prouver. Comme il n'y a aucun motif d'ordonner une procédure
probatoire pour élucider les faits, au sens de l'art. 95 al.
1 OJ (applicable par renvoi de l'art. 113 OJ), il n'y a pas
lieu de donner suite à la requête de l'intéressée.

2.- a) Selon l'art. 100 al. 1 lettre b ch. 3 OJ, le re-
cours de droit administratif n'est pas recevable en matière
de police des étrangers contre l'octroi ou le refus d'auto-
risations auxquelles le droit fédéral ne confère pas un
droit. D'après l'art. 4 de la loi fédérale du 26 mars 1931
sur le séjour et l'établissement des étrangers (LSEE; RS
142.20), les autorités compétentes statuent librement, dans
le cadre des prescriptions légales et des traités avec
l'étranger, sur l'octroi ou le refus d'autorisations de sé-
jour ou d'établissement. En principe, l'étranger n'a pas de
droit à l'octroi d'une autorisation de séjour. Ainsi, le re-
cours de droit administratif est irrecevable, à moins que ne
puisse être invoquée une disposition particulière du droit
fédéral ou d'un traité, accordant le droit à la délivrance
d'une telle autorisation (ATF 126 I 81 consid. 1a p. 83).

b) L'art. 17 al. 2 LSEE dispose que le conjoint d'un
étranger possédant l'autorisation d'établissement a droit à
l'autorisation de séjour aussi longtemps que les époux vi-
vent ensemble (1ère phrase). Après un séjour régulier et
ininterrompu de cinq ans, le conjoint a lui aussi droit à
l'autorisation d'établissement (art. 17 al. 2 2ème phrase
LSEE). Ces droits s'éteignent si l'ayant droit a enfreint
l'ordre public (art. 17 al. 2 4ème phrase LSEE). Le droit
à l'autorisation prévu à l'art. 17 al. 2 LSEE, à l'instar
du droit à l'autorisation fondé sur l'art. 7 al. 1 LSEE,
n'existe pas lorsque le mariage a été conclu en vue d'éluder
les dispositions sur le séjour et l'établissement des étran-
gers (application de la règle générale de l'art. 7 al. 2
LSEE; ATF 121 II 5 consid. 3a p. 7).

c) aa) L'art. 17 al. 2 1ère phrase LSEE ne confère un
droit à une autorisation de séjour qu'aussi longtemps qu'il
existe une communauté conjugale juridique et effectivement
vécue, à la différence de l'art. 7 al. 1 LSEE qui n'exige
que l'existence formelle du mariage pour que le conjoint

étranger d'un ressortissant suisse puisse en principe pré-
tendre à une autorisation de séjour (arrêt non publié du 20
août 1999 en la cause Llanos Vargas, consid. 2a).

Il n'est pas contesté que la recourante a épousé, le
11 novembre 1992, un étranger titulaire d'une autorisation
d'établissement en Suisse. L'intéressée a elle-même admis
entre le 12 et le 19 décembre 1997 - les pièces du dossier
laissent planer un doute sur la date de cette déclaration -,
que son mari n'habitait plus au domicile conjugal depuis
plusieurs semaines. En outre, le divorce des époux
B.________ a été prononcé par le jugement précité du 4 jan-
vier 1999, exécutoire depuis le 12 février 1999. Dès lors,
la recourante ne peut pas se prévaloir d'une communauté con-
jugale juridique et effectivement vécue ni, par conséquent,
déduire de l'art. 17 al. 2 1ère phrase LSEE un droit à l'oc-
troi d'une autorisation de séjour. Son recours n'est donc
pas recevable sous cet angle.

bb) L'art. 17 al. 2 2ème phrase LSEE n'institue un
droit à l'autorisation d'établissement que pour autant que
les époux aient fait ménage commun pendant au moins cinq ans
(arrêts non publiés du 30 août 1999 en la cause Carneiro
Garcia, consid. 1a/aa, et du 1er avril 1998 en la cause Lou-
kili, consid. 2b).

Le 16 septembre 1993, les époux B.________ ont été in-
terrogés séparément; ils ont tous les deux déclaré qu'ils ne
vivaient pas ensemble et étaient à la recherche d'un appar-
tement. Selon le mari de la recourante, cette situation
n'avait pas changé le 13 janvier 1994. D'après les pièces
du dossier, c'est seulement à partir du 1er février 1994 que
les époux B.________ ont pu bénéficier d'un appartement à la
rue C.________ (commune de Genève) et ils l'ont quitté le 31
mai 1996 pour emménager à la rue D.________ (commune de Ge-
nève). Le 29 février 2000, devant la Commission cantonale de

recours, l'intéressée a soutenu qu'elle avait vécu avec son
mari "tant à la rue C.________ qu'à la rue D.________". Il
ressort de ce qui précède que les époux B.________ n'ont pas
vécu ensemble du 16 septembre 1993 au 1er février 1994 en
tout cas. Même s'ils ne se sont séparés qu'au mois de décem-
bre 1997, ils n'ont donc pas fait ménage commun pendant cinq
ans durant leur mariage. Ainsi, la recourante ne peut pas
invoquer un droit à une autorisation d'établissement sur la
base de l'art. 17 al. 2 2ème phrase LSEE. Son recours n'est
donc pas non plus recevable à cet égard.

d) Vu ce qui précède, le recours est irrecevable en
tant que recours de droit administratif.

3.- Il convient alors d'examiner si le recours est re-
cevable comme recours de droit public.

a) Aux termes de l'art. 88 OJ, ont qualité pour former
un recours de droit public les particuliers ou les collecti-
vités lésés par des arrêtés ou décisions qui les concernent
personnellement ou qui sont d'une portée générale; cette
voie de recours ne leur est ouverte que pour qu'ils puissent
faire valoir leurs intérêts juridiquement protégés.

Comme on l'a vu ci-dessus (consid. 2), la recourante ne
peut invoquer aucun droit à l'octroi d'une autorisation de
séjour ou d'établissement. Par conséquent, elle n'a pas qua-
lité pour recourir à cet égard, faute d'intérêt juridique-
ment protégé au sens de l'art. 88 OJ (cf. ATF 122 I 267 con-
sid. 1a p. 270).

b) Même s'il n'a pas qualité pour agir au fond, un re-
courant peut se plaindre de la violation d'une garantie de
procédure qui équivaut à un déni de justice formel. Dans un
tel cas, l'intérêt juridiquement protégé exigé par l'art. 88
OJ découle non pas du droit de fond, mais du droit de parti-

ciper à la procédure. Un tel droit existe lorsque le recou-
rant avait qualité de partie en procédure cantonale. Si tel
est le cas, il peut se plaindre de la violation des droits
de partie que lui reconnaît la procédure cantonale ou qui
découlent directement de dispositions constitutionnelles
(ATF 122 I 267 consid. 1b p. 270; 121 I 218 consid. 4a
p. 223). Celui qui n'a pas qualité pour recourir au fond
mais qui avait qualité de partie en procédure cantonale peut
se plaindre par exemple de ce qu'un recours cantonal a été
déclaré à tort irrecevable, ou que lui-même n'a pas été en-
tendu, ou qu'on ne lui a pas donné l'occasion de présenter
des moyens de preuve ou qu'il n'a pas pu prendre connaissan-
ce du dossier. En revanche, il ne saurait se plaindre d'une
appréciation prétendument arbitraire des preuves, ni du fait
que des moyens de preuve ont été écartés pour défaut de per-
tinence ou par appréciation anticipée. L'examen de ces ques-
tions ne peut en effet pas être séparé de l'examen du fond
lui-même; or, celui qui n'a pas qualité pour recourir au
fond ne peut pas exiger un tel examen (ATF 120 Ia 227 con-
sid. 1 p. 229/230 et la jurisprudence citée).

La recourante se plaint apparemment que la Commission
cantonale de recours ait violé son droit d'être entendue en
ne procédant pas à l'audition de trois témoins, qu'elle a
écartée par une appréciation anticipée des preuves. L'inté-
ressée semble aussi reprocher à l'autorité intimée d'être
tombée dans l'arbitraire en appréciant les preuves. Il
s'agit de griefs dont l'examen ne peut pas être séparé de
celui du fond. Dès lors, ces moyens ne sont pas recevables.

c) Le recours est donc irrecevable en tant que recours
de droit public.

4.- Vu ce qui précède, le recours est irrecevable.

Succombant, la recourante doit supporter les frais ju-
diciaires (art. 156 al. 1, 153 et 153a OJ) et n'a pas droit
à des dépens (art. 159 al. 1 OJ).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Déclare le recours irrecevable.

2. Met à la charge de la recourante un émolument judi-
ciaire de 2'000 fr.

3. Communique le présent arrêt en copie au mandataire
de la recourante, à l'Office cantonal de la population et à
la Commission cantonale de recours de police des étrangers
du canton de Genève, ainsi qu'à l'Office fédéral des étran-
gers.

_______________

Lausanne, le 11 décembre 2000
DAC/mnv

Au nom de la IIe Cour de droit public
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président,

La Greffière,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2A.333/2000
Date de la décision : 11/12/2000
2e cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-12-11;2a.333.2000 ?
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