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04/12/2000 | SUISSE | N°5C.169/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 04 décembre 2000, 5C.169/2000


«/2»
5C.169/2000

IIe C O U R C I V I L E
******************************

4 décembre 2000

Composition de la Cour: M. Reeb, président, M. Raselli,
Mme Nordmann, M. Merkli et M. Meyer, juges.
Greffière: Mme Mairot
__________

Statuant sur le recours en nullité
formé par

M.________, représenté par Me Raphaël Treuillaud, avocat à
Genève,

contre

l'arrêt rendu le 15 juin 2000 par la Ière section de la Cour
de justice du canton de Genève dans la cause qui oppose le

recourant à dame S.________, représentée par Me Jacques
Python, avocat à Genève, et à C.________ Management Company
SA, repré...

«/2»
5C.169/2000

IIe C O U R C I V I L E
******************************

4 décembre 2000

Composition de la Cour: M. Reeb, président, M. Raselli,
Mme Nordmann, M. Merkli et M. Meyer, juges.
Greffière: Mme Mairot
__________

Statuant sur le recours en nullité
formé par

M.________, représenté par Me Raphaël Treuillaud, avocat à
Genève,

contre

l'arrêt rendu le 15 juin 2000 par la Ière section de la Cour
de justice du canton de Genève dans la cause qui oppose le
recourant à dame S.________, représentée par Me Jacques
Python, avocat à Genève, et à C.________ Management Company
SA, représentée par Me François Dugast, avocat à Genève;

(art. 68 ss OJ; reddition de comptes)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- X.________, de nationalité égyptienne et dom-
icilié en Egypte, est décédé au Caire le 5 février 1998 en
laissant comme héritiers sa seconde épouse, S.________,
ainsi
que son fils né d'un premier mariage, M.________.

Par décision du 17 janvier 2000, le Tribunal de pre-
mière instance de Genève a fait droit à la requête en reddi-
tion de comptes déposée le 29 octobre 1999 par dame
S.________ au sujet des biens sis en Suisse de feu son mari.
Cette décision ordonnait à C.________ Management Company SA
(ci-après: C.________), à Genève, sous menace des peines pré-
vues par l'art. 292 CP, de donner à la requérante, dans un
délai de trois semaines, toutes informations relatives aux
avoirs détenus par le défunt ou en son nom, ou encore dont
il
était l'ayant droit économique, tels que trusts, fondations
de famille, sociétés suisses ou "offshore" ou comptes fidu-
ciaires, et de lui fournir la totalité des instructions écri-
tes données par celui-ci dans les dix ans précédant son
décès
ou par M.________ concernant les comptes auprès de l'Union
de
Banques Suisses et du Crédit suisse.

B.- Le 15 février 2000, M.________ a formé tierce-
opposition à l'ordonnance du Tribunal de première instance,
ordonnance qui a été confirmée par la Cour de justice du
canton de Genève le 15 juin suivant.

C.- M.________ exerce un recours en nullité au Tri-
bunal fédéral contre l'arrêt du 15 juin 2000 pour le motif
que l'autorité cantonale aurait appliqué à tort le droit
fédéral au lieu du droit étranger déterminant. Il requiert
l'annulation de la décision entreprise et le renvoi de la

cause à la cour cantonale pour qu'elle déboute la requérante
des fins de sa requête ainsi que de toutes autres,
contraires
ou plus amples conclusions.

La requérante propose l'irrecevabilité du recours,
subsidiairement son rejet.

C.________ s'en remet à justice, tant en ce qui con-
cerne la recevabilité que le bien-fondé du recours.

D.- Par ordonnance du 31 août 2000, le président de
la cour de céans a admis la requête d'effet suspensif du re-
courant et rejeté la demande de sûretés de la requérante.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- a) Le recours en nullité est recevable - pour
les motifs énumérés à l'art. 68 al. 1 OJ - contre les juge-
ments de la dernière juridiction cantonale, à la condition
qu'ils ne puissent pas faire l'objet d'un recours en réforme.

L'arrêt entrepris concerne une demande de reddition
de comptes prise en application de l'art. 400 al. 1 CO et de
l'art. 324 al. 2 de la loi de procédure civile du canton de
Genève (LPC/GE). Selon la jurisprudence récente, il s'agit
d'une décision finale au sens de l'art. 48 OJ, ce qui ouvre
la voie du recours en réforme (ATF 126 III 445 consid. 3b p.
446 ss). Le recours en nullité est par conséquent irreceva-
ble. Il peut toutefois être traité comme un recours en réfor-
me, dont il remplit les conditions (consid. 1 non publié de
l'arrêt paru aux ATF 120 II 112; ATF 110 II 54 consid. 1a p.
56; 99 II 277 consid. 1 p. 279; 97 II 180 consid. 1 p. 181
s.; 93 II 354 consid. 1 p. 356; J.-F. Poudret/S. Sandoz-
Monod, Commentaire de la loi fédérale d'organisation judi-

ciaire, n. 2.4 ad art. 43 et n. 2.1 ad chap. III). Interjeté
en temps utile contre une décision finale prise par l'autori-
té suprême du canton, dans une contestation civile de nature
pécuniaire (cf. ATF 126 III 445 consid. 3b p. 446) dont la
valeur apparaît manifestement supérieure à 8'000 fr., le re-
cours est en effet recevable au regard des art. 46, 48 al. 1
et 54 al. 1 OJ. De plus, l'absence de conclusions en modifi-
cation de l'arrêt entrepris ne nuit pas (art. 55 al. 1 let.
b
OJ). Interprétées au regard de la motivation du recours et
de
la décision entreprise (Poudret/Sandoz-Monod, op. cit., n. 1.
4.1.3 ad art. 55), elles permettent en effet d'admettre que
le recourant entend faire annuler la mesure de reddition de
comptes litigieuse.

b) La jurisprudence pose comme condition subjective
de recevabilité l'existence d'un intérêt au recours: le re-
courant doit avoir été lésé par la décision attaquée, c'est-
à-dire atteint dans ses droits et non seulement dans ses in-
térêts de fait (ATF 120 II 5 consid. 2a p. 7/8 et les arrêts
cités). Dans sa réponse au recours, la requérante soutient
que tel n'est pas le cas en l'espèce, le recourant n'ayant
aucun intérêt juridique au recours, ni même qualité pour
agir. Ces questions souffrent de demeurer indécises, le re-
cours étant de toute façon mal fondé.

3.- a) Le recourant reproche à l'autorité cantonale
d'avoir examiné uniquement en fonction du droit suisse dans
quelle mesure l'héritier a le droit d'être renseigné. Il sou-
tient que selon le droit égyptien, applicable à la succes-
sion, le conjoint survivant ne bénéficie d'aucune réserve,
et
ne peut remettre en cause les actes de disposition accomplis
par le défunt de son vivant; ses droits ne portent dès lors
que sur les biens existants au jour du décès. La requérante
n'aurait de plus aucune prétention résultant du régime matri-
monial.

b) Le recours en réforme constitue la voie appro-
priée pour faire valoir que la décision attaquée n'a pas ap-
pliqué le droit étranger désigné par le droit international
privé suisse (art. 43a al. 1 let. a OJ). Tel n'est cependant
pas le cas en l'espèce. La vocation successorale de la requé-
rante, qui détermine sa qualité pour agir (cf. ATF 119 II 77
consid. 3c p. 82 et les références), se définit certes au re-
gard du droit égyptien, en l'occurrence applicable à la suc-
cession (art. 92 al. 1 LDIP). L'autorité cantonale a toute-
fois constaté que sa qualité d'héritière n'était pas contes-
tée. On ne saurait dès lors lui reprocher d'avoir appliqué à
tort le droit suisse sur ce point. En effet, cette qualité,
examinée en première instance au regard du droit égyptien,
n'a pas été critiquée par le recourant, qui ne le prétend du
reste pas. Celui-ci soutient seulement que la requérante n'a
pas qualité d'héritière réservataire et qu'elle ne peut re-
mettre en cause les actes de disposition accomplis du vivant
du de cujus: or il s'agit là de questions d'application du
droit étranger qui ne peuvent pas être soulevées dans un re-
cours en réforme, s'agissant d'une contestation civile de na-
ture pécuniaire (43a al. 2 OJ a contrario).

Il en va de même lorqu'il prétend que la requérante
n'aurait aucun droit aux renseignements sollicités, le droit
égyptien ne lui accordant pas les mêmes droits successoraux
que le droit suisse: ce faisant, il fait valoir en réalité
que le droit de la requérante à la reddition de comptes
n'est
pas "évident ou reconnu", comme le prévoit l'art. 324 al. 2
let. b LPC/GE; il critique ainsi, de manière irrecevable
dans
le recours en réforme, l'application du droit cantonal de
procédure. Est également irrecevable l'allégation du recou-
rant selon laquelle la demande en reddition de comptes liti-
gieuse vise principalement à connaître les donations que le
défunt pourrait avoir faites de son vivant, ce fait ne res-
sortant pas de l'arrêt entrepris (art. 63 al. 2 OJ).

Le grief se révèle dès lors mal fondé, en tant qu'il
est recevable.

4.- En conclusion, le recours doit être rejeté dans
la mesure de sa recevabilité, aux frais de son auteur (art.
156 al. 1 OJ), qui versera en outre des dépens à l'intimée
dame S.________ (art. 159 al. 1 OJ). Il n'y a en revanche
pas
lieu d'allouer une telle indemnité à CHP, qui s'en est
remise
à justice sur le fond.

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Rejette le recours, traité comme recours en ré-
forme, dans la mesure où il est recevable, et confirme l'ar-
rêt entrepris.

2. Met à la charge du recourant:
a) un émolument judiciaire de 5'000 fr.
b) une indemnité de 5'000 fr. à payer à
l'intimée
dame S.________ à titre de dépens.

3. Communique le présent arrêt en copie aux manda-
taires des parties et à la Ière section de la Cour de
justice
du canton de Genève.
__________

Lausanne, le 4 décembre 2000
MDO/frs
Au nom de la IIe Cour civile
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE :
Le Président, La Greffière,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 5C.169/2000
Date de la décision : 04/12/2000
2e cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-12-04;5c.169.2000 ?
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