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04/12/2000 | SUISSE | N°4C.246/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 04 décembre 2000, 4C.246/2000


«/2»

4C.246/2000

Ie C O U R C I V I L E
****************************

4 décembre 2000

Composition de la Cour: MM. Walter, président, Leu et
Corboz,
juges. Greffière: Mme de Montmollin Hermann.

_______________

Dans la cause civile pendante
entre

Association X.________, défenderesse et recourante, représen-
tée par Me Gérard Brutsch, avocat à Genève,

et

P.________, demanderesse et intimée, représentée par Me
Christian Buonomo, avocat à Genève;


(contrat de travail; transfert des rapports de travail; in-
demnité en cas de maladie)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
...

«/2»

4C.246/2000

Ie C O U R C I V I L E
****************************

4 décembre 2000

Composition de la Cour: MM. Walter, président, Leu et
Corboz,
juges. Greffière: Mme de Montmollin Hermann.

_______________

Dans la cause civile pendante
entre

Association X.________, défenderesse et recourante, représen-
tée par Me Gérard Brutsch, avocat à Genève,

et

P.________, demanderesse et intimée, représentée par Me
Christian Buonomo, avocat à Genève;

(contrat de travail; transfert des rapports de travail; in-
demnité en cas de maladie)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- a) P.________ a été engagée en qualité d'em-
ployée polyvalente par la Résidence A.________,
établissement
médico-social (EMS), le 1er janvier 1997 pour un salaire
mensuel brut de 3400 fr. Par contrat expirant le 31 décembre
1998, la Résidence A.________ avait conclu avec Y.________
S.A. (ci-après: Y.________) une assurance collective contre
la maladie, qui prévoyait notamment le versement
d'indemnités
journalières pendant une durée de 120 jours.

Le 31 mars 1998, la Fédération Z.________ (ci-
après: Z.________) et les représentations syndicales concer-
nées ont signé la Convention Collective de Travail pour les
employés des établissements médico-sociaux (ci-après: la
CCT). En annexe n° 1, qui répertorie les établissements ap-
pliquant la CCT, figure la Résidence A.________, qui avait
adhéré à la Z.________ par déclaration du 28 avril 1998. Le
seul but de cette démarche était de recevoir la subvention
cantonale.

b) Par courrier du 14 octobre 1998, la Résidence
A.________ a averti l'ensemble de ses collaborateurs du tra-
nsfert de l'exploitation du home à l'Association X.________
(ci-après: X.________). Ce transfert a été effectif le 1er
novembre 1998.

c) Dès 1998, P.________ a été malade à diverses
reprises, à 50% ou à 100%. Dès le 18 décembre 1998, elle a
été malade à 100% pour une durée indéterminée. Le 30 juin
2000 (date de l'arrêt cantonal), elle était toujours en inca-
pacité de travail à 100%.

Le 29 décembre 1998, un nouveau contrat de travail
a été envoyé à P.________ qui l'a retourné dûment signé le
12
janvier 1999 pour approbation. Ce contrat attestait de son
engagement en qualité d'aide-soignante au sein de X.________
dès le 1er novembre 1998, pour un salaire mensuel brut de
3723 fr.25. Le contrat stipulait le versement d'une
indemnité
journalière en cas de maladie équivalant au 100% du salaire
durant les 12 premiers mois et de 80% du 13ème au 24ème mois
dans une période de 900 jours consécutifs (art. 9.3 let. b
et
c). Ce droit au salaire équivalait en tous points à celui
prévu à l'art. 6.1.1 ch. 3 et 4 de la CCT.

Le 1er janvier 1999 est entrée en vigueur une nou-
velle assurance indemnité journalière contractée par
X.________ auprès de W.________ Société Suisse d'Assurance
(ci-après: W.________) pour l'ensemble de son personnel. Les
indemnités journalières versées en cas de maladie correspon-
daient au 90% du gain journalier dès le 31ème jour,
abaissées
à 70% dès le 365ème jour pour une durée de 730 jours. Le con-
trat a été signé le 30 mars 1999.

d) Par courrier du 12 mars 1999, W.________ a
averti X.________ que le droit de P.________ au versement
d'indemnités journalières - soit 120 jours au maximum selon
le contrat Y.________ - avait été épuisé le 10 février 1999.
La maladie de l'employée ayant débuté en 1998 pour se pro-
longer en 1999, W.________ se trouvait dans un cas de libre
passage. Par conséquent, cette dernière a continué la
gestion
de ce dossier conformément aux conditions générales d'assu-
rance de W.________ et selon la couverture accordée par le
contrat.

Le 19 avril 1999, X.________ a écrit à P.________
qu'elle résiliait leur contrat avec effet au 31 juillet 1999
et qu'elle la dispensait de l'obligation de travailler.

B.- L'employée s'est opposée à la résiliation de
son contrat. Le 4 août 1999, elle a assigné X.________
devant
la juridiction des prud'hommes du canton de Genève. Elle a
conclu au paiement de 22 339 fr.50 à titre d'indemnité pour
résiliation abusive, 2734 fr.80 à titre d'indemnité pour va-
cances non prises et 45 425 fr.70 à titre de dommages-
intérêts supplémentaires.

Par jugement du 3 novembre 1999, le Tribunal des
prud'hommes a condamné la défenderesse au paiement de 500
fr.
net, à titre d'indemnité pour licenciement abusif, de
8848 fr.75 brut à titre d'indemnités pour perte de gain
(soit
le paiement des indemnités pour perte de gain selon la CCT
jusqu'au 3 novembre 1999, date du jugement) et de 1475 fr.75
brut, à titre d'indemnité pour vacances non prises.

Par arrêt du 30 juin 2000, la Cour d'appel de la
juridiction des prud'hommes du canton de Genève a annulé ce
jugement. Statuant à nouveau, elle a condamné l'employeuse à
payer à la travailleuse les montants de 32 881 fr.65 brut et
de 1457 fr.75 brut sous réserve des déductions sociales et
légales usuelles.

C.- X.________ recourt en réforme au Tribunal fédé-
ral. Ses conclusions tendent à l'annulation de l'arrêt de la
Cour d'appel et au rejet des prétentions de P.________.

Cette dernière conclut au rejet du recours et à la
confirmation de la décision attaquée.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- Le recours porte uniquement sur le droit à
des indemnités pour perte de gain tel qu'il a été reconnu à
la demanderesse par la cour cantonale.

La Cour d'appel a considéré que lorsque l'employé
se voit reconnaître, en cas d'incapacité de travail, un
droit
à des indemnités versées par une assurance pendant une
longue
période, sans restriction d'aucune sorte, le travailleur
peut
de bonne foi comprendre qu'il bénéficiera de cette
couverture
même si le contrat de travail prend fin avant l'épuisement
de
son droit à être indemnisé (ATF 124 III 126 consid. 2b p.
132
et les références); lorsque l'employeur omet de conclure une
assurance en faveur du travailleur alors qu'il s'y est obli-
gé, l'employeur doit réparer le préjudice subi par l'inté-
ressé et lui verser les montants que l'assurance aurait
payés
(arrêt cité; consid. 4).

La cour cantonale a retenu qu'en l'espèce la
résiliation du contrat de travail par la défenderesse, avec
effet au 31 juillet 1999, n'entamait en rien le droit de la
demanderesse d'obtenir réparation du préjudice résultant du
fait que son employeur ne l'avait pas mise au bénéfice d'une
assurance collective conforme à la CCT et au contrat de
travail. La Cour d'appel a donc alloué à la demanderesse
l'équivalent du solde des indemnités pour perte de gain qui
lui étaient contractuellement dues pour la période du 1er
juillet 1999 au 30 juin 2000, soit 32 881 fr.65 brut.

2.- La défenderesse fait valoir en substance que la
Cour d'appel a violé l'art. 333 CO, en la condamnant à
verser
des indemnités pour perte de gain que le précédent employeur
de la demanderesse n'aurait pas eues à payer. Elle rappelle
que celui-ci avait contracté une assurance collective contre

la maladie auprès de Y.________, avec une couverture impli-
quant une durée maximale de prestations de 120 jours. Elle
allègue que, à compter du 1er janvier 1999, elle a elle-même
conclu une assurance perte de gain presque équivalente aux
conditions contractuelles la liant à ses employés auprès de
W.________ qui, s'agissant d'un cas de libre passage,
n'était
pas tenue d'accorder des conditions de couverture
supérieures
à celles de Y.________. Le droit de la travailleuse à des in-
demnités journalières aurait de la sorte pris fin le 10 fé-
vrier 1999.

3.- a) On relèvera d'emblée que le recours, en mé-
connaissance totale des exigences des art. 55 al. 1 let. c
et
63 al. 2 OJ, est truffé d'affirmations de fait qui ne trou-
vent aucune assise dans l'arrêt attaqué et qui, partant,
sont
irrecevables. Il ne sera ainsi pas tenu compte des arguments
fondés sur le fait que la recourante ignorait que le droit
aux prestations de la demanderesse se révélerait limité à
120
jours, que cette dernière souffrait d'une maladie antérieure
à son engagement par la Résidence A.________ et à son entrée
dans l'assurance conclue par celle-ci avec Y.________, ou
que
cette maladie avait fait l'objet d'une réserve que seule la
salariée connaissait.

b) L'art. 333 CO prévoit que si l'employeur trans-
fère l'entreprise à un tiers, les rapports de travail
passent
à l'acquéreur avec tous les droits et obligations qui en dé-
coulent, au jour du transfert. En l'espèce, on ne se trouve
pas dans un cas où l'application de cette disposition pose
problème. En effet, après le transfert de X.________ par la
Résidence A.________ à la défenderesse, devenu effectif le
1er novembre 1998, cette dernière a conclu à fin décembre
1998 un nouveau contrat de travail avec la demanderesse. Ce
second contrat remplaçait le précédent. A propos de l'assu-
rance perte de gain en cas de maladie, semblable en tous
points aux dispositions de la CCT applicable aux parties, il

prévoyait le versement d'une indemnité journalière en cas de
maladie équivalant au 100% du salaire durant les 12 premiers
mois et de 80% du 13ème au 24ème mois. En allouant à la de-
manderesse les montants dus en application de ces disposi-
tions contractuelles, la cour cantonale a correctement ap-
pliqué le droit fédéral.

Le recours se révèle mal fondé. On peut le rejeter
en se contentant de renvoyer aux motifs de l'arrêt attaqué
(art. 36a al. 3 OJ): la défenderesse a omis de conclure au
bénéfice du travailleur une assurance correspondant aux dis-
positions contractuelles et aux engagements qu'elle a pris.
Dans ces conditions, elle doit réparer le préjudice subi par
l'intéressé et lui verser les montants que l'assurance
aurait
payés (ATF 124 III 126 consid. 4 p. 133). Même si, comme en
l'occurrence, le contrat a pris fin avant l'épuisement du
droit du travailleur à une indemnité, ce dernier peut préten-
dre être pleinement indemnisé (même arrêt, consid. 3b).
C'est
par conséquent à juste titre que la cour cantonale a alloué
à la demanderesse la pleine indemnité qui lui avait été pro-
mise contractuellement en conformité aux dispositions de la
CCT.

4.- Vu le sort du litige, la recourante supportera
les frais de justice et versera une indemnité de dépens à
l'intimée (art. 156 al. 1, 159 al. 1 OJ, 343 al. 2 et 3 CO).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l ,

vu l'art. 36a OJ:

1. Rejette le recours dans la mesure où il est re-
cevable et confirme l'arrêt attaqué;

2. Met un émolument judiciaire de 2000 fr. à la
charge de la recourante;

3. Dit que la recourante versera à l'intimée une
indemnité de 3000 fr. à titre de dépens;

4. Communique le présent arrêt en copie aux manda-
taires des parties et à la Chambre d'appel de la juridiction
des prud'hommes du canton de Genève (Cause n°
C/19579/1999-5).

____________

Lausanne, le 4 décembre 2000
ECH

Au nom de la Ie Cour civile
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le président,

La greffière,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4C.246/2000
Date de la décision : 04/12/2000
1re cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-12-04;4c.246.2000 ?
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