La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/11/2000 | SUISSE | N°2A.379/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 14 novembre 2000, 2A.379/2000


«/2»
2A.379/2000

IIe C O U R D E D R O I T P U B L I C
***********************************************

14 novembre 2000

Composition de la Cour: MM. et Mme les Juges Hartmann, juge
présidant, Betschart et Yersin. Greffier: M. Langone.

Statuant sur le recours de droit administratif
formé par

Y.________, né le 6 décembre 1947, et son fils T.________,
né le 10 juillet 1983, tous deux représentés par Me Jean-
Pierre Moser, avocat à Lausanne,

contre

l'arrêt rendu le 29 juin 2

000 par le Tribunal administratif
du canton de Vaud, dans la cause qui oppose les recourants
au Service de la popu...

«/2»
2A.379/2000

IIe C O U R D E D R O I T P U B L I C
***********************************************

14 novembre 2000

Composition de la Cour: MM. et Mme les Juges Hartmann, juge
présidant, Betschart et Yersin. Greffier: M. Langone.

Statuant sur le recours de droit administratif
formé par

Y.________, né le 6 décembre 1947, et son fils T.________,
né le 10 juillet 1983, tous deux représentés par Me Jean-
Pierre Moser, avocat à Lausanne,

contre

l'arrêt rendu le 29 juin 2000 par le Tribunal administratif
du canton de Vaud, dans la cause qui oppose les recourants
au Service de la population du canton de V a u d;

(art. 17 al. 2 LSEE; regroupement familial)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- Y.________ et son épouse K.________, tous deux
de nationalité turque, ont eu cinq enfants: B.________,
né en 1972, M.________, né en 1974, A.________, né en 1976,
D.________, né en 1979, et enfin T.________, né le 10 juil-
let 1983. Les époux Y.________ et K.________ ont divorcé en
1983.

Y.________ est parti pour la Suisse en 1987, laissant
ses enfants en Turquie auprès de divers membres de la famil-
le. Ses fils B.________, A.________ et M.________ l'ont re-
joint par la suite. Quant à D.________ et T.________, ils
sont restés en Turquie où ils ont été élevés par différents
membres de la famille. T.________ a vécu en dernier lieu
chez sa grand-mère paternelle qui est décédée le 30 octobre
1998. La mère ne s'est apparemment jamais occupée de son
fils T.________.

En 1998, Y.________ a obtenu une autorisation d'éta-
blissement.

Le 3 mars 1999, T.________ a présenté à l'Ambassade
suisse de Ankara (Turquie) une demande de visa pour la Suis-
se afin de vivre auprès de son père. Sans attendre la déli-
vrance du visa, il est entré en Suisse en janvier 2000. Le
31 mars 2000, Y.________ s'est remarié avec sa première fem-
me, K.________, avec laquelle il fait ménage commun.

B.- Par décision du 7 avril 2000, le Service de la po-
pulation du canton de Vaud a refusé l'autorisation d'entrée,
respectivement l'autorisation d'établissement au titre du
regroupement familial en faveur de T.________. Il a considé-
ré en substance que l'intéressé, qui était proche de la ma-

jorité, était venu en Suisse pour des motifs professionnels
et que, de toute manière, le père de T.________, qui tou-
chait des prestations d'aide sociale (revenu minimum de ré-
insertion), n'était pas en mesure d'assumer l'entretien de
son fils T.________.

Statuant sur recours le 29 juin 2000, le Tribunal admi-
nistratif du canton de Vaud a confirmé cette décision.

C.- Agissant par la voie du recours de droit adminis-
tratif, Y.________ et son fils T.________ demandent princi-
palement au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt du 29 juin
2000 du Tribunal administratif.

Le Service de la population s'en remet aux détermina-
tions du Tribunal administratif, lequel conclut au rejet du
recours dans la mesure où il est recevable. L'Office fédéral
des étrangers conclut au rejet du recours.

D.- Par ordonnance présidentielle du 3 novembre 2000,
l'effet suspensif a été octroyé au recours.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- Aux termes de l'art. 17 al. 2 3ème phrase de la loi
fédérale du 26 mars 1931 sur le séjour et l'établissement
des étrangers (LSEE; RS 142.20), les enfants célibataires de
moins de dix-huit ans ont le droit d'être inclus dans l'au-
torisation d'établissement de leurs parents aussi longtemps
qu'ils vivent auprès d'eux.

La seule condition prévue explicitement par cette dis-
position est que les enfants vivent auprès de leurs (deux)
parents. Cette disposition traite du regroupement familial

et a pour but de permettre et d'assurer juridiquement la vie
familiale commune (père, mère et enfant) vécue de manière
effective (ATF 118 Ib 153 consid. 2b p. 159).

Selon la jurisprudence (ATF 125 II 585 consid. 2, 633
consid. 3a et les arrêts cités), lorsque les parents sont
divorcés ou séparés et que l'un d'eux se trouve en Suisse et
l'autre à l'étranger, il n'existe pas un droit incondition-
nel des enfants vivant à l'étranger de rejoindre le parent
se trouvant en Suisse, car le but de l'art. 17 al. 2 3ème
phrase LSEE n'est alors pas pleinement atteint. Dans un tel
cas, le regroupement familial n'est admis qu'à certaines
conditions restrictives.

Mais cette jurisprudence n'est pas applicable telle
quelle lorsque l'enfant entend rejoindre ses deux parents
établis en Suisse. Sous réserve d'un abus de droit manifes-
te, le regroupement familial est possible en tout temps, car
l'art. 17 al. 2 3ème phrase LSEE vise précisément à protéger
la vie familiale commune d'un enfant avec ses deux parents
(arrêt destiné à la publication du 26 juillet 2000 en la
cause OFE c. Stanojevic, consid. 3. Voir aussi arrêt non pu-
blié du 25 août 2000 en la cause OFE c. Jenic, consid. 2).

2.- En l'occurrence, Y.________, divorcé, est venu seul
en Suisse en 1987, laissant ses enfants aux soins de divers
membres de la famille. Ses fils B.________, A.________ et
M.________ l'ont rejoint par la suite, alors que T.________
est, quant à lui, resté en Turquie où il a été élevé en der-
nier lieu par sa grand-mère paternelle qui est décédée le 30
octobre 1998. T.________ n'a apparemment pas eu de contacts
avec sa mère lorsque celle-ci vivait en Turquie. Ayant ter-
miné sa scolarité obligatoire en Turquie, T.________ a, le 3
mars 1999, sollicité le regroupement familial avec son père,
alors qu'il était âgé de seize ans environ. Il est toutefois
entré en Suisse en janvier 2000 sans autorisation. Au moment

de la requête de regroupement familial, ses parents vivaient
séparés. Ce n'est que le 31 mars 2000 que ses parents se
sont remariés et qu'ils font depuis lors ménage commun. A
noter que l'enfant D.________, actuellement majeur, est de-
meuré en Turquie.

Compte tenu des circonstances particulières du cas
d'espèce, on peut sérieusement douter que T.________ soit
venu en Suisse dans le but principal de créer une véritable
vie familiale commune avec ses parents, avec lesquels il n'a
pratiquement pas eu de contacts pendant la séparation. Les
recourants n'indiquent pas pourquoi T.________ n'a pas re-
joint son père plus tôt, ainsi que ses trois frères aînés.
Tout porte donc à croire que T.________, qui est actuelle-
ment à la recherche d'une place d'apprentissage en Suisse,
est venu en Suisse avant tout pour assurer son avenir éco-
nomique en obtenant plus facilement une autorisation d'éta-
blissement et non pour des motifs d'ordre familial. Point
n'est cependant nécessaire d'examiner plus avant si l'on est
en présence ou non d'un abus de droit manifeste, dès lors
que le regroupement familial doit être rejeté déjà pour un
autre motif (voir consid. 3 ci-après).

3.- En vertu de l'art. 10 al. 1 lettre d LSEE - en re-
lation avec les art. 9 al. 3 lettre b et 11 al. 3 LSEE -, un
étranger, même au bénéfice d'une autorisation d'établisse-
ment, peut être expulsé de Suisse si lui-même, ou une per-
sonne aux besoins de laquelle il est tenu de pourvoir, tombe
d'une manière continue et dans une large mesure à la charge
de l'assistance publique. Ces dispositions s'appliquent éga-
lement à l'étranger qui peut prétendre à une autorisation
d'établissement fondée sur l'art. 17 al. 2 LSEE. Toutefois,
pour que le regroupement familial puisse être refusé, il
faut qu'il existe un danger concret que les membres de la
famille concernée tombent de manière continue et dans une
large mesure à la charge de l'assistance publique. Le simple

risque n'est pas suffisant (cf. ATF 119 Ib 81 consid. 2d.
Voir plus récemment ATF 122 II 1 consid. 3c et 125 II 633
consid. 3c).

En l'occurrence, il ressort du dossier que Y.________
est au chômage depuis 1993, qu'il touche depuis le 1er no-
vembre 1998 un revenu minimum de réinsertion (environ
1'853 fr. par mois) et qu'il a des dettes. Il s'est en outre
vu délivrer plusieurs actes de défaut de biens pour un mon-
tant total de 20'000 fr. environ. Dans ces conditions, force
est de reconnaître que Y.________ ne dispose manifestement
pas de ressources financières suffisantes pour subvenir aux
besoins de son fils T.________, d'autant que son épouse
n'exerce pas d'activité lucrative. Il existe donc un risque
concret et sérieux que T.________ et ses parents tombent à
la charge de l'assistance publique de manière continue et
notable. Certes, les recourants allèguent que le fils aîné
A.________, majeur, participe financièrement à l'entretien
du ménage. Mais ils n'établissent pas que cette contribution
financière permet à tous les membres de la famille de
Y.________ de vivre de manière autonome, sans recourir à
l'aide sociale.

En résumé, les autorités cantonales n'ont pas violé
l'art. 17 al. 2 LSEE, ni l'art. 8 CEDH en refusant le re-
groupement familial en faveur de T.________ pour des motifs
financiers.

4.- Manifestement mal fondé, le présent recours doit
être rejeté. Succombant, les recourants doivent supporter
un émolument judiciaire, solidairement entre eux (art. 156
al. 1 et 7 OJ).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l ,

vu l'art. 36a OJ:

1.- Rejette le recours.

2.- Met un émolument judiciaire de 1'000 fr. à la char-
ge des recourants, solidairement entre eux.

3.- Communique le présent arrêt en copie au mandataire
des recourants, au Service de la population et au Tribunal
administratif du canton de Vaud, ainsi qu'à l'Office fédéral
des étrangers.

Lausanne, le 14 novembre 2000
LGE/mnv

Au nom de la IIe Cour de droit public
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Juge présidant,

Le Greffier,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2A.379/2000
Date de la décision : 14/11/2000
2e cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-11-14;2a.379.2000 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award