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13/11/2000 | SUISSE | N°2A.356/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 13 novembre 2000, 2A.356/2000


«/2»
2A.356/2000

IIe C O U R D E D R O I T P U B L I C
***********************************************

13 novembre 2000

Composition de la Cour: MM. les Juges Wurzburger, président,
Müller et Zappelli, suppléant. Greffière: Mme Dupraz.

Statuant sur le recours de droit administratif
formé par

X.________, né le 2 mars 1971, et dame X.________, tous les
deux représentés par Me Cornelia Seeger Tappy, avocate à
Lausanne,

contre

l'arrêt rendu le 10 juillet 2000 par le Tribuna

l administra-
tif du canton de Vaud, dans la cause qui oppose X.________
au Service de la population du canton de ...

«/2»
2A.356/2000

IIe C O U R D E D R O I T P U B L I C
***********************************************

13 novembre 2000

Composition de la Cour: MM. les Juges Wurzburger, président,
Müller et Zappelli, suppléant. Greffière: Mme Dupraz.

Statuant sur le recours de droit administratif
formé par

X.________, né le 2 mars 1971, et dame X.________, tous les
deux représentés par Me Cornelia Seeger Tappy, avocate à
Lausanne,

contre

l'arrêt rendu le 10 juillet 2000 par le Tribunal administra-
tif du canton de Vaud, dans la cause qui oppose X.________
au Service de la population du canton de V a u d;

(art. 7 al. 1 et 10 al. 1 LSEE: autorisation de séjour)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- Ressortissant tunisien né le 2 mars 1971,
X.________ a séjourné en Suisse sans autorisation au cours
de l'année 1989. Il a été refoulé en Tunisie le 21 septembre
1989. Il est revenu en Suisse le 7 avril 1990 et y a épousé,
le 8 mai 1990, Y.________, ressortissante suisse née le 20
juin 1948. Il s'est alors vu octroyer une autorisation de
séjour à l'année valable jusqu'au 8 mai 1991.

B.- Le 10 octobre 1991, le "Bezirksanwaltschaft" de Zu-
rich a condamné X.________ à quatorze jours d'arrêts sous
déduction de trois jours de détention préventive avec sursis
pendant un an et à 500 fr. d'amende pour conduite sans per-
mis de conduire et contravention à la loi fédérale du 3 oc-
tobre 1951 sur les stupéfiants (actuellement loi fédérale du
3 octobre 1951 sur les stupéfiants et les substances psycho-
tropes; loi sur les stupéfiants; LStup; RS 812.121). Le 22
juin 1992, le Tribunal de police du district de Lausanne l'a
condamné à vingt jours d'emprisonnement et à 500 fr. d'amen-
de pour contravention à la loi sur les stupéfiants, viola-
tion simple des règles de la circulation, vol d'usage d'un
véhicule automobile et conduite d'un véhicule automobile
malgré un retrait de permis. Le 28 août 1992, le Juge infor-
mateur de l'arrondissement de Lausanne a condamné l'intéres-
sé pour vol d'usage et conduite d'un véhicule malgré un re-
trait de permis, la peine étant absorbée dans celle infligée
le 22 juin 1992 par le Tribunal de police du district de
Lausanne. Le 21 décembre 1993, le Tribunal correctionnel du
district de Lausanne (ci-après: le Tribunal correctionnel) a
condamné X.________ à quinze mois d'emprisonnement sous dé-
duction de deux cent dix-huit jours de détention préventive
et à 200 fr. d'amende pour vol, infraction grave et contra-
vention à la loi sur les stupéfiants, violation simple et

grave des règles de la circulation routière, vol d'usage et
conduite sans permis; il a également ordonné l'expulsion du
territoire suisse de l'intéressé pour la durée de cinq ans
avec sursis pendant cinq ans. Le 28 mars 1994, la Commission
de libération du canton de Vaud a accordé la libération con-
ditionnelle à X.________.

C.- Le 24 juin 1994, l'Office cantonal de contrôle des
habitants et de police des étrangers du canton de Vaud (ci-
après: l'Office cantonal) a décidé de prolonger l'autorisa-
tion de séjour de X.________, tout en lui adressant "un très
sérieux et dernier avertissement".

Le 18 août 1994, l'Office fédéral des étrangers (ci-
après: l'Office fédéral) a prononcé à l'encontre de l'inté-
ressé une interdiction d'entrée en Suisse et au Liechten-
stein valable dès le 1er novembre 1994 et pour une durée
indéterminée. Le 22 août 1994, l'Office fédéral a décidé de
refuser son approbation à la délivrance d'une autorisation
de séjour à X.________ et a imparti à l'intéressé un délai
de départ échéant le 31 octobre 1994.

Le 12 septembre 1996, la femme de X.________ est décé-
dée.

Le 9 décembre 1996, le Département fédéral de justice
et police a rejeté le recours de l'intéressé contre la déci-
sion de l'Office fédéral du 22 août 1994. L'Office fédéral a
alors fixé à X.________ un délai de départ échéant le 28 fé-
vrier 1997.

Le 19 mars 1997, le Tribunal de police du district
d'Yverdon a condamné X.________ à quatorze jours d'arrêts et
à 100 fr. d'amende pour conduite malgré un retrait de per-
mis, violation simple d'une règle de la circulation.

Le 17 juillet 1997, l'intéressé a été refoulé en Tuni-
sie.

D.- Le 11 avril 1998, X.________ a épousé à Tunis dame
X.________, ressortissante suisse née le 10 août 1964 au Ma-
roc. Il a alors demandé une "autorisation d'entrée en Suis-
se" pour vivre auprès de sa femme (regroupement familial).
Le 1er juillet 1998, l'Office cantonal a refusé l'autorisa-
tion d'entrée, respectivement de séjour, sollicitée. Sur
recours, le Tribunal administratif du canton de Vaud (ci-
après: le Tribunal administratif) a confirmé cette décision
par arrêt du 18 décembre 1998.

E.- Le 19 avril 1999, le Tribunal correctionnel a con-
damné X.________ à deux ans d'emprisonnement sous déduction
de cent douze jours de détention préventive pour infraction
grave à la loi sur les stupéfiants et complicité d'infrac-
tion à l'art. 23 al. 1 de la loi fédérale du 26 mars 1931
sur le séjour et l'établissement des étrangers (LSEE; RS
142.20); il a également révoqué le sursis à l'expulsion oc-
troyé par le jugement précité du 21 décembre 1993 et ordonné
l'arrestation immédiate de l'intéressé. Sur recours, ce ju-
gement a été confirmé le 10 juin 1999 par la Cour de cassa-
tion pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud.

F.- Le 10 février 2000, X.________ a adressé à l'Office
cantonal une requête par laquelle il a demandé de lever tou-
te interdiction d'entrée en Suisse qui pourrait subsister et
d'autoriser son entrée et son séjour en Suisse. Il invoquait
essentiellement la naissance, le 6 décembre 1999, de son
fils Z.________.

Le 21 février 2000, le Service de la population du can-
ton de Vaud (ci-après: le Service cantonal), autorité désor-
mais compétente en la matière, a rejeté cette requête consi-

dérée comme une demande de réexamen, en se fondant notamment
sur l'art. 10 al. 1 lettres a et b LSEE.

L'intéressé a alors porté sa cause devant le Tribunal
administratif qui, par arrêt du 10 juillet 2000, a rejeté
son recours et confirmé la décision du Service cantonal du
21 février 2000.

G.- Agissant par la voie du recours de droit adminis-
tratif, X.________ et dame X.________ demandent au Tribunal
fédéral, sous suite de frais et dépens, de réformer l'arrêt
du Tribunal administratif du 10 juillet 2000 en ce sens
qu'une autorisation de séjour soit accordée à X.________; à
titre subsidiaire, ils demandent que l'arrêt du Tribunal ad-
ministratif du 10 juillet 2000 soit annulé et que la cause
soit renvoyée au Tribunal administratif, subsidiairement au
Service cantonal, pour complément d'instruction et nouvelle
décision. Ils requièrent leur audition et celle de trois té-
moins. Ils sollicitent l'assistance judiciaire partielle,
soit limitée aux frais de justice.

Le Tribunal administratif conclut au rejet du recours.
Le Service cantonal se réfère à l'arrêt attaqué. L'Office
fédéral propose de rejeter le recours.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- Le Tribunal fédéral examine d'office et librement
la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 125 II
497 consid. 1a p. 499).

a) Selon l'art. 100 al. 1 lettre b ch. 3 OJ, le recours
de droit administratif n'est pas recevable en matière de po-
lice des étrangers contre l'octroi ou le refus d'autorisa-

tions auxquelles le droit fédéral ne confère pas un droit.
D'après l'art. 4 LSEE, les autorités compétentes statuent
librement, dans le cadre des prescriptions légales et des
traités avec l'étranger, sur l'octroi ou le refus d'autori-
sations de séjour ou d'établissement. En principe, l'étran-
ger n'a pas de droit à l'octroi d'une autorisation de sé-
jour. Ainsi, le recours de droit administratif est irrece-
vable, à moins que ne puisse être invoquée une disposition
particulière du droit fédéral ou d'un traité, accordant le
droit à la délivrance d'une telle autorisation (ATF 126 I 81
consid. 1a p. 83).

D'après l'art. 7 al. 1 LSEE, le conjoint étranger d'un
ressortissant suisse a droit à l'octroi et à la prolongation
de l'autorisation de séjour. Selon la jurisprudence, pour
juger de la recevabilité du recours de droit administratif,
seule est déterminante la question de savoir si un mariage
au sens formel existe (ATF 124 II 289 consid. 2b p. 291).

X.________ est marié avec une Suissesse. Le recours est
donc recevable au regard de la disposition précitée, le
point de savoir s'il faut délivrer une autorisation de sé-
jour à l'intéressé relevant du fond (ATF 124 II 289 consid.
2b p. 291).

b) D'après l'art. 103 lettre a OJ, quiconque est at-
teint par la décision attaquée et a un intérêt digne de pro-
tection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée a qualité pour
recourir.

La qualité pour recourir est donnée au justiciable tou-
ché plus que quiconque ou que la généralité des administrés
dans ses intérêts économiques, matériels ou idéaux. En prin-
cipe, seul peut former un recours de droit administratif ce-
lui qui apparaît formellement atteint, c'est-à-dire celui
qui a participé à la procédure devant l'instance inférieure

et dont les conclusions déposées alors ont été totalement ou
partiellement écartées (ATF 118 Ib 356 consid. 1a p. 359).

La qualité pour recourir de X.________ ne fait pas de
doute. En revanche, il convient de dénier la qualité pour
agir à dame X.________ qui n'a pas participé à la procédure
devant le Tribunal administratif. Ainsi, le recours est ir-
recevable dans la mesure où il émane de dame X.________.

c) Au surplus, déposé en temps utile et dans les formes
prescrites par la loi, le présent recours est en principe
recevable en vertu des art. 97 ss OJ.

2.- D'après l'art. 104 OJ, le recours de droit adminis-
tratif peut être formé pour violation du droit fédéral, y
compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (lettre
a) ainsi que pour constatation inexacte ou incomplète des
faits pertinents, sous réserve de l'art. 105 al. 2 OJ, (let-
tre b). Le Tribunal fédéral vérifie d'office l'application
du droit fédéral, qui englobe notamment les droits constitu-
tionnels des citoyens (ATF 124 II 517 consid. 1 p. 519; 123
II 385 consid. 3 p. 388), sans être lié par les motifs invo-
qués par les parties (art. 114 al. 1 in fine OJ). En revan-
che, lorsque le recours est dirigé, comme en l'espèce, con-
tre la décision d'une autorité judiciaire, le Tribunal fédé-
ral est lié par les faits constatés dans cette décision,
sauf s'ils sont manifestement inexacts ou incomplets ou
s'ils ont été établis au mépris de règles essentielles de
procédure (art. 105 al. 2 OJ). La possibilité de faire va-
loir des faits nouveaux ou de nouveaux moyens de preuve est
dès lors très restreinte. Seules sont admissibles les preu-
ves que l'instance inférieure aurait dû retenir d'office et
dont le défaut d'administration constitue une violation de
règles essentielles de procédure (ATF 121 II 97 consid. 1c
p. 99). En outre, le Tribunal fédéral ne peut pas revoir
l'opportunité de l'arrêt entrepris, le droit fédéral ne pré-

voyant pas un tel examen en la matière (art. 104 lettre c
ch. 3 OJ).

3.- Le recourant reproche au Tribunal administratif
d'avoir statué sans avoir procédé à son audition ni à celle
de quatre témoins dont sa femme. Il considère que l'autorité
intimée a commis une violation de son droit d'être entendu
qui aurait entraîné une constatation incomplète des faits
pertinents.

a) Le droit d'être entendu, garanti constitutionnelle-
ment, comprend le droit pour l'intéressé de s'exprimer sur
les éléments pertinents avant qu'une décision ne soit prise
touchant sa situation juridique, le droit de produire des
preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier,
d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves
pertinentes, de participer à l'administration des preuves
essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résul-
tat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à
rendre (ATF 124 II 132 consid. 2b p. 137 et la jurisprudence
citée). Au surplus, la jurisprudence admet que le droit
d'être entendu n'empêche pas l'autorité de mettre un terme à
l'instruction lorsque les preuves administrées lui ont per-
mis de former sa conviction et que, procédant d'une manière
non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui
lui sont encore proposées, elle a la certitude qu'elles ne
pourraient l'amener à modifier son opinion (ATF 124 I 208
consid. 4a p. 211).

b) Dans son recours cantonal, l'intéressé faisait es-
sentiellement valoir la naissance de son fils, sa rupture
avec les stupéfiants et le milieu de la drogue ainsi que la
renonciation, dans le jugement précité du 19 avril 1999, à
une mesure d'expulsion; il se référait à des pièces sur ces
deux derniers points. Il demandait aussi les auditions sus-

mentionnées, sans toutefois préciser sur quoi il désirait
qu'elles portent ni ce qu'il voulait prouver par là.

Le 10 avril 2000, le Tribunal administratif a fait sa-
voir aux parties qu'il ne procéderait pas aux auditions re-
quises, les éléments du dossier permettant de contrôler
l'exercice du pouvoir d'appréciation du Service cantonal.
Compte tenu des circonstances, il pouvait s'estimer suffi-
samment renseigné par les pièces du dossier dont il dispo-
sait pour écarter les auditions sollicitées par une appré-
ciation anticipée des preuves. D'ailleurs, il a notamment
pris en considération les événements survenus depuis son
arrêt du 18 décembre 1998, soit le jugement précité du 19
avril 1999 et la naissance du fils du recourant, et il a
procédé à une pesée des intérêts
en présence. Ainsi, l'auto-
rité intimée n'a pas violé le droit d'être entendu de l'in-
téressé ni établi les faits de façon manifestement inexacte
ou incomplète, de sorte que les griefs du recourant doivent
être rejetés.

c) Vu ce qui précède, le Tribunal fédéral est lié par
les faits constatés dans l'arrêt entrepris. Il doit par con-
séquent rejeter la requête d'auditions présentée par l'inté-
ressé.

4.- Le recourant se plaint de violations des art. 7 al.
1 LSEE et 8 CEDH, estimant que le refus de lui délivrer une
autorisation de séjour est disproportionné et procède d'un
excès du pouvoir d'appréciation. Il invoque des circonstan-
ces familiales. Il fait aussi valoir que, dans son jugement
du 19 avril 1999, le Tribunal correctionnel aurait voulu lui
laisser une chance de faire ses preuves en Suisse.

a) On peut douter que le recourant puisse se prévaloir
de l'art. 8 par. 1 CEDH. En effet, une autorisation de sé-
jour fondée sur cette disposition présuppose une relation

étroite et effective entre un étranger et une personne de sa
famille ayant un droit de présence en Suisse (ATF 125 II 633
consid. 2e p. 639). Or, un tel lien est exclu dans le cas
particulier, puisque l'intéressé est en détention (ATF 118
Ib 145 consid. 4b p. 152; cf. aussi l'arrêt non publié du 8
mai 2000 en la cause Stocker, consid. 4c). De toute façon,
la pesée des intérêts qui doit intervenir au regard de
l'art. 7 LSEE n'est pas différente de celle à opérer selon
l'art. 8 CEDH.

b) Selon l'art. 7 al. 1 LSEE, le droit du conjoint
étranger d'un ressortissant suisse à l'octroi et à la pro-
longation d'une autorisation de séjour s'éteint lorsqu'il
existe un motif d'expulsion. D'après l'art. 10 al. 1 LSEE,
l'étranger peut être expulsé de Suisse notamment s'il a été
condamné par une autorité judiciaire pour crime ou délit
(lettre a) ou si sa conduite, dans son ensemble, et ses ac-
tes permettent de conclure qu'il ne veut pas s'adapter à
l'ordre établi dans le pays qui lui offre l'hospitalité ou
qu'il n'en est pas capable (lettre b). Cependant, l'expul-
sion n'est ordonnée que si elle paraît appropriée à l'en-
semble des circonstances (art. 11 al. 3 LSEE) et qu'elle
respecte le principe de la proportionnalité (ATF 116 Ib 113
consid. 3c p. 117); pour apprécier ce qui est équitable,
l'autorité doit tenir compte notamment de la gravité de la
faute commise par l'étranger, de la durée de son séjour en
Suisse et du préjudice qu'il aurait à subir avec sa famille
du fait de l'expulsion (art. 16 al. 3 du règlement d'exécu-
tion du 1er mars 1949 de la LSEE - RSEE; RS 142.201).

Le refus d'octroyer une autorisation de séjour au con-
joint étranger d'un ressortissant suisse condamné pour crime
ou délit, respectivement le refus de la prolonger, suppose
de même une pesée des intérêts en présence (ATF 120 Ib 6
consid. 4a p. 13). Cela résulte en particulier de la réfé-

rence, contenue dans l'art. 7 al. 1 LSEE, à un motif d'ex-
pulsion de l'art. 10 al. 1 LSEE.

Pour procéder à cette pesée des intérêts, l'autorité de
police des étrangers s'inspire de considérations différentes
de celles qui guident l'autorité pénale. Ainsi, la décision
du juge pénal d'ordonner ou non l'expulsion d'un condamné
étranger en application de l'art. 55 CP, ou de l'ordonner
en l'assortissant d'un sursis, respectivement la décision
que prend l'autorité compétente de suspendre l'exécution de
cette peine accessoire, est dictée, au premier chef, par des
considérations tirées des perspectives de réinsertion socia-
le de l'intéressé; pour l'autorité de police des étrangers,
c'est en revanche la préoccupation de l'ordre et de la sécu-
rité publics qui est prépondérante. Il en découle que l'ap-
préciation faite par l'autorité de police des étrangers peut
avoir pour l'intéressé des conséquences plus rigoureuses que
celle de l'autorité pénale (ATF 120 Ib 129 consid. 5b p. 132
et la jurisprudence citée).

Lorsque le motif d'expulsion est la commission d'une
infraction, la peine infligée par le juge pénal est le pre-
mier critère lorsqu'il s'agit d'évaluer la gravité de la
faute et de procéder à la pesée des intérêts. Ainsi, selon
la jurisprudence applicable au conjoint étranger d'un res-
sortissant suisse, une condamnation à deux ans de privation
de liberté constitue la limite à partir de laquelle, en gé-
néral, il y a lieu de refuser l'autorisation de séjour lors-
qu'il s'agit d'une demande d'autorisation initiale ou d'une
requête de prolongation d'autorisation déposée après un sé-
jour de courte durée (ATF 120 Ib 6 consid. 4b p. 14 se ré-
férant à l'arrêt Reneja, ATF 110 Ib 201). Ce principe vaut
même lorsque l'on ne peut pas - ou difficilement - exiger de
l'épouse suisse de l'étranger qu'elle quitte la Suisse, ce
qui empêche de fait les conjoints de vivre ensemble d'une
manière ininterrompue. En effet, lorsque l'étranger a grave-

ment violé l'ordre juridique en vigueur et qu'il a ainsi été
condamné à une peine d'au moins deux ans de détention, l'in-
térêt public à son éloignement l'emporte normalement sur son
intérêt privé - et celui de sa famille - à pouvoir rester en
Suisse.

c) En l'espèce, il existe au moins un motif d'expul-
sion, puisque l'intéressé s'est rendu coupable de "crime ou
délit" (art. 10 al. 1 lettre a LSEE). Dès lors, il convient
d'examiner si l'arrêt attaqué est justifié sur la base des
intérêts en présence.

Le recourant, qui a été refoulé en Tunisie en 1989
après avoir séjourné irrégulièrement en Suisse, y est revenu
en 1990 et n'a pas tardé à adopter un comportement délic-
tueux qui lui a valu différentes condamnations à partir du
10 octobre 1991. C'est le Tribunal correctionnel qui lui a
infligé les peines privatives de liberté les plus lourdes:
quinze mois et deux ans d'emprisonnement par jugements des
21 décembre 1993 et 19 avril 1999. Ces peines sanctionnaient
en particulier des infractions graves à la loi sur les stu-
péfiants. Dans le jugement précité du 19 avril 1999, il a
été retenu que l'intéressé avait mis sur le marché quelque
315 g d'héroïne et 50 g de cocaïne, soit des quantités de
drogue impressionnantes selon les termes du Tribunal correc-
tionnel. Or, il s'agit d'un domaine où la jurisprudence se
montre particulièrement rigoureuse (cf. ATF 122 II 433 con-
sid. 2c p. 436). La protection de la collectivité publique
face au développement du marché de la drogue constitue in-
contestablement un intérêt public prépondérant justifiant
l'éloignement de Suisse d'un étranger qui s'est rendu coupa-
ble d'infraction grave à la loi sur les stupéfiants. Les
étrangers qui sont mêlés au commerce des stupéfiants doivent
donc s'attendre à faire l'objet de mesures d'éloignement
(arrêt non publié du 26 février 1998 en la cause Mustafa,
consid. 5b). Par ailleurs, la durée du séjour du recourant

en Suisse n'est pas déterminante. Il est arrivé en Suisse le
7 avril 1990 et a été refoulé en Tunisie le 17 juillet 1997,
mais il a passé une partie de ce temps en détention. De
plus, il est incarcéré depuis le 19 avril 1999. Au demeu-
rant, il n'y a pas lieu de prendre en considération le temps
qu'il a passé irrégulièrement en Suisse. En outre, on ne
saurait suivre l'intéressé dans sa façon de comprendre le
jugement susmentionné du 19 avril 1999. Certes, le Tribunal
correctionnel a dit que le recourant lui avait donné le sen-
timent de vouloir tirer un trait sur son passé et semblait
avoir rompu définitivement avec la drogue. Toutefois, le
Tribunal correctionnel a aussi relevé la gravité des infrac-
tions commises par l'intéressé, la récidive, la réitération
en cours d'enquête et les renseignements de moralité défavo-
rables. Enfin, il a estimé "superfétatoire d'ordonner une
nouvelle mesure d'expulsion vu la décision administrative
d'interdiction d'entrée et de séjour en Suisse frappant
l'accusé". Ce n'est donc pas pour laisser une chance à l'in-
téressé de faire ses preuves en Suisse que le Tribunal cor-
rectionnel a renoncé à prononcer son expulsion. Par ail-
leurs, l'argument que le recourant tire de la naissance de
son fils n'est pas décisif. Il n'est pas exclu que cet en-
fant l'aide un jour à trouver un certain équilibre, mais il
s'agit en l'état d'un élément d'autant plus hypothétique que
l'intéressé a toujours vécu en prison depuis que son fils
est né. Quant à la situation de la femme du recourant, le
Tribunal administratif l'a déjà examinée dans son arrêt du
18 décembre 1998. Il a alors retenu, à juste titre, qu'en
épousant l'intéressé, sa femme avait accepté le risque de
devoir vivre sa vie de couple à l'étranger. Au surplus, elle
savait que ce ne serait pas sans incidence pour l'enfant
qu'elle avait eu d'un mariage antérieur.

d) Il apparaît dès lors que l'intérêt public qu'il y a
à éloigner de Suisse le recourant l'emporte sur l'intérêt

privé de ce dernier et de sa famille à pouvoir vivre ensem-
ble dans ce pays.

Ainsi, l'autorité intimée a procédé à une pesée des in-
térêts en présence qui n'est pas critiquable. Elle n'a pas
violé le droit fédéral ni excédé son pouvoir d'appréciation.

5.- Vu ce qui précède, le recours doit être rejeté dans
la mesure où il est recevable.

Les conclusions des recourants étaient dénuées de tou-
tes chances de succès, de sorte qu'il convient de leur refu-
ser l'assistance judiciaire partielle (art. 152 al. 1 OJ).

Succombant, les recourants doivent supporter les frais
judiciaires, qui seront fixés compte tenu de leur situation
financière (art. 156 al. 1, 153 et 153a OJ), et n'ont pas
droit à des dépens (art. 159 al. 1 OJ).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Rejette le recours dans la mesure où il est receva-
ble.

2. Met à la charge des recourants un émolument judi-
ciaire de 500 fr.

3. Communique le présent arrêt en copie à la mandataire
des recourants, au Service de la population et au Tribunal
administratif du canton de Vaud, ainsi qu'à l'Office fédéral
des étrangers.

Lausanne, le 13 novembre 2000
DAC/mnv

Au nom de la IIe Cour de droit public
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président,

La Greffière,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2A.356/2000
Date de la décision : 13/11/2000
2e cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-11-13;2a.356.2000 ?
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