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10/11/2000 | SUISSE | N°I.225/00

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 10 novembre 2000, I.225/00


«AZA 7»
I 225/00 Sm

IIIe Chambre

composée des Juges fédéraux Schön, Spira et Widmer; Wagner,
Greffier

Arrêt du 10 novembre 2000

dans la cause

C.________, représenté par Maître Charles Guerry, avocat,
rue du Progrès 1, Fribourg,

contre

Office AI du canton de Fribourg, Impasse de la Colline 1,
Givisiez, intimé,

et

Tribunal administratif du canton de Fribourg, Givisiez

A.- a) C.________ a travaillé en qualité de maçon et
de manoeuvre au service de l

'entreprise de bâtiments & gé-
nie civil M.________ SA, à E.________. A ce titre, il était
assuré par la Caisse nationale suisse d'as...

«AZA 7»
I 225/00 Sm

IIIe Chambre

composée des Juges fédéraux Schön, Spira et Widmer; Wagner,
Greffier

Arrêt du 10 novembre 2000

dans la cause

C.________, représenté par Maître Charles Guerry, avocat,
rue du Progrès 1, Fribourg,

contre

Office AI du canton de Fribourg, Impasse de la Colline 1,
Givisiez, intimé,

et

Tribunal administratif du canton de Fribourg, Givisiez

A.- a) C.________ a travaillé en qualité de maçon et
de manoeuvre au service de l'entreprise de bâtiments & gé-
nie civil M.________ SA, à E.________. A ce titre, il était
assuré par la Caisse nationale suisse d'assurance en cas
d'accidents (CNA) pour les accidents professionnels et non
professionnels.
Le 16 mars 1995, le prénommé crépissait un mur, lors-
qu'il fit une chute d'une hauteur d'environ six mètres d'un

échafaudage. Souffrant d'une torsion du genou droit, accom-
pagnée par la suite d'un épanchement intra-articulaire, il
a présenté une incapacité totale de travail. Le 8 juin
1995, le docteur Z.________, spécialiste FMH en chirurgie
orthopédique et médecin-chef du secteur d'orthopédie de
l'Hôpital du district de B.________, a procédé à une
arthroscopie diagnostique du genou droit, mettant en évi-
dence une rupture du ligament croisé antérieur (rapport du
16 juin 1995). La CNA a pris en charge le cas.
Dans un rapport du 23 avril 1997, le professeur
J.________, médecin-chef du Service de chirurgie orthopé-
dique de l'Hôpital cantonal de X.________, consulté le
21 avril par C.________, a posé l'indication pour une re-
construction du ligament croisé antérieur. Le 5 septembre
1997, le docteur Z.________ et la doctoresse O.________ ont
procédé à une plastie du ligament croisé antérieur droit
par voie arthroscopique.
Par décision du 15 mai 1998, la CNA a alloué à
C.________ une rente d'invalidité dès le 1er juin 1998 pour
une incapacité de gain de 20 % et une indemnité pour
atteinte à l'intégrité de 9720 fr., compte tenu d'une dimi-
nution de l'intégrité de 10 %.

b) Le 10 juin 1997, C.________ a présenté une demande
de prestations de l'assurance-invalidité. Dans un rapport
médical du 15 juin 1998, le docteur Z.________ a posé le
diagnostic de status après plastie ligamentaire du ligament
croisé antérieur droit et de gonalgie du genou gauche sur
chondropathie tricompartimentale. Il signalait qu'à la
suite des douleurs persistantes aux deux genoux, il avait
demandé une imagerie par résonance magnétique (IRM). En ce
qui concerne le genou droit, l'IRM avait permis de mettre
en évidence une lésion de la corne postérieure du ménisque
interne, une chondromalacie du cartilage rotulien ainsi
qu'une inflammation autour de la plastie tendineuse du
ligament croisé antérieur. Il était donc probable qu'il

procède à l'avenir à une arthroscopie et à un travail de
toilettage. Enfin, l'assuré était totalement incapable de
travail en tant que manoeuvre dans une entreprise de cons-
truction. Du point de vue de sa réinsertion professionnel-
le, une activité sédentaire était absolument nécessaire. En
tant que manoeuvre de chantier, il resterait inapte en tout
cas à 66 2/3 %.
Par décision du 22 juillet 1998, l'Office AI du canton
de Fribourg a rejeté la demande, au motif que C.________
présentait une invalidité de 20 % environ.

B.- Le 8 septembre 1998, C.________ a recouru devant
la Cour des assurances sociales du Tribunal administratif
du canton de Fribourg contre la décision de l'office AI du
22 juillet 1998, en concluant, sous suite de dépens, à
l'annulation de celle-ci. Il demandait qu'une nouvelle éva-
luation de sa capacité de travail soit ordonnée.
Le 22 janvier 1999, C.________ a produit un document
du docteur Z.________ du 18 janvier 1999, dont il ressort
que ce spécialiste a procédé le 27 octobre 1998 à une
arthroscopie, à une biopsie synoviale, à une synovectomie
au shaver AMO de la vis distale et à l'ablation d'une
patella bipartita avec SAE.
Sur requête de l'office AI, la procédure fut suspendue
jusqu'au dépôt d'une expertise du Service d'orthopédie et
de traumatologie de l'appareil moteur du Centre Hospitalier
Universitaire, à Y.________. Dans leur rapport du 28 juin
1999, le professeur L.________ et les docteurs F.________
et V.________ ont posé le diagnostic de séquelles doulou-
reuses du genou droit sur un status deux ans après la
reconstruction du ligament croisé antérieur, de chondrite
stade I condyles fémoraux interne et externe, de chondrite
stade I plateaux tibiaux interne et externe, de chondrite
stade II à III facettes rotuliennes et stade III trochlée
fémorale, ainsi que de suspicion de conflit entre la plas-
tie du ligament croisé antérieur et le toit de l'échancrure

intercondylienne avec flexum de 5°. Décrivant le problème
mécanique posé par ce flexum, ils en concluaient que l'en-
semble des plaintes subjectives du patient ne pouvaient
être expliquées uniquement par ce problème mécanique, mais
qu'avant toute nouvelle intervention chirurgicale une éva-
luation soigneuse de l'état psychique devrait être effec-
tuée.
L'office AI, dans une prise de position du 8 septembre
1999, a conclu au rejet du recours.
Dans ses déterminations du 14 octobre 1999, C.________
a requis la mise en oeuvre d'une expertise psychiatrique.
Le 26 janvier 2000, l'office AI, produisant un docu-
ment du Service d'orthopédie et de traumatologie de l'appa-
reil moteur de l'Hôpital W.________, du 11 janvier 2000,
dans lequel le docteur V.________ déclarait qu'aucun trou-
ble psychique n'avait été relevé durant la consultation du
24 juin 1999, a maintenu ses conclusions.
Par jugement du 23 février 2000, le tribunal adminis-
tratif a rejeté le recours. Niant l'existence de troubles
psychiques, il a considéré qu'il ne se justifiait pas de
mettre sur pied une expertise psychiatrique.

C.- Dans un mémoire daté du 6 avril 2000, C.________
interjette recours de droit administratif contre ce juge-
ment, en concluant, sous suite de frais et dépens, à l'an-
nulation de celui-ci, la cause étant renvoyée à la juri-
diction cantonale pour instruction complémentaire au sens
des considérants et nouveau jugement. Il produit une déci-
sion de la CNA du 23 février 2000, rejetant l'opposition
formée contre une décision du 28 septembre 1999, un rapport
du 3 novembre 1999 des docteurs D.________ et A.________,
respectivement médecin-chef adjoint et médecin-assistant du
Service de rhumatologie, médecine physique et rééducation
de l'Hôpital cantonal de X.________, ainsi qu'un document
du docteur Z.________ du 23 novembre 1999. Il a requis la
suspension du procès jusqu'au dépôt d'une expertise qu'il a

demandée au docteur K.________, spécialiste FMH en psychia-
trie et psychothérapie à X.________.
L'Office AI du canton de Fribourg déclare qu'il n'a
pas de remarques particulières à formuler, dans la mesure
où le jugement attaqué confirme sa position.
Le 30 mai 2000, C.________ a produit une expertise
psychiatrique du docteur K.________, du 22 mai 2000.

Considérant en droit :

1.- a) Lorsque le litige porte sur l'octroi ou le
refus de prestations d'assurance, le Tribunal fédéral des
assurances n'est pas lié par l'état de fait constaté par la
juridiction inférieure (art. 132 OJ; ATF 121 V 366 con-
sid. 1c, 120 V 448 consid. 2a/aa et les références).
Dans ce cas, la possibilité d'alléguer des faits nou-
veaux ou de faire valoir de nouveaux moyens de preuve dans
le cadre de l'acte de recours est en principe admise (ATF
121 II 99 consid. 1c a contrario). En revanche, la produc-
tion de nouveaux moyens de preuves après l'échéance du
délai de recours n'est admissible que dans le cadre d'un
deuxième échange d'écritures (arrêt non publié B. du
10 octobre 1997 [2A.616/1996]).

b) En l'occurrence, la Cour de céans n'a pas autorisé
de second échange d'écritures (art. 110 al. 4 OJ). Produite
hors délai, l'expertise psychiatrique du docteur
K.________, du 22 mai 2000, n'est donc pas admissible. En
conséquence, le rapport précité de ce spécialiste ne sau-
rait être pris en considération.

c) La requête du recourant de suspension du procès est
sans objet (art. 6 al. 1 PCF en corrélation avec les
art. 40 et 135 OJ).

2.- Est litigieux le point de savoir si le recourant
est atteint de troubles d'ordre psychique diminuant sa ca-
pacité de travail et de gain.

a) Parmi les atteintes à la santé psychique, qui peu-
vent, comme les atteintes physiques, provoquer une invali-
dité au sens de l'art. 4 al. 1 LAI, on doit mentionner - à
part les maladies mentales proprement dites - les anomalies
psychiques qui équivalent à des maladies. On ne considère
pas comme des conséquences d'un état psychique maladif,
donc pas comme des affections à prendre en charge par l'as-
surance-invalidité, les diminutions de la capacité de gain
que l'assuré pourrait empêcher en faisant preuve de bonne
volonté; la mesure de ce qui est exigible doit être déter-
minée aussi objectivement que possible. Il faut donc
établir si et dans quelle mesure un assuré peut, malgré son
infirmité mentale, exercer une activité que le marché du
travail lui offre, compte tenu de ses aptitudes. Le point
déterminant est ici de savoir quelle activité peut raison-
nablement être exigée dans son cas. Pour admettre l'exis-
tence d'une incapacité de gain causée par une atteinte à la
santé mentale, il n'est donc pas décisif que l'assuré exer-
ce une activité lucrative insuffisante; il faut bien plutôt
se demander s'il y a lieu d'admettre que la mise à profit
de sa capacité de travail ne peut, pratiquement, plus être
raisonnablement exigée de lui, ou qu'elle serait même in-
supportable pour la société (ATF 102 V 165; VSI 2000 p. 153
sv. consid. 2a; RCC 1992 p. 182 consid. 2a et les référen-
ces).

b) Selon les premiers juges, l'existence de troubles
psychiques ne saurait être admise. En effet, il ressort de
la lettre du docteur V.________ du 26 (recte : 11) janvier
2000 qu'aucun trouble d'ordre psychique n'a été relevé
durant la consultation du 24 juin 1999. Cet expert expli-
que, en outre, que l'allusion à une évaluation soigneuse de

l'état psychique avait été faite uniquement afin d'éviter
que des interventions chirurgicales à répétition ne soient
effectuées sans qu'elles amènent une amélioration signi-
ficative. Or, le recourant n'apportant aucun autre indice
d'un quelconque trouble psychique, il ne se justifiait donc
pas de mettre sur pied une expertise psychiatrique.

c) Une instruction complémentaire, consistant dans
l'expertise psychiatrique du recourant, est toutefois né-
cessaire.
En effet, il ressort du rapport du 3 novembre 1999 des
docteurs D.________ et A.________, produit avec l'acte de
recours, que le recourant présente notamment un état dé-
pressif. Selon le docteur Z.________, le patient, suivi par
le docteur P.________, psychiatre à G.________, présente un
état dépressif flagrant (lettre du 23 novembre 1999).
Il s'ensuit que la cause doit être renvoyée à la juri-
diction cantonale pour complément d'instruction sur le
point de savoir si le recourant présente un état psychique
maladif diminuant sa capacité de travail et de gain. C'est
dans ce cadre qu'il pourra faire valoir ses moyens de
preuve et notamment le rapport qu'il a demandé au docteur
K.________.

3.- Obtenant gain de cause, le recourant a droit à une
indemnité de dépens pour l'instance fédérale (art. 159
al. 1 en corrélation avec l'art. 135 OJ). A ce stade de la
procédure, la question du remboursement de ses frais d'ex-
pertise ne se pose pas (ATF 115 V 62).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est admis et le jugement de la Cour des
assurances sociales du Tribunal administratif du can-

ton de Fribourg, du 23 février 2000, est annulé, la
cause étant renvoyée à l'autorité judiciaire de pre-
mière instance pour complément d'instruction au sens
des considérants et nouveau jugement.

II. Il n'est pas perçu de frais de justice.

III. L'intimé versera au recourant la somme de 2500 fr. (y
compris la taxe sur la valeur ajoutée) à titre de dé-
pens pour l'instance fédérale.

IV. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, à la
Cour des assurances sociales du Tribunal administratif
du canton de Fribourg et à l'Office fédéral des assu-
rances sociales.

Lucerne, le 10 novembre 2000

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la IIIe Chambre :

Le Greffier :


Synthèse
Numéro d'arrêt : I.225/00
Date de la décision : 10/11/2000
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-11-10;i.225.00 ?
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