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10/11/2000 | SUISSE | N°1P.519/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 10 novembre 2000, 1P.519/2000


«/2»

1P.519/2000

Ie C O U R D E D R O I T P U B L I C
**********************************************

10 novembre 2000

Composition de la Cour: MM. les Juges Aemisegger, Président,
Féraud et Favre. Greffier: M. Parmelin.

Statuant sur le recours de droit public
formé par

D.________, représenté par Me Michel Ducrot, avocat à
Martigny,

contre

le jugement rendu le 17 avril 2000 par la Cour d'appel
pénale
II du Tribunal cantonal du canton du Valais dans la cause

qui
oppose le recourant au Ministère public du Bas-Valais, à
E.________, représenté par Me Jörn-Albert Bostelmann, avocat...

«/2»

1P.519/2000

Ie C O U R D E D R O I T P U B L I C
**********************************************

10 novembre 2000

Composition de la Cour: MM. les Juges Aemisegger, Président,
Féraud et Favre. Greffier: M. Parmelin.

Statuant sur le recours de droit public
formé par

D.________, représenté par Me Michel Ducrot, avocat à
Martigny,

contre

le jugement rendu le 17 avril 2000 par la Cour d'appel
pénale
II du Tribunal cantonal du canton du Valais dans la cause
qui
oppose le recourant au Ministère public du Bas-Valais, à
E.________, représenté par Me Jörn-Albert Bostelmann, avocat
à Sion, à F._________, représenté par Me Thierry Roduit,
avocat à Fully, à G.________, représenté par Me Yves
Donzallaz, avocat à Sion, et à H.________, représenté par Me
Jean-Marc Gaist, avocat à Sion;

(art. 6 § 2 CEDH et 9 Cst.; condamnation aux frais en cas
d'acquittement; taxation des dépens)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- Le 5 avril 1989, A.________, B.________ et
C.________ ont déposé une plainte pénale contre D.________,
F._________, I.________ et E.________ pour abus de
confiance,
escroquerie et gestion déloyale, en raison de divers actes
illicites commis en relation avec l'acquisition d'actions de
la société X.________, dont la raison sociale est devenue
par
la suite Y.________, et avec la gestion de cette société. Le
24 avril 1990, ils ont requis l'extension de la procédure
pour banqueroute simple et frauduleuse, à la suite de la
faillite de Y.________ prononcée le 20 juin 1989.

L'administration spéciale de la masse en faillite de
Y.________ a notamment dénoncé D.________, en tant qu'admi-
nistrateur de fait de la société, le 10 juillet 1990, pour
banqueroute simple, éventuellement frauduleuse, violation de
l'obligation de tenir une comptabilité, détournement
d'objets
mis sous main de justice, et éventuellement gestion
déloyale,
puis le 24 août 1990 pour détournement d'objets appartenant
à
la masse.

Le 5 mars 1991, le Juge d'instruction pénale du
Valais central a ouvert une instruction d'office contre
D.________ pour abus de confiance et gestion déloyale, éten-
due par la suite aux infractions de faux dans les titres,
éventuellement d'obtention frauduleuse d'une constatation
fausse, d'escroquerie, de gestion déloyale et de banqueroute
simple. Une instruction a également été ouverte à l'encontre
de F._________, E.________, G.________ et H.________ pour
des
chefs de même nature liés au même complexe de faits.

L'acte d'accusation, dressé le 21 novembre 1996, re-
tenait les accusations d'obtention frauduleuse d'une consta-

tation fausse (art. 253 CP) et de faux dans les titres (art.
251 CP) à l'encontre de D.________ et des autres partici-
pants.

B.- Par jugement du 26 octobre 1998, le Tribunal du
IIIe arrondissement pour le district de Martigny (ci-après,
le Tribunal d'arrondissement) a reconnu D.________ coupable
d'obtention frauduleuse d'une constatation fausse et d'abus
de confiance et l'a condamné à quatre mois d'emprisonnement,
peine complémentaire à celle prononcée le 3 juillet 1995 par
la Cour d'appel pénale II du Tribunal cantonal du canton du
Valais (ci-après, la Cour d'appel pénale ou la cour
cantonale), avec sursis pendant trois ans. Il a également
condamné les autres prévenus à des peines d'emprisonnement
avec sursis.

C.- Statuant par jugement du 17 avril 2000, la Cour
d'appel pénale a acquitté D.________, H.________, G.________
et E.________ (ch. 1 du dispositif). Elle a mis les frais
d'instruction de la procédure principale s'élevant à
50'337.15 fr. à la charge de D.________ à concurrence de
7'460.30 fr. (ch. 6a du dispositif). Elle lui a alloué une
indemnité de 4'050 fr. à titre de dépens à la charge de
A.________, B.________ et C.________, solidairement entre
eux
(ch. 8 du dispositif), ainsi qu'une indemnité de 13'900 fr.
à
titre de dépens à la charge de l'Etat du Valais (ch. 9 du
dispositif).

D.- Agissant par la voie du recours de droit public,
D.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler les
chiffres
6a et 9 du dispositif du jugement rendu le 17 avril 2000 par
la Cour d'appel pénale en tant qu'ils concernent les frais
d'instruction mis à sa charge et le montant des dépens que
l'Etat du Valais doit lui payer. Il dénonce une violation de
la présomption d'innocence consacrée à l'art. 6 § 2 CEDH, un
déni de justice formel prohibé par l'art. 29 al. 2 Cst.

tenant à la motivation insuffisante du jugement ainsi qu'une
application arbitraire de l'art. 207 ch. 2 et 3 du Code de
procédure pénale du canton du Valais (CPP val.) et des
règles
cantonales relatives à la fixation des dépens.

La Cour d'appel pénale se réfère à son jugement.
G.________ conclut à l'admission du recours.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- Interjeté en temps utile contre une décision
prise en dernière instance cantonale par une personne direc-
tement touchée dans ses droits par la condamnation au paie-
ment de frais de justice, le recours de droit public est re-
cevable.

2.- Le recourant voit un déni de justice formel pro-
hibé par l'art. 29 al. 2 Cst. dans la motivation
insuffisante
du jugement attaqué s'agissant des frais de procédure mis à
sa charge.

a) La jurisprudence a notamment déduit du droit
d'être entendu découlant de l'art. 4 aCst. et garanti aujour-
d'hui par l'art. 29 al. 2 Cst., l'obligation pour l'autorité
de motiver sa décision, afin que l'intéressé puisse la com-
prendre, l'attaquer utilement s'il y a lieu et que
l'autorité
de recours puisse exercer son contrôle. Pour répondre à ces
exigences, il suffit que l'autorité mentionne, au moins briè-
vement, les motifs qui l'ont guidée et sur lesquels elle a
fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se
rendre compte de la portée de celle-ci et la combattre en
connaissance de cause. Le droit à une motivation écrite ex-
haustive n'existe pas. Il y a cependant violation du droit
d'être entendu si l'autorité ne satisfait pas à son devoir

minimum d'examiner et de traiter les problèmes pertinents
(ATF 126 I 97 consid. 2b p. 102/103; 124 II 146 consid. 2a
p.
149/150; 122 IV 8 consid. 2c p. 14/15 et les arrêts cités).

b) Dans le cas présent, même si c'est de manière
succincte, la Cour d'appel pénale a clairement indiqué aux
considérants 7b/ee et 7b/ff les comportements illicites et
fautifs qu'elle reprochait au recourant et qui ont amené les
dénonciateurs et les autorités de poursuite à introduire et
à
étendre l'action pénale à son encontre. Dans ce sens,
D.________ était en mesure de comprendre le jugement
cantonal
et de l'attaquer devant le Tribunal fédéral en connaissance
de cause, en tout cas en ce qui concerne les considérants
7b/ee et 7b/ff le visant directement et personnellement.

Quant aux considérants 7b/aa et 7b/cc, ils englobent
de manière moins nette le comportement du recourant dans ce-
lui de ses associés ou partenaires, mais il apparaît ici éga-
lement que la cour cantonale lui a reproché une faute de pro-
cédure au sens large, même si le lien de causalité entre son
comportement fautif et l'introduction de la procédure pénale
n'est pas clairement évoqué. De toute manière, dans cette
dernière hypothèse, comme dans celle des considérants 7b/ee
et 7b/ff, le recourant a pu longuement et en détail faire va-
loir ses moyens contre la décision entreprise, ce qui révèle
le caractère suffisant de la motivation litigieuse, pour
écarter les griefs de violation du droit d'être entendu et
de
déni de justice formel.

3.- Le recourant prétend que sa condamnation à payer
une partie des frais d'instruction de la procédure
principale
à concurrence de 7'460.30 fr. consacrerait une violation de
la présomption d'innocence ancrée à l'art. 6 § 2 CEDH.

a) L'art. 207 ch. 3 CPP val. prévoit que le prévenu
acquitté qui, par sa faute, a donné lieu à une poursuite pé-

nale ou l'a rendue difficile, peut être condamné au paiement
de tout ou partie des frais. Cette disposition de droit can-
tonal correspond aux principes dégagés par la jurisprudence,
selon laquelle la présomption d'innocence garantie par les
art. 6 § 2 CEDH et 32 al. 1 Cst., n'empêche pas que les
frais
puissent être mis à la charge du prévenu libéré, à condition
que celui-ci ait clairement violé une norme de comportement
écrite ou non écrite, résultant de l'ordre juridique suisse
pris dans son ensemble - dans le sens d'une application par
analogie des principes qui découlent de l'art. 41 CO - et
qu'il ait ainsi occasionné la procédure pénale ou qu'il en
ait entravé le cours. Le comportement fautif doit être déter-
minant et se trouver en rapport de causalité avec les faits
imputés, le fardeau de la preuve du comportement fautif in-
combant à l'Etat (ATF 119 Ia 332 consid. 1b p. 334; 116 Ia
162 consid. 2 p. 165 ss; Gérard Piquerez, Procédure pénale
suisse, Zurich 2000, p. 677).

b) La cour cantonale a notamment estimé que
D.________ avait eu un comportement relevant pour partie du
dol (art. 28 CO) dans le cadre de la vente d'actions
de X.________, en présentant notamment à C.________ des
budgets prévisionnels dénués de toute valeur qui ont
contribué à la décision de celui-ci d'acquérir des actions
de
la société. Considérant que "le dol civil n'est rien d'autre
qu'une escroquerie au pénal", le recourant invoque à cet
égard la violation de la présomption d'innocence.

Ce faisant, il perd de vue que l'autorité intimée a
considéré comme l'un des fondements de l'obligation de payer
une partie des frais de justice un comportement dolosif au
sens de l'art. 28 CO, sans indiquer que celui-ci aurait pu
correspondre aux éléments constitutifs de l'escroquerie au
sens de l'art. 146 CP. Seule est ainsi mise en cause la res-
ponsabilité civile, précontractuelle ou délictuelle (cf. ATF
61 II 228), du recourant à l'exclusion du reproche larvé de

s'être rendu coupable d'une escroquerie, qui ne ressort nul-
lement de la rédaction du jugement entrepris. Or, si le Tri-
bunal fédéral examine librement le grief tiré de la
violation
de la présomption d'innocence, en vérifiant notamment que la
décision de condamnation au paiement des frais de procédure
du prévenu acquitté ne contient pas implicitement le
reproche
d'avoir commis l'infraction dénoncée, il ne contrôle que
sous
l'angle de l'arbitraire si l'intéressé a violé manifestement
une norme juridique écrite ou non écrite, provoquant ainsi
l'ouverture d'une enquête pénale ou en aggravant le cours
(ATF 116 Ia 162 consid. 2f p. 175). En l'espèce, la
référence
à l'art. 28 CO, pris comme règle de comportement, échappe au
grief d'arbitraire.

c) Plus délicate est l'appréciation de l'affirmation
de la Cour d'appel pénale selon laquelle D.________ et
H.________ "ont réalisé les éléments constitutifs objectifs
de faux dans les titres (art. 251 ch. 1 CP)" en présentant
au
Crédit Suisse un bilan d'ouverture de X.________ inexact
pour
l'obtention d'un crédit en faveur de la société. A cet
égard,
le recourant soutient que l'autorité intimée a violé la
présomption d'innocence, notamment parce que le Tribunal
d'arrondissement l'avait acquitté de ce chef d'accusation.

Le recourant oppose toutefois en vain la décision
d'acquittement du premier juge à celle de la Cour d'appel pé-
nale s'agissant des frais de justice. Cette dernière a rele-
vé, à propos de l'obtention d'un crédit en faveur
de X.________ S.A. en 1987, que différents postes du bilan
d'ouverture ne correspondaient pas à la situation réelle de
la société. Tel était le cas de la constitution du capital-
actions à hauteur de 800'000 fr., alors que seuls 600'000
fr.
figuraient sur le compte de consignation auprès de la Banque
Cantonale du Valais. Il en allait de même d'un "brevet" - en
réalité un contrat de licence - porté à l'actif du bilan
pour
une valeur de 600'000 fr., alors que le titulaire des droits

les avait cédés pour un montant de 250'000 fr. En rappelant
ces "éléments constitutifs objectifs de faux dans les ti-
tres", la Cour d'appel pénale ne revient pas sur le prononcé
d'acquittement du Tribunal de première instance, comme si
elle insinuait qu'elle aurait probablement rapporté cette
décision si elle en avait été régulièrement saisie. Dans son
jugement du 26 octobre 1998, le Tribunal d'arrondissement a
également rappelé ces faits, avant de relever que, du point
de vue subjectif, les accusés n'avaient pas voulu ou accepté
que le bilan d'ouverture de la société présenté au Crédit
Suisse contienne une altération de la vérité dans le but de
tromper autrui, ce qui avait entraîné la libération du chef
d'accusation de faux dans les titres, "en l'absence de réali-
sation des éléments constitutifs subjectifs".

En reprenant les divergences entre les postes indi-
qués au bilan et la réalité découlant elle-même d'autres ti-
tres ou d'autres moyens de preuve, la cour cantonale pouvait
considérer que le comportement visé engageait la responsabi-
lité civile de ses auteurs, avec comme conséquence l'obliga-
tion de supporter les frais de justice afférents à la procé-
dure pénale qu'ils avaient provoquée. Dans ce sens, la men-
tion de "faux dans les titres (art. 251 ch. 1 CP)" ne consti-
tue pas une atteinte implicite à la présomption d'innocence,
en ce que ni le Tribunal d'arrondissement, ni la Cour d'ap-
pel, n'ont laissé entendre que D.________ aurait commis
cette
infraction, même si les deux juridictions cantonales ont
successivement constaté des éléments clairement établis,
prouvant que le recourant avait présenté au Crédit Suisse un
bilan de la société
X.________ S.A. contenant objectivement
des postes différents de la réalité. En cela, il avait
engagé
sa responsabilité civile, mais sans qu'une quelconque respon-
sabilité pénale ne lui soit reprochée.

d) En conséquence, la Cour d'appel pénale n'a pas
versé dans l'arbitraire en retenant les comportements
décrits
plus haut comme étant le fondement d'une condamnation aux
frais de justice, sans implicitement faire le reproche d'une
faute pénale, la notion d'escroquerie n'étant pas mentionnée
ni insinuée à l'appui de cette argumentation, et celle de
faux dans les titres envisagée uniquement sous l'angle des
éléments constitutifs matériels, sans que l'acquittement du
Tribunal d'arrondissement ne soit remis en cause, même im-
plicitement ou de manière allusive.

Au surplus, la mention que certaines infractions,
qui auraient dû être envisagées - comme la gestion déloyale
-,
ne l'ont pas été "compte tenu de la prescription", n'est pas
pertinente dans la mesure où la juridiction cantonale ne re-
prend pas cet argument pour asseoir sa décision sur les
frais
de justice, mais l'évoque uniquement pour s'opposer au grief
soulevé devant elle, de violation du principe de la célérité.

e) Le moyen tiré de la violation de la présomption
d'innocence doit en conséquence être écarté.

4.- Le recourant se plaint également d'une applica-
tion arbitraire de l'art. 207 ch. 2 et 3 CPP val. selon les-
quels le prévenu qui est acquitté purement et simplement ne
peut être condamné aux frais à moins qu'il n'ait donné lieu,
par sa faute, à la poursuite pénale ou l'a rendue difficile.

a) Une décision est arbitraire lorsqu'elle viole
gravement une norme ou un principe juridique clair et indis-
cuté, ou lorsqu'elle contredit d'une manière choquante le
sentiment de la justice et de l'équité; à cet égard, le Tri-
bunal fédéral ne s'écarte de la solution retenue par l'auto-
rité cantonale de dernière instance que si elle apparaît in-
soutenable, en contradiction manifeste avec la situation ef-
fective, adoptée sans motifs objectifs et en violation d'un

droit certain. En outre, il ne suffit pas que les motifs de
la décision critiquée soient insoutenables, encore faut-il
que cette dernière soit arbitraire dans son résultat (ATF
126
I 168 consid. 3a p. 170 et l'arrêt cité). Il n'y a pas arbi-
traire du seul fait qu'une autre interprétation de la loi
soit possible, ou même préférable (ATF 124 I 247 consid. 5
p.
250/251; 120 Ia 369 consid. 3a p. 373).

b) Pour justifier la prise en charge par D.________
d'une partie des frais de justice, la Cour d'appel pénale a
retenu que ce dernier avait violé ses devoirs de diligence à
l'égard de X.________, qu'il avait par ailleurs eu un
comportement dolosif dans le cadre de la vente d'actions de
la société en 1997, qu'il en avait été de même en 1987 par
la
présentation d'un bilan d'ouverture de X.________ au Crédit
Suisse, en vue de l'obtention d'un crédit en faveur de
celle-ci, cette dernière attitude correspondant aux éléments
constitutifs objectifs de l'infraction de faux dans les
titres. Elle a aussi pris en considération la participation
du recourant à la surévaluation d'un droit de licence, au
moment de la fondation de la société, ainsi que sa
participation à des actes de gestion dont la pertinence
était
controversée et dont l'effet était d'accroître la perte
d'exploitation de la société pour 1987, au point de la
placer
en état de surendettement. La cour cantonale a ainsi admis
que ces comportements illicites étaient objectivement
propres
à faire naître de sérieux soupçons quant à la commission
d'infractions et se trouvaient en relation de causalité di-
recte avec l'ouverture de l'instruction et son extension.
Dans ce sens, la Cour d'appel pénale n'a pas interprété arbi-
trairement l'art. 207 ch. 3 CPP val., lorsqu'elle a vu dans
l'attitude du recourant, décrite ci-dessus, des
comportements
illicites et fautifs en rapport de causalité avec
l'ouverture
et l'extension de la procédure pénale.

A cet égard, les mêmes considérations que celles
avancées plus haut quant à la compatibilité de la condamna-
tion aux frais, dans ces circonstances, avec la présomption
d'innocence, peuvent être reprises sans autre pour la cons-
tatation du caractère non arbitraire de la condamnation au
paiement de tout ou partie des frais, en application de
l'art. 207 ch. 3 CPP val. Il importe à cet égard peu que la
cour cantonale n'a pas indiqué quelle norme de comportement
spécifique le recourant aurait violée en qualité de
fondateur
ou d'administrateur de fait de X.________, dans les
considérants où son activité est mentionnée collectivement
avec celle des autres prévenus. Même si l'autorité intimée
n'a pas précisé par divers articles du Code des obligations
les normes de comportement qui auraient pu être enfreintes
par le recourant, et si elle ne s'est pas étendue sur la na-
ture fautive de cette attitude et sur le rapport de
causalité
entre cette dernière et l'introduction ou l'extension de la
procédure pénale, il ressort de l'ensemble de sa motivation
que le recourant a adopté un comportement contraire à la
bonne foi (art. 2 al. 1 CC), soit un principe juridique géné-
ral de droit écrit ayant une portée universelle dans l'ordre
juridique suisse (ATF 122 I 328 consid. 3a p. 333/334 et les
références), et susceptible d'entraîner la procédure pénale
en cause.

Le moyen tiré d'une application arbitraire de l'art.
207 ch. 3 CPP val. est en conséquence infondé.

5.- Le recourant prétend enfin que la Cour d'appel
pénale aurait arbitrairement appliqué l'art. 210 CPP val.,
dans sa teneur modifiée par l'art. 46 ch. 1 de loi
valaisanne
du 14 mai 1998 fixant le tarif des frais et dépens devant
les
autorités judiciaires et administratives (LTar), ainsi que
les dispositions pertinentes de cette dernière loi.

a) Il est constant que s'appliquait en l'espèce la
loi fixant le tarif des frais et dépens, entrée en vigueur
le
1er janvier 1999, novelle qui a notamment abrogé le décret
cantonal fixant le tarif des frais de justice, du 28 mai
1980
(DTFJ - cf. les art. 45 let. a LTar, mis en relation avec
l'art. 47 al. 2 de la même loi).

b) A teneur de l'art. 3 al. 1 LTar, les dépens, ar-
rêtés globalement, comprennent une indemnité et les frais
d'avocat; ils couvrent, en principe, les frais
indispensables
occasionnés par le litige. L'indemnité au sens de l'art. 3
al. 1 LTar comprend le remboursement des débours et, lorsque
des circonstances particulières le justifient, un dédommage-
ment pour la perte de temps ou de gain (art. 3 al. 2 LTar).
Les frais d'avocat, au sens de l'art. 3 al. 1 LTar, compren-
nent les honoraires, calculés selon l'art. 26ss LTar, aux-
quels s'ajoutent les débours (art. 3 al. 3 LTar). Les hono-
raires de l'avocat sont fixés entre un minimum et un maximum
prévus par la loi, d'après la nature et l'importance de la
cause, ses difficultés, l'ampleur du travail fourni, le
temps
utilement consacré par l'avocat à sa mission et la situation
financière de la partie (art. 26 al. 1 LTar). Selon l'art.
36
LTar, le montant de l'honoraire varie entre 500 et 5000 fr.
pour la procédure devant le juge d'instruction pénale (let.
d) et entre 1000 et 8000 fr. pour la procédure devant le tri-
bunal d'arrondissement en première instance (let. f). Dans
les causes ayant nécessité un travail particulier, notamment
lorsque les moyens de preuve ont été longs et difficiles à
réunir ou à coordonner, que le dossier de la procédure proba-
toire a pris une ampleur considérable, que les questions de
fait ou de droit ont été spécialement compliquées, que l'avo-
cat représente plusieurs parties ou que son client est
opposé
à plusieurs parties, l'autorité peut accorder des honoraires
d'un montant supérieur à celui prévu par le tarif (art. 28
al. 1 LTar).

Au terme de toute procédure, l'ampleur et le sort
des dépens sont arrêtés dans le jugement ou la décision,
sous
réserve du cas où la décision sur les dépens est renvoyée à
fin de cause (art. 30 al. 1 LTar). A teneur de l'art. 30 al.
2 LTar, jusqu'au débat ou dans le délai assigné par l'auto-
rité, la partie peut déposer un décompte présentant ses dé-
bours au sens de l'art. 3 al. 2 LTar (let. a); l'indemnité
au
sens de l'art. 3 al. 2 LTar (let. b); les honoraires et dé-
bours d'avocat au sens de l'art. 3 al. 3 LTar (let. c). L'au-
torité fixe les honoraires en chiffres ronds, en motivant sa
décision (art. 30 al. 3 LTar).

Sur ce dernier point, le droit valaisan accorde aux
parties une garantie plus étendue que celle conférée par
l'art. 29 al. 2 Cst., puisqu'il exige de l'autorité qu'elle
motive dans tous les cas sa décision sur le montant des
frais
et dépens, sous réserve du cas visé à l'art. 30 al. 4 LTar.
Le Tribunal fédéral doit donc vérifier si la Cour d'appel pé-
nale a fait une application arbitraire des dispositions pré-
citées. Celles-ci sont en revanche muettes au sujet du conte-
nu de la motivation qu'elles imposent et le recourant ne
fait
pas état d'une jurisprudence des autorités de son canton qui
aurait élucidé la question. Il faut dès lors s'en tenir sur
ce point aux exigences minimales fixées par la jurisprudence
(ATF 111 Ia 1 consid. 2a) et examiner librement si la cour
cantonale les a respectées.

c) Le défenseur du recourant a produit un décompte
de frais et honoraires mentionnant 275 heures et proposé un
tarif horaire de 350 fr.

La Cour d'appel pénale ne s'est pas déterminée sur
le nombre d'heures consacrées utilement à la défense du re-
courant, au sens de l'art. 26 al. 1 LTar. Elle a relevé les
très fortes disparités entre les exigences des mandataires
des cinq coaccusés, soit respectivement 41 heures, 90
heures,

110 heures, 210 heures et 275 heures en ce qui concerne le
recourant. Elle a aussi souligné les différentes prétentions
tarifaires des mandataires, oscillant de 300 fr. à 350 fr.,
TVA non comprise, tout en relevant l'évolution faite en ma-
tière de rémunération horaire entre 1991 et l'entrée en vi-
gueur de la loi fixant le tarif des frais et dépens, sous
l'empire de laquelle il est désormais admis qu'un tarif ho-
raire de 240 fr., TVA comprise, représente une rémunération
équitable. Appliquant ensuite les principes retenus dans la
jurisprudence récente (cf. notamment arrêts non publiés des
17 avril et 24 octobre 2000 dans les causes R. contre Minis-
tère public du Valais central), elle a détaillé pour chaque
accusé et pour chacune des phases de la procédure (instruc-
tion, Tribunal d'arrondissement et instance d'appel), les
montants auxquels elle a arrêté leurs dépens. Concernant
plus
particulièrement le recourant, la juridiction cantonale a
fixé les honoraires de ses mandataires successifs à 6'500
fr.
pour l'instruction, à 8'000 fr. pour la procédure de
première
instance et à 7'000 fr. en appel, soit des montants restant
dans les limites de l'art. 36 let. f et i LTar, sous réserve
d'un léger dépassement du maximum fixé à l'art. 36 let. d
LTar s'agissant de la phase d'instruction.

Concernant cette dernière, la cour cantonale a re-
levé les interventions successives des deux mandataires du
recourant, et celles effectuées par son dernier conseil pour
un autre inculpé, avant d'observer que l'administration des
moyens de preuve complémentaires requis par le prévenu avait
nécessité quatre séances d'une vingtaine d'heures.
S'agissant
de la répartition des dépens devant le Tribunal d'arrondisse-
ment, elle a noté que l'avocat de D.________ avait déposé
"une écriture fouillée, à l'appui de ses conclusions". En ap-
pel, l'affaire se trouvait très simplifiée, limitée au seul
examen de l'infraction qui subsistait, étant précisé que
l'avocat du recourant avait dû développer des moyens particu-
liers quant à la participation des parties civiles à la pro-

cédure, les débats proprement dits à ce degré de juridiction
s'étant déroulés pendant sept heures.

Il ressort des considérants consacrés au recourant
et, plus largement, du jugement dans son ensemble, que la
procédure, tant à l'instruction qu'en première instance,
était particulièrement longue et difficile, dans un dossier
qui a pris une ampleur considérable et où le recourant était
opposé à plusieurs parties. Or, en constatant ces éléments,
tout en restant dans les limites de l'art. 36 LTar, la Cour
d'appel pénale a versé dans une contradiction qui ne peut
qu'être résolue par l'application de l'art. 28 al. 1 LTar et
qui doit entraîner l'annulation du jugement attaqué en tant
qu'il concerne la phase de l'instruction et celle de
première
instance (ATF 109 Ia 19 consid. 5f p. 29 et l'arrêt cité;
cf.
également ATF 124 III 34 consid. 2c p. 36). Pour la
procédure
d'appel en revanche, la cour cantonale a estimé l'activité
de
l'avocat du recourant de façon appropriée, compte tenu de la
durée des débats, en retenant qu'il avait présenté ses
moyens
pour le profit de tous les accusés et que sa déclaration
d'appel était fouillée, sous réserve de certains développe-
ments inutiles. A cet égard, la motivation et la décision de
la juridiction cantonale échappent au grief d'arbitraire.

Vu ce qui précède, il y a lieu d'annuler le chiffre
9 du dispositif du jugement rendu le 17 avril 2000 par la
Cour d'appel pénale, en tant qu'il arrête à 13'900 fr. le
montant des dépens dus au recourant par l'Etat du Valais,
cette juridiction devant statuer à nouveau sur le montant
des
dépens à octroyer au recourant pour la phase de
l'instruction
et celle du jugement de première instance, en tenant compte
des critères dégagés par la loi et par la jurisprudence, tel
que le nombre d'heures consacrées à la défense utile par les
mandataires
du recourant.

6.- Le recours doit ainsi être partiellement admis
dans le sens du considérant qui précède. Conformément à
l'art. 156 al. 2 OJ, il y a lieu de statuer sans frais. Le
canton du Valais versera en revanche des dépens réduits au
recourant, qui obtient partiellement gain de cause avec l'as-
sistance d'un avocat ainsi qu'à l'intimé G.________, qui
s'est très brièvement déterminé, dans le sens des
conclusions
partiellement admises du recourant (art. 159 OJ).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Admet partiellement le recours et annule le chif-
fre 9 du dispositif du jugement attaqué en tant qu'il fixe à
13'900 fr. le montant dû par l'Etat du Valais à D.________ à
titre de dépens.

Rejette le recours pour le surplus.

2. Dit qu'il n'est pas perçu d'émolument judiciaire.

3. Dit que l'Etat du Valais versera une indemnité de
1'000 fr. à titre de dépens au recourant et une indemnité de
100 fr. à titre de dépens à G.________.

4. Communique le présent arrêt en copie aux manda-
taires des parties, au Ministère public du Bas-Valais et au
Tribunal cantonal du canton du Valais.

Lausanne, le 10 novembre 2000
PMN/col

Au nom de la Ie Cour de droit public
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président,

Le Greffier,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 1P.519/2000
Date de la décision : 10/11/2000
1re cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-11-10;1p.519.2000 ?
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