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03/11/2000 | SUISSE | N°C.263/00

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 03 novembre 2000, C.263/00


«AZA 7»
C 263/00 Kt

IIe Chambre

composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, Meyer
et Ferrari; Frésard, Greffier

Arrêt du 3 novembre 2000

dans la cause

G.________, recourant, représenté par Me Christian Bruchez,
avocat, Genève,

contre

Caisse cantonale genevoise de chômage, rue de Mont-
brillant 40, Genève, intimée,

et

Commission cantonale de recours en matière d'assurance-
chômage, Genève

A.- G.________ a été engagé, dès le 1er sept

embre
1993, en qualité de réalisateur au service de T.________.
Selon un contrat de travail daté du 29 décembre 1995, il a
un horaire de ...

«AZA 7»
C 263/00 Kt

IIe Chambre

composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, Meyer
et Ferrari; Frésard, Greffier

Arrêt du 3 novembre 2000

dans la cause

G.________, recourant, représenté par Me Christian Bruchez,
avocat, Genève,

contre

Caisse cantonale genevoise de chômage, rue de Mont-
brillant 40, Genève, intimée,

et

Commission cantonale de recours en matière d'assurance-
chômage, Genève

A.- G.________ a été engagé, dès le 1er septembre
1993, en qualité de réalisateur au service de T.________.
Selon un contrat de travail daté du 29 décembre 1995, il a
un horaire de travail variable, réparti sur 170 jours par
an. Son salaire horaire est de 43 fr. 95.

Le 24 mars 1997, G.________, qui avait terminé la
réalisation d'une émission, s'est annoncé à l'assurance-
chômage. Il a déclaré mettre fin à son chômage à partir du
19 avril suivant. Durant cette période, il a perçu
15 indemnités de chômage, pour un montant total net de
2931 fr. 85.
Le 3 août 1998, il a présenté une nouvelle demande
d'indemnités de chômage, à partir du même jour, en indi-
quant qu'il était à nouveau momentanément sans travail.
Le 12 octobre 1998, la Caisse cantonale genevoise de
chômage a soumis le cas à l'examen de l'Office cantonal
genevois de l'emploi. Statuant le 19 octobre 1998, cet
office a nié l'aptitude au placement de l'assuré pour les
périodes du 24 mars au 18 avril 1997 et du 3 août au
31 août 1998, en considérant, notamment, que l'intéressé
n'avait pas la disponibilité nécessaire pour accepter un
emploi convenable durant les périodes très courtes pendant
lesquelles il était sans travail.
Pour la période du 3 août au 31 août 1998, l'assuré
n'a pas touché d'indemnités de chômage.

B.- Par décision du 26 février 1999, la Caisse canto-
nale genevoise de chômage a réclamé à l'assuré la restitu-
tion du montant précité de 2931 fr. 85.
Saisi d'un recours de l'assuré, le Groupe réclamations
de l'office cantonal de l'emploi l'a rejeté par décision du
12 juillet 1999.

C.- G.________ a recouru devant la Commission canto-
nale genevoise de recours en matière d'assurance-chômage,
qui a également rejeté son recours par jugement du
30 septembre 1999.

D.- G.________ interjette un recours de droit admi-
nistratif dans lequel il conclut à l'annulation du jugement

attaqué, en demandant au Tribunal fédéral des assurances de
dire qu'il ne doit pas rembourser la somme de 2931 fr. 85.
La caisse de chômage déclare se rallier aux considé-
rants du jugement attaqué. Quant au Secrétariat d'Etat à
l'économie (seco), il ne s'est pas déterminé au sujet du
recours.

Considérant en droit :

1.- Est litigieuse l'obligation du recourant de resti-
tuer le montant de 2931 fr. 85 qu'il a perçu à titre d'in-
demnités de chômage entre le 24 mars et le 18 avril 1997.

a) Selon l'art. 95 al. 1 LACI, la caisse est tenue
d'exiger du bénéficiaire la restitution des prestations de
l'assurance auxquelles il n'avait pas droit; elle exige de
l'employeur la restitution d'indemnités allouées en cas de
réduction de l'horaire de travail ou d'intempéries quand
cette indemnité a été versée à tort. Une telle restitution
suppose toutefois que soient remplies les conditions d'une
reconsidération ou d'une révision procédurale des décisions
par lesquelles les prestations litigieuses ont été allouées
(ATF 122 V 21 consid. 3a, 368 consid. 3 et la jurisprudence
citée). Cela vaut aussi, en principe, pour les prestations
qui ont été accordées sans avoir fait l'objet d'une déci-
sion formelle (voir ATF 122 V 369 consid. 3).
L'administration peut reconsidérer une décision for-
mellement passée en force de chose jugée et sur laquelle
une autorité judiciaire ne s'est pas prononcée quant au
fond, à condition qu'elle soit sans nul doute erronée et
que sa rectification revête une importance notable (ATF
122 V 21 consid. 3a, 173 consid. 4a, 271 consid. 2, 368
consid. 3 et les arrêts cités).

b) Les premiers juges ont considéré qu'il n'y avait
pas lieu d'examiner le cas sous l'angle de la reconsidéra-
tion ou de la révision, attendu que la décision de l'office
cantonal de l'emploi du 19 octobre 1998 n'avait pas été
attaquée; le grief tiré de l'absence d'un motif de reconsi-
dération ou de révision aurait dû être invoqué par le re-
courant à l'occasion d'un recours contre cette décision. Le
recourant conteste ce point de vue et soutient que la ques-
tion de la reconsidération ou de la révision doit être
examinée au stade de la demande - formulée par la caisse -
de restitution du montant litigieux.
Aux termes de l'art. 85 al. 1 let. e LACI, les autori-
tés cantonales statuent sur les cas qui leur sont soumis
par les caisses de chômage, concernant le droit de l'assuré
à l'indemnité (art. 81 al. 2 let. a LACI). Le cas échéant,
elles sont appelées à se prononcer sur la question de l'ap-
titude au placement, qui est une des conditions du droit à
l'indemnité de chômage (art. 8 al. 1 let. f LACI). A cet
effet, elles statuent sous la forme d'une décision de cons-
tatation.
Dans un arrêt récent en la cause L. du 8 août 2000
(C 416/98), destiné à la publication, le Tribunal fédéral
des assurances a précisé sa jurisprudence concernant les
décisions de constatation rendues par les autorités canto-
nales de chômage. Lorsqu'une telle décision est en force,
la caisse de chômage est liée par l'appréciation de l'au-
torité cantonale (ou du juge en cas de recours) au sujet
- par exemple - de l'aptitude au placement. Il se peut que
l'autorité cantonale, appelée à statuer sur un cas soumis à
examen par la caisse, constate que les conditions du droit
à des indemnités de chômage - déjà allouées par la caisse
dans un cas concret - n'étaient pas réalisées. Dans cette
éventualité, les prestations en cause apparaissent comme
indûment perçues et la caisse est tenue, aux termes de
l'art. 95 al. 1 LACI, d'en exiger la restitution, pour
autant que les conditions d'une reconsidération ou d'une

révision procédurale soient réalisées. Ces conditions n'ont
pas à être examinées par l'autorité cantonale appelée à se
prononcer sur le cas soumis à examen, puisque sa tâche
consiste exclusivement à trancher le point de savoir - le
cas échéant rétroactivement - si les conditions du droit à
la prestation sont remplies. Si l'autorité cantonale cons-
tate que tel n'est pas le cas, il appartient encore à la
caisse d'examiner la question de la restitution sous l'an-
gle de la reconsidération ou de la révision procédurale.

c) En l'espèce, on se trouve dans un cas de figure
typiquement visé par cette jurisprudence. Il convient donc
- contrairement à l'avis des premiers juges et comme le
soutient avec raison le recourant - d'examiner le cas sous
l'angle des conditions susmentionnées qui président à la
révocation des décisions administratives. Point n'est be-
soin toutefois, contrairement à ce que voudrait le recou-
rant, de renvoyer la cause à l'autorité cantonale pour
qu'elle procède à un tel examen. Les faits sont suffisam-
ment élucidés pour que l'on puisse se prononcer ici.
Le recourant est au bénéfice d'un contrat de travail
de durée indéterminée, aux termes duquel son employeur lui
garantit au moins 170 jours (pleins) de travail effectif
par année. Le recourant n'est sans activité que pendant des
laps de temps très brefs. Il n'est pas concevable qu'il
puisse être placé pendant de si courtes périodes. Ainsi,
pour la période d'indemnisation litigieuse (24 mars au
18 avril 1997), la durée du chômage invoqué était infé-
rieure à un mois (comp. avec ATF 123 V 214, plus spéciale-
ment 218 consid. 5a). Du reste, ces courtes périodes
d'inactivité (entre deux émissions) sont certainement
inhérentes à la profession de réalisateur de télévision.
Par ailleurs, l'assuré n'a jamais allégué qu'il était à la
recherche d'un travail à plein temps, en lieu et place
d'une activité de réalisateur. Bien au contraire, on cons-
tate à cet égard que du 25 mars au 5 avril 1997, il a

effectué cinq recherches d'emploi qui étaient pratiquement
toutes en relation directe avec sa profession (deux recher-
ches comme réalisateur, deux comme monteur-réalisateur et
une comme monteur de films).
Il apparaît ainsi clairement que le recourant n'était
pas apte à être placé durant la période en cause : d'une
part, entre le 24 mars et le 18 avril 1997, le temps dispo-
nible était trop court pour qu'un employeur potentiel fût
disposé à l'engager à titre temporaire; d'autre part il n'a
jamais été question que le recourant accepte un emploi
durable qui aurait pu lui être proposé en dehors de sa
profession (voir au surplus, à propos de l'aptitude au
placement, ATF 125 V 58 consid. 6a, 123 V 216 consid. 3 et
les références citées). On doit ainsi retenir que les déci-
sions (non formelles) par lesquelles les indemnités liti-
gieuses ont été versées au recourant étaient entachées
d'inexactitude manifeste.
Le recourant fait certes valoir que le fait d'avoir
été considéré comme apte au placement en 1997 ne consti-
tuait pas une interprétation manifestement fausse de la
loi. En effet, à cette époque et durant les années précé-
dentes, des employés de T.________ qui se trouvaient dans
une situation identique à la sienne auraient
- affirme-t-il - bénéficié des indemnités de chômage. Le
recourant n'apporte toutefois aucun élément de preuve à
l'appui de ses allégués. Quoi qu'il en soit, si, dans des
circonstances identiques, d'autres collaborateurs de
T.________ ont bénéficié d'indemnités de chômage, cela
n'enlève rien au caractère manifestement erroné des déci-
sions ici en cause.
Comme, en outre, la rectification de ces décisions
revêt incontestablement une importance notable, les condi-
tions d'une reconsidération et, partant, d'une restitution,
sont réalisées.

2.- A titre subsidiaire, le recourant soulève le moyen
tiré de la péremption du droit de la caisse de chômage de
lui réclamer les indemnités versées à tort. Si l'assurance-
chômage voulait nier son droit à l'indemnité pour la pério-
de du 24 mars au 18 avril 1997, elle disposait, à cette
époque déjà, de tous les éléments qui lui permettaient de
le faire. En tout cas, toujours selon le recourant, elle
aurait dû se rendre compte de son erreur au plus tard le
26 mai 1997, lorsqu'elle a reçu la formule d'attestation de
l'employeur, d'où il résultait, notamment, que l'assuré
était au bénéfice d'un contrat de durée indéterminée.
Aux termes de l'art. 95 al. 4, première phrase, LACI,
le droit de répétition se prescrit une année après que
l'organe qui a payé a eu connaissance des faits, mais au
plus tard cinq ans après le versement de la prestation.
Nonobstant la terminologie légale, il s'agit d'un délai de
péremption (ATF 124 V 382 consid. 1 et la jurisprudence
citée).
D'après la jurisprudence, le délai de péremption d'une
année de l'art. 95 al. 4 LACI commence à courir dès le
moment où la caisse de chômage aurait dû connaître les
faits fondant l'obligation de restituer, en faisant preuve
de l'attention que l'on pouvait raisonnablement exiger
d'elle (ATF 124 V 382 consid. 1). Lorsque la restitution
est imputable à une faute de l'administration (p. ex. une
erreur de calcul d'une prestation), on ne saurait considé-
rer comme point de départ du délai le moment où la faute a
été commise, mais bien celui auquel l'administration aurait
dû, dans un deuxième temps (p. ex., à l'occasion d'un con-
trôle comptable), se rendre compte de son erreur en faisant
preuve de l'attention requise. En effet, si l'on plaçait le
moment de la connaissance du dommage à la date du versement
indu, cela rendrait souvent illusoire la possibilité pour
une administration de réclamer le remboursement de presta-
tions versées à tort en cas de faute de sa part (ATF
124 V 382 consid. 1).

Appliqués au cas d'espèce, ces principes conduisent à
retenir que c'est au plus tôt au moment où l'assuré s'est
annoncé pour la seconde fois à l'assurance-chômage (début
août 1998) que l'administration a pu, dans un deuxième
temps, se rendre compte de l'erreur qu'elle avait commise.
Il ne s'est pas écoulé plus d'une année entre ce moment et
celui où la décision de restitution a été rendue. Partant,
le moyen tiré de la péremption du droit de la caisse est
mal fondé.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est rejeté.

II. Il n'est pas perçu de frais de justice.

III. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, à la
Commission cantonale genevoise de recours en matière
d'assurance-chômage, à l'Office cantonal genevois de
l'emploi et au Secrétariat d'Etat à l'économie.

Lucerne, le 3 novembre 2000

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la IIe Chambre :

Le Greffier :


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.263/00
Date de la décision : 03/11/2000
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-11-03;c.263.00 ?
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