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02/11/2000 | SUISSE | N°U.80/00

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 02 novembre 2000, U.80/00


«AZA 7»
U 80/00 Mh

IIIe Chambre

composée des Juges fédéraux Schön, Spira et Widmer;
von Zwehl, Greffière

Arrêt du 2 novembre 2000

dans la cause

D.________, recourant, représenté par Maître Mauro Poggia,
avocat, rue de Beaumont 11, Genève,

contre

Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents,
Fluhmattstrasse 1, Lucerne, intimée,

et

Tribunal administratif du canton de Genève, Genève

A.- a) D.________ travaillait comme manoeuvre au
service

de l'entreprise X.________ SA. A ce titre, il était
assuré contre le risque d'accident professionnel et non
professionnel auprès de l...

«AZA 7»
U 80/00 Mh

IIIe Chambre

composée des Juges fédéraux Schön, Spira et Widmer;
von Zwehl, Greffière

Arrêt du 2 novembre 2000

dans la cause

D.________, recourant, représenté par Maître Mauro Poggia,
avocat, rue de Beaumont 11, Genève,

contre

Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents,
Fluhmattstrasse 1, Lucerne, intimée,

et

Tribunal administratif du canton de Genève, Genève

A.- a) D.________ travaillait comme manoeuvre au
service de l'entreprise X.________ SA. A ce titre, il était
assuré contre le risque d'accident professionnel et non
professionnel auprès de la Caisse nationale suisse en cas
d'accidents (CNA).

U 80/00 Mh

Le 1er décembre 1997, l'employeur du prénommé a fait
parvenir à la CNA une déclaration d'accident LAA indiquant
que le 24 novembre 1997, l'assuré était «tombé d'une échel-
le». Quelques semaines plus tard, le directeur de l'entre-
prise a informé la CNA que selon les dires d'un témoin,
D.________ aurait provoqué l'accident «volontairement». La
CNA a alors ouvert une enquête et invité l'assuré à s'ex-
pliquer sur les circonstances de l'accident. Ce dernier a
exposé qu'il était monté sur une échelle en portant un
fagot de bois de 20 à 25 kilos et qu'ensuite, déséquilibré
par le poids de sa charge, il était tombé d'une hauteur de
2 mètres sur la tête; sous l'effet du choc, il s'était
évanoui pendant deux à trois minutes; un collègue l'avait
immédiatement transporté à la Permanence Y.________. Le
témoin étant revenu sur ses déclarations, la CNA a clos
l'enquête et pris en charge le cas.

b) Les premiers soins prodigués à D.________ furent
donnés par le docteur W.________, médecin-répondant de la
Permanence Y.________, qui a mis en évidence une commotion
cérébrale et des contusions au crâne, à la colonne cervica-
le, au coude ainsi qu'à la cuisse droite (rapport médical
initial LAA du 13 janvier 1998). Dans un rapport radio-
logique du 9 janvier 1998, la doctoresse H.________ a
mentionné «l'existence d'une lésion de l'appareil liga-
mentaire gauche avec une atteinte probable du ligament
alaire et des autres ligaments de la charnière». Ce
diagnostic n'a toutefois pas trouvé confirmation auprès des
docteurs E.________ et G.________, neurologues, que
l'assuré a consultés par la suite (rapports des 28 janvier
et 20 février 1998). Se plaignant de cervicalgies et de
céphalées permanentes, D.________ a été adressé à la Divi-
sion de Rééducation de l'Hôpital Z.________, où il a
séjourné du 26 février au 13 mars 1998 pour un traitement

de physiothérapie intensive; son état s'est amélioré (rap-
port de sortie du 17 mars 1998). Ensuite, il a été pris en
charge ambulatoirement par le docteur C.________. Ce
médecin a constaté l'apparition d'importants troubles
neuropsychologiques (oublis fréquents, difficultés de
concentration, cauchemars, apathie), ce qui l'a amené à
conclure, notamment, à un état dépressif et à un syndrome
de stress post-traumatique probables (rapport médical in-
termédiaire du 16 juin 1998). Devant l'importance de ces
troubles, l'assuré s'est soumis à divers examens complémen-
taires ainsi qu'à un traitement psychiatrique (rapports des
docteurs O.________, I.________ et P.________). Le 16 no-
vembre 1998, le docteur M.________, médecin d'arrondisse-
ment de la CNA, a procédé à un examen final de l'assuré.
Dans son rapport, ce praticien a conclu que s'agissant des
atteintes cervicales, le statu quo sine pouvait être consi-
déré comme atteint une année après la survenance de l'acci-
dent, si bien que sur le plan somatique, la CNA n'avait pas
à répondre du cas; en ce qui concerne les troubles psy-
chogènes présentés par l'assuré, il a admis que ceux-ci
s'inscrivaient dans un lien de causalité naturelle avec
l'accident, tout en réservant la question de la causalité
adéquate.

c) Se fondant sur l'avis du médecin d'arrondissement,
la CNA a, par décision du 29 janvier 1999, mis un terme à
ses prestations (indemnités journalières et prise en charge
des frais médicaux) avec effet au 28 février 1999. L'assuré
a formé opposition contre cette décision; à l'appui de
celle-ci, il a produit divers certificats médicaux des
docteurs C.________ et P.________. Appelée à donner son ap-
préciation, l'équipe médicale de médecine des accidents de
la CNA est parvenue à la conclusion que l'effet délétère
des diverses séquelles de l'accident était éteint après un
an d'évolution, et que la persistance des troubles était

générée par des facteurs psychiques, dont on pouvait ad-
mettre le rapport de cause à effet avec l'accident du
24 novembre 1997. En particulier, ces médecins ont nié
l'existence d'une lésion organique au niveau de la colonne
cervicale et écarté l'hypothèse, avancée par le docteur
C.________, d'un syndrome de stress post-traumatique,
l'événement à l'origine des troubles étant dépourvu de
caractère menaçant et impressionnant, condition nécessaire
au développement d'une telle affection (rapport du 7 mai
1999). Par décision du 21 juin 1999, la CNA a confirmé sa
position initiale.

B.- L'assuré a recouru contre la décision sur opposi-
tion de la CNA devant le Tribunal administratif du canton
de Genève, qui l'a débouté par jugement du 18 janvier 2000.
En bref, le tribunal a considéré que les troubles psy-
chiques n'engageaient pas la responsabilité de la CNA, en
raison de l'absence d'un lien de causalité adéquate avec
l'accident assuré.

C.- D.________ interjette recours de droit adminis-
tratif contre ce jugement dont il requiert l'annulation. Il
conclut, sous suite de frais et dépens, principalement, au
renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour un complé-
ment d'instruction sous la forme d'une expertise et, à
titre subsidiaire, au maintien, après le 28 février 1999,
des prestations d'assurances (indemnités journalières et
traitement médical).
La CNA conclut au rejet du recours. La Concordia Assu-
rance-maladie et accidents, à laquelle le recourant est af-
filié, a renoncé à présenter des observations, tandis que
la CMBB Assurance-maladie et accidents, assureur perte de
gain de l'employeur, a proposé la mise en oeuvre d'une ex-
pertise psychiatrique. De son côté, l'Office fédéral des
assurances sociales ne s'est pas déterminé.

Considérant en droit :

1.- Le litige porte sur le droit du recourant à des
prestations de l'assurance-accidents au-delà du 28 février
1999.

2.- Le jugement entrepris expose correctement les dis-
positions légales et les principes jurisprudentiels appli-
cables en l'espèce, de sorte qu'il suffit d'y renvoyer.

3.- Selon les nombreuses pièces médicales au dossier,
on peut retenir que les séquelles physiques de l'accident
du 24 novembre 1997 n'entraînent plus d'incapacité de tra-
vail (voir notamment les rapports des médecins de la CNA et
les appréciations du docteur C.________, médecin traitant,
qui, dès le mois juin 1998, a indiqué que l'inaptitude au
travail de son patient était principalement due à des trou-
bles psychologiques). Par ailleurs, au vu de ces mêmes
constatations médicales, on peut admettre l'existence d'un
lien de causalité naturelle entre cet accident et les
troubles psychiques dont souffre le recourant. Ce lien de
causalité naturelle - question de fait - étant établi, il
est dès lors superflu de procéder à une expertise médicale,
comme le demande le recourant ainsi que l'assureur perte de
gain de son employeur.

4.- Il reste à examiner si, selon le cours ordinaire
des choses et l'expérience de la vie, l'accident du 24 no-
vembre 1997 était propre à provoquer de tels troubles psy-
chiques (causalité adéquate).

a) Selon la jurisprudence, l'examen de la causalité
adéquate entre un accident et des troubles psychiques
nécessite d'abord de classifier l'accident en cause en
fonction de sa gravité, en s'attachant non pas à la manière
dont l'assuré a ressenti et assumé le choc traumatique,

mais en se fondant, d'un point de vue objectif, sur l'évé-
nement accidentel lui-même (ATF 115 V 139 consid. 6, 407 sv
consid. 5).
Bien que le caractère accidentel de la chute subie par
le recourant ait été initialement mis en doute, on retien-
dra, à la lumière des pièces versées au dossier, que celui-
ci est tombé d'une échelle d'une hauteur de 2 mètres et
qu'il s'est évanoui pendant 2 à 3 minutes avant d'être ame-
né à une permanence médicale, d'où il a pu ensuite regagner
son domicile. Objectivement, cet accident doit être classé
à la limite inférieure de la catégorie des accidents de
gravité moyenne, ce que le recourant ne conteste d'ailleurs
pas (pour comp. RAMA 1998 no U 307 p. 449). En effet, dès
lors qu'il a lieu de faire abstraction de la manière dont
l'assuré a ressenti et assumé le choc traumatique, force
est de constater que le déroulement de l'événement en cause
et l'intensité des atteintes qu'il a générées se sont pas
telles qu'il faille admettre l'existence d'un accident
grave.

b) Cela étant, l'analyse des critères objectifs posés
par la jurisprudence en matière de troubles psychiques con-
sécutifs à un accident de gravité moyenne (ATF 115 V 138 ss
consid. 6 et 407 ss consid. 5), ne permet pas de conclure,
en l'espèce, à l'existence d'un rapport de causalité adé-
quate entre l'accident du 24 novembre 1997 et les troubles
dont le recourant est affecté. D'une part, il n'existe
aucune circonstance de nature à faire apparaître l'accident
en cause comme impressionnant ou particulièrement drama-
tique : le fait que le recourant a perdu connaissance quel-
ques instants après le choc ne représente pas, en soi, un
élément suffisamment important pour admettre le contraire.
D'autre part, celui-ci n'a subi aucune lésion physique sé-
rieuse à la suite de sa chute. L'hypothèse d'une lésion
ligamentaire a certes été évoquée peu après l'accident,
mais ce diagnostic a pu rapidement être infirmé par deux
autres médecins, neurologues, qui n'ont, au demeurant,

observé aucune lésion particulière sur le plan neurolo-
gique. Quant à la durée du traitement médical, elle n'a
- en ce qui concerne les troubles somatiques - pas été
spécialement longue, puisqu'après un séjour hospitalier de
deux semaines au mois de février 1998, les douleurs cervi-
cales se sont notablement estompées et que c'est avant tout
les troubles psychiques développés depuis lors qui ont eu
une influence déterminante sur la capacité de travail du
recourant et nécessité la poursuite du traitement médical.
C'est dès lors à juste titre que la juridiction canto-
nale a considéré que l'intimée n'était pas tenue de verser
des prestations pour les conséquences des affections de na-
ture psychique dont est atteint le recourant.
Le recours se révèle par conséquent mal fondé.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est rejeté.

II. Il n'est pas perçu de frais de justice.

III. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au
Tribunal administratif du canton de Genève, à la
Concordia Assurance suisse de maladie et accidents, à
la CMBB Assurance-maladie et accident, ainsi qu'à
l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 2 novembre 2000

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la IIIe Chambre :

La Greffière :


Synthèse
Numéro d'arrêt : U.80/00
Date de la décision : 02/11/2000
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-11-02;u.80.00 ?
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