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01/11/2000 | SUISSE | N°6P.68/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 01 novembre 2000, 6P.68/2000


«/2»
6P.68/2000/ROD

C O U R D E C A S S A T I O N P E N A L E
*************************************************

1er novembre 2000

Composition de la Cour: M. Schubarth, Président, Président
du Tribunal fédéral, M. Kolly et Mme Escher, Juges.
Greffière: Mme Angéloz.
___________

Statuant sur le recours de droit public
formé par

Jean M u s y, à Bernex, représenté par Me Jean-Pierre
Garbade, avocat à Genève,

contre

l'arrêt rendu le 10 avril 2000 par la Chambre péna

le de la
Cour de justice genevoise dans la cause qui oppose le re-
courant à la F o n d a t i o n H i r o n d e l l e, ...

«/2»
6P.68/2000/ROD

C O U R D E C A S S A T I O N P E N A L E
*************************************************

1er novembre 2000

Composition de la Cour: M. Schubarth, Président, Président
du Tribunal fédéral, M. Kolly et Mme Escher, Juges.
Greffière: Mme Angéloz.
___________

Statuant sur le recours de droit public
formé par

Jean M u s y, à Bernex, représenté par Me Jean-Pierre
Garbade, avocat à Genève,

contre

l'arrêt rendu le 10 avril 2000 par la Chambre pénale de la
Cour de justice genevoise dans la cause qui oppose le re-
courant à la F o n d a t i o n H i r o n d e l l e, à
Lausanne, représentée par Me Charles Poncet, avocat à
Genève, et au Procureur général du canton de G e n è v e;

(art. 9, 29, 30 et 32 Cst.; art. 6 et 10 CEDH;
arbitraire, droit d'être entendu, droit à un
tribunal indépendant et impartial, droits
de la défense, liberté d'expression)

Vu les pièces du dossier, d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- a) Dans le cadre de la guerre civile et du
génocide survenus en 1994 au Rwanda, l'association
"Reporters Sans Frontières" (ci-après: RSF) a créé une
station de radio libre chargée de fournir une information
impartiale aux populations concernées, sous l'appellation
"Radio Agatashya" (ci-après: RA) signifiant en langue
kinyarwanda "Radio Hirondelle". Celle-ci a commencé à
émettre depuis la région de Bukavu, au Sud Kivu, en été
1994. A la fin de 1994, RSF s'est retirée du projet,
lequel a été repris par la "Fondation Hirondelle pour une
information en cas d'urgence" (ci-après: la Fondation
Hirondelle), qui fut inscrite au Registre du commerce de
Genève le 22 mars 1995 et dont le comité directeur était
composé des journalistes Philippe Dahinden, François
Gross et Jean-Marie Etter.

Bukavu se trouvait à proximité immédiate des
principaux camps de réfugiés, lesquels étaient également
considérés comme abritant des responsables du génocide et
des massacres perpétrés au Rwanda en 1994. Bukavu était
en outre le siège du gouvernement rwandais en exil, dont
un grand nombre d'observateurs estimait qu'il continuait
à exercer un contrôle sur les camps.

RA était essentiellement financée par la coopéra-
tion publique suisse, soit la Direction du Développement
et de la Coopération (ci-après: DDC).

A Bukavu, une cinquantaine de personnes ont tra-
vaillé sous la direction de Philippe Dahinden.

Les activités de RA ont pris fin au début de
l'année 1997.

b) Le journaliste Jean Musy a rédigé, signé et
fait publier, dans le numéro du 28 février au 13 mars
1997 du périodique "L'Objectif", un article intitulé "Et
si la "machine Agatashya" était une formidable escroque-
rie morale?"

Cet article était précédé d'un préambule en ca-
ractères gras ayant la teneur suivante:

"Les documents que nous révélons ici sont acca-
blants. Diktat de la coopération suisse sur le
projet, employés au service des responsables du
génocide, cassettes des programmes "vérifiées"
par un ex-ministre de l'ancien régime rwandais,
copinage entre journalistes, utilisation des
organisations humanitaires. Bref, la "machine"
Agatashya se révèle une formidable escroquerie
morale pour les populations africaines et le
contribuable helvétique qui lui a versé depuis
quatre ans plusieurs millions de francs."

L'article comportait notamment les passages sui-
vants:

"(...) En décembre dernier, le Conseiller
national Jean Ziegler (soc.) interpellait le
gouvernement au sujet de Radio Hirondelle, un
projet suisse de station à vocation humanitaire,
à Bukavu, au Zaïre. Il y dénonçait les millions
de francs du contribuable engagés dans la "mal-
heureuse entreprise" depuis deux ans et demi
pour un "effet nul, sinon néfaste". En Suisse
comme au Rwanda, plusieurs voix proches des
victimes du génocide avaient déjà dénoncé le
caractère tendancieux des informations, diffu-
sées par la station lancée en été 1994 par
Reporters sans frontières section suisse, à
destination des populations réfugiées
rwandaises.

(...) Le Conseil fédéral vient de lui répondre.
Il ne veut plus financer la radio Agatashya,

"Radio Hirondelle" en kinyarwanda. Sans vouloir
se déjuger sur son soutien passé, le gouverne-
ment suisse prend désormais ses distances avec
le projet. Pour s'assurer une sortie honorable,
il a pris soin de confier une évaluation externe
du travail de la station à trois experts
"neutres et indépendants" qui confirment en
substance son appréciation (...).

(...) Bien que présentée par ses initiateurs
comme le projet pilote de l'information objec-
tive et neutre, nous avions révélé dans ces
colonnes comment "la radio qui ne penche pas" a
servi de couverture à des opérations douteuses
pour le compte de la coopération suisse. Celle-
ci en a fait son instrument d'intervention dans
la région, derrière le paravent de l'action
humanitaire. Un véritable diktat (...).

(...) Rappelons que nombre de dignitaires de
l'ancien régime rwandais réfugiés dans les camps
zaïrois et responsables du génocide de 800.000
personnes au Rwanda, ont collaboré et dirigé des
projets suisses dans leur pays. Exemple: celui
des Banques populaires, le plus important. Pour
qui et pour quoi Philippe Dahinden est-il allé
tourner un film vidéo sur le fonctionnement des
Banques populaires dans ces camps de réfugiés?
Ces images, dont nous avons une copie, n'ont
jamais passé à la télévision. On y voit l'usage
du matériel pillé par les anciens responsables
rwandais du projet suisse. Les cadres des ban-
ques, en exil, sont parfaitement identifiables.

(...) N'oublions pas non plus l'ouverture d'un
coffre-fort volé des mêmes banques, dans la
maison suisse du projet Agatashya, à Bukavu.
Antoine Golay, responsable du bureau de coordi-
nation de la Direction de la coopération au dé-
veloppement (DDC) à Kigali, et Roland Tillmans,
journaliste de la Radio Suisse Romande et res-
ponsable suisse de Radio Hirondelle au Zaïre,
s'y échinaient, en short et à quatre pattes, à
coup de pied-de-biche et de meule électrique ...
Une tâche peu journalistique dans un projet de
radio qui se veut impartial, neutre et à voca-
tion humanitaire (...).

(...) Que dire encore sur la lecture de cas-
settes de Radio Agatashya et du courrier emmené
depuis la Suisse à Bukavu ou à Kigali, par un
membre de l'opposition de gouvernement actuel du
Rwanda? Dans une note interne no 6, datée du
8 mai 95, Jean-Pierre Husi, futur directeur de

la Fondation Hirondelle, confirme ainsi au Co-
mité de Fondation l'accord de James Gasana pour
cette tâche. Membre du Gouvernement du Président
Habyarimana à deux reprises, celui-ci a occupé
le poste de ministre de la Défense d'avril 1992
à juillet 1993, avant de quitter le pays pour la
Suisse. Il est un opposant notoire au régime de
coalition en place à Kigali (voir encadré). Son
recrutement manifeste-t-il le souci d'impartia-
lité et de neutralité tant affiché par les pro-
moteurs de Radio Hirondelle?

(...) D'après la charte de Radio Agatashya, les
organisations internationales et les Ong parte-
naires au projet lui transmettent "les informa-
tions qu'elles jugent utiles". Est-ce à dire que
la station dénoncera abus ou erreur les concer-
nant. En tout cas pas à l'antenne. Le filtre de
l'info humanitaire, c'est cela aussi. La bonne
information est celle qui est rendue crédible,
qui rassure les populations. Elle n'est pas la
vérité journalistique.

(...) Comment rendre compte de l'élection bidon
de chefs de camps de réfugiés rwandais, aux
mains couvertes de sang, comme nous l'avons
nous-mêmes constaté à Bukavu, sans légitimer la
prise d'otage des populations? Qu'importe. Et
même si des responsables de la radio sont com-
promis ou délibérément partisans, l'important
est que cela ne se sache pas (...)".

Ledit article faisait également état, dans un
encart intitulé "Un chèque en blanc sans frémissement",
d'une note interne n° 6 de Jean-Pierre Husi au Comité
directeur de la Fondation Hirondelle, en mai 1995,
retranscrite comme suit:

"Armon Hartmann, DDA (l'ex-DDC, NdR) m'informe
que l'ordre de nous verser les 200.000 fr. a été
signé et que cette somme devrait nous arriver
dans les quinze jours. Je l'informe de notre
intention d'adresser à la DDA une nouvelle
demande de subvention fédérale pour l'année en
cours. Pour M. Hartmann, cette demande devrait
couvrir la même période que celle pour la
demande de 200.000 fr., soit de mars 1995 à
avril 1996. Aucun frémissement de sa part à

l'évocation du chiffre possible de 500.000 fr.
pour cette future demande de crédit (...)".

Cette retranscription était suivie d'un remarque
de Jean Musy, précisant notamment:

"(...) La Confédération a ainsi versé "sans fré-
missement" plus d'un million et demi de francs
en 1995, sur ce mode-là. Avis aux amateurs.
(...) A voir les largesses dont jouit la Fonda-
tion Hirondelle, on comprend d'autant mieux la
politique de salaire pratiquée par la Fondation
Hirondelle envers ses cadres."

Etaient ensuite cités quelques exemples de sa-
laires, notamment ceux perçus par Jean-Pierre Husi et
Philippe Dahinden.

L'article comportait encore la liste des membres
du Conseil de la Fondation Hirondelle ainsi qu'une photo
de Jean-Marie Etter et François Gross, membres du Comité
directeur de ce conseil.

Enfin, dans un autre encart plus restreint, inti-
tulé "La Fondation ne répond plus", Jean Musy indiquait
avoir contacté Jean-Pierre Husi, alors directeur de la
Fondation Hirondelle, sans succès; il dénonçait "ce
mépris du droit à l'information" de la part des respon-
sables de la radio "qui ne penche pas".

c) Jean Musy a également rédigé, signé et fait
publier, dans le périodique "Gauchehebdo" du 6 mars 1997,
un article intitulé "Radio Hirondelle privée de crédits",
dans lequel il reproduisait les affirmations décrites
sous let. b ci-dessus.

d) Le 28 mai 1997, la Fondation Hirondelle, sous
les signatures de Jean-Marie Etter et Jean-Pierre Husi,
qui étaient alors respectivement son président et son
directeur, a déposé plainte pénale, pour calomnie et
diffamation, contre Jean Musy.

e) Par feuille d'envoi du 26 septembre 1997, le
Procureur général du canton de Genève a renvoyé Jean Musy
devant le Tribunal de police, retenant que les articles
incriminés étaient diffamatoires en tant qu'ils affir-
maient notamment:

- que la "machine" Agatashya s'était révélée une
formidable escroquerie morale pour les populations afri-
caines et pour le contribuable helvétique;

- que, selon des voix proches des victimes du
génocide, la radio avait diffusé des informations à
caractère tendancieux;

- que la radio avait servi de couverture à des
opérations douteuses pour le compte de la coopération
suisse;

- que la radio était compromise avec les respon-
sables du génocide, dont certains étaient employés par
elle;

- que les informations diffusées par la radio ne
correspondaient pas à la "vérité journalistique".

B.- Par jugement du 9 novembre 1999, le Tribunal
de police a condamné Jean Musy, pour diffamation (art.
173 CP), à la peine de 2 mois d'emprisonnement avec sur-
sis pendant 4 ans ainsi qu'à une amende de 1500 fr. Il a

en outre ordonné, en application de l'art. 61 CP, la
publication du dispositif du jugement dans les pério-
diques "Gauchehebdo" et "L'Objectif" ainsi que dans le
journal "Le Temps", selon des modalités qu'il a fixées et
sous la menace des peines prévues à l'art. 292 CP.

C.- Statuant sur appel du condamné, la Chambre
pénale de la Cour de justice, par arrêt du 10 avril 2000,
l'a rejeté, confirmant le jugement qui lui était déféré.
En bref et pour l'essentiel, elle a considéré qu'il avait
été admis à juste titre que les propos contenus dans les
articles incriminés étaient diffamatoires au sens de
l'art. 173 CP et que leur auteur n'avait pas prouvé la
véracité de ses allégations ni qu'il avait des raisons
sérieuses de les tenir de bonne foi pour vraies. La peine
et la publication du jugement ont également été confir-
mées.

D.- Jean Musy forme un recours de droit public
au Tribunal fédéral. Il se plaint du refus de la cour
cantonale de renvoyer les débats pour entendre des
témoins dont il avait demandé l'audition; il lui reproche
en outre de n'avoir pas examiné certains moyens de preuve
qu'il avait produits; il invoque encore une violation de
la liberté d'expression garantie par l'art. 10 CEDH. Il
conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué, sollicitant
par ailleurs l'assistance judiciaire.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- Le recourant se plaint du refus de la cour
cantonale d'ajourner les débats pour entendre des témoins
qui n'ont pu être entendus à une audience de la cour du
29 février 2000. Il soutient que ce refus viole son droit
à la convocation et à l'interrogation de témoins à dé-
charge, garanti par l'art. 6 ch. 3 let. d CEDH et pouvant
également être déduit du droit d'être entendu consacré
par l'art. 29 al. 2 Cst. et de celui de faire valoir les
droits de la défense consacré par l'art. 32 al. 2 Cst.;
dans ce contexte, il invoque également la violation ar-
bitraire de dispositions du droit cantonal et une viola-
tion de l'égalité de traitement en relation avec l'octroi
de l'assistance judiciaire, se plaignant en outre de ce
que l'absence de certains témoins leur ait été imputée à
faute et de ce que la pertinence de ces témoignages ait
été niée.

a) Le droit de fournir des preuves quant aux
faits de nature à influer sur le sort de la décision à

rendre est une composante du droit d'être entendu consa-
cré par l'art. 29 al. 2 Cst. (cf. ATF 122 I 53 consid. 4a
p. 55, 109 consid. 2a p. 112 et les arrêts cités). Il
peut également être déduit de l'art. 32 al. 2 Cst., qui
concrétise le droit d'être entendu consacré par l'art. 29
al. 2 Cst., en garantissant à l'accusé le droit d'être
mis en état de faire valoir les droits de la défense (cf.
FF 1997 I 189). Une garantie analogue a été déduite de
l'art. 6 ch. 3 let. d CEDH, qui concrétise le droit à
un procès équitable consacré par l'art. 6 ch. 1 CEDH
(ATF 125 I 127 consid. 6a p. 132; 124 I 274 consid. 5b
p. 284), en disposant que tout accusé a le droit d'in-
terroger ou faire interroger les témoins à charge et
d'obtenir la convocation et l'interrogation des témoins

à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à
charge. Les griefs de violation de l'art. 32 al. 2 Cst.
et de l'art. 6 ch. 3 let. d CEDH, tels qu'ils sont sou-
levés, se confondent donc avec celui de violation de
l'art. 29 al. 2 Cst., de sorte qu'il suffit d'examiner la
question sous cet angle.

b) En principe, l'autorité doit donner suite aux
offres de preuves présentées en temps utile et dans les
formes prescrites; il n'y a toutefois pas violation du
droit à l'administration de preuves lorsque la mesure
probatoire refusée est inapte à établir le fait à prou-
ver, lorsque ce fait est sans pertinence ou lorsque, sur
la base d'une appréciation non arbitraire des preuves
dont elle dispose déjà, l'autorité parvient à la conclu-
sion que les faits pertinents sont établis et que le
résultat, même favorable au requérant, de la mesure
probatoire sollicitée ne pourrait pas modifier sa con-
viction (ATF 125 I 127 consid. 6c/cc p. 134 s.; 124 I 274
consid. 5b p. 285; 122 V 157 consid. 1d p. 162; 121 I 306
consid. 1b p. 308 s. et les références citées).

c) Lors de l'audience de la cour cantonale du
13 décembre 1999, le recourant a demandé de pouvoir
prouver par des témoignages que les propos contenus dans
les articles incriminés étaient vrais ou du moins qu'il
pouvait le croire de bonne foi. La cour cantonale a donné
suite à cette requête et ajourné son audience au 29 fé-
vrier 2000. Le 19 janvier 2000, le recourant a déposé une
liste de huit témoins, à savoir: A.________, B.________,
C._______, D.________, E.________, F.________, G.________
et H.________. Ces trois dernières personnes étant domi-
ciliées à Bukavu, le président de la cour cantonale a
fait savoir au mandataire du recourant, par courrier du
31 janvier 2000, que le délai restant jusqu'à l'audience
du 29 février 2000, ne permettait plus de les citer en

temps utile. Par lettre du 3 février 2000, le mandataire
du recourant a toutefois persisté à requérir ces mesures
probatoires.

A l'audience du 29 février 2000, la cour a enre-
gistré les dépositions de A.________, B.________ et
C.________.

Bien que convoqués à cette audience, D.________
et E.________ ne se sont pas présentés; la première
s'était excusée par courrier du 3 février 2000, indiquant
qu'elle était en mission pendant trois mois à l'étranger,
et le second par téléfax du 28 février 2000, motivant son
absence par "la longue bureaucratie pour l'obtention du
visa et l'imprécision des modalités d'indemnité". La cour
cantonale a relevé que D.________ ne s'était pas non plus
présentée devant le tribunal de police, qui l'avait con-
voquée, produisant à deux reprises des certificats médi-
caux pour justifier ses absences; au demeurant, les ques-
tions que le recourant entendait poser à ce témoin
n'étaient pas déterminantes; quant à E.________, le
recourant n'avait pas demandé son audition en première
instance, ce qui indiquait que l'on pouvait se dispenser
de ce témoignage; dans ces conditions, il ne se justi-
fiait pas de renvoyer une fois de plus les débats pour
entendre ces deux témoins.

S'agissant des trois personnes domiciliées à
Bukavu, soit F.________, G.________ et H.________, la
cour cantonale a relevé que, bien que l'audience avait
été ajournée de plus de deux mois le 13 décembre 1999, le
recourant n'avait sollicité leur audition par la cour que
le 19 janvier 2000; or, à cette date, il n'était plus
possible de les citer à temps pour l'audience du 29 fé-
vrier 2000; sur requête du recourant du 18 janvier 1999,
ces témoins avaient d'ailleurs été convoqués à deux

reprises devant le tribunal de police, aux audiences des
18 mai et 21 septembre 1999, mais ne s'étaient jamais
présentés; un nouveau renvoi des débats, en vue d'une
éventuelle audition de ces témoins, ne se justifiait donc
pas.

d) Nonobstant l'intitulé de son grief, le recou-
rant ne s'en prend qu'au refus d'entendre quatre témoins,
à savoir D.________ et les trois personnes domiciliées à
Bukavu, et non cinq. Il ne conteste en effet nullement le
refus de la cour cantonale d'ajourner les débats pour
entendre le témoin E.________, dont il n'avait d'ailleurs
pas requis l'audition en première instance.

e) Le refus de la cour cantonale de renvoyer
l'audience pour entendre le témoin D.________ repose sur
deux motivations distinctes; d'une part, la cour canto-
nale a observé que ce témoin, qui avait vainement été
cité à plusieurs reprises en première instance, ne
s'était pas non plus présenté en seconde instance;
d'autre part, elle a considéré que, de toute manière, ce
témoignage ne serait pas déterminant au vu des questions
que le recourant entendait poser au témoin, se référant à
cet égard à un document déposé par le recourant à l'au-
dience.

Le recourant ne conteste pas qu'il était perti-
nent, pour juger de la nécessité de recueillir le té-
moignage litigieux, de se fonder sur les questions qu'il
avait indiqué vouloir poser au témoin dans le document
qu'il a déposé devant la cour cantonale. Il ne prétend
pas non plus que la cour cantonale aurait apprécié ce
document de manière arbitraire. Contrairement à ce qu'il
soutient, la cour cantonale disposait d'autres témoi-
gnages au sujet des faits sur lesquels reposait l'accu-
sation que la radio avait servi de couverture à des

opérations douteuses pour le compte de la coopération
suisse, notamment des déclarations de I.________, de
J.________, d'Antoine Golay, de Roland Tillmans et
de A.________, qui toutes infirment l'accusation
litigieuse et la portée attribuée par le recourant aux
faits allégués à l'appui. La cour cantonale pouvait dès
lors admettre sans arbitraire que le résultat, même fa-
vorable au requérant, de la mesure probatoire sollicitée
ne pourrait pas modifier sa conviction selon laquelle
l'accusation litigieuse était infondée. L'une des deux
motivations adoptées suffisant à justifier le refus de
renvoyer les débats pour entendre le témoin D.________,
ce refus ne viole pas le droit d'être entendu du recou-
rant.

f) Le refus d'ajourner les débats pour entendre
les trois témoins domiciliés à Bukavu a été justifié par
le fait que le recourant, qui aurait pu le faire plus
tôt, n'avait indiqué que le 19 janvier 2000 qu'il deman-
dait leur audition, alors qu'il était manifestement trop
tard pour les citer à l'audience arrêtée au 29 février
2000, étant en outre observé que, même si cette audience
était reportée, il était douteux que ces témoins puissent
être entendus, dès lors qu'ils avaient fait défection à
deux reprise en première instance.

Comme le recourant le relève lui-même, ce n'est
pas parce que le dépôt de la liste de témoins aurait été
tardif au regard des dispositions du droit cantonal de
procédure que la cour cantonale a refusé d'ajourner
l'audience pour entendre les trois témoins, mais parce
que, s'agissant de citer des témoins résidant à Bukavu,
le laps de temps restant jusqu'à l'audience était mani-
festement trop court. C'est donc en vain que le recourant
reproche à la cour cantonale d'avoir méconnu arbitrai-

rement les dispositions du droit cantonal relatives aux
conditions et au délai pour faire citer des témoins.

Le recourant ne pouvait manifestement ignorer que
faire citer des témoins résidant à Bukavu nécessitait des
démarches qui prendraient un temps relativement impor-
tant, puisque, sur sa demande, le tribunal de police
avait déjà effectué à deux reprises ces démarches. Il
devait donc faire diligence pour indiquer le plus tôt
possible à la cour cantonale de quels témoins entendus en
première instance il entendait demander la réaudition.
Les trois témoins domiciliés à Bukavu ayant été convoqués
à deux reprises par le tribunal de police, on doit en
déduire que leurs noms et adresses figuraient au dossier,
de sorte qu'une lettre ou un fax de quelques lignes suf-
fisait, ce qui pouvait être fait très rapidement et sans
aucune difficulté. Le recourant objecte vainement que la
cour cantonale, comme il le lui aurait proposé, aurait pu
s'en remettre à lui pour les convocations et se borner à
intervenir auprès des autorités fédérales compétentes
pour que des visas soient délivrés aux témoins; il est
évident, qu'une citation à comparaître devant une auto-
rité judiciaire doit émaner de cette autorité, et non
d'une partie à la procédure. C'est en vain aussi que,
pour justifier son retard à déposer la liste de témoins,
il tente de tirer argument du fait que son précédent
conseil avait abandonné la cause et que son nouveau
mandataire ne lui avait pas encore été désigné comme
défenseur d'office; la transmission de la liste des
témoins faisait manifestement partie des démarches ur-
gentes que le nouveau mandataire du recourant avait ac-
cepté de faire pour sauvegarder les droits de ce dernier
en attendant une décision formelle le désignant comme
défenseur d'office; preuve en est du reste que le man-
dataire du recourant n'a pas attendu cette décision,
intervenue le 4 février 2000, pour déposer cette liste;

il avait d'ailleurs accepté de faire plus, puisqu'il a
assisté le recourant à l'audience du 13 décembre 1999;
au demeurant, comme le recourant le souligne lui-même, il
était plus que prévisible qu'il serait mis au bénéfice de
l'assistance judiciaire. A l'audience d'introduction du
13 décembre 1999, la cour cantonale a fait droit à la
requête du recourant tendant à ce qu'elle procède à
l'audition de témoins et il est manifeste qu'elle était
disposée à faire ce qui était nécessaire pour que ceux-ci
puissent être entendus à l'audience du 29 février 2000,
dût-elle convoquer les témoins avant qu'une décision ac-
cordant l'assistance judiciaire au recourant soit rendue;
on ne voit dès lors pas en quoi le recourant aurait subi
un préjudice du fait que son nouveau mandataire ne lui
avait pas encore été désigné comme défenseur d'office, ni
en quoi son droit à l'égalité de traitement en relation
avec l'octroi de l'assistance judiciaire aurait été
violé.

En définitive, force est de constater que le re-
courant, qui aurait pu accomplir très rapidement la dé-
marche simple consistant à transmettre la liste de té-
moins à la cour cantonale, a mis plus de cinq semaines
depuis l'audience d'introduction pour la lui faire par-
venir, alors qu'il ne pouvait lui échapper qu'il devait
le faire sans tarder pour que les témoins domiciliés à
Bukavu puissent être cités à temps, et qu'il ne peut
justifier ce retard par aucun motif sérieux. On ne peut,
dans ces circonstances, que douter de la volonté réelle
du recourant de faire en sorte que les témoins domiciliés
à Bukavu puissent être entendus à l'audience du 29 fé-
vrier 2000; il apparaît au contraire n'avoir voulu que
retarder la procédure, de sorte que son comportement
s'apparente à une manoeuvre dilatoire; il ne peut en tout
cas le justifier par aucun motif sérieux. Un tel compor-
tement contrevient aux règles de la bonne foi. Dans ces

conditions, la cour cantonale était fondée à refuser de
renvoyer une nouvelle fois l'audience pour convoquer et
entendre les trois témoins et le recourant ne saurait se
plaindre d'une violation de son droit d'être entendu à
raison de ce refus.

Du fait qu'en première instance les trois témoins
avaient déjà été convoqués à deux reprises sans succès,
la cour cantonale était fondée à déduire que leur compa-
rution n'était au demeurant pas assurée. Contrairement à
ce que suggère le recourant, ce raisonnement ne revient
pas à affirmer que les témoins n'auraient volontairement
pas comparu; cette interprétation, que le recourant
n'évoque d'ailleurs que comme une hypothèse, ne trouve
aucun point d'appui dans l'arrêt attaqué. Toute l'argu-
mentation du recourant visant à démontrer que les
absences des témoins ne leur sont pas imputables et que
ce sont bien plutôt les autorités suisses qui en seraient
responsables est donc vaine. Au demeurant, le fait qu'en
première instance les témoins aient été convoqués à deux
reprises sans succès n'est qu'un argument subsidiaire de
la cour cantonale, qui a essentiellement refusé de ren-
voyer à nouveau les débats pour entendre les témoins en
raison du retard du recourant à déposer sa liste de
témoins; comme le refus fondé sur cette motivation
principale ne viole pas les droits constitutionnels du
recourant, il est superflu d'examiner la question plus
avant.

Au reste, le recourant s'efforce vainement de
démontrer que les témoignages des trois personnes domi-
ciliées à Bukavu seraient aptes à établir les faits à
prouver. Ce n'est pas parce qu'elle l'aurait nié que la
cour cantonale a refusé de reporter l'audience pour
entendre ces témoins.

g) Au vu de ce qui précède, le refus de la cour
cantonale de renvoyer l'audience du 29 février 2000 pour
entendre des témoins ne viole pas les droits de rang
constitutionnel invoqués par le recourant.

2.- Le recourant reproche à la cour cantonale de
n'avoir pas examiné certains moyens de preuve qu'il avait

produits en vue d'apporter la preuve de la vérité et de
sa bonne foi. Il formule à cet égard deux griefs dis-
tincts, pris, respectivement, d'une violation de son
droit à une décision motivée découlant du droit d'être
entendu garanti par l'art. 29 al. 2 Cst. et du droit
de l'accusé de faire valoir les droits de la défense
consacré par l'art. 32 al. 2 Cst. et d'une violation de
l'interdiction de l'arbitraire prohibé par l'art. 9 Cst.
Sur certains points, la cour cantonale n'aurait pas ex-
pliqué pourquoi elle a préféré certains témoignages,
défavorables au recourant, à d'autres, qui lui étaient
favorables; sur d'autres points, elle aurait opéré un
choix arbitraire entre les divers témoignages recueillis,
faisant même, sur l'un de ces points, preuve d'une par-
tialité contraire à l'art. 30 al. 1 Cst.

a) Le droit à une décision motivée est une compo-
sante du droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2
Cst. (ATF 126 I 97 consid. 2b p. 102). L'accusé peut
également le déduire du droit que lui confère l'art. 32
al. 2 2ème phrase Cst. d'être mis en état de faire valoir
les droits de la défense. Le droit à une décision motivée
correspond à l'obligation du juge de motiver sa décision,
de manière à ce que son destinataire puisse la comprendre
et l'attaquer utilement s'il y a lieu et à ce que l'auto-
rité de recours puisse exercer son contrôle (ATF 126 I 97
consid. 2b p. 102); il suffit, pour répondre à ces exi-
gences, que le juge mentionne, au moins brièvement, les

motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa dé-
cision, de sorte que l'intéressé puisse se rendre compte
de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de
cause; il n'a pas l'obligation d'exposer et de discuter
tous les arguments invoqués par les parties et il peut
passer sous silence ce qui, sans arbitraire, lui paraît à
l'évidence non établi ou sans pertinence (ATF 126 I 97
consid. 2b p. 102 s.; 124 II 146 consid. 2a p. 149; 124 V
180 consid. 1a p. 181; 123 I 31 consid. 2c p. 34; 123 II
175 consid. 6c p. 183 s.; 122 IV 8 consid. 2c p. 14 s.).

L'art. 9 Cst. garantit notamment à toute personne
le droit d'être traitée par les organes de l'Etat sans
arbitraire. Selon la jurisprudence, il n'y a pas
arbitraire du seul fait qu'une autre solution que celle
retenue par l'autorité cantonale pourrait entrer en
considération ou même qu'elle serait préférable; le
Tribunal fédéral ne s'écarte de la décision attaquée que
lorsqu'elle est manifestement insoutenable, se trouve en
contradiction claire avec la situation de fait, viole
gravement une norme ou un principe juridique indiscuté ou
encore lorsqu'elle heurte de manière choquante le senti-
ment de la justice et de l'équité. En outre, il ne suffit
pas que la motivation de la décision attaquée soit insou-
tenable; il faut encore que celle-ci apparaisse arbitrai-
re dans son résultat (ATF 124 V 137 consid. 2b p. 139;
123 I 1 consid. 4a p. 5 et les arrêts cités).

b) Le recourant reproche d'abord à la cour can-
tonale de n'avoir pas expliqué pourquoi, s'agissant du
transport, à une occasion, de courriers à travers la
frontière rwandaise, elle a préféré le témoignage de
Roland Tillmans à celui de B.________.

Les articles incriminés laissaient clairement
entendre que la radio avait effectué, en toute connais-

sance de cause, le transport de courriers évoqué par le
recourant en vue de "faciliter" les dignitaires de l'an-
cien régime rwandais et qu'elle avait ainsi servi de
couverture à des opérations douteuses. Le témoin Tillmans
n'a pas nié que ce transport avait eu lieu, mais a ex-
pliqué que "nous avons à ce moment-là commis une erreur,
par naïveté, car "nous pensions que notre personnel, soit
des journalistes rwandais ainsi que du personnel de mai-
son, qui vivaient la tragédie, devaient pouvoir corres-
pondre avec leurs familles au Rwanda et que nous devions
les aider". La déclaration de B.________ citée par le
recourant se borne à confirmer "qu'une fois des sacs de
journalistes suisses de la radio ont été ouverts à la
frontière et que des lettres de réfugiés des camps, à
leur famille au Rwanda, ont été trouvées dans ceux-ci".
Elle n'infirme nullement - et c'est ce qui est
déterminant - que la radio a agi en croyant erronément
qu'elle aidait son personnel rwandais, et non pas dans le
but insinué dans les articles incriminés. La déclaration
invoquée ne prouve donc aucunement la véracité de l'al-
légation litigieuse, de sorte qu'il pouvait être admis
sans arbitraire qu'elle n'était à cet égard pas perti-
nente.

S'agissant de la preuve de la bonne foi, il y a
lieu de rappeler qu'elle ne peut être apportée que par
des éléments dont l'auteur des propos diffamatoires avait
connaissance au moment où il a tenu ses propos (ATF 124
IV 149 consid. 3b p. 151 s. et les références citées). Or
le témoignage de B.________ invoqué par le recourant est
largement postérieur, puisqu'il remonte au 21 septembre
1999; il était donc à cet égard dépourvu de pertinence,
de sorte que la cour cantonale pouvait le passer sous
silence sans arbitraire.

En n'expliquant pas pourquoi elle ne faisait pas
état du témoignage invoqué, la cour cantonale n'a donc
pas violé le droit d'être entendu du recourant.

c) Le recourant reproche ensuite à la cour can-
tonale d'avoir retenu arbitrairement que le témoignage de
M.________ - selon lequel il n'y avait pratiquement pas
d'employés tutsis au sein de la radio, dont la quasi
totalité des employés était des hutus, appartenant à
l'ethnie même des génocidaires - n'était pas corroboré
par d'autres témoignages.

Examinant si les témoignages recueillis prou-
vaient la véracité de l'accusation du recourant selon
laquelle la radio était compromise avec les responsables
du génocide, la cour cantonale l'a nié; c'est dans ce
contexte qu'elle a écarté le témoignage de M.________,
considérant qu'il n'était pas corroboré par d'autres
dépositions, qui, au contraire, l'infirmaient.

Il est notoire que toutes les personnes apparte-
nant à l'ethnie des hutus n'ont pas participé au génocide
survenu au Rwanda en 1994. Que des hutus aient été em-
ployés par la radio ne suffirait donc pas à prouver que
l'accusation du recourant selon laquelle la radio était
compromise avec les responsables du génocide était vraie;
encore faudrait-il qu'il soit démontré qu'il s'agissait
de personnes ayant participé au génocide et, au demeu-
rant, que la radio, bien qu'elle aurait pu le faire dans
le contexte de l'époque, n'aurait rien entrepris pour
éviter d'engager des personnes ayant collaboré au géno-
cide. Les déclarations des témoins Golay et K.________
auxquelles se réfère la cour cantonale l'infirment
clairement. Quant aux déclarations des témoins
B.________, N.________ et C.________ citées par le
recourant, elles ne prouvent nullement que les

collaborateurs hutus de la radio auraient participé au
génocide et n'infirment en tout cas pas que la radio
s'est efforcée, dans le contexte de l'époque, d'éviter
d'employer des hutus ayant collaboré au génocide. Il n'y
avait dès lors aucun arbitraire, ni de partialité, à
admettre que le témoignage de M.________ n'était pas
corroboré par d'autres dépositions. Ce témoignage étant
au contraire infirmé par deux autres, il n'était pas
manifestement insoutenable de considérer que la véracité
de l'accusation litigieuse n'était pas prouvée.

d) Selon le recourant, le seul témoignage de
L.________ sur lequel s'est fondée la cour cantonale pour
nier que l'accusation selon laquelle la radio aurait
diffusé des informations ne correspondant pas à la
"vérité journalistique" "serait contredit par tous les
autres, surtout par celui du rédacteur en chef".

Contrairement à ce qu'il soutient, la cour can-
tonale s'est fondée sur deux témoignages concordants:
celui de L.________ - qui a déclaré que la charte de la
radio, qui préconisait que les commentaires et les élé-
ments sur lesquels ils se basaient devaient être véri-
fiés, avait toujours été respectée - et celui d'Antoine
Golay, qui a dit avoir été impressionné par le souci des
journalistes d'être toujours au plus près de la vérité.
A ces témoignages, le recourant, quoi qu'il en dise, ne
peut en opposer aucun qui les infirmerait. Les déclara-
tions faites le 21 septembre 1999 par le témoin
B.________, que le recourant cite de manière tronquée,
tendent au contraire à confirmer les témoignages retenus.
Selon ce témoin, le contrôle de l'information se faisait
en conseil de rédaction, puis il la vérifiait encore
avant la diffusion à l'antenne; par la suite, les
cassettes étaient ramenées en Suisse, où, parfois, elles
étaient encore contrôlées a posteriori, par pointages;

durant la période où il était rédacteur en chef, c'est
lui qui contrôlait les informations avant diffusion et il
y avait une critique interne après la diffusion de l'in-
formation. Au reste, le recourant s'efforce vainement de
démontrer que le contrôle des cassettes, qui, parfois,
était encore effectué en Suisse a posteriori n'était pas
fiable; ce qui est déterminant c'est que les informations
diffusées par la radio étaient régulièrement contrôlées
avant leur diffusion à l'antenne, comme l'exigeait la
charte de la radio, qui, selon deux témoins, a toujours
été respectée sur ce point. Il n'est dès lors aucunement
établi que la véracité de l'accusation litigieuse aurait
été niée arbitrairement.

e) Sous l'intitulé "faits pertinents passés sous
silence", le recourant reproche à la cour cantonale
d'avoir laissé de côté des éléments de preuve qu'il avait
produits et qui étaient propres à prouver la véracité de
ses propos ou qu'il pouvait les tenir de bonne foi pour
vrais; de manière arbitraire, elle n'aurait retenu que
les éléments qui lui permettaient de nier que ces preuves
avaient été apportées.

Sur une dizaine de pages, le recourant se livre à
une longue critique appellatoire, dans laquelle il re-
proche à la cour cantonale de n'avoir pas ou que partiel-
lement tenu compte de diverses déclarations, en parlant
d'arbitraire, sans exposer clairement dans quelle mesure
elle aurait omis "d'expliquer pourquoi" elle aurait écar-
té certaines déclarations et dans quelle mesure elle au-
rait apprécié arbitrairement les éléments de preuve qui
lui étaient soumis. Saisi d'un recours de droit public,
le Tribunal fédéral n'a toutefois pas à rechercher lui-
même, parmi celles qui apparaissent invoquées, de quelles
atteintes à ses droits constitutionnels le recourant en-
tend au juste se plaindre; il appartient à ce dernier

d'indiquer clairement, quels sont les droits constitu-
tionnels qui, selon lui, auraient été violés et de démon-
trer en quoi consiste cette violation (cf. art. 90 al. 1
let. b OJ; ATF 122 I 70 consid. 1c p. 73 et la jurispru-
dence citée). L'argumentation présentée en l'espèce ne
satisfait manifestement pas à ces exigences.

Autant qu'on le comprenne, le recourant paraît
surtout vouloir se plaindre d'arbitraire dans l'appré-
ciation des preuves, arbitraire qui n'est toutefois pas
démontré d'une manière qui satisfasse aux exigences de
motivation de l'art. 90 al. 1 let. b OJ (ATF 125 I 71
consid. 1c p. 76; 122 I 70 consid. 1c p. 73; 118 Ia 184
consid. 2 p. 189 et les arrêts cités; cf. également ATF
110 Ia 1 consid. 2a p. 3). Le recourant n'établit nulle-
ment que la cour cantonale aurait apprécié arbitrairement
les témoignages concordants sur lesquels elle s'est fon-
dée et qu'il était manifestement insoutenable d'en dé-
duire que la véracité des affirmations litigieuses
n'était pas prouvée; il ne démontre pas plus qu'il était
arbitraire d'admettre qu'il n'avait pas prouvé avoir fait
tout ce que l'on pouvait attendre de lui pour vérifier
l'exactitude de ses allégations et n'avait même jamais
expliqué à quelles vérifications il aurait procédé. Re-
discutant les faits comme s'il s'adressait à une juridic-
tion d'appel, il cite à l'appui des phrases extraites de
déclarations, qui ne suffisent manifestement pas à faire
admettre qu'il était arbitraire de nier qu'il avait prou-
vé la véracité de ses allégations et qu'il avait fait
tout ce que l'on pouvait attendre de lui pour s'assurer
de leur exactitude. Maints extraits de déclarations qu'il
invoque tendent essentiellement à démontrer que la radio
n'a pas pris le parti des opposants à l'ancien régime
génocidaire, non pas, comme l'affirmaient les articles
incriminés et comme devait le prouver le recourant, que
la radio se serait présentée faussement comme une source

d'information neutre. Autant qu'elles ne soient pas pos-
térieures aux allégations incriminées et, partant, que le
recourant pouvait s'en prévaloir pour apporter la preuve
de sa bonne foi, les déclarations invoquées ne prouvent
au reste nullement que le recourant aurait consciencieu-
sement vérifié les propos qu'il reproduisait. Au demeu-
rant, il n'est pas arbitraire d'accorder crédit à cer-
taines déclarations plutôt qu'à d'autres, si le choix ne
repose pas sur des motifs manifestement insoutenables, ce
qui, en l'occurrence, n'est pas démontré.

Le grief est par conséquent irrecevable.

3.- Le recourant invoque une violation de la
liberté d'expression garantie par l'art. 10 CEDH, faisant
valoir que le condamner pour diffamation à raisons des
propos qu'il a tenus, en tant que journaliste, n'est pas
admissible au regard de la garantie ainsi consacrée.

Le grief ainsi formulé revient à se plaindre
d'une application de l'art. 173 CP incompatible avec la
liberté d'expression garantie par l'art. 10 CEDH, soit
d'une violation indirecte, et non pas directe, de la
garantie de rang constitutionnel invoquée. Un tel grief,
comme le recourant du reste l'admet, doit être soulevé
dans un pourvoi en nullité, non pas dans un recours de

droit public; il a d'ailleurs été invoqué et examiné dans
le cadre du pourvoi déposé parallèlement par le recourant
(cf. arrêt 6S.295/2000 consid. 6). Le moyen est par con-
séquent irrecevable.

4.- Le recours doit ainsi être rejeté dans la
mesure où il est recevable.

Comme il était dépourvu de chances de succès,
l'assistance judiciaire doit être refusée (art. 152 al. 1
OJ) et le recourant sera condamné aux frais (art. 156 al.
1 OJ). Il n'y a pas lieu d'allouer une indemnité à l'in-
timée, qui n'est pas intervenue devant le Tribunal fédé-
ral dans la procédure de recours de droit public (art.
159 al. 1 OJ).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l ,

1. Rejette le recours dans la mesure où il est
recevable.

2. Rejette la requête d'assistance judiciaire.

3. Met à la charge du recourant un émolument
judiciaire de 800 francs.

4. Dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité.

5. Communique le présent arrêt en copie aux man-
dataires des parties, au Procureur général du canton de
Genève et à la Chambre pénale de la Cour de justice gene-
voise.
__________

Lausanne, le 1er novembre 2000

Au nom de la Cour de cassation pénale
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président, La Greffière,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 6P.68/2000
Date de la décision : 01/11/2000
Cour de cassation pénale

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-11-01;6p.68.2000 ?
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