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27/10/2000 | SUISSE | N°1P.520/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 27 octobre 2000, 1P.520/2000


«/2»

1P.520/2000

Ie C O U R D E D R O I T P U B L I C
**********************************************

27 octobre 2000

Composition de la Cour: Mme et MM. les Juges Aemisegger,
Président, Favre et Pont Veuthey, suppléante.
Greffier: M. Kurz.

Statuant sur le recours de droit public
formé par

F.________, représenté par Me Lionel Halpérin, avocat sta-
giaire à Genève,

contre

l'arrêt rendu le 2 août 2000 par la Chambre pénale de la
Cour
de justice du canton d

e Genève dans la cause qui oppose le
recourant au Procureur général du canton de Genève;

(procédure pénale;
droit d'inte...

«/2»

1P.520/2000

Ie C O U R D E D R O I T P U B L I C
**********************************************

27 octobre 2000

Composition de la Cour: Mme et MM. les Juges Aemisegger,
Président, Favre et Pont Veuthey, suppléante.
Greffier: M. Kurz.

Statuant sur le recours de droit public
formé par

F.________, représenté par Me Lionel Halpérin, avocat sta-
giaire à Genève,

contre

l'arrêt rendu le 2 août 2000 par la Chambre pénale de la
Cour
de justice du canton de Genève dans la cause qui oppose le
recourant au Procureur général du canton de Genève;

(procédure pénale;
droit d'interroger un témoin à charge)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- Le 11 avril 2000, le Tribunal de police de Genè-
ve a reconnu F.________ coupable d'infractions graves à la
loi fédérale du 3 octobre 1951 sur les stupéfiants (LStup,
RS
812.121) et l'a condamné à 4 ans de réclusion ainsi qu'à 15
ans d'expulsion du territoire de la Confédération.

B.- Sur appel du condamné, la Chambre pénale de la
Cour de justice a confirmé ce jugement par arrêt du 2 août
2000. Elle a rappelé que F.________ était poursuivi pour
avoir réceptionné et vendu à Fribourg 200 g de cocaïne envi-
ron, pour s'être préparé à y recevoir une seconde livraison
de l'ordre de 380 g destinés à la vente, pour être venu cher-
cher à Genève, le 22 octobre 1999, accompagné de M.________
et D.________, une valise censée contenir 3,4 kg de cocaïne,
amenés de Rio de Janeiro par S.________, elle-même
coïnculpée
pour ce fait.

Concernant ce troisième chef d'accusation, la Cham-
bre pénale a relevé que la police avait interpellé
S.________
dans un hôtel de Genève, alors qu'elle était en possession
d'une valise à double fond contenant 3,492 kg de cocaïne,
d'une pureté de 56%. Reconnaissant les faits, cette dernière
avait indiqué que la seule instruction qu'elle avait reçue à
Sao Paulo, d'un dénommé Paul, était de prendre une chambre
d'hôtel dès son arrivée à Genève. La police genevoise avait
alors pris des dispositions pour identifier les éventuels ap-
pels téléphoniques destinés à S.________. Elle a demandé aux
portiers de l'hôtel d'avertir les agents chargés de
l'enquête
en cas d'appels et leur a transmis, dans ce but, le numéro
de
téléphone mobile d'un des agents. Ce numéro a été communiqué
"par erreur" à un inconnu qui tentait de joindre S.________.
Comme plusieurs personnes ont ensuite appelé cet agent,
celui-ci s'est surnommé "Peter", afin de rester en contact

avec les trafiquants. Le 21 octobre 1999, un dénommé
M.________ a appelé "Peter" pour convenir d'un rendez-vous à
proximité de la gare, et prendre livraison de la valise. Le
22 octobre, "Peter" a apporté la valise au rendez-vous fixé;
M.________ l'a prise, puis a rejoint à la gare B.________ et
D.________, avant que ces trois personnes ne soient arrêtées
par la police. A la suite de diverses déclarations,
B.________, surnommé A.________, en réalité F.________, a
indiqué qu'il avait reçu un appel d'un dénommé I.________,
exploitant d'un coffee-shop à Amsterdam, qui lui avait
demandé de convaincre S.________ de retourner en Hollande
avec la valise contenant 3 kg de cocaïne, pour une "commis-
sion" de 8'000 à 10'000 fr. Il avait ensuite contacté
M.________, qui parlait un peu le français, et l'avait
chargé
d'arranger la rencontre à Genève avec "Peter".

La cour cantonale a retenu que l'audition de l'agent
infiltré comme témoin ne paraissait pas pertinente dans la
mesure où ses révélations étaient établies "à satisfaction
de
droit" et non contestées par l'appelant. De plus, cet agent
était "devenu infiltré involontairement", lorsque le numéro
de son téléphone mobile avait été communiqué "par erreur" à
un correspondant de S.________. F.________ avait alors
appelé
sans succès ce numéro, avant d'être contacté par l'agent in-
filtré qui lui avait seulement dit avoir constaté qu'on
avait
cherché à le joindre et qu'il devait rappeler plus tard, le
soir, pour atteindre S.________. A ce moment, l'agent infil-
tré a répondu que l'intéressée ne voulait pas lui parler. En
se bornant à réceptionner les appels téléphoniques destinés
à
S.________ et à remettre la valise de cocaïne à M.________
et
aux autres participants, selon des modalités fixées par ces
derniers, l'agent infiltré avait joué un rôle purement pas-
sif, ne faisant pas obstacle à la poursuite pénale, et ne
pouvant qu'entraîner un effet minime sur la mesure de la
peine infligée; le Tribunal de police en avait implicitement

tenu compte, en arrêtant cette dernière à 4 ans de
réclusion,
peine qui devait être confirmée.

C.- Agissant le 25 août 2000 par la voie du recours
de droit public, F.________ demande au Tribunal fédéral d'an-
nuler l'arrêt de la Chambre pénale du 2 août 2000, et de le
mettre au bénéfice de l'assistance judiciaire. Il invoque en
substance la violation de l'art. 6 § 3 let. d CEDH, en
raison
du refus de la juridiction cantonale d'entendre comme témoin
l'agent infiltré, pour déterminer avec précision le degré
d'influence de celui-ci sur son activité délictuelle. Il
voit
aussi une violation du droit d'être entendu dans ce que la
Chambre pénale n'a pas mentionné l'existence d'écoutes télé-
phoniques réalisées en violation des art. 8 § 1 et 2 CEDH,
13
al. 1 Cst. et 184A ss du code de procédure pénale genevois
(CPP/GE).

La Chambre pénale se réfère à son arrêt et le Procu-
reur général n'a pas déposé d'observations.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- Le Tribunal fédéral examine d'office et libre-
ment la recevabilité des recours qui lui sont soumis, notam-
ment en ce qui concerne le recours de droit public (ATF 126
I
81 consid. 1 p. 83 et les arrêts cités).

a) Au vu des arguments soulevés, seule la voie du
recours de droit public est ouverte en l'espèce, dans la me-
sure où le recourant n'invoque pas uniquement l'art. 6 § 3
let. d CEDH - quant au refus de l'audition de l'agent infil-
tré - pour se plaindre de la fixation de la peine qui pour-
rait, à son avis, être réduite (ATF 118 IV 115 consid. 2a p.
118/119 et les arrêts cités).

b) Le recourant est personnellement touché par l'ar-
rêt attaqué qui confirme notamment sa condamnation à 4 ans
de
réclusion. Il a un intérêt personnel, actuel et
juridiquement
protégé à ce que cet arrêt soit annulé et a, partant,
qualité
pour recourir selon l'art. 88 OJ (ATF 125 I 394 consid. 4a
p.
397; 125 II 86 consid. 5b p. 97 et les références).

Pour le surplus, le recours répond aux conditions de
recevabilité du recours de droit public, de sorte qu'il con-
vient d'entrer en matière sur le fond.

2.- Le recourant reproche à la juridiction intimée
d'avoir refusé d'entendre l'agent infiltré comme témoin - à
charge et à décharge - auquel il n'avait pas été confronté,
en violation de son droit de le faire interroger consacré
aux
art. 29 al. 2 Cst. et 6 § 3 let. d CEDH.

a) Selon cette dernière disposition, tout accusé a
le droit d'interroger ou de faire interroger les témoins à
charge et d'obtenir la convocation et l'interrogatoire des
témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins
à charge. La jurisprudence a admis que le même droit décou-
lait de l'art. 4 aCst. (aujourd'hui art. 29 al. 2 Cst.; ATF
125 I 127 consid. 6b p. 132-133; 124 I 274 consid. 5b p.
284;
121 I 306 consid. 1b p. 308 et les arrêts cités). Il s'agit
d'une règle concrétisant le droit à un procès équitable ga-
ranti par l'art. 6 § 1 CEDH (ATF 125 I 127 consid. 6a p. 131-
132; 121 I 306 consid. 1b p. 308; 116 Ia 289 consid. 3b p.
292).

Les éléments de preuve doivent en principe être pro-
duits en présence de l'accusé lors d'une audience publique,
en vue d'un débat contradictoire (ATF 125 I 127 consid. 6b
p.
132-133). Cette règle tend à assurer l'égalité des armes en-
tre l'accusateur public et la défense (ATF 121 I 306 consid.
1b p. 308; 104 Ia 314 consid. 4b p. 316). Il n'est toutefois

pas exclu de prendre en compte des dépositions recueillies
durant la phase de l'enquête, pour autant que l'accusé ait
disposé d'une occasion adéquate et suffisante de contester
ces témoignages à charge et d'en interroger ou d'en faire
interroger les auteurs (ATF 125 I 127 consid. 6b p. 132-133
et les arrêts cités). L'accusé ne peut en principe exercer
qu'une seule fois le droit d'interroger ou de faire interro-
ger les témoins à charge (ATF 125 I 127 consid. 6c/ee p. 136-
137; 124 I 274 consid. 5b p. 285; 121 I 306 consid. 1b p.
308; 120 Ia 48 consid. 2b/aa p. 50; 118 Ia 457 consid. 2b/aa
p. 459 et les arrêts cités).

Concernant l'audition d'un agent infiltré en qualité
de témoin, la jurisprudence du Tribunal fédéral l'a admise,
à
la suite de celle de la Cour européenne des droits de l'hom-
me, dans la mesure où l'intérêt légitime des autorités de po-
lice était pris en compte par la protection de l'anonymat de
l'agent, afin de garantir sa sécurité et son efficacité dans
des enquêtes ultérieures. Les mesures nécessaires doivent
être prises pour que l'autorité judiciaire puisse s'assurer
de l'identité du témoin anonyme, et vérifier qu'il n'y a pas
de substitution de personne avant de permettre l'interroga-
toire par les parties, singulièrement par l'accusé (ATF 125
I
127 consid. 6c/ff et 6d p. 137 ss et les références; ATF 121
I 306 consid. 1b p. 309 et les arrêts cités; JAAC 1998, p.
940, no 107).

L'exercice du droit d'interrogatoire des témoins est
soumis aux dispositions de la loi de procédure applicable,
qui peut poser des conditions de forme et de délai. L'éven-
tuelle renonciation, expresse ou tacite, à ce droit, doit
être établie de manière non équivoque et s'entourer d'un mi-
nimum de garanties (ATF 121 I 30 consid. 5f p. 37-38).

De façon générale, la question de savoir si le droit
d'interroger ou de faire interroger les témoins à charge -
ou
à décharge - est respecté, doit être examinée dans chaque
cas
en fonction de l'ensemble de la procédure et des circonstan-
ces concrètes de l'espèce.

b) En l'occurrence, au terme d'une appréciation an-
ticipée des preuves, qui n'est en principe pas contraire à
la
garantie du droit d'être entendu lorsque le juge retient
sans
arbitraire que sa conviction est déjà forgée à partir des
éléments établis et réunis dans le dossier (ATF 125 I 417
consid. 7 p. 430 et les arrêts cités; ATF 124 I 208 consid.
4a p. 211 et les références; 274 consid. 5b p. 285-286 et
les
références), la cour cantonale a considéré que l'agent infil-
tré avait joué un rôle purement passif ne correspondant en
rien à celui d'un agent provocateur et ne faisant aucun
obstacle à la poursuite pénale. Tout au plus a-t-elle estimé
que l'intervention de cet agent n'a pu entraîner qu'un effet
très restreint sur la peine, dont le Tribunal de police
avait
implicitement tenu compte en prononçant la réclusion pour 4
ans, en l'absence de tout autre facteur de diminution, alors
que la peine susceptible d'être prononcée par le Tribunal de
police s'élevait à 5 ans de réclusion au maximum. En effet,
l'art. 6 § 3 let. d CEDH n'exclut pas de refuser l'interroga-
toire d'un témoin parce que la déposition sollicitée n'est
pas pertinente ou parce que les faits sont déjà établis à la
suite d'une appréciation anticipée des preuves, réalisée
dans
les conditions mentionnées ci-dessus.

c) La Chambre pénale a retenu que l'audition de l'a-
gent infiltré n'apparaissait pas pertinente dans la mesure

ses révélations étaient suffisamment établies et non contes-
tées par l'appelant. Elle a également remarqué que
F.________
avait pris contact avec l'agent et non pas l'inverse, et
qu'il avait décidé lui-même de répondre favorablement à la
demande de son correspondant en Hollande, et de récupérer la

valise de stupéfiants contre une rémunération très importan-
te; il avait enfin organisé le rendez-vous avec l'agent in-
filtré, après avoir requis l'assistance de M.________. Dans
ces circonstances, la cour cantonale pouvait, au terme d'une
appréciation anticipée du témoignage de l'agent infiltré dé-
nommé Peter, considérer que ce dernier n'avait pas instigué
l'appelant et que son rôle était resté très limité. Cepen-
dant, conformément à la jurisprudence (ATF 121 I 306 consid.
1c p. 310), même si le rôle du prénommé Peter semble avoir
été très modeste et si l'on peut raisonnablement douter que
son audition puisse modifier la décision rendue, en
l'absence
d'éléments de preuve déterminants venant contredire l'appré-
ciation anticipée, rien ne permet d'exclure que son interro-
gatoire en qualité de témoin révélerait un rôle plus impor-
tant que l'intervention minime qui lui est prêtée en l'état
du dossier. Dans ces conditions, le recourant a le droit de
faire entendre ce témoin, dans les limites fixées par la ju-
risprudence pour assurer sa sécurité et son efficacité dans
des enquêtes ultérieures, afin de déterminer avec précision
le degré d'influence éventuelle de celui-ci sur celui-là,
notamment dans la perspective de la fixation de la peine.

Ainsi, en refusant d'auditionner l'agent infiltré
Peter, la Chambre pénale a violé le droit constitutionnel in-
voqué, motif pour lequel son arrêt doit être annulé.

3.- Vu le sort réservé à la décision de la juridic-
tion cantonale, qui devra statuer à nouveau, après avoir en-
tendu comme témoin l'agent infiltré, le Tribunal fédéral est
dispensé d'examiner plus avant les autres moyens soulevés
par
le recourant.

a) Il rappellera toutefois, en ce qui concerne l'ap-
préciation des preuves, que le juge dispose d'une grande la-
titude, limitée par l'interdiction
de l'arbitraire (ATF 120
Ia 31 consid. 2b p. 38; 118 Ia 28 consid. 1b p. 30; 116 Ia
85

consid. 2b p. 88 et les références). Le Tribunal fédéral
n'intervient que si le juge a abusé de son pouvoir d'appré-
ciation, en particulier lorsqu'il admet ou nie un fait perti-
nent en se mettant en contradiction évidente avec les pièces
et éléments du dossier, lorsqu'il méconnaît des preuves per-
tinentes ou qu'il n'en tient arbitrairement pas compte, lors-
que les constatations de fait sont manifestement fausses ou
encore lorsque l'appréciation des preuves se révèle manifes-
tement insoutenable (ATF 124 I 208 consid. 4 p. 211 et les
arrêts cités).

b) En l'espèce, le recourant se plaint de ce que la
Cour de justice n'a pas mentionné l'existence d'écoutes té-
léphoniques auxquelles la police a procédé le 21 octobre
1999. Il soutient que la transcription de ces écoutes, illé-
gales, aurait permis d'établir le rôle secondaire qu'il au-
rait joué dans ce transport de stupéfiants, puisque la con-
versation qu'il avait eue avec le dénommé I.________ le 21
octobre 1999 aurait démontré qu'il avait été informé à cette
date seulement de l'existence de la valise et de son
contenu,
ainsi que de la rémunération qui avait été prévue pour sa
collaboration.

A cet égard, à l'audience du 20 juin 2000, le recou-
rant a déclaré devant la Chambre pénale ce qui suit:

"J'ai ensuite rappelé le soir, mais "Peter" m'a dit
que S.________ ne voulait pas me parler. J'ai alors
téléphoné à I.________ en lui demandant ce que
c'était cette histoire. Il m'a indiqué qu'il
s'agissait d'aller chercher une valise contenant de
la drogue. Je lui ai demandé ce que je gagnerai. Il
m'a dit 8'000 fr. que je pourrai obtenir en conser-
vant une partie de la drogue dans la valise pour
réaliser ce profit.

A la police, on m'a fait écouter ma conversation
avec I.________ telle que relatée ci-dessus et on
m'a dit que je ferais mieux d'avouer".

La Chambre pénale a repris presque textuellement la
déclaration du recourant dans son considérant 5 consacré à
la
discussion juridique des faits, la seule différence résidant
dans l'estimation de sa rémunération, évaluée à 10'000 fr.
d'après une allégation de l'intéressé faite devant le Tribu-
nal de police. La cour cantonale a donc retenu les rapports
entre I.________ et le recourant selon la description que ce
dernier en a donnée, de sorte qu'elle ne saurait être
accusée
d'avoir apprécié arbitrairement ses déclarations, lesquelles
rendaient inutile toute autre investigation à ce sujet, et
ceci dans le respect du droit d'être entendu du recourant
(ATF 125 I 417 consid. 7 p. 430; 124 I 208 consid. 4a p.
211;
274 consid. 5b p. 285/286 et les références, déjà cités).

c) Quant à l'illégalité des écoutes téléphoniques,
ces dernières ne sont pas prises en considération par la
Cour
de justice comme un élément à charge, et ce qui les concerne
ressort (ou ressortira) tant des déclarations déjà faites
par
le prévenu que des dépositions des témoins entendus ou à au-
ditionner, soit notamment de celles de l'agent infiltré dé-
nommé "Peter". Au vu des circonstances du cas, soit de l'ar-
restation de S.________ avec la valise de stupéfiants et des
instructions téléphoniques qu'elle devait recevoir une fois
arrivée à Genève, il paraît très vraisemblable que l'écoute
d'un téléphone portable d'une personne déterminée, pendant
une très courte période, remplisse les conditions de l'art.
184A CPP/GE, qui actualise les principes développés par la
Cour européenne des droits de l'homme (CourEDH, arrêt
Lambert
c. France du 24 août 1998, Recueil des arrêts et décisions
1998-V p. 2230 ss, § 22-30). De plus, indépendamment de la
ratification éventuelle par le Juge d'instruction des
mesures
de surveillance téléphonique prises, dans l'urgence, par la
police, la jurisprudence n'exclut pas, par principe et in
abstracto, l'admissibilité d'une preuve recueillie de
manière
illégale (CourEDH, arrêt Schenk c. Suisse du 12 juillet
1988,
Série A, vol. 140, § 6-49).

4.- Vu l'issue du recours, aucun émolument n'est
perçu et la demande d'assistance judiciaire devient sans ob-
jet. Le canton de Genève est dispensé du paiement d'un émolu-
ment, mais devra verser la somme de 1000 fr. au recourant à
titre de dépens (art. 159 al. 1 OJ).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Admet le recours de droit public.

2. Annule l'arrêt de la Chambre pénale de la Cour de
justice, du 2 août 2000.

3. Dit qu'il n'est pas perçu d'émolument judiciaire,
et que le canton de Genève paiera au recourant la somme de
1000 fr. à titre de dépens.

4. Déclare sans objet la demande d'assistance judi-
ciaire.

5. Communique le présent arrêt en copie au manda-
taire du recourant, au Procureur général et à la Chambre pé-
nale de la Cour de justice du canton de Genève.

Lausanne, le 27 octobre 2000
KUR/col
Au nom de la Ie Cour de droit public
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président, Le Greffier,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 1P.520/2000
Date de la décision : 27/10/2000
1re cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-10-27;1p.520.2000 ?
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