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26/10/2000 | SUISSE | N°I.99/00

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 26 octobre 2000, I.99/00


«AZA 7»
I 99/00 Sm

IIIe Chambre

composée des Juges fédéraux Schön, Spira et Widmer; Addy,
Greffier

Arrêt du 26 octobre 2000

dans la cause

S.________, recourante, représentée par Maître Philippe
Degoumois, avocat, chemin de la Nant 1, Moutier,

contre

Office AI Berne, Chutzenstrasse 10, Berne, intimé,

et

Tribunal administratif du canton de Berne, Berne

A.- Le 6 août 1995, S.________, a été victime d'un
accident de la circulation dont elle a gardé des sÃ

©quelles,
notamment à l'épaule gauche ainsi qu'au bas de la jambe et
au pied droits. Elle a présenté une demande de prestations
d...

«AZA 7»
I 99/00 Sm

IIIe Chambre

composée des Juges fédéraux Schön, Spira et Widmer; Addy,
Greffier

Arrêt du 26 octobre 2000

dans la cause

S.________, recourante, représentée par Maître Philippe
Degoumois, avocat, chemin de la Nant 1, Moutier,

contre

Office AI Berne, Chutzenstrasse 10, Berne, intimé,

et

Tribunal administratif du canton de Berne, Berne

A.- Le 6 août 1995, S.________, a été victime d'un
accident de la circulation dont elle a gardé des séquelles,
notamment à l'épaule gauche ainsi qu'au bas de la jambe et
au pied droits. Elle a présenté une demande de prestations
de l'assurance-invalidité le 15 janvier 1998.
Dans un rapport du 16 mars 1998, son médecin traitant,
le docteur W.________, a attesté les périodes d'incapacité
de travail suivantes :

100 % du 06.08.1995 au 30.05.1996

50 % du 31.05.1996 au 08.01.1997
100 % du 09.01.1997 au 15.08.1997 et
75 % dès le 16.08.1997 pour les travaux lourds
50 % dès le 16.08.1997 pour les travaux ménagers

Une enquête économique effectuée le 11 janvier 1999
par l'Office AI du canton de Berne (ci-après : l'office) a
révélé que l'assurée, qui n'exerçait pas d'activité lucra-
tive avant l'accident, présente une invalidité de 26 % en
relation avec l'accomplissement de ses activités habitu-
elles.
Le 10 février 1999, l'office a fait savoir à
S.________ qu'il se proposait de lui accorder une demi-
rente d'invalidité pour la période du 1er août 1996 au
31 mars 1997, remplacée dès le 1er avril 1997 par une rente
entière d'une durée limitée, soit jusqu'au 30 novembre
1997. L'assurée a marqué son désaccord avec ce projet de
prononcé, en produisant un nouveau rapport du docteur
W.________ établi le 10 mars 1999, dans lequel ce médecin
faisait derechef état d'une capacité de travail de 50 % au
plus pour effectuer les travaux ménagers. En plus des limi-
tations physiques déjà mentionnées dans son premier rapport
du 16 mars 1998, ce médecin relevait également la présence
d'une grave et durable surcharge psychique.
Par deux décisions du 3 juin, l'office a confirmé les
termes de son projet de prononcé du 10 février 1999.

B.- Par jugement du 28 décembre 1999, le Tribunal
administratif du canton de Berne, Cour des affaires de lan-
gue française, a rejeté le recours formé par S.________
contre les deux décisions de l'office.

C.- La prénommée interjette recours de droit adminis-
tratif contre ce jugement dont elle requiert l'annulation
en concluant, sous suite de frais et dépens, au renvoi de
la cause à l'autorité cantonale pour complément d'instruc-
tion et nouveau jugement ou, subsidiairement, à l'octroi

«des prestations AI requises tenant compte de sa véritable
situation tant financière que de santé». A l'appui de son
recours, S.________ produit un certificat du docteur
M.________, médecin-chef du service de rhumatologie de
l'Hôpital de X.________.
L'office cantonal a conclu au rejet du recours, tandis
que l'Office fédéral des assurances sociales ne s'est pas
déterminé.

Considérant en droit :

1.- L'octroi rétroactif d'une rente d'invalidité
dégressive et/ou temporaire règle un rapport juridique sous
l'angle de l'objet de la contestation et de l'objet du
litige. Lorsque seule la réduction ou la suppression des
prestations est contestée, le pouvoir d'examen du juge
n'est pas limité au point qu'il doive s'abstenir de se pro-
noncer quant aux périodes à propos desquelles l'octroi de
prestations n'est pas remis en cause (ATF 125 V 415 ss
consid. 2).
En l'espèce, par deux décisions du même jour, l'office
a accordé à la recourante une demi-rente d'invalidité pour
la période du 1er août 1996 au 31 mars 1997, remplacée par
une rente entière pour la période du 1er avril 1997 au
30 novembre 1997. Vu sa motivation et ses conclusions, le
recours porte sur l'ensemble des rapports juridiques ainsi
créés et l'objet du litige se confond donc avec celui de la
contestation (ATF 125 V 414 consid. 1b).

2.- Selon la jurisprudence, une décision par laquelle
l'assurance-invalidité accorde une rente d'invalidité avec
effet rétroactif et, en même temps, prévoit la réduction de
cette rente, correspond à une décision de révision au sens
de l'art. 41 LAI (ATF 125 V 417 sv. consid. 2d et les
références). Aux termes de cette disposition, si l'invali-

dité d'un bénéficiaire de rente se modifie de manière à
influencer le droit à la rente, celle-ci est, pour
l'avenir, augmentée, réduite ou supprimée. Tout changement
important des circonstances, propre à influencer le degré
d'invalidité, donc le droit à la rente, peut donner lieu à
une révision de celle-ci.
Pour le surplus, les premiers juges ont correctement
rappelé les dispositions légales et réglementaires ainsi
que la jurisprudence applicables en l'espèce, de sorte
qu'on peut renvoyer à leurs considérants. En particulier,
l'invalidité de la recourante doit être évaluée selon la
méthode dite spécifique, car celle-ci n'exerçait pas
d'activité lucrative avant l'apparition de ses problèmes de
santé (art. 28 al. 3 LAI; art. 27 RAI).

3.- a) La recourante soutient qu'au vu de la gravité
des affections dont elle souffre, sa cause n'a pas été
suffisamment instruite sur le plan médical, singulièrement
sur le plan psychique. Elle reproche par ailleurs à l'of-
fice et aux premiers juge d'avoir statué sur ses droits à
la seule lumière du rapport d'enquête économique réalisé à
la demande de l'office le 11 janvier 1999, dont elle
conteste énergiquement les conclusions.
Selon les premiers juges, l'estimation de la capacité
de travail à laquelle le médecin traitant est parvenu, soit
50 % pour les tâches ménagères, n'est pas de nature, vu le
caractère médico-théorique de ce taux, à remettre en cause
les conclusions du rapport d'enquête économique faisant
état d'une invalidité de 26 %, car celles-ci résultent
d'une évaluation concrète de la situation. En tout état de
cause, même en pondérant les conclusions du rapport d'en-
quête pour tenir compte de certains griefs soulevés par la
recourante, les premiers juges n'arrivent pas un taux
d'invalidité supérieur à 32 %.

b) Selon le principe de la libre appréciation des
preuves, qui s'applique aussi bien en procédure administra-
tive qu'en procédure de recours de droit administratif
(art. 40 PCF en corrélation avec l'art. 135 OJ; art. 95
al. 2 OJ en liaison avec les art. 113 et 132 OJ; art. 85
al. 2 let. c LAVS en corrélation avec l'art. 69 LAI;
Meyer-Blaser, Rechtsprechung des Bundesgerichts zum IVG,
p. 229), l'administration ou le juge apprécie librement les
preuves, sans être lié par des règles formelles, en procé-
dant à une appréciation complète et rigoureuse des preuves.
Dès lors, le juge doit examiner de manière objective tous
les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis
décider si les documents à disposition permettent de porter
un jugement valable sur le droit litigieux (ATF 125 V 352
consid. 3a et la référence).

c) En l'espèce, les critiques de la recourante, qui
visent pour l'essentiel à contester la valeur probante de
l'enquête sur les activités ménagères réalisée par
l'intimé, sont trop générales et trop vagues pour que la
fiabilité de ce moyen de preuve, conforme au droit de l'AI
(art. 69 al. 2 RAI), puisse être sérieusement mise en
doute. A cet égard, il n'y a rien à ajouter aux considé-
rants des premiers juges, qui ont revu de près l'estimation
des empêchements mesurés dans les différentes activités
prises en considération par l'enquête, en expliquant perti-
nemment en quoi les objections soulevées par la recourante
sont infondées (jugement attaqué consid. 3b, pp. 9 à 15).
En particulier, il n'y a pas lieu de faire procéder par un
médecin à une nouvelle estimation des empêchements que
celle-ci rencontre dans ses activités habituelles car,
selon la jurisprudence, cela ne peut se faire qu'à titre
exceptionnel, singulièrement lorsque les déclarations de la
personne assurée ne concordent pas avec les constatations
faites sur le plan médical (arrêt non publié W. du
17 juillet 1990, consid. 3, I 151/90). Or, tel n'est pas le
cas en l'occurrence.

A ce propos, que le docteur W.________, spécialiste
FMH en orthopédie, ait fait état d'une incapacité de
travail de 50 % n'est pas décisif (rapports des 16 mars
1998 et 10 mars 1999). Il s'agit en effet d'une apprécia-
tion médico-théorique de la situation de l'assurée consi-
dérée globalement et abstraitement, ce qui n'est pas de
nature à remettre en cause les conclusions du rapport
d'enquête économique, car celles-ci reposent au contraire
sur un examen concret des circonstances du cas d'espèce. Le
taux d'invalidité de 32 % admis par les premiers juges qui
ont, sur ce point, corrigé en faveur de la recourante le
taux fixé par l'intimé, n'est dès lors pas critiquable.
Partant, les conditions de la révision du droit à la
rente sont réunies. A teneur du rapport d'enquête écono-
mique, il n'est toutefois pas possible de déterminer préci-
sément à partir de quel moment la recourante a présenté un
taux d'invalidité justifiant la suppression de son droit à
une rente d'invalidité. Mais on peut admettre que tel est
le cas dès le 16 août 1997, soit depuis le moment où le
médecin traitant a considéré que l'incapacité de travail
n'était plus de 100 %, mais de 50 % (rapport du docteur
W.________ du 16 mars 1998). En conséquence, c'est à bon
droit que l'office a supprimé le droit à la rente à partir
du 30 novembre 1997, soit trois mois après la diminution de
l'invalidité, conformément à ce que prévoit l'art. 88a
al. 1, 2ème phrase RAI (étant précisé que l'art. 88bis RAI
n'est pas applicable en cas d'octroi, à titre rétroactif,
d'une rente temporaire : ATF 106 V 16).

d) Il est certes possible que, postérieurement au
prononcé de la décision administrative litigieuse, l'inva-
lidité de la recourante se soit aggravée de manière signi-
ficative en raison de l'apparition d'une maladie psychique.
En effet, dans le rapport du 29 novembre 1999 que la recou-
rante a produit en instance fédérale, le docteur
M.________, médecin-chef au service de rhumatologie de

l'Hôpital de X.________, a évoqué l'existence de «douleurs
diffuses de type fibromyalgique qui sont à situer dans un
contexte d'état dépressif réactionnel». En outre, alors
qu'il excluait la présence de troubles d'ordre psychique le
16 mars 1998, le docteur W.________ en a par la suite fait
mention dans son rapport du 10 mars 1999.
S'il devait se confirmer que de tels troubles sont
apparus après la révision du droit de la recourante à la
rente d'invalidité, l'enquête sur les activités ménagères
ne constituerait plus, selon la jurisprudence, un moyen de
preuve approprié pour estimer son degré d'invalidité (arrêt
non publié C. du 9 novembre 1987, consid. 3, I 277/87).
Cela ne justifie toutefois pas l'annulation du jugement
attaqué et de la décision litigieuse, la recourante devant
bien plutôt suivre la voie prescrite par l'art. 87 al. 4
RAI (VSI 1999, p. 85 consid. 1 et les références).
Le recours est mal fondé.

4.- La recourante, qui succombe, ne saurait prétendre
une indemnité de dépens pour l'instance fédérale (art. 159
al. 1 en corrélation avec l'art. 135 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est rejeté.

II. Il n'est pas perçu de frais de justice ni alloué de
dépens.

III. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tri-
bunal administratif du canton de Berne, Cour des

affaires de langue française, et à l'Office fédéral
des assurances sociales.

Lucerne, le 26 octobre 2000

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la IIIe Chambre :

Le Greffier :


Synthèse
Numéro d'arrêt : I.99/00
Date de la décision : 26/10/2000
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-10-26;i.99.00 ?
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