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24/10/2000 | SUISSE | N°C.135/00

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 24 octobre 2000, C.135/00


«AZA 7»
C 135/00 Rl

Ière Chambre

composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, Schön,
Spira, Rüedi et Widmer; Berset, Greffière

Arrêt du 24 octobre 2000

dans la cause

C.________, recourant,

contre

Caisse cantonale genevoise de chômage, rue de
Montbrillant 40, Genève, intimée,

et

Commission cantonale de recours en matière d'assurance-
chômage, Genève

A.- Par décision du 13 janvier 1999, la caisse canto-
nale genevoise de chômage (ci-apr

ès : la caisse) a réclamé
à C.________ le remboursement de prestations de chômage
versées à tort du 20 mars au 17 avril 1998 (1'344 fr. 6...

«AZA 7»
C 135/00 Rl

Ière Chambre

composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, Schön,
Spira, Rüedi et Widmer; Berset, Greffière

Arrêt du 24 octobre 2000

dans la cause

C.________, recourant,

contre

Caisse cantonale genevoise de chômage, rue de
Montbrillant 40, Genève, intimée,

et

Commission cantonale de recours en matière d'assurance-
chômage, Genève

A.- Par décision du 13 janvier 1999, la caisse canto-
nale genevoise de chômage (ci-après : la caisse) a réclamé
à C.________ le remboursement de prestations de chômage
versées à tort du 20 mars au 17 avril 1998 (1'344 fr. 65).

Par décision du 5 juillet 1999, le Groupe Réclamations
de l'Office cantonal genevois de l'emploi (OCE) a déclaré
irrecevable pour cause de tardiveté la réclamation formée
par l'assuré contre la décision précitée.

B.- Saisie d'un recours de l'assuré, la Commission
cantonale de recours en matière d'assurance-chômage du
canton de Genève (ci-après : la commission de recours) l'a
rejeté par jugement du 30 septembre 1999.

C.- C.________ a interjeté recours de droit adminis-
tratif contre ce jugement dont il requiert l'annulation.
Pour excuser son retard, il fait valoir qu'il a bien rédigé
et mis, à temps, dans une boîte postale sa réclamation
contre la décision de la caisse, mais que son courrier
s'est égaré. Il conclut, implicitement, à ce qu'il ne soit
pas tenu de rembourser les prestations versées à tort par
la caisse.
Par décision du 23 août 2000 - notifiée à son destina-
taire le 8 septembre 2000 - le tribunal a rejeté la demande
d'assistance judiciaire formée entre-temps par le recourant
et lui a imparti un délai de 14 jours à dater de la notifi-
cation de la décision pour verser une avance de frais de
500 fr.
Le recourant a versé les sûretés demandées.
La caisse et le Groupe Réclamations de l'OCE ont con-
clu implicitement au rejet du recours, alors que le Secré-
tariat d'Etat à l'économie ne s'est pas déterminé.

Considérant en droit :

1.- Le litige porte sur la tardiveté de la réclamation
formée par C.________ contre la décision de la caisse du
13 janvier 1999.

Le Tribunal fédéral des assurances doit dès lors se
borner à examiner si c'est à bon droit que la commission de
recours a rejeté le recours formé par le prénommé contre la
décision du 5 juillet 1999, par laquelle le Groupe Réclama-
tions de l'OCE a déclaré tardive sa réclamation contre la
décision de la caisse. Il ne saurait en revanche examiner
le fond du litige comme le voudrait le recourant (ATF
125 V 505 consid. 1 et 124 V 49 consid. 1).

2.- a) L'OCE de la République et canton de Genève, qui
relève du Département de l'économie publique, assume une
double fonction en matière d'assurance-chômage. D'une part,
il est l'autorité cantonale au sens de l'art. 85 LACI et
exécute les tâches qui y sont énumérées. D'autre part, il
statue sur recours contre des décisions des caisses de
chômage et agit alors en qualité de première instance can-
tonale de recours en matière d'assurance-chômage. C'est le
système de la juridiction à deux degrés, que connaît notam-
ment la République et canton de Genève, et qui, en vertu du
droit fédéral, est compatible avec l'art. 101 let. b LACI
(arrêt non publié C. du 12 avril 1989 [C 30/88]; Thomas
Nussbaumer, Arbeitslosenversicherung, in : Schweizerisches
Bundesverwaltungsrecht [SBVR], Soziale Sicherheit, ch. 737;
Meyer-Blaser, Die Rechtspflege in der Sozialversicherung,
in : BJM 1989 p. 8 ; Gerhards, Kommentar zum
Arbeitslosenversicherungsgesetz, vol II, n. 4 ad art. 101;
cf. Thomas Locher, Grundriss des Sozialversicherungsrechts,
2ème édition, n. 8 p. 368).

b) Le délai que le recourant n'a pas respecté est le
délai de réclamation contre une décision de la caisse,
adressée à l'OCE en sa qualité d'autorité de recours
cantonale de première instance.

3.- a) Il convient d'examiner en premier lieu si le
délai en cause est régi par l'art. 103 al. 3 LACI ou par le
droit cantonal de procédure, en vertu de l'art. 103 al. 6
première phrase LACI. Certes, en l'espèce, le délai fixé

par le droit cantonal est identique à celui du droit fédé-
ral (30 jours). Toutefois, il n'en va pas toujours de même.
Par exemple, en droit neuchâtelois - où l'on connaît aussi
la double instance de recours (art. 34 al. 1 de la loi du
30 septembre 1996 concernant le marché du travail, le ser-
vice de l'emploi, l'assurance-chômage et les mesures de
crise [RSN 813.10]) - le délai de recours ordinaire, en
procédure administrative, est de 20 jours et non de
30 jours (art. 34 al. 1 de la loi du 27 juin 1979 sur la
procédure et la juridiction administrative [RSN 152.130]).

b) Peu abondante, la jurisprudence du Tribunal fédéral
des assurances en la matière n'est pas uniforme. Un arrêt
rendu sous l'ancien droit, mais dont les principes restent
applicables sous l'empire de la LACI, consacre l'autonomie
du droit cantonal de procédure en matière de délai de révi-
sion d'un jugement de l'autorité cantonale de recours (ATF
110 V 395 consid. 2b). Il en va de même de l'arrêt B. du
31 janvier 1983, publié dans DTA 1983 no 10 p. 45, en ce
qui concerne la suspension des délais de recours contre les
décisions des caisses de chômage et des autorités cantona-
les compétentes. En revanche, dans un arrêt non publié S.
du 24 avril 1990, (C 6/90), tout en admettant que la double
instance de recours en matière d'assurance-chômage prévue
par le droit valaisan était compatible avec l'art. 101
let. b LACI, le Tribunal fédéral des assurances a considéré
que la procédure devant les deux autorités de recours
cantonales était régie par l'art. 103 al. 2 à 4 LACI. En
l'occurrence, toutefois, personne ne contestait que le
délai de recours fût de 30 jours et qu'il était dépassé
depuis longtemps lorsque le recourant avait remis son
recours à un bureau de poste. Par ailleurs, dans trois
arrêts non publiés similaires D., K. et S. du 15 juin 2000
(C 32/98, C 33/98, et C 34/98), le Tribunal fédéral des
assurances a rappelé que les cantons disposaient d'une
grande marge de liberté dans l'application de l'art. 103
al. 6 LACI. Cependant, l'examen ne portait pas sur la

nature (de droit fédéral ou cantonal) du délai de recours
devant une première autorité cantonale de recours.

c) Pour Nussbaumer (op. cit., ch. 740 ss), par
comparaison avec d'autres branches des assurances sociales,
l'art. 103 LACI contient des exigences minimales de droit
fédéral qui s'imposent dans le cadre des procédures canto-
nales de recours, tel le délai de recours de 30 jours prévu
à l'al. 3. A côté de celles-ci, s'appliquent les principes
généraux d'ordre procédural du droit des assurances socia-
les. Pour le surplus, soit en matière de dépens, de suspen-
sion des délais, de délai pour déposer une demande de révi-
sion d'un jugement de l'autorité cantonale de recours et
d'amendes d'ordre, la procédure est régie par le droit
cantonal.
De son côté, Gerhards soutient que la loi fédérale
sur la procédure administrative et le droit cantonal de
procédure régissent la procédure devant les autorités de
recours de première instance en matière d'assurance-chômage
(op. cit., n. 5 ad art. 101), ce qui paraît contredire son
affirmation selon laquelle le délai de 30 jours prescrit
par l'art. 103 al. 3 LACI s'applique également au recours
devant l'autorité de recours inférieure (op. cit., n. 30 ad
art. 103).

d) En vertu du principe de l'autonomie du droit canto-
nal de procédure en matière de délais - affirmé dans la
jurisprudence relative à l'ancien droit (ATF 110 V 395
consid. 2b et DTA 1983 no 10 p. 45) et implicitement con-
firmé dans les trois arrêts précités du 15 juin 2000 - il
faut admettre que l'art. 103 al. 3 LACI ne s'applique qu'au
délai de recours devant l'autorité cantonale de dernière
instance et qu'il appartient donc au droit cantonal de
fixer le délai de recours (ou de réclamation) devant l'au-
torité de recours inférieure, lorsque celle-ci existe.

4.- Selon la jurisprudence rendue sous l'empire de la
Constitution du 29 mai 1874, une décision est arbitraire et
viole dès lors l'art. 4 al. 1 aCst, lorsqu'elle méconnaît
gravement une règle de droit ou un principe juridique clair
et indiscuté, ou qu'elle contredit de manière choquante le
sentiment de l'équité. La violation incriminée doit être
manifeste et reconnaissable d'emblée. Il n'y a pas arbi-
traire du seul fait qu'une solution autre que celle de
l'autorité cantonale apparaît concevable ou même préféra-
ble. Enfin, une décision ne sera annulée que si elle est
arbitraire dans son résultat, mais non lorsque seuls
ses motifs sont insoutenables, ou encore qu'elle n'est pas
motivée (ATF 125 I 168 consid. 2a, 125 II 15 consid. 3a,
124 I 316 consid. 5a, 124 V 139 consid. 2b et les réfé-
rences).
Cette jurisprudence s'applique également dans le cadre
des art. 8 al. 1 et 9 nCst consacrant les principes de
l'égalité devant la loi et de l'interdiction de l'arbitrai-
re.

5.- a) Aux termes de l'art. 49 de la loi cantonale
genevoise en matière de chômage du 11 novembre 1983
(entrée en vigueur le 1er janvier 1984 : RSGE J 2 20) et de
l'art. 62 du règlement d'exécution de cette loi, du
3 décembre 1984 (entré en vigueur le 1er janvier 1984 :
RSGE J 2 20.01) - dont l'application est réservée par
l'art. 103 al. 6 première phrase LACI - le délai de recours
devant l'autorité cantonale statuant sur réclamation en
matière d'assurance-chômage est de 30 jours.

b) En l'espèce, la décision de la caisse a été en-
voyée, sous pli simple, au recourant le 13 janvier 1999, de
sorte qu'elle lui est parvenue quelques jours plus tard,
mais en tout cas le 18 janvier 1999. Il est constant que le
délai de réclamation venait à échéance le 18 février 1999.

La réclamation remise à la poste le 1er mars suivant était
donc tardive.

c) Comme en procédure cantonale, le recourant allègue
qu'il a rédigé, le 1er février 1999 à 23 h 18, une
(première) réclamation contre la décision de la caisse du
13 janvier 1999, sous forme de document informatique, et
l'a mise dans une boîte postale située en face de son domi-
cile, le 2 février à 01 h 30 environ. Il admet, cependant,
qu'il a indiqué un numéro erroné de case postale. Il fait
valoir également qu'il a adressé par télécopieur une copie
de sa (première) réclamation à G.________ du Service social
de la Ville de Genève et que la disquette informatique
(produite en procédure cantonale) contenait la date de
création du document, soit le 1er février 1999.
Les premiers juges ont déduit des allégations du re-
courant - tenues pour vraisemblables - que l'établissement
du document ne signifiait cependant pas que la réclamation
ait été envoyée à la date indiquée. Ils ont considéré que,
quelle que soit la date à laquelle la réclamation a été
rédigée, le recourant n'a pas apporté la preuve que cel-
le-ci a été déposée dans le délai de 30 jours prescrit par
la loi.

d) Au regard de la jurisprudence citée au consid. 4
ci-dessus, on ne saurait reprocher aux premiers juges
d'avoir constaté les faits de manière inexacte ou incom-
plète ou d'avoir violé le droit fédéral de toute autre
manière. En particulier, le dossier ne contient aucun
élément permettant de confirmer les allégations du recou-
rant quant à la remise d'une éventuelle première réclama-
tion dans une boîte postale, le matin du 2 février 1999. En
conséquence le jugement attaqué est conforme au droit. Le
recourant n'avance d'ailleurs aucun motif pertinent dans le
sens contraire. Le recours se révèle ainsi mal fondé.

6.- Vu la nature du litige, qui porte uniquement sur
un point de procédure, des frais de justice doivent être
mis à la charge du recourant qui succombe (art. 134 OJ a
contrario; art. 156 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Dans la mesure où il est recevable, le recours est
rejeté.

II. Les frais de justice, d'un montant de 500 fr., sont
mis à la charge du recourant et sont compensés avec
l'avance de frais qu'il a versée.

III. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, à la
Commission cantonale genevoise de recours en matière
d'assurance-chômage et au Secrétariat d'Etat à
l'économie.

Lucerne, le 24 octobre 2000

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la Ière Chambre :

p. la Greffière :


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.135/00
Date de la décision : 24/10/2000
Cour des assurances sociales

Analyses

Art. 103 al. 3 et 6 LACI: Délai de recours (ou de réclamation) devant l'autorité cantonale de recours de première instance. L'art. 103 al. 3 LACI ne s'applique qu'au délai de recours devant l'autorité cantonale de dernière instance. Il appartient donc au droit cantonal, en vertu de l'art. 103 al. 6, première phrase LACI, de fixer le délai de recours (ou de réclamation) devant l'autorité de recours inférieure, lorsque celle-ci existe.


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-10-24;c.135.00 ?
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