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12/10/2000 | SUISSE | N°2P.158/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 12 octobre 2000, 2P.158/2000


«/2»
2P.158/2000

IIe C O U R D E D R O I T P U B L I C
***********************************************

12 octobre 2000

Composition de la Cour: MM. les Juges Wurzburger, président,
Hungerbühler et Berthoud, juge suppléant.
Greffière: Mme Rochat.

Statuant sur le recours de droit public
formé par

B.________, représenté par Me Olivier Carrard, avocat à Genè-
ve,

contre

la décision prise le 8 juin 2000 par la Commission de
recours
de l'Université de Genève, dans

la cause qui oppose le recou-
rant à l'Université de Genève, représentée par Madame
Barbara
Schaeppi, juriste de l'Unive...

«/2»
2P.158/2000

IIe C O U R D E D R O I T P U B L I C
***********************************************

12 octobre 2000

Composition de la Cour: MM. les Juges Wurzburger, président,
Hungerbühler et Berthoud, juge suppléant.
Greffière: Mme Rochat.

Statuant sur le recours de droit public
formé par

B.________, représenté par Me Olivier Carrard, avocat à Genè-
ve,

contre

la décision prise le 8 juin 2000 par la Commission de
recours
de l'Université de Genève, dans la cause qui oppose le recou-
rant à l'Université de Genève, représentée par Madame
Barbara
Schaeppi, juriste de l'Université de Genève;

(art. 9 Cst.: examens universitaires; élimination du deuxième
cycle de la licence)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- Les études dans la Section des sciences de
l'éducation de l'Université de Genève sont régies par le rè-
glement d'études du 20 juin 1990, modifié le 27 novembre
1997. Elles sont organisées en deux cycles comportant respec-
tivement 60 crédits (tronc commun de 2 à 4 semestres) et 180
crédits (deuxième cycle de licence de 6 à 12 semestres),
soit
au total 240 crédits ECTS ("European Community Transfer Sys-
tem"; voir art. 5 et 6 du règlement). Pour chaque cycle du
programme d'études, l'étudiant doit accumuler un nombre dé-
terminé de crédits qui lui sont octroyés lorsqu'il satisfait
aux conditions d'évaluation d'une unité de formation (en
abrégé: UF). Il existe deux types d'UF d'enseignement, qui
se
distinguent par leur organisation dans le temps, soit les UF
dites "filées", pour lesquelles la formation s'étend sur
l'ensemble d'un semestre ou d'une année académique, et les
UF
dites "compactes", pour lesquelles la formation est
condensée
en périodes plus brèves de plusieurs journées ou semaines
(art. 3 du règlement).

B.- Immatriculé auprès de la Faculté de psychologie
et des sciences de l'éducation de l'Université de Genève de-
puis le semestre d'hiver 1996-1997, B.________ a satisfait
aux conditions posées par le règlement d'études pour l'ac-
complissement du tronc commun en comptabilisant, en octobre
1997, les 60 crédits requis. Admis pour l'année académique
1997-1998 en deuxième cycle de licence, l'intéressé a opté
pour la mention "Enseignement". Pour l'année académique 1997-
1998, il a obtenu 38 crédits et 22 crédits d'échec dans les
UF pour lesquelles il s'était inscrit. Ensuite, pour l'année
académique 1998-1999, il a obtenu 33 crédits et 18 crédits
d'échec.

Par décision du 6 décembre 1999, confirmant celle de
sa Doyenne du 16 novembre 1999, la Faculté de psychologie et
des sciences de l'éducation a prononcé l'élimination de
B.________, en application de l'art. 34 al. 1 lettre a du rè-
glement d'études disposant qu'un étudiant est définitivement
éliminé du deuxième cycle, mention "Enseignement", s'il enre-
gistre des échecs totalisant plus de 30 crédits pour des UF
du deuxième cycle de licence.

B.________ a recouru contre cette décision auprès de
la Commission de recours de l'Université de Genève
(ci-après:
la Commission de recours). Il a notamment fait valoir qu'il
avait présenté, dans trois branches pour lesquelles il avait
été pénalisé de 10 crédits d'échec, un projet indépendant
permettant de compenser les crédits manquants au sens de
l'art. 33 al. 4 du règlement d'études, que ses travaux, pré-
sentés lors de la session d'examens d'octobre 1999,
n'avaient
pas encore fait l'objet d'une évaluation et que son élimina-
tion était donc prématurée.

C.- Statuant le 8 juin 2000, la Commission de re-
cours a confirmé la décision de la Faculté de psychologie et
des sciences de l'éducation du 6 décembre 1999. Elle a
retenu
que le règlement d'études ne permettait pas à un étudiant po-
tentiellement en état d'élimination de surseoir à cette der-
nière aussi longtemps qu'il entreprend des travaux de compen-
sation et que la durée réglementaire de ses études n'est pas
dépassée. Une telle possibilité viderait de sa substance la
disposition réglementaire qui vise précisément à ne pas tolé-
rer qu'un étudiant demeure inscrit dès qu'il a dépassé la li-
mite des 30 crédits d'échec.

D.- Agissant par la voie du recours de droit public
pour violation de l'art. 4 aCst., B.________ demande au Tri-
bunal fédéral d'annuler la décision prise le 8 juin 2000 par

la Commission de recours. Il fait essentiellement valoir que
la décision entreprise est arbitraire, dans la mesure où
elle
écarte la possibilité offerte par l'art. 33 al. 4 du règle-
ment d'études de compenser ses crédits d'échec par la prise
en considération de travaux indépendants, remis aux profes-
seurs responsables lors de la session d'examens d'octobre
1999.

La Commission de recours renonce à faire valoir des
observations et persiste dans le dispositif et les considé-
rants de sa décision. L'Université de Genève conclut à l'ir-
recevabilité du recours.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- Le Tribunal fédéral examine d'office et libre-
ment la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF
125
I 253 consid. 1a p. 254, 412 consid. 1a p. 416).

Selon l'art. 88 OJ, le recours de droit public est
ouvert uniquement à celui qui est atteint par l'acte attaqué
dans ses intérêts personnels et juridiquement protégés. Le
recourant est directement touché par la décision entreprise
qui confirme son élimination de la Faculté de psychologie et
des sciences de l'éducation (ATF 108 Ia 22 consid. 2 p. 25;
105 Ia 318 consid. 3b p. 323). Il a donc qualité pour recou-
rir au sens de l'art. 88 OJ.

Formé en temps utile contre une décision finale ren-
due en dernière instance cantonale, le recours répond en ou-
tre aux conditions de recevabilité des art. 84 ss OJ, de sor-
te qu'il y a lieu d'entrer en matière sur le fond.

2.- Le recourant soutient qu'au vu des dispositions
applicables, la Commission de recours ne pouvait confirmer
son élimination de la Faculté de psychologie et des sciences
de l'éducation; elle serait ainsi tombée dans l'arbitraire
en
refusant d'admettre qu'il avait la possibilité de compenser
10 crédits d'échec par les projets indépendants présentés à
la session d'examens d'octobre 1999.

a) Une décision est arbitraire lorsqu'elle viole
gravement une règle ou un principe juridique clair et indis-
cuté ou lorsqu'elle contredit d'une manière choquante le sen-
timent de la justice ou de l'équité. Le Tribunal fédéral ne
s'écarte de la solution retenue par l'autorité cantonale de
dernière instance que si elle est insoutenable ou en contra-
diction évidente avec la situation de fait, si elle a été
adoptée sans motifs objectifs ou en violation d'un droit cer-
tain; par ailleurs, il ne suffit pas que les motifs de la dé-
cision attaquée soient insoutenables, encore faut-il que cel-
le-ci soit arbitraire dans son résultat (ATF 125 I 166 con-
sid. 2a p. 168; 125 II 129 consid. 5b p. 134 et les arrêts
cités). Il n'y a pas arbitraire du seul fait qu'une autre in-
terprétation de la loi est possible ou même préférable (ATF
124 I 247 consid. 5 p. 250; 120 Ia 369 consid. 3a p. 373;
118
Ia 497 consid. 2a p. 499).

b) Selon l'art. 22 al. 2 lettre a du règlement de
l'Université de Genève du 7 septembre 1988, l'étudiant qui
échoue à un examen ou à une session d'examens auxquels il ne
peut plus se présenter en vertu du règlement d'études est
éliminé. L'art. 34 du règlement d'études, auquel renvoie
l'art. 12 ch. 1 lettre d, prévoit à son chiffre 1:

"un étudiant est définitivement éliminé du deuxième
cycle mention Enseignement:

a) s'il enregistre des échecs totalisant plus de 30
crédits pour les UF du deuxième cycle de licence

mention Enseignement;
b) s'il n'a pas obtenu, au terme de ses délais
d'études, au moins 57 crédits dans le domaine A.
Didactique des disciplines;
c) s'il n'a pas obtenu, au terme de ses délais
d'études, au moins 40 crédits dans le domaine B.
Approches transversales;
d) s'il n'a pas obtenu, au terme de ses délais
d'études, au moins 19 crédits dans le domaine C.
Outils et méthodes de travail et de recherche;
e) s'il n'a pas obtenu, au terme de ses délais
d'études, au moins 16 crédits dans le domaine D.
Intégration des savoirs, savoir-faire, et déve-
loppement de la personne;
f) s'il n'a pas obtenu, au terme de ses délais
d'études, au moins 15 crédits proposés dans le
domaine E. Stages en responsabilité dans une éco-
le;
g) s'il ne peut faire état, au terme de ses délais
d'études, d'une attestation pour le stage de qua-
tre semaines à plein temps prévu hors des éta-
blissements secondaires."

Schématiquement, la réussite du parcours académique
du deuxième cycle est donc subordonnée à deux conditions:
l'une, négative, est de ne pas enregistrer des échecs totali-
sant plus de 30 crédits pendant la durée du cycle. L'autre,
positive, est d'obtenir, au terme des délais d'études, un
certain nombre de crédits variant selon les cinq domaines en-
seignés et de justifier de l'accomplissement d'un stage de
quatre semaines à plein temps hors des établissements scolai-
res.

Chaque domaine d'enseignement comporte un ensemble
d'unités de formation filées et compactes. Les règles spéci-
fiques aux unités de formation compactes sont définies à
l'art. 33 du règlement d'études. Le chiffre 4 de cette dispo-
sition précise qu'après un échec dans une unité compacte,
l'étudiant ne peut, sauf dérogation accordée par le Doyen,
inscrire à nouveau cette unité de formation lors d'une autre

année académique. Selon les règles adoptées par le Conseil
de
Faculté, il peut compenser les crédits manquants en choisis-
sant une ou plusieurs unités de formation filées dans le
même
domaine ou un projet indépendant incluant éventuellement un
stage supplémentaire.

c) Les griefs du recours portent uniquement sur la
comptabilisation au titre d'échec des crédits attribués aux
unités de formation compactes suivantes, relevant du domaine
"Didactique des disciplines":

- didactique du français I (4 crédits)
- didactique des arts plastiques (3 crédits)
- didactique de l'éducation physique (3 crédits)
total: 10 crédits d'échec

Le recourant a subi un échec dans ces trois disci-
plines lors de la session d'examens d'octobre 1998. Confor-
mément à l'art. 33 ch. 4 du règlement d'études, il ne
pouvait
plus inscrire à nouveau ces unités de formation lors de l'an-
née académique 1998-1999 et perdait ainsi la possibilité de
comptabiliser les 10 crédits correspondants pour obtenir, au
terme de ses études, les 57 crédits requis dans le domaine
"Didactique des disciplines" (art. 34 ch. 1 lettre b du rè-
glement d'études). Usant de la possibilité conférée par
l'art. 33 ch. 4 du règlement d'études, il a tenté de compen-
ser la perte de ces 10 crédits en présentant trois projets
indépendants lors de la session d'examens d'octobre 1999.
Or,
contrairement à ce que soutient le recourant, l'admission de
ces projets n'aurait pas effacé les 10 crédits comptabilisés
comme échec, mais lui aurait simplement permis d'augmenter
de
10 unités le total de ses crédits dans le domaine
"Didactique
des disciplines".

Cette interprétation ressort de la lecture même du
texte de l'art. 33 ch. 4 du règlement d'études: la présenta-
tion d'un projet indépendant permet de compenser les crédits
manquants du domaine considéré, donc de pallier le manque de
crédits consécutif à un échec. Il offre à l'étudiant la fa-
culté d'obtenir les crédits qu'il ne peut plus comptabiliser
du fait de l'impossibilité d'inscrire à nouveau l'unité de
formation dans laquelle il a échoué. Comme l'Université de
Genève l'a relevé dans ses observations du 13 septembre
2000,
la procédure de compensation des crédits manquants permet à
l'étudiant d'atteindre, malgré un échec, le nombre de
crédits
requis pour chaque domaine. Elle ne permet toutefois pas
d'annuler les crédits d'échec enregistrés, car cela équivau-
drait à mettre à sa disposition une procédure d'évaluation
supplémentaire. Une telle interprétation correspond d'ail-
leurs au but visé par l'art. 34 du règlement d'études:
l'élimination intervient, non seulement lorsqu'au terme des
délais d'études le nombre des différents crédits requis
n'est
pas atteint, mais également lorsqu'en cours d'études l'étu-
diant accumule trop d'échecs. Admettre que la procédure de
compensation permettrait l'annulation de crédits enregistrés
comme échecs reviendrait à supprimer la limite posée par
l'art. 34 ch. 1 lettre a du règlement d'études aux échecs
successifs intervenus avant la fin du cycle d'études.

Conforme aux dispositions réglementaires applica-
bles, la décision entreprise ne saurait donc être qualifiée
d'arbitraire. Partant, le recours doit être rejeté en tant
qu'il porte sur une violation de l'art. 4 aCst., respective-
ment 9 Cst., applicable en l'espèce dès lors que la décision
attaquée a été rendue après le 1er janvier 2000.

3.- Il résulte de ce qui précède que le recours doit
être rejeté, avec suite de frais à la charge du recourant
(art. 156 al. 1 OJ).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l ,

1.- Rejette le recours.

2.- Met à la charge du recourant un émolument judi-
ciaire de 2'000 fr.

3.- Communique le présent arrêt en copie au manda-
taire du recourant, à l'Université de Genève et à la Commis-
sion de recours de l'Université de Genève.

Lausanne, le 12 octobre 2000
ROC/mnv

Au nom de la IIe Cour de droit public
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président,

La Greffière,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2P.158/2000
Date de la décision : 12/10/2000
2e cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-10-12;2p.158.2000 ?
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