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10/10/2000 | SUISSE | N°1A.169/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 10 octobre 2000, 1A.169/2000


«»

1A.169/2000
1P.287/2000

Ie C O U R D E D R O I T P U B L I C
**********************************************

10 octobre 2000

Composition de la Cour: MM. les Juges Aemisegger, Président,
Féraud et Favre. Greffier: M. Jomini.

Statuant sur les recours de droit administratif et
de droit public formés par

M. et consorts, tous domiciliés à Lausanne et représentés
par
Me Benoît Bovay, avocat à Lausanne,

contre

l'arrêt rendu le 27 mars 2000 par le Tribunal adminis

tratif
du canton de Vaud, dans la cause qui oppose les recourants à
la société anonyme Tridel S.A., à Lausanne, représent...

«»

1A.169/2000
1P.287/2000

Ie C O U R D E D R O I T P U B L I C
**********************************************

10 octobre 2000

Composition de la Cour: MM. les Juges Aemisegger, Président,
Féraud et Favre. Greffier: M. Jomini.

Statuant sur les recours de droit administratif et
de droit public formés par

M. et consorts, tous domiciliés à Lausanne et représentés
par
Me Benoît Bovay, avocat à Lausanne,

contre

l'arrêt rendu le 27 mars 2000 par le Tribunal administratif
du canton de Vaud, dans la cause qui oppose les recourants à
la société anonyme Tridel S.A., à Lausanne, représentée par
Me Jacques-H. Meylan, avocat à Lausanne, à la Municipalité
de
la commune de Lausanne, représentée par Me Daniel Pache,
avocat à Lausanne, à la Municipalité de la commune du Mont-
sur-Lausanne, à la Municipalité de la commune de Romanel-
sur-Lausanne et au Département des travaux publics, de l'amé-
nagement et des transports du canton de Vaud (actuellement:
Département des infrastructures);

(installation de traitement des déchets)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- Le Département des travaux publics, de l'aména-
gement et des transports du canton de Vaud (DTPAT; actuelle-
ment: Département des infrastructures) a adopté le 24 mai
1995, en rejetant les oppositions, le plan d'affectation can-
tonal (PAC) n° 296 destiné à la réalisation d'un centre de
recyclage et d'incinération des déchets dans la partie supé-
rieure de la vallée du Flon, à Lausanne, avec des installa-
tions annexes sur les territoires des communes de Romanel-
sur-Lausanne et du Mont-sur-Lausanne (projet "Tridel"). Ce
plan comprend deux sous-périmètres, distants d'environ 2,5
km: celui du bâtiment principal (usine d'incinération et
locaux annexes, volet A) et celui d'une "installation d'ap-
provisionnement à distance" (interface de la Blécherette,
volet B). L'usine et l'interface, prévus sur des terrains
dont la commune de Lausanne est propriétaire, devraient être
reliés par une galerie souterraine.

La décision par laquelle le DTPAT a adopté le plan
d'affectation cantonal et rejeté les oppositions qui avaient
été déposées lors de l'enquête publique (en septembre 1994)
a
fait l'objet de recours auprès du Département cantonal de la
justice, de la police et des affaires militaires (DJPAM). Ce
département a rejeté les recours par prononcés du 14 mars
1996. Deux recours ont ensuite été déposés par des opposants
devant le Tribunal administratif du canton de Vaud, qui à
son
tour les a rejetés par un arrêt rendu le 30 juin 1998 (cause
AC 96/0074). Les recourants - M.________ et différents
consorts - ont alors demandé au Tribunal fédéral, par la
voie
du recours de droit administratif, d'annuler l'arrêt du Tri-
bunal administratif et le plan d'affectation cantonal (cause
1A.179/1998). Le Tribunal fédéral a partiellement admis ce
recours par un arrêt rendu le 27 avril 1999, pour constata-
tion manifestement incomplète des faits pertinents; il a an-

nulé l'arrêt du Tribunal administratif et lui a renvoyé l'af-
faire pour nouvelle décision.

Le Tribunal administratif a repris l'instruction de
l'affaire (soit des deux recours dont il était saisi depuis
le printemps 1996) puis, par un arrêt rendu le 13 décembre
1999, il a rejeté les recours. Ce jugement cantonal a fait
l'objet d'un nouveau recours de droit administratif, déposé
par M.________ et consorts (cause 1A.17/2000); le Tribunal
fédéral l'a rejeté par un arrêt rendu le 17 août 2000.

Dans le cadre de la procédure d'établissement du
plan d'affectation cantonal - le périmètre constructible des-
tiné à l'usine d'incinération des déchets empiétant sur la
forêt -, une autorisation de défricher a été demandée à l'Of-
fice fédéral de l'environnement, des forêts et du paysage
(OFEFP). Celle-ci a été délivrée le 22 mai 1995 et elle a
fait l'objet d'un recours devant le Département fédéral de
l'intérieur. Cette autorité a rejeté le recours le 24 décem-
bre 1999; M.________ et consorts ont alors formé un recours
de droit administratif, en demandant au Tribunal fédéral
d'annuler cette décision ainsi que l'autorisation de défri-
cher (cause 1A.39/2000). Cette cause a été jointe à la cause
1A.17/2000 (concernant le plan d'affectation cantonal) et,
dans son arrêt du 17 août 2000, le Tribunal fédéral a égale-
ment rejeté ce recours de droit administratif.

Par ailleurs, le 29 octobre 1997, le DTPAT a approu-
vé le plan d'affectation cantonal qu'il avait lui-même
adopté
deux ans auparavant. Cette décision a été publiée et elle
n'a
pas fait l'objet d'un recours.

B.- Au début de l'année 1997 - soit après la déci-
sion du DJPAM sur les recours contre le plan d'affectation
cantonal, mais avant le premier arrêt du Tribunal administra-
tif dans cette contestation -, un "comité provisoire Tridel

et Ville de Lausanne" a déposé trois demandes de permis de
construire au sens des art. 103 ss de la loi cantonale sur
l'aménagement du territoire et les constructions (LATC): la
première pour le "centre Tridel", soit l'usine
d'incinération
avec centre de tri des déchets, garages de véhicules de ra-
massage et locaux administratifs, adressée à la municipalité
de Lausanne; la deuxième pour l'installation de transborde-
ment des conteneurs de déchets et des locaux de service à
l'"interface de la Blécherette", adressée à la municipalité
de Romanel-sur-Lausanne; la troisième pour des ouvrages du
tunnel d'approvisionnement, entre l'interface et l'usine,
adressée à la municipalité du Mont-sur-Lausanne. Le projet
Tridel étant soumis à une étude de l'impact sur l'environne-
ment (EIE), un rapport d'impact (de deuxième étape, la pre-
mière étape ayant été effectuée dans la procédure d'établis-
sement du plan d'affectation cantonal) a également été four-
ni. En outre, le dossier du "centre Tridel" comprend un plan
du 10 janvier 1997 d'"attribution des degrés de sensibilité
au bruit au cas par cas" pour les secteurs proches de
l'usine
d'incinération (quartiers de villas voisins, carrefour de La
Sallaz, terrains le long de la voie d'accès depuis l'auto-
route).

Ces demandes de permis de construire ont été mises à
l'enquête publique du 14 février au 7 mars 1997. Des opposi-
tions ont été déposées dans les trois communes.

Le 31 octobre 1997, la municipalité de Lausanne a
accordé le permis de construire pour le "centre Tridel", en
approuvant certaines modifications apportées au projet par
ses auteurs, après l'enquête publique (notamment:
suppression
de la déchetterie prévue, suppression de trois places de
parc, autorisation de démolir un hangar de voirie existant,
adjonction d'une description des aménagements extérieurs).

Le 6 novembre 1997, la municipalité de Romanel-sur-
Lausanne a accordé le permis de construire pour la halle de
transbordement.

Le 6 novembre 1997 également, la municipalité du
Mont-sur-Lausanne a accordé le permis de construire pour les
ouvrages du tunnel situés sur son territoire, en approuvant
une modification intervenue après l'enquête publique (change-
ment du tracé du premier tronçon, afin qu'il ne traverse
plus
la zone agricole mais qu'il soit aménagé sous le remblai bor-
dant l'autoroute).

En accordant les permis de construire, les trois mu-
nicipalités ont rejeté les oppositions qui leur avaient été
adressées.

Différentes autorisations cantonales ont en outre
été requises pour le projet Tridel, en particulier une auto-
risation spéciale du DTPAT prévue par l'art. 22 al. 2 de la
loi cantonale sur la gestion des déchets (LGD). Ce départe-
ment cantonal a pris le 29 octobre 1997 une "décision fina-
le", au sens des art. 17 ss de l'ordonnance relative à l'étu-
de de l'impact sur l'environnement (OEIE; RS 814.011), qui
accorde l'autorisation selon l'art. 22 al. 2 LGD, fait la
synthèse de l'ensemble des autorisations cantonales et ap-
prouve le projet Tridel avec les corrections de détail sou-
mises aux autorités communales. Cette décision finale a été
communiquée aux municipalités concernées et annexée aux per-
mis de construire.

C.- Deux recours au Tribunal administratif ont été
formés par des opposants contre les trois décisions municipa-
les et la décision finale du DTPAT: l'un par M.________,
l'autre par R.________ et plusieurs consorts. Le Tribunal
administratif a joint les deux recours (cause AC 97/0212) et
il a instruit cette affaire parallèlement à celle concernant

le plan d'affectation cantonal (cause AC 96/0074; cf. supra,
let. A). Il a également statué par un arrêt du 30 juin 1998,
rejetant ces recours, et il a réformé d'office le permis de
construire délivré par la municipalité de Lausanne sur un
point accessoire ("en ce sens que la démolition du hangar de
voirie situé au sud de l'usine litigieuse hors du périmètre
du PAC 296 ne fait pas partie des travaux autorisés").

La société anonyme Tridel S.A., constituée dans
l'intervalle pour assurer la direction opérationnelle et fi-
nancière du projet, a participé à cette procédure de recours
comme intimée.

M.________ ainsi que R.________ et consorts ont
désormais procédé conjointement (ci-après: M.________ et
consorts). Agissant par la voie du recours de droit adminis-
tratif (cause 1A.181/1998) et par celle du recours de droit
public (cause 1P.437/1998), ils ont demandé au Tribunal fédé-
ral d'annuler l'arrêt du Tribunal administratif ainsi que
les
autorisations communales et cantonales pour le projet
Tridel.
Le Tribunal fédéral a joint ces deux recours au recours de
droit administratif concernant le plan d'affectation
cantonal
(cause 1A.179/1998; cf. supra, let. A). Dans son arrêt du 27
avril 1999, il a admis partiellement le recours de droit ad-
ministratif 1A.181/1998, annulé la décision attaquée et ren-
voyé l'affaire pour nouvelle décision au Tribunal administra-
tif; il a considéré en substance qu'il n'était pas possible
de statuer sur la validité des autorisations de construire
avant de connaître le sort des recours contre le plan d'af-
fectation cantonal (consid. 5 de l'arrêt du 27 avril 1999).
Dans ces conditions, le recours de droit public 1P.437/1998
a
été déclaré sans objet.

D.- Le Tribunal administratif a repris l'instruc-
tion des deux recours dirigés contre les trois permis de
construire et la décision finale du DTPAT. Cette procédure a

été suspendue du 2 juin au 22 décembre 1999 (la fin de la
suspension correspondant à la notification de l'arrêt du
Tribunal administratif du 13 décembre 1999 relatif au plan
d'affectation cantonal - cf. supra, let. A).

Par un arrêt rendu le 27 mars 2000, le Tribunal
administratif a rejeté les recours dans la mesure où ils
étaient recevables (ch. I du dispositif); il a "réformé
d'office" le permis de construire délivré par la
municipalité
de Lausanne, "en ce sens que la démolition du hangar de voi-
rie situé au sud de l'usine litigieuse hors du périmètre du
PAC 296 ne fait pas partie des travaux autorisés" (ch. II du
dispositif); il a maintenu pour le surplus les décisions at-
taquées (ch. III du dispositif); il a mis un émolument judi-
ciaire de 3'500 fr. à la charge des recourants,
solidairement
entre eux (ch. IV du dispositif); il a enfin alloué des dé-
pens à la commune de Lausanne, par 2'500 fr., et à Tridel
S.A., par 2'500 fr., à la charge des recourants (ch. V et VI
du dispositif).

E.- M.________ et consorts ont déposé, contre cet
arrêt du Tribunal administratif, un recours de droit adminis-
tratif (1A.169/2000) et un recours de droit public (1P.287/
2000).

Par la voie du recours de droit administratif, ils
demandent au Tribunal fédéral de réformer ou d'annuler l'ar-
rêt du Tribunal administratif, et de prononcer l'annulation
des trois permis de construire ainsi que de la décision fi-
nale du DTPAT, "un degré de sensibilité au bruit II étant
attribué à la partie de la zone qui borde le coteau de La
Sallaz vers le bois de Sauvabelin" et le dossier étant ren-
voyé aux autorités inférieures pour nouvelles décisions. Les
recourants se plaignent d'une violation des prescriptions de
la législation fédérale sur la protection de l'environnement
en matière de protection contre le bruit.

Par la voie du recours de droit public, ils deman-
dent au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt du Tribunal admi-
nistratif. Ils se plaignent, à différents égards, de viola-
tions du droit d'être entendu ou d'un déni de justice
formel.
Ils dénoncent également une violation des principes de la
légalité et de la non-rétroactivité des lois, ainsi qu'une
application arbitraire de différentes dispositions canto-
nales, en faisant en substance valoir que les permis de
construire n'auraient pas dû être délivrés avant l'issue des
procédures de recours contre le plan d'affectation cantonal.
Enfin, critiquant les dépens alloués aux intimés et mis à
leur charge, les recourants se plaignent d'une application
arbitraire du droit cantonal de procédure.

L'instruction de ces deux recours a été suspendue
jusqu'au jugement du Tribunal fédéral dans les causes concer-
nant le plan d'affectation cantonal et l'autorisation de dé-
fricher (arrêt 1A.17/2000 et 1A.39/2000 du 17 août 2000).

Dans leurs réponses, la commune de Lausanne et
Tridel S.A. concluent au rejet des recours.

Les municipalités de Romanel-sur-Lausanne et du
Mont-sur-Lausanne ont renoncé à déposer des observations et
à
prendre des conclusions.

L'Office fédéral de l'environnement, des forêts et
du paysage (OFEFP), s'est déterminé sur les moyens du
recours
de droit administratif.

Le mémoire de réponse du Département des infrastruc-
tures, daté du 22 septembre
2000 et mis à la poste le 23 sep-
tembre 2000, a été déposé après l'échéance du délai de répon-
se, fixée au 20 septembre 2000. Ce mémoire, tardif (cf. art.
32 al. 3, 93 al. 1 et 110 al. 2 OJ), a été renvoyé à son au-
teur et il n'a pas été versé au dossier.

F.- Par ordonnance du 9 juin 2000, le Président de
la Ie Cour de droit public a accordé l'effet suspensif aux
recours de droit administratif et de droit public.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- La présente contestation porte sur l'autorisa-
tion de construire une installation de traitement des dé-
chets. Il s'agit d'une autorisation au sens de l'art. 22 de
la loi fédérale sur l'aménagement du territoire (LAT; RS
700). En droit cantonal vaudois, la compétence pour délivrer
cette autorisation (permis de construire) appartient à la mu-
nicipalité (art. 104 LATC); une ou plusieurs autorisations
spéciales, octroyées par des autorités cantonales, peuvent
en
outre être exigées par des règles particulières (art. 120 ss
LATC). Ces différentes autorisations, délivrées de manière
coordonnée (cf. art. 25a LAT), sont fondées en premier lieu
sur le droit cantonal de l'aménagement du territoire et des
constructions. La conformité du projet à la loi fédérale sur
la protection de l'environnement (LPE; RS 814.01), voire à
d'autres règles du droit administratif fédéral, doit égale-
ment être examinée dans ces procédures d'autorisation.

Dans une contestation relative à une autorisation de
construire à l'intérieur d'une zone à bâtir, la décision pri-
se par l'autorité cantonale de dernière instance ne peut en
principe faire l'objet que d'un recours de droit public
(art.
34 al. 3 LAT). Néanmoins, en tant que cette décision est fon-
dée non pas sur des règles d'aménagement du territoire, mais
sur d'autres normes du droit administratif fédéral - en ma-
tière de protection de l'environnement, par exemple -, le re-
cours de droit administratif est recevable (cf. ATF 125 II
10
consid. 2 p. 13; 123 II 88 consid. 1a p. 91, 231 consid. 2
p.

233 et les arrêts cités; cf. aussi l'arrêt du 27 avril 1999
concernant le projet Tridel, consid. 5b).

En l'occurrence, les recourants prétendent que le
Tribunal administratif aurait violé certaines prescriptions
fédérales sur la protection contre le bruit; à juste titre,
ils présentent leurs griefs à ce propos dans un recours de
droit administratif. Ce recours doit être traité en premier
lieu, le recours de droit public ayant un caractère subsi-
diaire (art. 84 al. 2 OJ). Ces deux recours doivent être
joints pour le jugement (ATF 123 II 16 consid. 1 p. 20; 113
Ia 390 consid. 1 p. 394).

2.- Dans leur recours de droit administratif, les
recourants font valoir que le degré de sensibilité au bruit
II aurait dû être attribué aux terrains bordant le coteau de
La Sallaz en direction de la vallée du Flon. Ils reprochent
au Tribunal administratif d'avoir admis l'application du de-
gré de sensibilité III, en violation selon eux de l'art. 43
de l'ordonnance sur la protection contre le bruit (OPB; RS
814.41) et des objectifs de la loi fédérale sur la
protection
de l'environnement. Ils prétendent aussi que sur ce point,
l'arrêt attaqué serait insuffisamment motivé.

a) Le Tribunal fédéral s'est prononcé à deux re-
prises au sujet de la qualité pour recourir des voisins de
l'emplacement retenu pour le projet Tridel, sous l'angle de
l'art. 103 let. a OJ; il l'avait reconnue au recourant André
Félix, en laissant pour le reste cette question indécise
(arrêt du 27 avril 1999, consid. 2b; arrêt du 17 août 2000,
consid. 2c). En l'espèce, il n'y a pas lieu d'adopter une
autre solution, ni d'examiner plus avant la recevabilité du
recours de droit administratif.

b) En autorisant la construction du centre Tridel à
Lausanne, les autorités compétentes devaient notamment véri-

fier que le bruit provoqué par l'exploitation ne serait pas
la source de nuisances excessives dans le voisinage. Cet exa-
men implique en particulier un contrôle du respect des va-
leurs limites d'exposition au bruit - valeurs de planifica-
tion ou valeurs limites d'immission (art. 25 LPE, art. 7
OPB) -, lesquelles sont fixées dans l'ordonnance sur la pro-
tection contre le bruit et varient selon le degré de sensibi-
lité de la zone exposée (art. 40 ss OPB).

Les cantons devaient veiller à ce que les degrés de
sensibilité fussent attribués aux zones des plans d'affecta-
tion avant le 1er avril 1997 (art. 44 al. 1 et 2 OPB). A
Lausanne, dans les zones adjacentes au périmètre du plan
d'affectation cantonal n° 296 - en particulier sur le coteau
de La Sallaz -, les plans d'affectation communaux n'avaient
pas encore été complétés à cet effet à la date de l'octroi
du
permis de construire (selon les observations de l'OFEFP, une
procédure d'attribution des degrés de sensibilité conforme à
l'art. 44 al. 1 et 2 OPB, sur l'ensemble du territoire com-
munal lausannois, a été engagée en juin 2000, avec la mise à
l'enquête publique d'un plan). La conséquence de cette
lacune
dans la planification communale est que, chaque fois que
l'autorité doit statuer sur une demande de permis de
construire pour une installation bruyante, elle doit détermi-
ner "cas par cas" les degrés de sensibilité applicables
(art.
44 al. 3 OPB).

Ainsi, tandis que les degrés de sensibilité défini-
tivement attribués selon l'art. 44 al. 1 et 2 OPB ne peuvent
en principe plus être remis en question dans une procédure
de
permis de construire, parce qu'ils constituent une
composante
ou un élément d'un plan d'affectation (cf. ATF 120 Ib 287
consid. 3c/cc p. 296; à propos de l'exclusion du contrôle in-
cident ou préjudiciel d'un plan d'affectation dans une procé-
dure de recours contre une autorisation de construire, cf.
ATF 125 II 643 consid. 5d p. 657 et les arrêts cités), la

contestation des degrés de sensibilité demeure possible
quand
ils sont simplement déterminés "cas par cas", avant l'attri-
bution formelle (art. 44 al. 3 OPB). Cette détermination in-
tervient dans le cadre de la procédure d'autorisation de
construire, mais elle n'est pas à proprement parler un élé-
ment de cette autorisation. Au reste, elle n'a aucun effet
juridique en dehors de cette procédure (ATF 120 Ib 287
consid. 2b/aa p. 290). Aussi la contestation ne porte-t-elle
pas sur le contenu de l'autorisation de construire le centre
Tridel, mais sur un point accessoire.

c) Selon l'arrêt du Tribunal administratif, le
secteur auquel les recourants se réfèrent - le coteau de La
Sallaz bordant la vallée du Flon - est incontestablement une
zone mixte au sens de l'art. 43 al. 1 let. c OPB; le degré
de
sensibilité III, indiqué sur le plan du 10 janvier 1997 éta-
bli en vue d'une détermination "cas par cas" au sens de
l'art. 44 al. 3 OPB, est en conséquence adéquat.

L'art. 43 al. 1 OPB énumère de façon claire et
exhaustive les degrés de sensibilité à appliquer dans les
diverses zones d'affectation. L'autorité compétente, dans
une
procédure cantonale d'attribution ou de détermination des
degrés de sensibilité, doit examiner si la zone concernée,
telle qu'elle est définie dans les instruments d'aménagement
du territoire, est une zone qui requiert une protection ac-
crue contre le bruit (art. 43 al. 1 let. a OPB), une zone où
aucune entreprise gênante n'est autorisée (art. 43 al. 1
let.
b OPB), une zone où sont admises des entreprises moyennement
gênantes (art. 43 al. 1 let. c OPB), ou encore une zone où
sont admises des entreprises fortement gênantes (art. 43 al.
1 let. d OPB); suivant les cas, les degrés I, II, III ou IV
devront respectivement être appliqués. Le pouvoir d'apprécia-
tion de l'autorité est assez limité à ce propos, vu les défi-
nitions de l'art. 43 al. 1 OPB (ATF 120 Ib 287 consid. 2c/bb
p. 295). L'art. 43 al. 2 OPB réserve cependant une hypothèse

particulière: celle des parties de zones d'affectation du de-
gré de sensibilité I ou II déjà exposées au bruit, qui peu-
vent être "déclassées d'un degré". Cette possibilité, qui ne
doit pas être utilisée à la légère (cf. ATF 121 II 235
consid. 5b p. 239), n'entre toutefois pas en considération
dans la présente contestation: les recourants ne prétendent
en effet pas que le coteau de La Sallaz devrait être "déclas-
sé", ce qui aurait en définitive pour conséquence de res-
treindre la protection contre le bruit.

Il reste donc à examiner si, en retenant le degré de
sensibilité III, les autorités compétentes ont dans le cas
particulier abusé de leur pouvoir d'appréciation. Comme cela
vient d'être exposé, il suffit pour cette opération de déter-
miner la nature ou la destination de la zone concernée.
C'est
précisément ce que le Tribunal administratif a fait et la mo-
tivation de son arrêt est, à ce propos, suffisante du point
de vue des exigences du droit d'être entendu (art. 29 al. 2
Cst.; ATF 124 II 146 consid. 2a p. 149; 123 I 31 consid. 2c
p. 34). Pour une zone à bâtir urbaine qualifiée de zone
mixte
(habitations, commerces, etc.) - cette qualification n'étant
pas contestée par les recourants -, le degré de sensibilité
III est manifestement approprié (cf. art. 43 al. 1 let. c
OPB). Les griefs des recourants sont donc mal fondés.

Les recourants font encore valoir que les critères
schématiques applicables à l'attribution ou à la détermina-
tion des degrés de sensibilité ne permettraient pas
d'assurer
une protection efficace contre les atteintes nuisibles ou in-
commodantes (cf. art. 1er LPE). Cet argument n'est pas
concluant car le degré de sensibilité n'est pas le seul élé-
ment à prendre en considération pour la limitation des nui-
sances. En effet, quelles que soient les valeurs limites
d'exposition à respecter, l'art. 11 al. 2 LPE dispose qu'il
importe dans tous les cas, à titre préventif, de limiter les
émissions dans la mesure que permettent l'état de la techni-

que et les conditions d'exploitation et pour autant que cela
soit économiquement supportable (cf. notamment ATF 124 II
517
consid. 4b p. 521). Or les recourants, qui ne discutent pas
le contenu des autorisations litigieuses, ne prétendent pas
que les mesures ordonnées concrètement pour limiter le bruit
d'exploitation ou le bruit routier du centre Tridel seraient
insuffisantes. C'est pourquoi il n'y a pas lieu d'examiner
plus avant les arguments avancés en faveur de la protection
des habitants du coteau de La Sallaz.

d) Il s'ensuit que le recours de droit administra-
tif doit être rejeté, dans la mesure où il est recevable.

3.- Les autres griefs des recourants, à l'encontre
de l'arrêt du Tribunal administratif, sont présentés dans un
recours de droit public. Ils ne concernent plus
l'application
du droit fédéral de la protection de l'environnement et ils
ne sont pas dans un rapport étroit avec la contestation rela-
tive aux degrés de sensibilité dans le voisinage du centre
Tridel. Les recourants mettent en cause la validité des auto-
risations cantonales et communales parce que des règles for-
melles du droit de l'aménagement du territoire ou des garan-
ties applicables aux procédures d'autorisation et de recours
auraient été violées. La règle de l'art. 34 al. 3 LAT s'ap-
plique donc (cf. supra, consid. 1) et, à ce propos, la voie
du recours de droit public a été choisie à juste titre.

Vu le sort à réserver, sur le fond, aux griefs des
recourants, les questions relatives à la recevabilité du re-
cours de droit public (art. 84 ss OJ) peuvent demeurer indé-
cises.

4.- Les recourants se plaignent d'une violation du
droit d'être entendu (art. 29 al. 2 Cst.) en faisant valoir
qu'après l'annulation, par le Tribunal fédéral, du premier
arrêt du Tribunal administratif concernant les autorisations

de construire, la juridiction cantonale aurait dû réexaminer
complètement leurs moyens, tenir une nouvelle audience, sta-
tuer au terme de "vraies délibérations", et rendre un juge-
ment avec une motivation nouvelle.

En annulant le premier arrêt du Tribunal administra-
tif, le Tribunal fédéral ne s'est pas prononcé sur le fond,
car cette annulation n'était qu'une conséquence de l'admis-
sion des recours concernant le plan d'affectation cantonal.
L'affaire a été renvoyée au Tribunal administratif pour nou-
velle décision, sans aucune indication dans les considérants
quant aux mesures d'instruction à prendre ou au contenu du
nouveau jugement cantonal, sinon qu'il devrait tenir compte
du résultat de la procédure de recours contre le plan d'af-
fectation cantonal (arrêt du 27 avril 1999, causes
1A.181/1998 et 1P.437/1998, consid. 5 et 6). Le Tribunal
administratif pouvait donc se fonder sur le dossier
constitué
dans la première phase de la procédure, avant l'arrêt du Tri-
bunal fédéral du 27 avril 1999. Une audience avait alors été
organisée et les recourants n'expliquent pas pourquoi une
nouvelle comparution des parties aurait été nécessaire dans
la seconde phase de la procédure.

Cela étant, les recourants prétendent que le Tribu-
nal administratif aurait renoncé, à l'occasion de son second
arrêt, à un examen complet des questions litigieuses. Or le
seul indice qu'ils fournissent à ce propos est le fait que,
sur de nombreux points, la motivation des deux arrêts est
identique. On ne peut manifestement pas en déduire que cette
motivation serait insuffisante au regard des exigences du
droit d'être entendu (voir la jurisprudence citée supra,
consid. 2c). Ce grief est donc mal fondé.

5.- Invoquant encore l'art. 29 Cst., les recourants
se plaignent d'un déni de justice formel en reprochant au
Tribunal administratif de n'avoir pas traité certains de
leurs griefs.

a) Ils se plaignent d'abord de ce que la juridic-
tion cantonale n'aurait pas examiné divers rapports
qu'ils
ont produits, au sujet de surcapacités d'incinération en
Suisse, de solutions alternatives au projet Tridel ou du
déroulement des différentes procédures cantonales dans ce
contexte.

Ces documents sont mentionnés dans l'arrêt attaqué
(faits, let. E, p. 8): le Tribunal administratif les a donc
bel et bien enregistrés. Il n'a pas assimilé ces documents à
des compléments de l'acte de recours - ils ont au demeurant
été produits bien après l'échéance du délai de recours -
mais
il les a considérés, manifestement, comme des pièces ou preu-
ves à l'appui de l'argumentation et des conclusions qui lui
avaient été présentées auparavant selon les formes de l'art.
31 al. 2 de la loi cantonale sur la juridiction et la procé-
dure administratives (LJPA). Le Tribunal administratif était
tenu de statuer explicitement sur les griefs proprement dits
(cf. ATF 115 Ia 1 consid. 3 p. 4), mais pas de prendre posi-
tion dans son arrêt sur chaque élément censé étayer ces
griefs. Cela étant, les recourants ne cherchent pas à démon-
trer que le Tribunal administratif n'aurait pas lu ces docu-
ments et qu'il n'en aurait pas tenu compte de façon appro-
priée dans son appréciation, en fonction de leur caractère
probant. Aussi le grief de violation du droit d'être entendu
apparaît-il, à cet égard, mal fondé (cf. arrêt du 17 août
2000 dans la cause 1A.17/2000, consid. 4a).

b) Les recourants soutiennent que le Tribunal admi-
nistratif n'aurait pas examiné leur argument au sujet de
l'intérêt actuel à obtenir les permis de construire liti-

gieux, compte tenu des risques de péremption. Or on ne voit
pas, dans les mémoires de recours au Tribunal administratif
-
celui de M.________ et celui de R.________ et consorts -,
que
cet argument aurait été évoqué à l'appui d'un grief. En
outre, il a été examiné dans l'arrêt attaqué (consid. 1 in
fine). Le grief de déni de justice formel est, à ce propos
également, mal fondé.

c) Les recourants reprochent encore au Tribunal
administratif d'avoir refusé d'examiner certains de leurs
griefs - ceux relatifs à la conformité des locaux adminis-
tratifs et du réfectoire au plan d'affectation cantonal et
ceux concernant la clause d'esthétique - au motif qu'il
s'agissait de questions d'opportunité qu'il n'était pas
habilité à revoir.

Si, sur les deux points que l'on vient de mention-
ner, le Tribunal administratif a effectivement rappelé que
sa cognition ne s'étendait pas à l'opportunité, il a
pourtant
également examiné les griefs des recourants sur le fond.
Dans
les deux cas, il a considéré que ces critiques visaient en
réalité le plan d'affectation, dont le contenu ne pouvait
pas
être remis en cause au stade du permis de construire. Le Tri-
bunal administratif a donc adopté dans ces deux cas une dou-
ble motivation, sur la recevabilité et sur le fond; aussi ne
saurait-on lui reprocher un déni de justice formel en raison
d'un refus d'entrer en matière.

6.- Les recourants critiquent l'absence d'avis per-
sonnel à tous les intéressés après le dépôt des demandes
d'autorisations de construire ainsi que la renonciation à
une
enquête publique complémentaire pour les éléments du projet
Tridel modifiés après la première enquête publique (tracé du
tunnel, suppression de la déchetterie, modification de la
cheminée, etc.). Ils se plaignent à ce propos d'une
violation
du droit d'être entendu (art. 29 al. 2 Cst.), d'une
violation

des principes de l'art. 33 LAT et d'une application abusive
ou arbitraire des art. 111 et 117 LATC.

L'art. 33 al. 1 LAT prévoit la mise à l'enquête pu-
blique des plans d'affectation; il est sans pertinence dans
une procédure ouverte en vue de l'octroi d'une autorisation
de construire. Quant aux autres alinéas de l'art. 33 LAT,
ils
concernent la procédure cantonale de recours.

Les demandes d'autorisation pour le projet Tridel
ont été mises à l'enquête publique, ce qui a permis aux re-
courants d'exercer leur droit d'être entendus et de parti-
ciper d'emblée à la procédure d'opposition, puis à la procé-
dure de recours. On ne voit pas en quoi un avis personnel
leur aurait permis de faire valoir leurs droits de manière
plus efficace. Les recourants évoquent la défense des in-
térêts de tiers, qui n'auraient pas été informés en temps
utile; or ils ne peuvent de toute manière, par la voie du
recours de droit public, qu'invoquer leurs intérêts person-
nels ou propres (art. 88 OJ; cf. ATF 126 I 81 consid. 3 p.
85
et les arrêts cités), de sorte que l'atteinte éventuelle aux
intérêts de tiers n'a pas à être examinée.

A propos de l'absence d'une enquête publique complé-
mentaire pour les modifications apportées au projet initial,
qui ont été approuvées par les municipalités de Lausanne et
du Mont-sur-Lausanne, les recourants n'expliquent pas en
quoi
cela les aurait empêchés d'exercer leur droit d'être enten-
dus. Ils se prévalent des art. 111 et 117 LATC, mais sans
critiquer l'argumentation détaillée du Tribunal
administratif
à propos des exigences du droit cantonal en pareil cas. Il
n'y a en conséquence pas lieu d'entrer en matière sur ce
grief, le recours de droit public n'étant pas, à cet égard,
motivé conformément aux exigences de l'art. 90 al. 1 let. b
OJ (cf. ATF 125 I 492 consid. 1b p. 495 et les arrêts
cités).

7.- Les recourants font valoir, en substance, que
les permis de construire ainsi que la décision finale du
département cantonal n'auraient pas dû être délivrés avant
l'issue des procédures de recours contre le plan d'affecta-
tion cantonal, celui-ci n'étant alors ni définitif, ni en
vigueur. Ils se plaignent de la violation de divers
principes
ou normes constitutionnels (art. 5, 8, 9, 26, 29 Cst.; prin-
cipes de la légalité et de non-rétroactivité) et légaux
(art.
75 al. 1, 79 et 104 LATC; principes de la coordination et de
la planification par étapes).

a) Une autorisation de construire ne peut être dé-
livrée que si la construction ou l'installation est conforme
à l'affectation de la zone (art. 22 al. 2 let. a LAT, art.
104 al. 1 LATC). Cela suppose que l'affectation soit définie
dans un plan exécutoire. Le Tribunal administratif s'est fon-
dé à ce propos sur le plan d'affectation cantonal n° 296;
les
recourants ne mettent pas en doute la conformité matérielle
du projet Tridel à ce plan. Leurs griefs sont d'ordre
formel:
en substance, dans l'enchaînement des procédures de planifi-
cation et de permis de construire, la projet aurait été auto-
risé prématurément.

Les autorisations litigieuses ont été délivrées
après l'adoption du plan d'affectation cantonal par le DTPAT
le 24 mai 1995 (décision comportant le rejet des opposi-
tions), et après le rejet par un autre département cantonal
(DJPAM), le 14 mars 1996, des recours dirigés contre ce
plan.
Elles ont en revanche été octroyées alors que des recours au
Tribunal administratif, dirigés contre l'adoption du plan
d'affectation cantonal, étaient pendants (c'est au demeurant
l'arrêt du Tribunal fédéral du 17 août 2000 qui a mis un
terme aux procédures de recours ordinaires contre le plan
d'affectation cantonal). Selon les recourants, ces recours
pendants excluaient l'octroi de permis de construire, car
ces

autorisations étaient fondées sur une planification non défi-
nitive.

Les autorisations litigieuses sont par ailleurs pos-
térieures (de quelques jours) à l'approbation du plan par le
DTPAT le 29 octobre 1997; cette dernière décision n'a pas
fait l'objet d'un recours. Les recourants prétendent cepen-
dant que l'approbation de ce plan, dont dépendait son entrée
en vigueur, aurait dû être prononcée par le Conseil d'Etat;
approuvé par une autorité incompétente, le plan
d'affectation
cantonal ne pourrait pas servir de fondement à des autorisa-
tions de construire.

b) Il n'est pas d'emblée exclu qu'une autorisation
de construire soit délivrée avant la fin des procédures de
recours contre le plan d'affectation sur lequel cette autori-
sation est fondée. Un recours n'empêche pas nécessairement
les mesures d'exécution du plan car, conformément aux prin-
cipes généraux du droit administratif, une décision a force
exécutoire - ce qui signifie que l'autorité peut la faire
exécuter d'office ou sur demande - avant d'être formellement
en force, quand le moyen juridictionnel ordinaire exercé
contre elle, ou susceptible de l'être, n'a pas d'effet
suspensif (cf. André Grisel, Traité de droit administratif,
Neuchâtel 1984, vol. II p. 882).

Dans le cas particulier, le recours de droit public
étant dirigé contre le jugement cantonal relatif aux autori-
sations de construire, les intéressés ne peuvent pas
attaquer
directement les décisions prises dans la procédure d'élabora-
tion du plan d'affectation cantonal. Ils ne peuvent donc pas
critiquer une ordonnance relative à l'effet suspensif rendue
par le Tribunal administratif lors de l'instruction des re-
cours contre ce plan d'affectation. Ils ne peuvent pas non
plus présenter des griefs à l'encontre de la décision d'ap-
probation du plan du 29 octobre 1997, laquelle n'a pas fait

l'objet de recours en temps utile. En définitive, ils
peuvent
uniquement faire valoir qu'en appliquant l'art. 22 al. 2
let.
a LAT - ou plutôt l'art. 104 al. 1 LATC, qui reprend cette
règle en droit cantonal -, l'autorité cantonale a considéré
à
tort que le régime prévu par le plan d'affectation cantonal
était déjà déterminant et qu'il pouvait servir de base aux
autorisations requises. Le seul grief pertinent est, en d'au-
tres termes, celui d'une application arbitraire du droit can-
tonal de l'aménagement du territoire et des constructions
(cf. art. 9 Cst.). Les autres normes ou principes constitu-
tionnels ou légaux invoqués par les recourants sont en revan-
che sans pertinence.

c) aa) En droit cantonal vaudois, l'effet suspensif
n'est pas automatique et il faut qu'il soit prononcé, d'offi-
ce ou sur requête, par le magistrat instructeur (art. 45
LJPA). Il ressort de l'arrêt attaqué que l'effet suspensif
n'a pas été accordé, par le Tribunal administratif, aux re-
cours contre les décisions du DJPAM relatives au plan d'af-
fectation cantonal adopté par le DTPAT; cela n'est pas
contesté par les actuels recourants. De ce point de vue for-
mel, ces décisions pouvaient donc être considérées comme exé-
cutoires par les autorités administratives qui devaient sta-
tuer sur les demandes d'autorisations de construire.

bb) La portée de la décision d'approbation du plan
d'affectation cantonal doit également être examinée. Selon
l'art. 26 LAT, les plans d'affectation doivent être
approuvés
par une autorité cantonale (al. 1), cette décision leur
conférant force obligatoire (al. 3). L'approbation permet no-
tamment à l'autorité cantonale compétente en matière d'aména-
gement du territoire d'exercer ses tâches de surveillance à
l'égard des autorités communales quand elles adoptent leur
planification (cf. Alexander Ruch, Commentaire LAT, Zurich
1999, art. 26, n. 10 ss). Lorsque le plan d'affectation a
été
adopté par une autorité cantonale, et que cette même
autorité

a également la compétence de l'approuver par une décision
distincte, il est plus difficile de déterminer le sens de
l'approbation. Quoi qu'il en soit, il appartient au législa-
teur cantonal de choisir les solutions formelles qu'il
estime
adéquates pour la mise en oeuvre de la loi fédérale sur
l'aménagement du territoire (cf. art. 25 al. 1 LAT).

Comme l'expose l'arrêt attaqué, la réglementation de
la compétence pour approuver un plan d'affectation cantonal
a
évolué à l'occasion de révisions successives de la loi canto-
nale sur l'aménagement du territoire et les constructions.
Dans sa teneur initiale (du 4 décembre 1985), l'art. 73 LATC
prévoyait la compétence du DTPAT pour établir un projet de
plan et des propositions de réponses aux oppositions, et il
donnait au Conseil d'Etat la compétence de statuer "en der-
nier ressort sur les propositions et les requêtes". L'art.
73
LATC a été modifié le 9 février 1994 (cf. Recueil annuel de
la législation vaudoise, 1994, p. 40): la compétence a été
donnée au DTPAT de statuer sur les oppositions (al. 3 -
cette
décision comportant nécessairement l'adoption du plan) et la
compétence du Conseil d'Etat pour approuver le plan et le
mettre en vigueur a été maintenue (art. 61 LATC par renvoi
de
l'art. 73 al. 4 LATC). Ces dispositions ont été une fois
encore modifiées le 20 février 1996 (cf. Recueil annuel de
la
législation vaudoise, 1996, p. 21): cette réglementation pré-
voit que le DTPAT (actuellement: le Département des infra-
structures) statue sur les oppositions et qu'il se prononce
sur l'approbation du plan; en règle générale, la décision
sur
les oppositions intervient en même temps que l'approbation
(art. 73 al. 3 et 4 LATC). La novelle du 20 février 1996 est
entrée en vigueur le 30 avril 1996; elle ne contient pas de
dispositions transitoires. Enfin, le texte de l'art. 73 LATC
a encore été modifié par une loi du 4 février 1998, entrée
en
vigueur le 7 avril 1998; cette dernière révision confirme
toutefois la compétence du DTPAT pour statuer sur les opposi-

tions et approuver le plan, en règle générale par des déci-
sions simultanées (art. 73 al. 3 LATC).

Lorsque le DTPAT a adopté le plan d'affectation can-
tonal, le 24 mai 1995, il avait la compétence pour prendre
une telle décision, mais pas pour approuver ce plan; à cette
époque, il fallait pour cela une décision ultérieure du
Conseil d'Etat. Or le gouvernement cantonal n'a pas approuvé
le plan avant le 30 avril 1996 et, ensuite, il a été privé
de
cette compétence. C'est pourquoi le DTPAT a lui-même
prononcé
l'approbation
le 29 octobre 1997, conformément au texte de
l'art. 73 al. 4 LATC applicable à ce moment-là. Dans la pré-
sente procédure de recours de droit public, il ne s'agit pas
de contrôler la validité de la décision d'approbation, mais
seulement de se prononcer sur son éventuelle nullité, qu'il
y
aurait lieu de constater d'office; il en irait en
particulier
ainsi si cette décision d'approbation avait été prise par
une
autorité manifestement incompétente, ou si elle était enta-
chée d'un autre vice grave (cf. ATF 122 I 97 consid. 3a/aa
p.
98/99; 118 Ia 336 consid. 2a p. 340 et les arrêts cités).
Ces
conditions ne sont à l'évidence pas remplies, le DTPAT pou-
vant fonder sa compétence sur une norme applicable à la date
où il s'est prononcé.

cc) Les autorités qui ont délivré les autorisations
de construire pouvaient dès lors admettre que le plan d'af-
fectation cantonal était en vigueur, d'une part, et que le
Tribunal administratif ne l'avait pas privé de son caractère
exécutoire pendant la procédure de recours, d'autre part. Il
n'était pas insoutenable, et donc pas arbitraire (cf. ATF
125
I 166 consid. 2a p. 168; 125 II 10 consid. 3a p. 15, 129
consid. 5b p. 134; 124 V 137 consid. 2b p. 139; 124 IV 86
consid. 2a p. 88 et les arrêts cités), de considérer que
l'affectation de la zone, au sens de l'art. 22 al. 2 let. a

LAT, était à ce stade déjà définie par ce plan. Les griefs
des recourants à ce propos sont donc mal fondés.

8.- Les recourants se plaignent de leur condamna-
tion à payer des dépens à deux parties intimées. Selon eux,
le Tribunal administratif aurait appliqué de manière arbi-
traire l'art. 55 LJPA, car il n'aurait pas tenu compte de
certaines circonstances. Ils mentionnent à cet égard le fait
que le projet Tridel avait été partiellement modifié après
l'enquête publique, à cause des oppositions, et que le Tribu-
nal administratif a jugé nécessaire de réformer d'office,
sur
un point, le permis de construire délivré par la
municipalité
de Lausanne (cf. ch. II du dispositif de l'arrêt attaqué).

L'art. 55 al. 1 LJPA dispose que les dépens sont en
principe supportés par la ou les parties qui succombent. Ce
principe n'est pas absolu car une autre répartition peut
être
ordonnée, en vertu de l'art. 55 al. 2 LJPA, lorsque l'équité
l'exige. Dans le cas particulier, les recourants ont succom-
bé. On ne saurait déduire des circonstances qu'ils invoquent
qu'ils auraient eu néanmoins partiellement gain de cause de-
vant le Tribunal administratif, en dépit du rejet total de
leurs conclusions. L'équité n'exige pas non plus, de façon
évidente, une autre solution. Aussi n'était-il pas
arbitraire
d'appliquer sans réserve la règle de l'art. 55 al. 1 LJPA.

9.- Il s'ensuit que le recours de droit public doit
être rejeté, dans la mesure où il est recevable.

10.- Les recourants, qui succombent, doivent payer
l'émolument judiciaire, fixé globalement pour le recours de
droit administratif et le recours de droit public (art. 153,
153a et 156 al. 1 OJ). Ils auront en outre à verser des dé-
pens à la société Tridel; les collectivités intimées n'ont
en
revanche pas droit à des dépens (art. 159 al. 1 et 2 OJ).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Rejette le recours de droit administratif et le
recours de droit public, dans la mesure où ils sont receva-
bles;

2. Met à la charge des recourants, solidairement
entre eux:
a) un émolument judiciaire de 3'000 fr.;
b) une indemnité de 2'000 fr. à payer à Tridel S.A.
à titre de dépens;

3. Communique le présent arrêt en copie aux manda-
taires des recourants, de Tridel S.A. et de la Municipalité
de la commune de Lausanne, à la Municipalité de la commune
du Mont-sur-Lausanne, à la Municipalité de la commune de
Romanel-sur-Lausanne, au Département des infrastructures et
au Tribunal administratif du canton de Vaud, ainsi qu'à
l'Office fédéral de l'environnement, des forêts et du
paysage.

Lausanne, le 10 octobre 2000
JIA/col

Au nom de la Ie Cour de droit public
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président,

Le Greffier,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 1A.169/2000
Date de la décision : 10/10/2000
1re cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-10-10;1a.169.2000 ?
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