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06/10/2000 | SUISSE | N°5P.205/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 06 octobre 2000, 5P.205/2000


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5P.205/2000

IIe C O U R C I V I L E
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6 octobre 2000

Composition de la Cour: M. Reeb, président, M. Bianchi et
Mme
Nordmann, juges. Greffière: Mme Mairot.

__________

Statuant sur le recours de droit public
formé par

R.________, représenté par Me Marianne Bovay, avocate à
Genève,

contre

l'arrêt rendu le 14 avril 2000 par la Chambre civile de la
Cour de justice du canton de Genève dans la cause qui oppose
le recourant à d

ame R.________, née K.________, représentée
par Me Brigitte Woodcock, avocate à Genève;

(art. 9 Cst.; modification d'une ren...

«»
5P.205/2000

IIe C O U R C I V I L E
******************************

6 octobre 2000

Composition de la Cour: M. Reeb, président, M. Bianchi et
Mme
Nordmann, juges. Greffière: Mme Mairot.

__________

Statuant sur le recours de droit public
formé par

R.________, représenté par Me Marianne Bovay, avocate à
Genève,

contre

l'arrêt rendu le 14 avril 2000 par la Chambre civile de la
Cour de justice du canton de Genève dans la cause qui oppose
le recourant à dame R.________, née K.________, représentée
par Me Brigitte Woodcock, avocate à Genève;

(art. 9 Cst.; modification d'une rente
selon l'art. 152 aCC)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- Le 25 avril 1991, le Tribunal de première ins-
tance de Genève a prononcé le divorce des époux R.________,
né le 5 avril 1957, et dame R.________, née K.________ le 22
février 1959.

Statuant "d'accord entre les parties" sur les effets
accessoires du divorce, le Tribunal a attribué à l'épouse la
garde et l'autorité parentale sur les deux enfants du
couple,
Jennifer Diane, née le 20 septembre 1985 et Joanna Mary-Ann,
née le 9 mars 1988, un droit de visite et de consultation
étant réservé au père. Le Tribunal a en outre donné acte à
celui-ci de son engagement de verser à la mère, par mois et
par enfant, des contributions d'entretien de 650 fr. jusqu'à
l'âge de dix ans, 750 fr. de 10 ans à 15 ans, 900 fr. de 15
ans à la majorité, voire au delà, mais jusqu'à 25 ans au
plus
en cas d'études sérieuses et régulières, allocations familia-
les et indexation en sus. Il a également été donné acte au
mari de son engagement de verser à l'épouse, en application
de l'art. 152 aCC, une pension mensuelle, indexée, de 2'000
fr. du 1er janvier 1991 au 30 septembre 1992, puis de 1'500
fr. dès le 1er octobre 1992.

Le 7 janvier 1994, R.________ s'est remarié avec
dame X.________. Trois enfants sont issus de cette seconde
union, David, né le 1er janvier 1994, Yann, né le 11 avril
1996 et Selena, née le 25 octobre 1999.

B.- Le 6 avril 1999, R.________ a saisi le Tribunal
de première instance de Genève d'une demande en modification
de jugement de divorce tendant à la suppression de la contri-
bution d'entretien due pour son ex-épouse.

Par jugement du 2 décembre 1999, le Tribunal l'a dé-
bouté.

Statuant le 14 avril 2000, sur appel de celui-ci, la
Cour de justice du canton de Genève a confirmé ce jugement.

C.- a) Agissant par la voie du recours de droit pu-
blic au Tribunal fédéral pour arbitraire, R.________ conclut
à l'annulation de l'arrêt du 14 avril 2000.

Des observations n'ont pas été requises.

b) Le recourant a également interjeté un recours en
réforme contre le même arrêt.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- Conformément au principe général de l'art. 57
al. 5 OJ, il convient d'examiner en premier lieu le recours
de droit public.

2.- Interjeté en temps utile contre une décision fi-
nale rendue en dernière instance cantonale, le recours est
en
principe recevable au regard des art. 84 ss OJ.

3.- Le recourant soutient que l'autorité cantonale a
arbitrairement apprécié ses revenus mensuels, en comptabili-
sant deux fois le montant de 521 fr.20 correspondant à des
"confidential fees".

a) Selon la Cour de justice, il ressort des pièces
produites que le revenu mensuel net du recourant s'élève à
8'919 fr. (10'543 fr.60 brut moins 1'624 fr. de charges so-
ciales). Lors des plaidoiries du 31 mars 2000, son
mandataire
avait toutefois déclaré que son salaire net moyen en 1999

avait été de 10'137 fr., sans que ce montant soit confirmé
par pièces. L'autorité cantonale a considéré qu'il fallait y
ajouter la somme de 521 fr.20 versée au titre de "confiden-
tial fees". Son employeur avait en effet attesté de l'exis-
tence de ceux-ci, correspondant au 5% du salaire brut, pré-
cisant qu'ils représentaient un avantage non taxable et par
conséquent non inclus dans le salaire brut; ils apparais-
saient d'ailleurs dans le certificat de salaire du recourant
pour 1998 sous la rubrique "frais de représentation".

b) Regrettant la confusion qui règnerait à propos de
ses revenus, le recourant prétend, d'une part, que le
montant
des "confidential fees" est inclus dans son salaire brut;
d'autre part, qu'il figure dans son certificat de salaire
pour la déclaration d'impôt sous la rubrique frais de repré-
sentation. Ces affirmations sont contradictoires, dans la me-
sure où ledit certificat mentionne expressément que les in-
demnités figurant dans cette rubrique ne sont pas comprises
dans le salaire brut; il résulte du reste clairement des piè-
ces du dossier que les "confidential fees" n'y sont pas in-
clus. Pour le surplus, le recourant affirme de façon
purement
appellatoire, donc irrecevable (cf. ATF 125 I 492 consid. 1b
p. 495), que son salaire mensuel net est de 10'137 fr. "avec
le bonus" et de 9'619 fr.80 "sans le bonus", variable
d'année
en année.

Loin de démontrer avec précision en quoi l'autorité
cantonale aurait commis arbitraire, ses allégations ne font
qu'ajouter à la prétendue confusion dont il se plaint. Selon
les attestations de son employeur, le recourant a reçu, de
1994 à 1999, un salaire comportant une augmentation de 3%
par
an liée au mérite. Depuis 1998, il bénéficie en outre de
"confidential fees" - non inclus dans le salaire brut total
-
et d'un bonus non garanti inclus dans le salaire brut total.
Si l'on se réfère au certificat établi par son employeur
pour

1998, son salaire brut total est de 130'702 fr. et son salai-
re net de 115'429 fr., auquel s'ajoute une indemnité de
6'854
fr. pour frais de représentation, non comprise dans le salai-
re brut. En admettant qu'il s'agisse, comme le relève l'auto-
rité cantonale, des "confidential fees", le salaire net
moyen
du recourant en 1998 peut être évalué à 10'190 fr. par mois
(115'429 fr. + 6'854 fr. : 12). En ce qui concerne 1999, le
recourant n'a produit qu'une seule pièce, à savoir un bulle-
tin de salaire pour le mois de juillet. Ce document n'est ce-
pendant pas déterminant, dès lors qu'il ne permet pas de con-
naître le montant - variable - du bonus que le recourant a
pu
recevoir cette année-là. Dans ces conditions, la cour canto-
nale ne saurait se voir reprocher d'avoir fait preuve d'arbi-
traire en retenant, sur la base des déclarations du mandatai-
re du recourant, un salaire annuel net 10'658 fr.20 (10'137
fr. + 521 fr. 20); du moins, celui-ci ne démontre pas claire-
ment que tel soit le cas (art. 90 al. 1 let. b OJ; ATF 110
Ia
1 consid. 2a p. 3-4). En particulier, il n'établit pas que
la
somme de 10'137 fr. alléguée par son avocat dans sa plaidoi-
rie comprendrait les 521 fr.20 de "confidential fees", qu'au
demeurant il ne conteste pas avoir reçus. Le grief est ainsi
mal fondé, en tant qu'il est recevable.

4.- Le recourant se plaint en outre d'une apprécia-
tion arbitraire des revenus de sa nouvelle épouse.

a) Se fondant sur les pièces du dossier, l'autorité
cantonale a considéré que ladite épouse avait réalisé en
1999
un revenu mensuel net de 5'227 fr.63, correspondant à une ac-
tivité de 80%, bien qu'elle n'ait effectivement travaillé
qu'à 40%. Ce salaire lui serait versé en totalité jusqu'en
avril 2000, mois à partir duquel son cas relèverait des pres-
tations pour cause d'invalidité du premier et du deuxième pi-
liers et serait donc revu. La cour cantonale a de plus admis
que sa capacité de travail ne pourrait vraisemblablement pas
être supérieure à 50% à l'avenir. Elle a cependant estimé
que

son revenu devait être entièrement pris en compte, car il
n'avait pas été démontré que celui-ci serait réévalué dès le
mois de mai 2000; le montant de son salaire à partir de
cette
date n'était pas non plus établi. En particulier, il n'était
nullement prouvé que son employeur eût l'intention de rési-
lier son contrat de travail. L'autorité cantonale a de plus
considéré qu'il ressortait clairement des certificats médi-
caux produits que l'actuelle épouse du débirentier conserve-
rait une capacité de gain résiduelle, qu'elle pourrait être
contrainte d'utiliser en raison de l'obligation d'assistance
entre conjoints. Toujours selon la cour, elle devrait aussi
bénéficier à la fois des prestations de l'assurance-invali-
dité et de la prévoyance professionnelle, qui couvriraient
en
principe au moins une partie de sa perte de salaire. Il y
avait dès lors lieu de prendre en compte, en l'état, un reve-
nu mensuel net de 5'227 fr.63.

b) Le recourant prétend qu'à défaut d'être certai-
nes, les ressources futures de sa nouvelle épouse étaient dé-
terminables au vu des pièces du dossier. Il allègue qu'à par-
tir de mai 2000, sa capacité de gain s'est réduite de moitié
(40% au lieu de 80%), ce qui ne représente plus qu'un revenu
de 2'613 fr.80 par mois. Si tant est qu'elle puisse
percevoir
des rentes d'invalidité, celles-ci ne devraient par ailleurs
être fixées que dans deux ans. De plus, il serait notoire
que
de telles rentes ne compensent pas intégralement la perte de
salaire. En retenant que la capacité de travail résiduelle
de
son épouse et la rente d'invalidité dont elle pourrait béné-
ficier lui procureraient un revenu identique à celui d'une
activité à 80%, l'autorité cantonale aurait commis arbitrai-
re. D'autant qu'il serait choquant d'obliger son épouse à
travailler, alors qu'elle est handicapée et mère de trois
enfants en bas âge, pour assurer le paiement d'une rente
d'assistance en faveur d'une première épouse parfaitement ap-
te au travail et au bénéfice d'une solide formation profes-
sionnelle.

c) Contrairement à ce que soutient le recourant,
l'autorité cantonale n'a pas affirmé que sa nouvelle épouse
continuerait de percevoir le même revenu que celui réalisé
jusqu'alors. Elle s'est contentée de dire que ses futures
ressources étaient incertaines, son degré d'invalidité et
les
répercussions de celui-ci sur ses moyens financiers n'étant
nullement établis. Le recourant ne démontre pas que cette
opinion soit arbitraire (art. 90 al. 1 let. b OJ; ATF 110 Ia
1 consid. 2a p. 3-4). S'il résulte des pièces produites que
le cas de son épouse sera effectivement revu à partir
d'avril
2000 et qu'il est probable que celle-ci ne pourra à l'avenir
pas travailler à plus de 50%, rien ne permet toutefois d'éva-
luer le montant de ses futurs revenus. Or, cette question ne
constitue pas un fait notoire, mais dépend de circonstances
de fait concrètes propres à l'intéressée. Comme le recourant
n'a pas été à même de fournir des preuves à ce sujet, l'auto-
rité cantonale ne saurait se voir reprocher d'avoir commis
arbitraire sur ce point. La question d'un délai d'attente
avant l'obtention des prestations d'invalidité n'est au de-
meurant pas déterminante, le fait nouveau justifiant la modi-
fication devant être durable (ATF 120 II 4 consid. 5d).
Quant
à savoir si et dans quelle mesure le conjoint du débirentier
peut être tenu, en vertu de son devoir d'assistance, d'aider
l'autre dans l'accomplissement de son obligation d'entretien
envers son ex-époux (art. 159 al. 3 CC; ATF 79 II 137
consid.
3 p. 140/141; Hausheer/Reusser/Geiser, Kommentar zum Ehe-
recht, n. 41 ad art. 159 CC), il s'agit d'une question qui
relève du droit fédéral, donc du recours en réforme lorsque,
comme en l'espèce, celui-ci est ouvert (art. 43 al. 1 OJ).
Les critiques soulevées à cet égard sont dès lors irreceva-
bles dans le présent recours de droit public (art. 84 al. 2
OJ).

5.- Dans un autre moyen, le recourant prétend que la
Cour de justice a arbitrairement apprécié son minimum vital.

Dans la mesure où il lui reproche de n'avoir pas re-
tenu un certain nombre d'éléments dans le calcul de ses char-
ges - à savoir les frais consécutifs à l'accueil de ses fil-
les aînées, la location d'un garage et d'un dépôt ainsi que
ses frais de voiture -, son recours est irrecevable. Ces
questions relèvent en effet du droit et peuvent donc être
soumises au Tribunal fédéral par la voie du recours en réfor-
me (cf. arrêt non publié K. c. dame K. du 3 mars 1992, in SJ
1992 p. 380, consid. 3b); il en va de même de ses critiques
concernant le refus de l'autorité cantonale de majorer de
20%
tous les postes de son minimum vital. En ce qui concerne les
frais de crèche, la Cour de justice a estimé que leur
montant
n'avait pas été valablement prouvé: le recourant se contente
d'affirmer le contraire, sans toutefois rien démontrer. Il
reproche en outre à l'autorité cantonale de n'avoir pris en
compte qu'une somme de 855 fr., correspondant à l'entretien
de trois enfants de moins de six ans, alors que son fils
aîné
a eu six ans le 1er janvier 2000. Il est exact que l'âge de
l'enfant a changé entre le moment où le jugement de première
instance a été rendu (le 2 décembre 1999), et celui où la
Cour de justice a statué (le 14 avril 2000). Toutefois, sa-
voir si la juridiction de recours devait se placer dans la
situation où se trouvait le juge inférieur où si elle devait
tenir compte de nouveaux faits pertinents est une question
qui relève de la procédure cantonale, le droit fédéral n'im-
posant pas la maxime d'office s'agissant de la modification
de la rente due à l'épouse. En l'occurrence, le recourant ne
se plaint d'aucune violation du droit cantonal, ni a
fortiori
ne précise quelle disposition de procédure aurait été
violée.
Sa critique est dès lors irrecevable (art. 90 al. 1 let. b
OJ).

Par conséquent, le moyen ne peut qu'être rejeté, en
tant qu'il est recevable.

6.- Enfin, le recours est également irrecevable dans
la mesure
où le recourant reproche à la décision attaquée
d'obliger son épouse actuelle à travailler pour l'aider à
payer la contribution d'entretien due à son ex-épouse: comme
il a été dit ci-dessus, cette question relève du droit fédé-
ral, donc du recours en réforme. Tel est aussi le cas s'agis-
sant d'une éventuelle limitation de la rente dans le temps.
Le recourant paraît en outre faire grief à l'autorité canto-
nale de n'avoir pas examiné ses conclusions subsidiaires pri-
ses en ce sens: dès lors qu'elle a considéré que les condi-
tions d'une modification du jugement de divorce n'étaient
pas
remplies, la cour cantonale ne saurait se voir reprocher un
déni de justice sur ce point.

7.- En conclusion, le recours doit être rejeté dans
la mesure de sa recevabilité, aux frais de son auteur (art.
156 al. 1 OJ). Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens, des
observations n'ayant pas été requises.

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Rejette le recours dans la mesure où il est rece-
vable.

2. Met à la charge du recourant un émolument judi-
ciaire de 2'000 fr.

3. Communique le présent arrêt en copie aux manda-
taires des parties et à la Chambre civile de la Cour de jus-
tice du canton de Genève.

__________

Lausanne, le 6 octobre 2000
MDO/frs

Au nom de la IIe Cour civile
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE :
Le Président,

La Greffière,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 5P.205/2000
Date de la décision : 06/10/2000
2e cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-10-06;5p.205.2000 ?
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