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06/10/2000 | SUISSE | N°5C.158/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 06 octobre 2000, 5C.158/2000


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5C.158/2000

IIe C O U R C I V I L E
******************************

6 octobre 2000

Composition de la Cour: M. Reeb, président, M. Bianchi et
Mme
Nordmann, juges. Greffière: Mme Mairot.

__________

Dans la cause civile pendante
entre

A.________ et E.W.________, défendeurs et recourants,
représentés par Me Reynald Bruttin, avocat à Genève,

et

Banque X.________, demanderesse et intimée, représentée par
Me Daniel Perren, avocat à Genève;

(actio

n en évacuation)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- Les époux A.________ et E.W.________...

«»
5C.158/2000

IIe C O U R C I V I L E
******************************

6 octobre 2000

Composition de la Cour: M. Reeb, président, M. Bianchi et
Mme
Nordmann, juges. Greffière: Mme Mairot.

__________

Dans la cause civile pendante
entre

A.________ et E.W.________, défendeurs et recourants,
représentés par Me Reynald Bruttin, avocat à Genève,

et

Banque X.________, demanderesse et intimée, représentée par
Me Daniel Perren, avocat à Genève;

(action en évacuation)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- Les époux A.________ et E.W.________ étaient co-
propriétaires de deux parcelles sises à Versoix et
comprenant
plusieurs bâtiments.

A.W.________ est consul honoraire de la République de
Guinée-Bissau depuis le 30 décembre 1987.

Le 1er novembre 1989, une convention a été passée en-
tre la République de Guinée-Bissau, d'une part, les époux
W.________, en tant que propriétaires, et A.W.________, en
qualité de consul, d'autre part. Selon ladite convention,
les
époux W.________ mettaient à la disposition du gouvernement
de
cet Etat une partie des locaux aménagés dans un bâtiment
cons-
truit sur l'une de leurs parcelles, pour lui permettre
d'abri-
ter les services du consulat. En contrepartie, A.W.________
était autorisé à conserver tous les émoluments perçus pour
l'établissement de documents officiels. La convention,
conclue
pour une durée initiale de dix ans, incluait une clause de
re-
conduction tacite.

Le 7 novembre 1997, la Banque X.________ a acquis les
deux parcelles précitées.

B.- Le 24 avril 1998, ladite banque a ouvert action
contre les époux W.________ et contre A.W.________, en tant
que consul, devant le Tribunal de première instance du
canton
de Genève, afin qu'ils soient condamnés à évacuer les locaux
qu'ils occupent sur l'une desdites parcelles.

Les défendeurs ont soulevé d'entrée de cause les ex-
ceptions d'immunité de juridiction et d'incompétence ratione
materiae.

Par jugement sur incident du 26 novembre 1998, le
Tribunal de première instance s'est déclaré compétent pour
connaître de l'action en évacuation, dans la mesure où elle
ne
concerne pas les locaux abritant les services du consulat; a
constaté que les défendeurs ne jouissent d'aucune immunité
de
juridiction dans le cadre de l'action en évacuation de leur
domicile privé; a dit qu'ils n'avaient pas la légitimation
passive pour résister à l'action en évacuation en tant
qu'elle
porte sur les locaux du consulat; enfin, s'est déclaré incom-
pétent à raison de la matière pour connaître de cette
dernière
action.

Statuant par arrêt du 21 mai 1999, sur appel de la
demanderesse, la Cour de justice du canton de Genève a par-
tiellement annulé le jugement de première instance, dit que
les tribunaux ordinaires (à l'exclusion du Tribunal des baux
et loyers) sont compétents pour connaître de l'action en éva-
cuation, quel qu'en soit l'objet, retourné le dossier au Tri-
bunal de première instance pour qu'il se prononce sur le
fond
du litige - même en ce qui concerne les locaux consulaires
-,
en particulier sur les questions de la légitimation passive
des défendeurs et, le cas échéant, de l'immunité de juridic-
tion.

Par arrêt du 10 septembre 1999, la Ie Cour civile du
Tribunal fédéral a déclaré irrecevable le recours en réforme
interjeté par les défendeurs contre cet arrêt.

Le Tribunal de première instance a rendu un nouveau
jugement le 20 janvier 2000. Il a condamné les défendeurs à
évacuer les locaux qu'ils occupent, à l'exception de ceux ré-
servés à l'activité du consulat, et dit qu'A.W.________ ne
possédait pas la légitimation passive pour défendre à
l'action
en évacuation de ceux-ci.

Chacune des parties a appelé de ce jugement, qui a
été confirmé le 19 mai 2000 par arrêt de la Chambre civile
de
la Cour de justice du canton de Genève.

C.- Les défendeurs exercent un recours en réforme au
Tribunal fédéral contre cet arrêt. Ils concluent, principale-
ment, à ce que la demanderesse soit déboutée de son action
en
évacuation, en tant qu'elle a trait à leur domicile privé.
Subsidiairement, ils demandent le renvoi de l'affaire à l'au-
torité cantonale pour qu'elle complète au besoin ses consta-
tations et statue à nouveau. Ils sollicitent en outre la con-
damnation de la demanderesse aux frais et dépens des
instances
cantonales et fédérale.

Une réponse n'a pas été requise.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- a) La Cour de justice a fondé sa décision d'éva-
cuation par les défendeurs de leur domicile privé sur l'art.
641 al. 2 CC, qui permet au propriétaire d'une chose de la
re-
vendiquer contre quiconque la détient sans droit et de
repous-
ser toute usurpation. Il s'agit ainsi d'une contestation
civi-
le au sens de l'art. 46 OJ. Interjeté en temps utile (art.
54
al. 1 OJ) contre une décision finale (ATF 116 II 21 consid.
1c
p. 25; 111 II 463 consid. 1a p. 465) rendue en dernière ins-
tance cantonale par l'autorité suprême du canton (art. 48
al.
1 OJ), le recours en réforme est donc en principe recevable,
la valeur litigieuse étant au demeurant supérieure à 8'000
fr.

b) Les dépens des instances cantonales ne sont pas
réglés par le droit civil fédéral. Le recours est donc irre-
cevable dans la mesure où le recourant cherche à en obtenir
(cf. art. 43 al. 1 OJ). Celui-ci entend sans doute son chef
de
conclusions comme une conséquence de l'admission du recours
(cf. art. 159 al. 6 OJ).

2.- Saisi d'un recours en réforme, le Tribunal fédé-
ral fonde son arrêt sur les faits tels qu'ils ont été consta-
tés par la dernière autorité cantonale, à moins que des
dispo-
sitions fédérales en matière de preuve n'aient été violées
ou
qu'il n'y ait lieu de rectifier des constatations reposant
sur
une inadvertance manifeste (art. 63 al. 2 OJ); l'art. 64 OJ
réserve en outre le complètement des constatations de fait.
Sous réserve de ces exceptions, les griefs dirigés à l'encon-
tre des constatations de fait - ou de l'appréciation des
preu-
ves à laquelle s'est livrée l'autorité cantonale (ATF 122
III
26 consid. 4a/aa p. 32, 61 consid. 2c/bb; 120 II 97 consid.
2b
p. 99; 119 II 84 consid. 3) - et les faits nouveaux sont
irre-
cevables (art. 55 al. 1 let. c OJ; ATF 126 III 59 consid.
2a;
120 II 280 consid. 6c p. 284 et les arrêts cités).

3.- Les recourants soutiennent que l'action en éva-
cuation intentée à leur encontre constitue un abus de droit,
l'intimée n'ayant aucun intérêt à l'exercice de celui-ci.

Dans la mesure où ils prétendent que la demanderesse
ne peut commercialiser les bâtiments qu'ils occupent tant
que
les locaux consulaires ne sont pas libérés, ils s'en
prennent,
de manière irrecevable, aux faits constatés par la cour
canto-
nale. Au demeurant, celle-ci a estimé que la
commercialisation
éventuelle des locaux n'était pas un point déterminant, ce
que
les recourants ne critiquent pas.

L'affirmation selon laquelle les locaux réservés au
consulat ne sont pas géographiquement séparés de
l'habitation
principale ne résulte pas non plus de l'arrêt entrepris. Les
recourants reprochent à l'autorité cantonale d'avoir écarté
des pièces produites en appel tendant à établir le
contraire,
pour le motif qu'elles n'étaient pas pertinentes. Quoi qu'il
en soit, la Cour de justice n'a pas seulement considéré que
les locaux consulaires comportaient une entrée indépendante;
elle a de plus retenu que rien ne permettait de dire que la

demanderesse entendait utiliser les locaux principaux, que
ce
soit à des fins d'habitation ou commerciales, ni même
qu'elle
désirait les conserver, de sorte que la question de
l'interdé-
pendance desdits locaux n'était pas déterminante. La demande-
resse, en tant que propriétaire, pouvait en effet disposer
des
immeubles comme elle l'entendait. Les recourants ne
critiquent
pas cette argumentation, de sorte que leur grief est, pour
cette raison déjà, irrecevable.

Les recourants se méprennent en outre sur la portée
de l'art. 64 OJ. Cette disposition confère au Tribunal
fédéral
le pouvoir de compléter ou de faire compléter un état de
fait
insuffisant pour lui permettre de statuer sur un recours en
réforme (J.-F. Poudret, Commentaire de la loi fédérale
d'orga-
nisation judiciaire, n. 1.2 ad art. 64); elle ne permet en
re-
vanche nullement au recourant de se soustraire à la règle po-
sée par l'art. 55 al. 1 let. c OJ, selon laquelle il ne peut
être présenté de griefs contre les constatations de fait, ni
de faits nouveaux. Dans cette mesure, le recours est par con-
séquent aussi irrecevable.

Les recourants se plaignent encore d'inadvertance ma-
nifeste, au sens de l'art. 63 al. 2 OJ. Ils confondent toute-
fois cette notion avec celle de l'appréciation arbitraire
des
preuves. Il y a en effet inadvertance manifeste lorsque l'au-
torité cantonale, par une simple inattention, a retenu un
état
de fait qui ne correspond manifestement pas au résultat de
l'administration des preuves; tel est le cas par exemple si
l'autorité a omis de mentionner un fait clairement établi ou
si, par une simple inattention, elle s'est à l'évidence trom-
pée sur un point de fait établi sans équivoque; on ne
saurait
en revanche parler d'une inadvertance manifeste lorsque,
comme
en l'espèce, l'autorité cantonale a retenu ou écarté un fait
à
la suite d'un raisonnement ou d'un choix dans l'appréciation
des preuves (ATF 121 IV 104 consid. 2b p. 106; 118 IV 88 con-
sid. 2b p. 89). De plus, comme on l'a vu, une éventuelle
inad-

vertance concernant l'interdépendance des locaux privés et
consulaires ne serait de toute façon pas causale (Poudret,
op.
cit., n. 1.6.2 ad art. 55 et n. 5.1 ad art. 63). Le moyen
tiré
de l'inadvertance manifeste est donc également irrecevable.

Enfin, les recourants reprochent aussi de manière ir-
recevable à la Cour de justice d'avoir retenu que "les diffi-
cultés qui résulteraient d'une éventuelle cohabitation ne
sont
nullement avérées". Cette constatation résulte en effet de
l'appréciation des preuves à laquelle s'est livrée
l'autorité
cantonale et ne peut être revue dans le cadre du recours en
réforme.

4.- En conclusion, le recours se révèle entièrement
irrecevable. Les frais judiciaires seront mis à la charge
des
recourants, qui succombent (art. 156 al. 1 OJ). Il n'y a en
revanche pas lieu d'allouer des dépens, l'intimée n'ayant
pas
été invitée à déposer une réponse.

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l ,

vu l'art. 36a OJ:

1. Déclare le recours irrecevable.

2. Met un émolument judiciaire de 10'000 fr. à la
charge des recourants, solidairement entre eux.

3. Communique le présent arrêt en copie aux mandatai-
res des parties et à la Chambre civile de la Cour de justice
du canton de Genève.

__________

Lausanne, le 6 octobre 2000
MDO/frs

Au nom de la IIe Cour civile
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE :
Le Président,

La Greffière,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 5C.158/2000
Date de la décision : 06/10/2000
2e cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-10-06;5c.158.2000 ?
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