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05/10/2000 | SUISSE | N°5P.235/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 05 octobre 2000, 5P.235/2000


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5P.235/2000

IIe C O U R C I V I L E
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5 octobre 2000

Composition de la Cour: M. Reeb, président, M. Bianchi et
Mme
Nordmann, juges. Greffière: Mme Mairot.

__________

Statuant sur le recours de droit public
formé par

D.________, S.________ et A.A.________, tous les trois repré-
sentés par Me Thierry Ulmann, avocat à Genève,

contre

l'arrêt rendu le 19 mai 2000 par la Chambre civile de la
Cour
de justice du canton de Genève

dans la cause qui oppose les
recourants à l'administration de la masse en faillite de
A.A.________, représentée par Me Raphaë...

«»
5P.235/2000

IIe C O U R C I V I L E
******************************

5 octobre 2000

Composition de la Cour: M. Reeb, président, M. Bianchi et
Mme
Nordmann, juges. Greffière: Mme Mairot.

__________

Statuant sur le recours de droit public
formé par

D.________, S.________ et A.A.________, tous les trois repré-
sentés par Me Thierry Ulmann, avocat à Genève,

contre

l'arrêt rendu le 19 mai 2000 par la Chambre civile de la
Cour
de justice du canton de Genève dans la cause qui oppose les
recourants à l'administration de la masse en faillite de
A.A.________, représentée par Me Raphaël Biaggi, avocat à
Genève;

(art. 5, 9 et 26 Cst.; évacuation du failli)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- Le 4 juillet 1997, le Tribunal de première ins-
tance de Genève a prononcé la faillite de A.A.________, en-
trepreneur inscrit au registre du commerce dudit lieu.

A.A.________ occupe avec son épouse D.A.________,
voire avec sa fille S.A.________, une villa dont il est pro-
priétaire sur la commune de X.________.

L'Office des poursuites et faillites de Genève/Arve-
Lac, chargé d'administrer la faillite de A.A.________, a avi-
sé à plusieurs reprises le failli, respectivement son
épouse,
qu'ils devaient trouver un nouveau logement pour le 1er juil-
let 1998, ajoutant qu'une indemnité mensuelle de 4'000 fr.
serait due pour occupation illicite si l'habitation n'était
pas libérée à cette date. Le failli a protesté qu'il
trouvait
la somme trop élevée, mais en vain. Il a dès lors continué
d'occuper la villa, sans s'acquitter de l'indemnité exigée.

B.- Le 8 octobre 1998, la masse en faillite de
A.A.________ a assigné les époux A.________ et leur fille en
évacuation devant le Tribunal de première instance de
Genève,
qui a admis l'action par jugement du 23 novembre 1999.

Statuant le 19 mai 2000 sur appel des défendeurs, la
Cour de justice du canton de Genève a confirmé le jugement
de
première instance.

C.- Agissant par la voie du recours de droit public
au Tribunal fédéral, D.________, S.________ et A.A.________
concluent à l'annulation de l'arrêt du 19 mai 2000,
l'intimée
étant déboutée de toutes autres, plus amples ou contraires
conclusions.

Les recourants ont également sollicité l'octroi de
l'effet suspensif. La cour cantonale s'en est remise à justi-
ce sur ce point. L'intimée s'est opposée à la mesure
requise.
Par ordonnance du 18 juillet 2000, le président de la cour
de
céans a admis la demande d'effet suspensif.

Des observations sur le fond n'ont pas été requises.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- a) Interjeté en temps utile contre une décision
finale rendue en dernière instance cantonale, le recours est
en principe recevable au regard des art. 84 ss OJ.

b) Saisi d'un recours de droit public, le Tribunal
fédéral n'examine que les griefs d'ordre constitutionnel in-
voqués et suffisamment motivés dans l'acte de recours. Le re-
courant doit indiquer, en se fondant sur la décision atta-
quée, quels sont les droits constitutionnels qui auraient
été
violés et préciser clairement, pour chacun d'eux, en quoi
consiste la violation (art. 90 al. 1 let. b OJ; ATF 125 I
492
consid. 1b p. 495, 72 consid. 1c p. 76; 122 I 70 consid. 1c
p. 73). Il ne saurait se contenter de soulever de vagues
griefs ou de renvoyer aux actes cantonaux (cf. ATF 125 I 71
consid. 1c p. 76; 115 Ia 27 consid. 4a p. 30; 114 Ia 317
consid. 2b p. 318). Par ailleurs, le Tribunal fédéral
n'entre
pas en matière sur des critiques de caractère appellatoire
(cf. 125 I 492 consid. 1b p. 495).

Seuls seront dès lors examinés les griefs qui sont
motivés conformément à ces exigences.

2.- a) Les recourants reprochent à l'autorité inti-
mée d'avoir restreint le droit de propriété du failli sans
disposer d'une base légale. Ils soutiennent que seule la mas-

se en faillite, à l'exclusion de la Cour de justice, pouvait
les empêcher d'utiliser l'immeuble de celui-ci, en vertu de
l'art. 229 al. 3 LP. En s'octroyant cette faculté sur la
base
du droit cantonal de procédure, l'autorité cantonale aurait
violé les principes de la garantie de la propriété, de la lé-
galité et de la force dérogatoire du droit fédéral.

b) Ces moyens apparaissent à l'évidence infondés.
Contrairement à ce que prétendent les recourants - d'une fa-
çon qui confine à la témérité -, la Cour de justice ne s'est
aucunement arrogé le droit d'ordonner leur évacuation en se
fondant sur le droit cantonal de procédure; elle n'a pas non
plus appliqué ce droit en lieu et place de la loi fédérale
sur la poursuite pour dettes et la faillite. Il convient en
effet de distinguer, d'une part, l'art. 229 al. 3 LP, qui
permet à l'administration de la masse en faillite de fixer
la
durée et les conditions auxquelles le failli et sa famille
peuvent rester dans leur logement, cette décision pouvant
faire l'objet d'une plainte (art. 17 LP); d'autre part, la
question de l'évacuation dudit logement, si le failli n'ob-
tempère pas à l'ordre de l'administration de la masse: cette
évacuation, qui peut être obtenue par les voies de la procé-
dure civile (Carl Jaeger, Commentaire de la loi fédérale sur
la poursuite pour dettes et la faillite, t. II, n. 11 ad
art.
229), ne se fonde pas sur l'art. 229 al. 3, mais bien plutôt
sur les art. 197 et 204 LP. On ne voit dès lors pas en quoi
l'autorité cantonale aurait enfreint les principes constitu-
tionnels précités.

Le recours étant de toute façon mal fondé sur ce
point, il est inutile d'examiner si la violation de la force
dérogatoire du droit fédéral n'aurait pas dû être soulevée
dans un recours en réforme (J.-F. Poudret, Commentaire de la
loi fédérale d'organisation judiciaire, n. 1.6.1. ad art.
43), dans la mesure où celui-ci serait en l'occurrence
ouvert

(cf. arrêt non publié du 18 septembre 1998 en la cause
4C.154/1998; cf. aussi arrêt du 27 février 1997 en la cause
4C.413/1996, reproduit in SJ 1997 p. 538 ss, consid. 1b).

3.- a) Les recourants prétendent en outre que les
courriers qu'ils ont reçus de l'administration de la masse
en
faillite - soit de l'office des poursuites et faillites - ne
sauraient être compris comme des décisions modifiant leur
droit de propriété, subsidiairement que ces prétendues déci-
sions seraient entâchées de vices graves. En entérinant cel-
les-ci sans leur donner la possibilité de s'exprimer sur
l'opportunité de leur expulsion, l'autorité cantonale les au-
rait traités de manière choquante et aurait de surcroît
violé
leur droit d'être entendus.

b) Les recourants se trompent lorsqu'ils affirment
que les lettres reçues de l'administration de la masse en
faillite auraient été considérées par la Cour de justice com-
me des décisions modifiant leur droit de propriété. De toute
manière, le dessaisissement du failli - celui-ci n'ayant
plus
le pouvoir de disposer du droit de propriété sur l'immeuble
mis sous main de justice et partant indisponible -
intervient
avec l'ouverture de la faillite (cf. ATF 117 III 63 et la no-
te de Gilliéron au JT 1993 II p. 143), de sorte que la vali-
dité desdits courriers est à cet égard sans pertinence. Au
demeurant, les avis de l'office des poursuites et faillites,
datés des 12 mai et 23 juillet 1998, revêtent assurément le
caractère d'une décision, même si leur forme extérieure est
celle d'une simple lettre. Par décision, la jurisprudence en-
tend un acte étatique qui touche la situation juridique de
l'intéressé, l'astreignant à faire, à s'abstenir ou à
tolérer
quelque chose, ou qui règle d'une autre manière ses rapports
avec l'Etat (ATF 121 I 173 consid. 2a et les arrêts cités).
Tel est le cas en l'occurrence, où les recourants se sont
vus
refuser le droit de demeurer dans les locaux litigieux après

le 1er juillet 1998 et devaient libérer les lieux à cette da-
te, sous peine de devoir payer une indemnité mensuelle de
4'000 fr. pour occupation illicite. Le failli ne s'y est
d'ailleurs pas trompé, puisqu'il a protesté contre l'une de
ces lettres.

Pour le surplus, les recourants ne démontrent pas en
quoi l'arrêt attaqué serait arbitraire (ATF 110 Ia 1 consid.
2a p. 3/4; 107 Ia 186), sinon dans ses motifs, du moins dans
son résultat (ATF 125 II 129 consid. 5b p. 134). Ils se con-
tentent en effet d'affirmer, de manière purement appellatoi-
re, qu'ils ont été dépossédés d'un de leurs biens matériels
les plus précieux, à savoir leur domicile familial, à la sui-
te d'un guet-apens juridique. Une telle argumentation ne ré-
pond manifestement pas aux exigences de l'art. 90 al. 1 let.
b OJ. Quant à la prétendue violation de leur droit d'être
entendus sur le fond - et pour autant que ce grief soit suf-
fisamment motivé - elle n'est en aucune manière établie.

4.- Vu ce qui précède, le recours apparaît manifes-
tement mal fondé et ne peut qu'être rejeté, dans la mesure

il est recevable. Les recourants supporteront dès lors soli-
dairement les frais judiciaires (art. 156 al. 1 OJ). Il con-
vient en outre d'allouer des dépens à l'intimée, qui a été
invitée à se déterminer sur la requête d'effet suspensif
(art. 159 al. 2 OJ).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l ,

vu l'art. 36a OJ:

1. Rejette le recours dans la mesure où il est
recevable.

2. Met à la charge des recourants, solidairement
entre eux:

a) un émolument judiciaire de 2'000 fr.

b) une indemnité de 500 fr. à payer à l'intimée
à
titre de dépens.

3. Communique le présent arrêt en copie aux manda-
taires des parties et à la Chambre civile de la Cour de jus-
tice du canton de Genève.

__________

Lausanne, le 5 octobre 2000
MDO/frs

Au nom de la IIe Cour civile
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE :
Le Président,

La Greffière,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 5P.235/2000
Date de la décision : 05/10/2000
2e cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-10-05;5p.235.2000 ?
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