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28/09/2000 | SUISSE | N°H.72/00

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 28 septembre 2000, H.72/00


«AZA 7»
H 72/00 Mh

IIe Chambre

composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, Meyer
et Ferrari; Frésard, Greffier

Arrêt du 28 septembre 2000

dans la cause

1. B. S.________,
2. M. S.________,
recourants, tous deux représentés par Maître Olivier
Derivaz, avocat, rue de Venise 3B, Monthey,

contre

Caisse cantonale valaisanne de compensation, avenue
Pratifori 22, Sion, intimée,

et

Tribunal cantonal des assurances, Sion

A.- Les époux B. et M.

S.________, ressortissants des
Pays-Bas, sont domiciliés en Suisse depuis le mois de juin
1994. L'épouse n'a jamais exercé d'activité ...

«AZA 7»
H 72/00 Mh

IIe Chambre

composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, Meyer
et Ferrari; Frésard, Greffier

Arrêt du 28 septembre 2000

dans la cause

1. B. S.________,
2. M. S.________,
recourants, tous deux représentés par Maître Olivier
Derivaz, avocat, rue de Venise 3B, Monthey,

contre

Caisse cantonale valaisanne de compensation, avenue
Pratifori 22, Sion, intimée,

et

Tribunal cantonal des assurances, Sion

A.- Les époux B. et M. S.________, ressortissants des
Pays-Bas, sont domiciliés en Suisse depuis le mois de juin
1994. L'épouse n'a jamais exercé d'activité lucrative.
Quant au mari, il a cessé son activité professionnelle à la

fin de l'année 1992. Il reçoit une rente d'invalidité de la
sécurité sociale hollandaise (versée par son ex-employeur
et rétrocédée par celui-ci à l'assuré), des prestations du
fonds de pension de son ancien employeur (qui seront ver-
sées jusqu'au moment ou l'intéressé aura atteint l'âge de
la retraite) et, enfin, un complément de prestations versé
par ce même employeur.
Par décisions du 19 janvier 1998, la Caisse cantonale
valaisanne de compensation a procédé à l'affiliation des
époux S.________ en tant que personnes sans activité lu-
crative, à partir du 1er juillet 1994 en ce qui concerne le
mari et dès le 1er janvier 1997 s'agissant de l'épouse.
En ce qui concerne le mari, les cotisations
AVS/AI/APG, ainsi que les frais d'administration, s'éle-
vaient à 3432 fr. 60 pour les années 1994 et 1995 et à
3328 fr. 60 pour l'année 1996 (intérêts moratoires non
compris). Pour l'année 1997, une cotisation de 1560 fr.
était mise à la charge de chacun des époux. La cotisation à
la charge du mari pour 1994 était due au prorata de la
période d'assujettissement au cours de cette année (sept
mois).

B.- Les époux S.________ ont recouru contre ces dé-
cisions en faisant notamment valoir que la caisse de
compensation ne s'était pas prononcée sur leur demande
d'exemption, motivée par le fait que le paiement de coti-
sations aux assurances suisse et néerlandaise entraînait un
cumul de charges trop lourdes.
Par écriture du 29 mars 1999, la caisse de compensa-
tion a conclu au rejet du recours. Le même jour, elle a
rendu deux nouvelles décisions, par lesquelles elle a
refusé d'accorder l'exemption demandée.
Les époux S.________ ont également recouru contre ces
deux décisions.

Après avoir joint les causes, le Tribunal des assuran-
ces du canton du Valais a rejeté les recours par jugement
du 14 janvier 2000.

C.- Les époux S.________ interjettent un recours de
droit administratif dans lequel ils demandent au Tribunal
fédéral des assurances de constater qu'ils ne sont pas
assurés obligatoirement à l'AVS suisse. Subsidiairement,
ils concluent à l'annulation du jugement attaqué et au
renvoi de la cause à l'autorité administrative pour nou-
velle décision.
La caisse de compensation conclut au rejet du recours.
Quant à l'Office fédéral des assurances sociales, il ne
s'est pas déterminé à son sujet.

Considérant en droit :

1.- Chacun des époux recourants a qualité pour inter-
jeter un recours de droit administratif aussi bien en ce
qui concerne sa propre affiliation à l'AVS que celle de son
conjoint (art. 103 let. a OJ; cf. RCC 1989 p. 184 con-
sid. 2b).

2.- La décision litigieuse n'ayant pas pour objet
l'octroi ou le refus de prestations d'assurance, le
Tribunal fédéral des assurances doit se borner à examiner
si les premiers juges ont violé le droit fédéral, y compris
par l'excès ou par l'abus de leur pouvoir d'appréciation,
ou si les faits pertinents ont été constatés d'une manière
manifestement inexacte ou incomplète, ou s'ils ont été
établis au mépris de règles essentielles de procédure
(art. 132 en corrélation avec les art. 104 let. a et b et
105 al. 2 OJ).

3.- La convention de sécurité sociale entre la Suisse
et les Pays-Bas du 27 mai 1970 ne contient pas de disposi-

tions relatives à l'affiliation à l'assurance sociale des
personnes sans activité lucrative dans l'un ou l'autre des
Etats contractants. Le présent litige doit ainsi être exa-
miné à la seule lumière du droit interne suisse.

4.- Les recourants étant domiciliés en Suisse, ils
sont en principe soumis à l'AVS en vertu de l'art. 1er
al. 1 let. a LAVS.
Conformément à l'art. 10 al. 1 LAVS, les assurés
n'exerçant aucune activité lucrative paient une cotisation
de 168 fr. (actuellement 324 fr.; cf. art. 2 de l'Ordon-
nance 2000 sur les adaptations à l'évolution des prix et
des salaires dans le régime de l'AVS et de l'AI [RS
831.110]) à 8400 fr. par an suivant leurs conditions
sociales. L'art. 10 al. 3 LAVS délègue au Conseil fédéral
la compétence d'édicter des règles plus détaillées sur le
calcul des cotisations. C'est ce que l'autorité exécutive a
fait aux art. 28 à 30 RAVS : elle y concrétise notamment la
notion de conditions sociales en prescrivant de fixer les
cotisations sur la base de la fortune et du revenu annuel
acquis sous forme de rente (art. 28 RAVS; ATF 120 V 166
consid. 2 et les références).
Jusqu'au 31 décembre 1996, les épouses d'assurés,
lorsqu'elles n'exerçaient pas d'activité lucrative,
n'étaient pas tenues de payer des cotisations à l'AVS
(art. 3 al. 2 let. b aLAVS). Cette situation a été modifiée
avec l'entrée en vigueur, le 1er janvier 1997, de la
10ème révision de l'AVS (cf. ATF 125 V 231 consid. 1).
Ainsi, l'art. 28 al. 4 RAVS prévoit que si une personne
mariée doit payer des cotisations comme personne sans acti-
vité lucrative, ses cotisations sont déterminées sur la
base de la moitié de la fortune et du revenu sous forme de
rente du couple. Cette disposition a été jugée conforme à
la loi par le Tribunal fédéral des assurances (ATF
125 V 230).

5.- Les recourants demandent toutefois à être exemptés
de l'AVS en application de l'art. 1er al. 2 let. b LAVS.
Selon cette disposition, ne sont pas assurées les personnes
affiliées à une institution officielle étrangère d'assuran-
ce-vieillesse et survivants si l'assujettissement à l'AVS
constitue pour elles un cumul de charges trop lourdes.

a) La notion de cumul de charges trop lourdes n'impli-
que pas, d'après la jurisprudence, l'existence d'un état de
gêne; il suffit - mais il faut - que le paiement simultané
de cotisations à deux assurances expose l'assuré à de sé-
rieuses difficultés financières (ATFA 1964 p. 90 consid. 1;
RCC 1983 p. 312).
Pour apprécier la condition de la charge trop lourde,
une jurisprudence établie en 1985, qui n'a pas été démentie
depuis lors, se réfère au taux des cotisations payées par
les assurés exerçant en Suisse une activité indépendante,
du moins lorsque le barème dégressif prévu par la loi
(art. 8 al. 1 LAVS et art. 21 RAVS) n'est pas applica-
ble : l'existence de la charge trop lourde doit en tout cas
être niée si les cotisations dues aux assurances suisse et
étrangère sont inférieures au montant que devrait payer un
indépendant en Suisse disposant d'un même revenu (arrêt non
publié W. du 11 janvier 1985 [H 74/84]). Cette jurispru-
dence se situe dans le prolongement d'un arrêt antérieur du
20 juillet 1982 (RCC 1983 p. 312), dans lequel le cumul de
charges trop lourdes n'a pas été admis pour une personne
dont le revenu brut était de 103 600 fr., la double charge
de cotisations se montant à environ 10,5 pour cent de ce
revenu.
A l'inverse, selon la pratique administrative, approu-
vée dans son principe par la doctrine
(GREBER/DUC/SCARTAZZINI, Commentaire des articles 1 à 16 de
la loi fédérale sur l'assurance-vieillesse et survivants
[LAVS], p. 74 ch. 131; HANSPETER KÄSER, Unterstellung und
Beitragswesen in der obligatorischen AHV, 2ème éd., p. 32,
ch. 1.64; UELI KIESER, Alters-und Hinterlassenenversiche-

rung, in Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR],
Soziale Sicherheit, ch. 20), on présume qu'il y a une
charge trop lourde lorsque le paiement simultané de coti-
sations aux deux assurances sociales correspond à 15 pour
cent ou plus du revenu (ch. 3022 de la circulaire de
l'Office fédéral des assurances sociales sur l'assujet-
tissement à l'assurance [CAA]).
D'autre part, le rattachement à l'assurance étrangère
doit être obligatoire. La loi ne le prévoit pas expressé-
ment, parce que cela va de soi. En effet, l'adhésion facul-
tative à un régime d'assurance sociale étrangère provoque
un cumul de charges dont l'assuré ne peut que s'accommoder
du moment qu'il a été voulu par celui-ci (ATFA 1967 p. 221
consid. 4b; GREBER/DUC/SCARTAZZINI, op. cit., p. 73
ch. 130 let. c; KÄSER, op. cit., p. 33 ch. 1.65).

b) aa) Selon les constatations du jugement attaqué,
seul le mari est obligatoirement affilié aux assurances
sociales néerlandaises. L'épouse est quant à elle assurée
facultativement à celles-ci. Dès lors, en ce qui la concer-
ne, elle ne peut d'emblée pas prétendre une exemption en
raison des cotisations qu'elle paie à ce titre (300 florins
néerlandais [NLK] par année).

bb) Toujours selon les constatations des premiers
juges - qui ne sont au demeurant pas contestées - le recou-
rant disposait d'un revenu annuel (sous forme de rentes) de
83 757 fr. en 1994, de 80 713 fr. en 1995, de 79 778 fr. en
1996, et de 79 713 fr. en 1997, après déduction des cotisa-
tions aux assurances néerlandaises. Les cotisations du mari
à ces assurances représentent environ 5000 fr. par an, ce
qui donne, pour les années précitées, des revenus bruts de
88 757 fr., 85 713 fr., 84 778 fr. et 84 713 fr. Si l'on
ajoute aussi le montant annuel de 5000 fr. aux cotisations
réclamées au mari par la caisse de compensation, le paie-
ment simultané aux deux assurances représente les pour-
centages suivants par rapport au revenu brut :

1994 : 88 757 fr. 8432 fr. 9,5 pour cent
1995 : 85 713 fr. 8432 fr. 9,8 pour cent
1996 : 84 778 fr. 8328 fr. 9,8 pour cent
1997 : 84 713 fr. 6560 fr. 7, 75 pour cent

Ces pourcentages, pour les années 1994 à 1996, sont
pratiquement les mêmes que le taux de cotisation qui serait
applicable à une personne de condition indépendante, dispo-
sant d'un revenu comparable. En effet, pour un revenu com-
parable, le taux de cotisation serait de 9,5 pour cent
(7,8 pour cent à l'AVS, 1,4 pour cent à l'AI et 0,3 pour
cent aux APG ). Pour l'année 1997, le pourcentage est sen-
siblement inférieur au taux de 9,4 pour cent. Dans l'ensem-
ble, on se situe très nettement en deçà de la limite de
15 pour cent du revenu brut à partir de laquelle la pra-
tique administrative pose la présomption d'une charge trop
lourde. On ne saurait donc, dans ces circonstances, consi-
dérer que l'on est en présence d'un cumul de charges trop
lourdes.
Les recourants invoquent certes le fait qu'ils sup-
portent une charge d'intérêts hypothécaires importante
(30 125 fr. en 1997 et 32 175 fr. en 1998 selon les cons-
tatations du jugement attaqué). Comme le démontrent les
premiers juges, cette charge - qui est en relation avec
l'immeuble habité par les recourants - n'apparaît pas
excessive au point qu'il faudrait en tenir compte dans
l'appréciation globale de la charge trop lourde. D'ail-
leurs, du moment qu'ils habitent l'immeuble pour lequel ils
paient des intérêts hypothécaires, les recourants n'ont
pas, en plus, à assumer une charge de loyer proprement
dite.

6.- Subsidiairement, les recourants font valoir que la
part des revenus provenant d'une rente d'invalidité selon

la législation néerlandaise doit être exonérée de la per-
ception de cotisations, au même titre que les rentes de
l'AVS/AI fédérales.
La notion de rente au sens de l'art. 28 RAVS doit être
interprétée de la manière la plus large; ce qui importe,
c'est que le revenu ait une influence sur les conditions
sociales de l'intéressé. En principe, toutes les presta-
tions d'assurance, à l'exception des rentes de l'AVS et de
l'AI, font partie du revenu acquis sous forme de rente
(pour une casuistique, voir RCC 1991 p. 434 consid. 3a).
Les rentes d'invalidité servies par une institution étran-
gère d'assurance n'entrent pas dans le cadre de cette
exception. Une différence de traitement par rapport aux
rentes de l'AVS/AI trouve une justification dans le fait
que, dans le cas de ces deux assurances fédérales, c'est le
même assureur qui accorde des prestations et réclame des
cotisations : la perception de cotisations représenterait
une sorte d'autofinancement de l'assurance, qui prendrait
en partie d'une main ce qu'elle donnerait de l'autre (ATF
107 V 70 sv; RCC 1991 p. 436 consid. 3c).
Le moyen subsidiaire du recours doit ainsi être écar-
té.

7.- Il suit de là que le recours est mal fondé.
Vu la nature du litige, la procédure n'est pas gratui-
te (art. 134 OJ a contrario). Succombant, les recourants en
supporteront les frais (art. 156 al. 1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est rejeté.

II. Les frais de justice, d'un montant de 1100 fr., sont
mis à la charge des recourants et sont compensés avec
l'avance de frais qu'ils ont versée.

III. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tri-
bunal des assurances du canton du Valais et à l'Office
fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 28 septembre 2000

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la IIe Chambre :

Le Greffier :


Synthèse
Numéro d'arrêt : H.72/00
Date de la décision : 28/09/2000
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-09-28;h.72.00 ?
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