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26/09/2000 | SUISSE | N°B.53/99

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 26 septembre 2000, B.53/99


«AZA 7»
B 53/99 Mh

Ière Chambre

composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, Schön,
Spira, Meyer et Ferrari; Addy, Greffier

Arrêt du 26 septembre 2000

dans la cause

I.________, recourant, représenté par la Fédération suisse
pour l'intégration des handicapés (FSIH), Place Grand-
Saint-Jean 1, Lausanne,

contre

1. Fondation collective LPP de la Ticino Vie devenue
American Security Life Insurance Company (Switzer-
land) Ltd., Via Camara 19, Breganzona, représentée par


Maître Johannes Stolba, avocat, Wildbachstrasse 3,
Zurich,

2. Fondation institution supplétive LPP, avenue de
Mo...

«AZA 7»
B 53/99 Mh

Ière Chambre

composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, Schön,
Spira, Meyer et Ferrari; Addy, Greffier

Arrêt du 26 septembre 2000

dans la cause

I.________, recourant, représenté par la Fédération suisse
pour l'intégration des handicapés (FSIH), Place Grand-
Saint-Jean 1, Lausanne,

contre

1. Fondation collective LPP de la Ticino Vie devenue
American Security Life Insurance Company (Switzer-
land) Ltd., Via Camara 19, Breganzona, représentée par
Maître Johannes Stolba, avocat, Wildbachstrasse 3,
Zurich,

2. Fondation institution supplétive LPP, avenue de
Montchoisi 35, Lausanne,
intimées,

et

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

A.- Dès 1988, I.________ a travaillé en Suisse au
bénéfice d'un permis A (saisonnier), notamment du 28 fé-
vrier au 30 novembre 1989 en qualité de jardinier pour le
compte de T.________. Ce dernier l'a annoncé à la Fondation
collective LPP de la Ticino Vie (ci-après : la fondation)
comme salarié soumis à l'assurance obligatoire de la
prévoyance professionnelle. A ce titre, I.________ a été
assuré du 1er mars au 31 décembre 1989, sur la base d'un
salaire annuel de 28'080 francs.
A partir du mois de mars et jusqu'à la fin de l'année
1990, le prénommé a derechef travaillé au service de
T.________, mais cette fois sans être au bénéfice d'une
autorisation de travail ou de séjour, car celles-ci lui ont
été refusées par l'autorité compétente. L'employeur ne l'a
de ce fait pas déclaré à la fondation en 1990. Réengagé au
début du mois de mars 1991 par le même employeur,
I.________ a été victime, le 7 mars 1991, d'un accident de
travail : il est tombé d'une échelle d'une hauteur de six
mètres et a subi des fractures multiples, en particulier
aux jambes et aux poignets. A la suite de cet accident, il
a été mis au bénéfice d'une rente entière de l'assurance-
invalidité, tandis que l'Union Suisse Assurances lui a
octroyé, en qualité d'assureur-accidents, une rente fondée
sur une incapacité de travail de 25 % en considérant que
l'invalidité était pour partie consécutive à des troubles
psychiques non imputables à l'accident.
Le 24 novembre 1997, I.________ a requis de la fon-
dation le versement d'une rente d'invalidité. Celle-ci lui
a fait savoir, par l'entremise de la société American
Security Life Insurance Company (Switzerland) Ltd., que sa
demande ne pouvait être prise en considération, vu le
défaut d'autorisation de travail et de séjour et l'absence
de contrat de travail au moment déterminant. La fondation
indiquait également que le contrat d'affiliation entre
elle-même et T.________ était «suspendu» depuis le
31 décembre 1989 faute de personnel soumis à l'assurance

obligatoire, et que par ailleurs une police de libre
passage avait été établie au nom de I.________ avec valeur
au 31 décembre 1989 (décompte de sortie du 6 juin 1990).

B.- Par mémoire du 23 décembre 1997, I.________ a
ouvert action devant le Tribunal des assurances du canton
de Vaud, en concluant principalement à ce que la fondation
soit condamnée à lui verser une rente d'invalidité pour
lui-même et ses trois enfants à partir du 1er décembre 1995
ou, subsidiairement, à ce que ces prestations lui soient
octroyées par la Fondation institution supplétive LPP
(ci-après : l'institution supplétive). Tant la fondation
que l'institution supplétive ont conclu au rejet de
l'action.
Dans le cadre de l'instruction de la cause, le tri-
bunal a requis l'audition de T.________ en qualité de
témoin. Du procès-verbal qui a été dressé à cette occasion,
il ressort notamment ceci :

«(...) - en 1990, (T.________) avait sollicité une
autorisation de travail en faveur du demandeur. Dite
autorisation lui a été refusée. Toutefois, dans la mesure
où I.________ était déjà en Suisse, T.________ l'a occupé
de manière irrégulière au cours de l'année 1990. Le
demandeur était rétribué à l'heure et de son gain étaient
retranchés les cotisations AVS/AI/APG/AC, ainsi que
l'impôt;
- confirmation est donnée par le témoin qu'il a fait
répondre par sa fiduciaire à la défenderesse Fondation
collective LPP de la Ticino-Vie qu'en 1990 aucun de ses
employés ne devait être soumis au 2e pilier;
- à la fin de 1990, il avait été convenu entre
T.________ et le demandeur que le premier solliciterait, en
faveur du second, une autorisation de travail pour l'année
1991. Dite autorisation a vraisemblablement été requise en
décembre 1990;
- en 1990, dès l'arrivée du demandeur dans notre
pays, le témoin lui aurait précisé qu'il pourrait travail-
ler à son service en attendant la réponse de l'Office
cantonal de contrôle des habitants et de police des
étrangers, quant à l'autorisation de travail. Le témoin est
d'avis que si la réponse avait été négative, il n'aurait
pas pu garder à son service le demandeur, dès lors qu'il
tenait à occuper un employé dont la situation était régu-
larisée sur le plan légal;
- (...)»

Par jugement du 19 février 1999, le tribunal a rejeté
la demande, motif pris de l'inexistence d'un contrat de
travail d'une durée supérieure à trois mois entre
T.________ et I.________ au moment déterminant.

C.- I.________ interjette recours de droit adminis-
tratif contre ce jugement dont il requiert l'annulation
sous suite de dépens. A titre principal, il demande le
renvoi de la cause au tribunal cantonal pour que celui-ci
«la juge dans une composition de Cour qu'il annoncera
préalablement au recourant»; subsidiairement, il conclut à
ce que l'existence d'un contrat de travail d'une durée
supérieure à trois mois soit constatée, et à ce que le
dossier soit renvoyé à l'instance cantonale pour qu'elle
«dise qui des deux caisses actionnées est compétente pour
le versement de rentes à I.________ et pour quel montant».
La fondation conclut principalement au rejet du re-
cours et, à titre subsidiaire, au renvoi du dossier au
tribunal cantonal pour examen d'une éventuelle responsa-
bilité de l'institution supplétive. Pour sa part, cette
dernière conclut que «si I.________ est soumis à l'assu-
rance obligatoire LPP et a droit à recevoir des prestations
d'invalidité, celles-ci doivent être versées par la
Fondation collective LPP de la Ticino-Vie». Enfin, l'Office
fédéral des assurances sociales (OFAS) se prononce en
faveur de l'admission du recours, à tout le moins dans sa
conclusion subsidiaire.

Considérant en droit :

1.- Il convient d'examiner en premier lieu le grief
d'ordre formel que le recourant soulève contre le déroule-
ment de la procédure de première instance, car il se

pourrait que le tribunal accueille le recours sur ce point
et renvoie la cause à l'autorité cantonale sans examen du
litige au fond (ATF 124 V 92 consid. 2 et la référence).
Le recourant invoque la violation des art. 58 al. 1
aCst. et 6 par. 1 CEDH, au motif que le juge assesseur
B.________ qui faisait partie de la cour cantonale, est
également sous-directeur des Retraites Populaires à
Lausanne, institution qui pratique la prévoyance profes-
sionnelle à l'instar des intimées.

a) La jurisprudence a déduit des art. 58 al. 1 aCst.
et 6 par. 1 CEDH - qui ont sur ce point la même portée - le
droit pour le justiciable d'être jugé par un tribunal
indépendant et impartial (ATF 125 I 122 consid. 3a, 217
consid. 8a, 119 Ia 83 ss consid. 3, 116 Ia 137 consid. 2
et les références). Cette garantie a été formalisée à
l'art. 30 Cst., en vigueur depuis le 1er janvier 2000, si
bien que les principes jurisprudentiels développés à propos
de l'art. 58 aCst. restent pleinement valables sous
l'empire de la nouvelle Constitution du 18 avril 1999.

b) Selon une jurisprudence constante, le motif de
récusation doit être invoqué dès que possible, à défaut de
quoi le plaideur est réputé avoir tacitement renoncé à s'en
prévaloir (ATF 119 Ia 228 sv. et les arrêts cités;
Egli/Kurz, La garantie du juge indépendant et impartial
dans la jurisprudence récente, in: Recueil de Jurisprudence
neuchâteloise (RJN) 1990 p. 28 sv.). En particulier, il est
contraire à la bonne foi d'attendre l'issue d'une procédure
pour tirer ensuite argument, à l'occasion d'un recours, de
la composition incorrecte de l'autorité qui a statué, alors
que le motif de récusation était déjà connu auparavant (ATF
124 I 121 consid. 2, 119 Ia 221 consid. 5a p. 228 sv.,
118 Ia consid. 3a). La garantie du juge naturel comprend
donc également le droit d'être informé de la composition du
tribunal compétent (ATF 117 Ia 323 consid. 1c, 114 Ia 280
consid. 3e).

Cela ne signifie toutefois pas que l'identité des
juges appelés à statuer doive nécessairement être commu-
niquée de manière expresse au justiciable; il suffit en
effet que le nom de ceux-ci ressorte d'une publication
générale facilement accessible, par exemple un annuaire
officiel. La partie assistée d'un avocat est en tout cas
présumée connaître la composition régulière du tribunal
(ATF 117 Ia 323; Merkli/Aeschlimann/Herzog, Kommentar zum
Gesetz über die Verwaltungsrechtspflege des Kantons Bern,
p. 93; Egli/Kurz, op. cit., p. 29). En revanche, un motif
de prévention concernant un juge suppléant peut, en
principe, encore valablement être soulevé dans le cadre
d'une procédure de recours, car le justiciable pouvait
partir de l'idée que le tribunal de première instance
statuerait dans sa composition ordinaire (arrêt 1P.21/1999
du Tribunal fédéral du 23 avril 1999, non publié dans la
cause H., consid. 3).

c) En l'espèce, le juge B.________, à l'égard duquel
le recourant invoque le grief de prévention, a siégé comme
assesseur dans la juridiction cantonale. Son nom figure,
avec dix-huit autres, dans la liste des assesseurs du
Tribunal des assurances publiée dans l'annuaire officiel
2000/2001 du canton de Vaud (p. 207).
Cela étant, nonobstant la publication de cette liste
- que le recourant, assisté d'un avocat, est censé con-
naître - le motif de prévention n'est pas allégué tardi-
vement. Car la jurisprudence précitée au sujet des juges
suppléants doit s'appliquer de la même manière quand il
s'agit d'examiner si un justiciable devait ou non s'atten-
dre à la présence d'un assesseur dans la composition du
tribunal saisi de son cas. Certes, les juges assesseurs
sont-ils en principe désignés, dans le canton de Vaud,
précisément en fonction de leurs connaissances profession-
nelles, afin de permettre au tribunal d'apprécier les faits
et de résoudre des difficultés d'ordre technique sans être

forcé de recourir à l'expertise, solution onéreuse en temps
et en argent (arrêt 2P.26/1999 du Tribunal fédéral du
26 avril 1999, non publié dans la cause M., consid. 2).
Dans la mesure toutefois où la liste des assesseurs publiée
dans l'annuaire officiel du canton de Vaud ne mentionne ni
l'activité professionnelle de ceux-ci, ni le domaine juri-
dique pour lequel ils ont été élus, on ne saurait reprocher
au recourant de n'avoir pas demandé plus tôt la récusation
du juge B.________ et il se justifie par conséquent d'exa-
miner le bien-fondé du grief invoqué.

d) Dans une affaire récente en tous points similaire à
la présente qui mettait également en cause la régularité de
la composition du tribunal des assurances du canton de
Vaud, dans laquelle le mandataire du recourant était aussi
intervenu comme avocat, la Cour de céans a rappelé en
détail les principes applicables en pareille occurrence.
Par économie de procédure, on renvoie les parties à l'arrêt
rendu à cette occasion (arrêt non publié N. du 25 avril
2000, B 60/99, consid. 1).
En l'espèce, il n'est ni allégué ni même rendu vrai-
semblable que l'assesseur B.________ aurait déployé une
quelconque activité à l'intérieur de l'une des institutions
de prévoyance intimées ou à leur sujet, ni même qu'il
aurait eu des activités au sein de la société American
Security Life Insurance Company (Switzerland) Ltd., la-
quelle gère le dossier de la Fondation collective LPP de la
Ticino Vie. Sa présence dans la Cour cantonale n'a dès lors
pas compromis le droit du recourant d'être jugé par un
tribunal indépendant et impartial.
Par ailleurs, le seul fait que B.________ exerce, à
côté de sa fonction d'assesseur, une activité profession-
nelle aux Retraites Populaires, n'est pas une raison suffi-
sante pour admettre sa prévention à l'égard du recourant.
Cette institution de prévoyance n'entretient en effet aucun
lien direct, connu ou supposé, avec les parties en cause.

En outre, la circonstance que cette institution est active
dans la même branche économique que les intimées n'est pas
non plus, à elle seule, de nature à donner au juge asses-
seur B.________ une apparence de prévention dans le procès
(pour comp. ATF 115 V 263 ss consid. 5b).
Le moyen tiré de la violation des art. 58 aCst. (ou
30 Cst.) et 6 par. 1 CEDH n'est ainsi pas fondé.

2.- Il convient d'examiner le mérite des arguments que
le recourant développe sur le fond du litige en vue
d'établir sa qualité d'assuré à l'égard de l'une ou l'autre
des deux institutions intimées.

a) Selon l'art. 10 al. 1 LPP, l'assurance obligatoire
commence en même temps que les rapports de travail. Y sont
soumis les salariés qui ont plus de 17 ans et reçoivent
d'un même employeur un salaire annuel supérieur au montant
limite fixé à l'art. 7 LPP (art. 2 al. 1 LPP). Lorsqu'un
salarié est occupé par un employeur pendant moins d'une
année, son salaire annuel est réputé être celui qu'il
obtiendrait en travaillant toute l'année (art. 2 OPP 2).
Aux termes de l'art. 2 al. 2 LPP, le Conseil fédéral
définit les catégories de salariés qui, pour des motifs
particuliers, ne sont pas soumis à l'assurance obligatoire.
C'est ce qu'il a fait en édictant l'art. 1er al. 1 let. b
OPP 2, qui prévoit que les salariés engagés
pour une durée
limitée ne dépassant pas trois mois ne sont pas soumis à
l'assurance obligatoire (première phrase); en cas de pro-
longation des rapports de travail au-delà de trois mois, le
salarié est assujetti à l'assurance obligatoire dès le
moment où la prolongation a été convenue (seconde phrase).

b) Se fondant sur les déclarations de T.________,
l'ancien employeur du recourant, les premiers juges ont
considéré que ce dernier n'était pas au bénéfice d'un
contrat de travail d'une durée supérieure à trois mois au

moment déterminant, et qu'il n'était donc pas soumis à
l'assurance obligatoire en application de l'art. 1er al. 1
let. b OPP 2.
Le recourant conteste ce point de vue, en faisant va-
loir qu'au regard de l'aménagement des relations de travail
avec son ancien employeur durant les années qui ont précédé
l'accident, l'existence d'un contrat d'une durée supérieure
à trois mois doit être admise.

c) Il est pour le moins douteux que lors de l'engage-
ment en mars 1991 la volonté commune de l'employeur et du
recourant fût de subordonner le maintien des rapports de
travail à l'obtention d'un permis de travail saisonnier. Il
appert en effet qu'une année auparavant à pareille époque,
soit en mars 1990, I.________ avait également commencé à
travailler pour le compte de T.________ et que, nonobstant
une réponse négative de l'autorité compétente en matière
d'autorisation de travail, il était resté au service de cet
employeur jusqu'à la fin de l'année. Or, on ne voit pas
pourquoi les parties intéressées en auraient décidé
autrement pour l'année 1991. Au reste, si véritablement
l'employeur «tenait à occuper un employé dont la situation
était régularisée sur le plan légal», comme il l'a allégué
devant la cour cantonale, on peut s'étonner qu'il ait pris
le recourant à son service avant même que l'autorité com-
pétente ne se fût prononcée sur le droit de celui-ci de
résider et de travailler en Suisse. A cela s'ajoute que,
selon un relevé du 29 juin 1995 de l'Office cantonal de
contrôle des habitants et de police des étrangers, ce n'est
qu'après la survenance de l'accident du 7 mars 1991 qu'une
demande de permis de travail a été présentée à l'autorité
pour l'année 1991, ce qui tend à démontrer que l'obtention
d'un tel permis n'était pas, aux yeux de l'employeur et du
travailleur, une condition primordiale au maintien de leurs
rapports de travail.

d) Cela étant, quand bien même les parties se seraient
mises d'accord, comme l'a allégué T.________, sur la
résolution des rapports de travail en cas de non-obtention
d'un permis saisonnier, le recourant n'en pourrait pas
moins se prévaloir de l'existence d'un contrat de travail
d'une durée propre à lui garantir la soumission à l'assu-
rance obligatoire. Car seuls les salariés qui sont engagés
pour une durée déterminée inférieure à trois mois ne sont
pas soumis à l'assurance obligatoire en vertu de l'art. 1er
al. 1 let. b OPP 2, mais non ceux dont l'engagement est
d'une durée déterminée supérieure à trois mois ou d'une
durée indéterminée (Jürg Brühwiler, Die betriebliche
Personalvorsorge in der Schweiz, Berne 1989, pp. 276 et 477
ss; Carl Helbling, Les institutions de prévoyance et la
LPP, Berne 1991, p. 79; voir aussi le commentaire de l'OFAS
au sujet du projet d'OPP 2, août 1983, p. 7). Or, en
l'occurrence, même s'il fallait s'en remettre à la version
de l'employeur, on ne voit pas que les parties auraient
conclu un contrat de travail de durée déterminée, qui plus
est pour un temps inférieur à trois mois. Cela supposerait
en effet qu'on pût objectivement, et avec suffisamment de
précision, déterminer à l'avance cette durée lors de la
conclusion du contrat (Brunner/Bühler/Waeber, Commentaire
du contrat de travail, 2e édition, Lausanne 1996, n. 2 ad
art. 334 CO; Brühwiler, Kommentar zum Einzelarbeitsvertrag,
2e édition, Berne 1996, n. 1 ad art. 334 CO; Streiff/von
Kaenel, Arbeitsvertrag: Leitfaden zum Arbeitsvertragsrecht,
5e édition, Zurich 1992, n. 2 ad art. 334 CO; Manfred
Rehbinder, Berner Kommentar, Kommentar zu den Art. 331-335
OR, Berne 1992, n. 7 ad art. 334 CO; Brand et al., Der
Einzelarbeitsvertrag im Obligationenrecht, Muri/Berne 1991,
n. 5 ad art. 334 CO). Mais cela n'était justement pas
possible dans le cas d'espèce, puisque les parties étaient
simplement convenues, aux dires de l'employeur, de résoudre
leurs rapports de travail en cas de refus de l'autorité
compétente de délivrer un permis de travail : non seulement

le moment auquel cet événement devait se produire était
ainsi incertain, mais encore la survenance même d'un tel
événement présentait un caractère aléatoire, l'autorité
pouvant tout aussi bien décider d'octroyer un permis de
travail. En réalité, les parties ont stipulé une condition
résolutoire au sens de l'art. 154 CO, ce qui ne donne
nullement lieu à un contrat de durée déterminée même si une
partie de la doctrine propose d'appliquer à ce genre de
convention les règles relatives au contrat de durée
déterminée (cf. Rehbinder, loc. cit.; Thomas Brender,
Rechtsprobleme des befristeten Arbeitsvertrages, thèse
Zurich 1976, p. 29).

e) Dans ces conditions, force est d'admettre que le
recourant était bien au bénéfice d'un contrat de durée
indéterminée lorsque s'est produit l'accident du 7 mars
1991. Par ailleurs, vu le salaire de 580 francs qu'il a
réalisé du 4 au 7 mars 1991 (et vu celui qu'il a réalisé
les années antérieures), il pouvait prétendre, en 1991, un
salaire annualisé (cf. art. 2 OPP 2) supérieur à la limite
fixée à l'art. 7 al. 1 LPP, qui se montait alors à
19'200 francs (art. 5 OPP 2, dans sa teneur en vigueur dès
le 1er janvier 1990; RO 1989 II 1901).
Par conséquent, le recourant remplissait en 1991 les
conditions de la soumission à l'assurance obligatoire.
C'est donc l'institution de prévoyance à laquelle son em-
ployeur était affilié à cette époque qui doit prendre en
charge les séquelles de l'accident (cf. art. 10 al. 1 LPP
et art. 7 al. 1 LPP) ou, à défaut d'affiliation à une ins-
titution de prévoyance - comme le soutient la fondation in-
timée -, l'institution supplétive (cf. art. 12 al. 1 LPP).
Le recours est bien fondé.

3.- Au vu de ce qui précède, il se justifie d'annuler
le jugement entrepris et de renvoyer la cause à la juri-

diction cantonale afin qu'elle détermine laquelle des
intimées doit fournir des prestations au recourant, ainsi
que l'étendue de celles-ci.

4.- La procédure est gratuite, s'agissant d'un litige
qui concerne l'octroi ou le refus de prestations d'assu-
rance (art. 134 OJ).
Les intimées, qui succombent, sont en outre redevables
d'une indemnité de dépens au recourant (art. 159 al. 1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est admis et le jugement du 19 février 1999
du Tribunal des assurances du canton de Vaud est
annulé, la cause étant renvoyée à cette autorité pour
nouveau jugement au sens des considérants.

II. Il n'est pas perçu de frais de justice.

III. Les intimées verseront au recourant une indemnité de
dépens de 2500 fr. pour l'instance fédérale.

IV. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tri-
bunal des assurances du canton de Vaud, et à l'Office
fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 26 septembre 2000

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la Ière Chambre :

Le Greffier :


Synthèse
Numéro d'arrêt : B.53/99
Date de la décision : 26/09/2000
Cour des assurances sociales

Analyses

Art. 2 al. 2 LPP; art. 1er al. 1 let. b OPP 2; art. 154 al. 1 CO: Soumission à l'assurance obligatoire. Les salariés engagés pour une durée indéterminée sont soumis à l'assurance obligatoire. In casu, travailleur saisonnier au bénéfice d'un contrat de travail assorti d'une condition résolutoire au sens de l'art. 154 CO: une telle convention ne donnant pas lieu à un contrat de durée déterminée, le travailleur est soumis à l'assurance obligatoire.


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-09-26;b.53.99 ?
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