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26/09/2000 | SUISSE | N°4C.71/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 26 septembre 2000, 4C.71/2000


«/2»

4C.71/2000

Ie C O U R C I V I L E
****************************

Séance du 26 septembre 2000

Présidence de M. Walter, Président de la Cour.
Présents: M. Leu, M. Corboz, Mme Klett et M. Nyffeler, juges.
Greffier: M. Ramelet.

__________

Dans la cause civile pendante
entre

F.________, demandeur et recourant, représenté par Me Jean-
Bernard Waeber, avocat à Genève,

et

X.________ S.A., défenderesse et intimée, représentée par Me
Eric C. Stampfli, avoc

at à Genève;

(contrat de travail; salaire)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- A...

«/2»

4C.71/2000

Ie C O U R C I V I L E
****************************

Séance du 26 septembre 2000

Présidence de M. Walter, Président de la Cour.
Présents: M. Leu, M. Corboz, Mme Klett et M. Nyffeler, juges.
Greffier: M. Ramelet.

__________

Dans la cause civile pendante
entre

F.________, demandeur et recourant, représenté par Me Jean-
Bernard Waeber, avocat à Genève,

et

X.________ S.A., défenderesse et intimée, représentée par Me
Eric C. Stampfli, avocat à Genève;

(contrat de travail; salaire)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- A compter du 2 janvier 1983, F.________ a été
engagé en qualité de serveur par X.________ S.A., société ex-
ploitant une pizzeria; il percevait un salaire fixe de
660 fr. par mois auquel s'ajoutait un montant variable cor-
respondant à un pourcentage de son chiffre d'affaires.

Avant l'entrée en vigueur de la Convention collec-
tive nationale de travail pour les hôtels, restaurants et ca-
fés du 6 septembre 1988 (CCNT 1988), le directeur d'alors de
la société précitée, P.________, avait voulu changer le mode
de rémunération et instaurer un système de paiement de salai-
res assorti d'un treizième salaire comme cela était prévu
par
ladite convention. Certains employés se sont opposés à ce
nouveau système de rémunération qu'ils considéraient comme
moins avantageux que celui en vigueur jusqu'alors.

Le 18 décembre 1989, une assemblée extraordinaire
s'est tenue afin d'examiner la situation. A la suite de
cette
réunion, P.________ a adressé à ses employés un courrier li-
bellé comme il suit:

"Monsieur,

En assemblée extraordinaire, en date du 18 décembre
1989, nous nous sommes réunis pour analyser l'en-
semble des salaires pour les employés rémunérés
jusqu'alors sur la base des taxes de service, en
pourcentage par rapport au chiffre d'affaires de
chacun.

Selon l'art. 28 al. 3, (CCNT), dès le 1er janvier
1990, Monsieur P.________ envisageait de changer le
système de rémunération en attribuant un salaire
mensuel fixe à chaque employé. Après débat et dis-
cussion, et d'un commun accord entre l'employeur et
chaque salarié, il a été convenu ce qui suit:

1) Monsieur P.________ renonce à changer le système
de rémunération pour le personnel de service qui
continuera à être payé au pourcentage par rapport
au chiffre d'affaires de chacun.

2) En contrepartie de l'avantage accordé, l'employé
soussigné renonce à l'application de l'art. 34 al.
1, c'est-à-dire au versement d'un treizième salaire
dans les proportions prescrites par la CCNT à la
fin de chaque année de travail.

Le présent accord a valeur de contrat de travail
pour les points soulevés, et ne pourra faire l'ob-
jet d'aucune action en justice".

F.________ a approuvé cette proposition en signant
cette écriture sous la mention "Bon pour accord".

Les salaires annuels bruts perçus de 1994 à 1998
par le travailleur ont été les suivants:

En 1994: 55 003 fr.35(:12 = moyenne: 4583 fr.60)
En 1995: 55 334 fr.70 (moyenne: 4611 fr.20)
En 1996: 53 559 fr.10 (moyenne: 4463 fr.25)
En 1997: 58 251 fr.10 (moyenne: 4854 fr.25)
En 1998: 55 037 fr.75 (moyenne: 4586 fr.50).

Le 30 janvier 1999, F.________ a résilié son con-
trat de travail pour le 28 février 1999. Il a reçu son sa-
laire jusqu'à la fin février 1999. Son dernier salaire men-
suel brut s'est élevé à 4744 fr.90.

B.- Le 26 mars 1999, F.________ a réclamé à
X.________ S.A., par l'intermédiaire de son syndicat, le
paiement de 23 824 fr.45 à titre de paiement du treizième
salaire de 1994 à 1999.

Le 16 avril 1999, le nouvel administrateur de l'em-
ployeur, G.________, a répondu au travailleur en se référant
à l'accord passé en décembre 1989; il a relevé que
F.________

avait préféré maintenir les 12 mensualités, au lieu de 13,
considérant que cela était à son avantage, qu'il l'avait
fait
de son plein gré et que, dès l'instant où, pendant les cinq
dernières années, le travailleur avait perçu un gain supplé-
mentaire d'environ 80 000 fr. par rapport au salaire prévu
par la convention collective, treizième mois compris, la de-
mande était injustifiée, voire malhonnête.

F.________ a alors assigné X.________ S.A. devant
la juridiction des prud'hommes de Genève, en paiement de
30 526 fr.90, plus intérêts.

Par jugement du 1er juillet 1999, le Tribunal des
prud'hommes de Genève a condamné la défenderesse à payer au
demandeur la somme brute de 2468 fr.30, plus intérêts, à ti-
tre de paiement de jours fériés; il a débouté le demandeur
de
ses prétentions en paiement d'un treizième salaire.

Statuant sur appel du demandeur, la Chambre d'appel
de la juridiction des prud'hommes du canton de Genève, par
arrêt du 22 novembre 1999, a confirmé le jugement du
Tribunal
des prud'hommes.

C.- F.________ exerce un recours en réforme au
Tribunal fédéral. Il conclut à la réforme de l'arrêt de la
Chambre d'appel, en ce sens que la défenderesse est
condamnée
à lui verser la somme brute de 26 258 fr.35, plus intérêts.

La défenderesse propose le rejet du recours.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- La Chambre d'appel a examiné la réclamation du
demandeur en paiement pour 1994 à 1999 d'un treizième
salaire

calculé sur les salaires bruts perçus, se demandant si et à
quelles conditions le travailleur pouvait renoncer au paie-
ment d'un treizième salaire en contrepartie de la continua-
tion du versement de sa rémunération en pourcentage du chif-
fre d'affaires réalisé.

La cour cantonale, après avoir retenu que la CCNT
1988 prévoyait, dès le 1er janvier 1990, le paiement d'un sa-
laire mensuel fixe, payable treize fois l'an, a contrôlé, à
la lumière de l'art. 341 al. 1 CO, si le travailleur pouvait
renoncer à une telle créance. Elle a considéré que l'art.
341
al. 1 CO ne s'appliquait qu'en cas de renonciation unilatéra-
le du travailleur portant sur des prétentions à l'encontre
de
son employeur; en revanche, lorsque les parties sont parve-
nues à un accord comportant des concessions réciproques,
celui-ci est valable au regard de la disposition précitée,
l'admission d'un tel accord devant être cependant limitée à
des cas sans équivoque où la renonciation du travailleur est
largement compensée par des contre-prestations de l'em-
ployeur. L'autorité cantonale a jugé que le droit au salaire
ne découlait pas d'une disposition impérative de la loi ou
d'une convention collective, si bien que le travailleur pou-
vait valablement renoncer au paiement d'un treizième salaire
sans contrepartie, l'art. 341 al. 1 CO n'étant pas
applicable
(ATF 118 II 58). Pour la Chambre d'appel, l'accord écrit con-
clu entre les parties à cet égard était limpide et sans équi-
voque; il stipulait clairement que l'employeur renonçait à
changer le système de rémunération pour le personnel de ser-
vice, qui continuerait donc à être payé au pourcentage par
rapport au chiffre d'affaires, et qu'en contrepartie de
l'avantage accordé, les employés renonçaient à se voir
verser
un treizième salaire. Les juges cantonaux en ont déduit que
le demandeur pouvait valablement renoncer au paiement de cet-
te part de salaire.

L'autorité cantonale, par application du principe
de la clause la plus favorable, a cherché à déterminer si
les
revenus annuels qu'a perçus le demandeur de 1994 à 1999 au-
raient été plus élevés s'il avait été payé treize fois l'an
selon le système prévu par la convention collective. Elle a
constaté que, pendant cette période, les salaires annuels
bruts effectivement touchés par le travailleur, représentant
277 186 fr., dépassaient les salaires annuels bruts fixés
par
les conventions collectives, qui atteignaient au total
231 530 fr., de sorte que la renonciation du demandeur à un
treizième salaire, convenue par l'accord du 18 décembre
1989,
avait été largement compensée. Partant, il était indéniable,
a poursuivi la Chambre d'appel, qu'un salaire de base auquel
s'ajoutait un montant correspondant à un certain pourcentage
du chiffre d'affaires avait été un mode de rémunération tout
à fait favorable aux employés.

2.- Le recourant ne s'en prend qu'à la question du
droit au treizième salaire pour les années 1994 à 1999. Il
invoque le caractère impératif des dispositions des CCNT et
de la Convention collective cantonale de travail pour les hô-
tels, restaurants et cafés (CCCT), qui prévoient que le sa-
laire brut mensuel de l'année civile sert de base pour calcu-
ler le treizième salaire, lequel est dû quels que soient le
système de rémunération et le montant du salaire du travail-
leur. Il fait valoir que les conventions collectives applica-
bles n'instituent aucune exception au paiement du treizième
salaire pour les travailleurs dont le salaire de base
dépasse
le salaire minimum ou dont le salaire est payé au prorata du
chiffre d'affaires. Il se réfère à l'art. 357 al. 2 CO, qui
dispose qu'en tant qu'ils dérogent à des clauses
impératives,
les accords entre employeurs et travailleurs liés par une
convention collective sont nuls et remplacés par ces
clauses,
mais que, toutefois, les dérogations stipulées en faveur des
travailleurs sont valables.

Le recourant invoque aussi les articles des CCNT et
de la CCCT qui prescrivent que les accords conclus entre em-
ployeurs et travailleurs dérogeant à la convention ne sont
admis que s'ils sont exclusivement en faveur du travailleur.
Il expose que le treizième salaire est dû à tout salarié sou-
mis à la convention, et non aux seuls travailleurs dont le
salaire de base ne dépasse pas le minimum conventionnel, com-
me l'a admis la Chambre d'appel. Le demandeur souligne, en-
fin, que, lorsqu'il a signé l'accord du 18 décembre 1989, il
était déjà au bénéfice d'une rémunération au chiffre d'affai-
res, si bien qu'il n'a pas obtenu à cette occasion un avanta-
ge par rapport à sa situation antérieure. L'appréciation
n'aurait pu être différente que s'il avait été au bénéfice,
avant 1989, d'une rémunération fixe correspondant au minimum
conventionnel. A suivre le recourant, l'accord du 18
décembre
1989, qui ne constituerait nullement une dérogation faite ex-
clusivement en faveur du travailleur, serait nul.

3.- a) Saisi d'un recours en réforme, le Tribunal
fédéral doit conduire son raisonnement sur la base des faits
contenus dans la décision attaquée, à moins que des disposi-
tions fédérales en matière de preuve n'aient été violées,
qu'il y ait lieu à rectification de constatations reposant
sur une inadvertance manifeste (art. 63 al. 2 OJ) ou qu'il
faille compléter les constatations de l'autorité cantonale
parce que celle-ci n'a pas tenu compte de faits pertinents
et
régulièrement allégués (art. 64 OJ; ATF 126 III 59 consid.
2a; 119 II 353 consid. 5c/aa). Dans la mesure où un
recourant
se prévaut d'un état de fait qui s'écarte de celui contenu
dans la décision attaquée sans invoquer l'une des exceptions
qui viennent d'être rappelées, il n'est pas possible d'en te-
nir compte. Il ne peut être présenté de griefs contre les
constatations de fait, ni de faits ou de moyens de preuve
nouveaux (art. 55 al. 1 let. c OJ). L'appréciation des preu-
ves à laquelle s'est livrée l'autorité cantonale ne peut
être

remise en cause (ATF 125 III 78 consid. 3a, 368 consid. 3 in
fine; 122 III 26 consid. 4a/aa, 61 consid. 2c/bb)

Si le Tribunal fédéral ne saurait aller au-delà des
conclusions des parties, lesquelles ne peuvent prendre de
conclusions nouvelles (art. 55 al. 1 let. b in fine OJ), il
n'est lié ni par les motifs qu'elles invoquent (art. 63 al.
1
OJ), ni par ceux de la décision cantonale (art. 63 al. 3 OJ;
ATF 126 III 59 consid. 2a; 123 III 246 consid. 2).

b) Les rapports contractuels noués par les parties
du 2 janvier 1983 au 28 février 1999 ont été régis successi-
vement par la CCNT pour les hôtels, restaurants et cafés
dans
sa version 1988 (CCNT 1988), du 1er novembre 1988 au 30 juin
1992, et par la CCNT 1992 du 1er juillet 1992 au 30 juin
1996. La CCNT 1992 ayant été dénoncée par les partenaires so-
ciaux pour le 30 juin 1996, la Chambre d'appel a retenu à
bon
droit que celle-ci ne s'appliquait plus dès cette date mais
que, comme les parties n'avaient pas modifié les conditions
de travail à cette échéance, il y avait lieu d'admettre
qu'elles étaient convenues tacitement d'incorporer le
contenu
de cette convention au contrat de travail qui les liait pour
la période courant du 1er juillet 1996 au 30 septembre 1996
(cf. ATF 98 Ia 561). Du 1er octobre 1996 au 31 décembre
1998,
les rapports des parties ont été régis par la CCCT. Enfin,
du
1er janvier 1999 au 28 février 1999, les rapports des plai-
deurs ont de nouveau été soumis à une Convention collective
nationale de travail, la CCNT 1998.

Les dispositions des conventions collectives de
travail qui prévoient le versement d'un treizième salaire
sont des clauses qui ont un effet direct dans les relations
entre l'employeur et le travailleur (art. 356 al. 1 et 357
CO). Selon l'opinion dominante, de telles clauses, dites nor-
matives, doivent s'interpréter objectivement selon les prin-
cipes valables pour l'interprétation des lois,
singulièrement

lorsque la convention a fait l'objet d'une décision d'exten-
sion (Schönenberger/Vischer, Commentaire zurichois, n. 110
ad
art. 356 CO et n. 144 ad art. 356b CO; Rehbinder,
Commentaire
bâlois, 2e éd., n. 3 et 4 ad art. 356 CO; Kramer,
Commentaire
bernois, n. 112 ad art. 1 CO et n. 63 ad art. 18 CO).

Les conventions collectives de travail dont le
champ d'application a été
étendu, que ce soit par le Conseil
fédéral ou par une autorité cantonale, renferment du droit
privé fédéral (ATF 98 II 205 consid. 1; Jean-Fritz Stöckli,
Commentaire bernois, n. 88 ad art. 356b CO; Schönenberger/
Vischer, op. cit., n. 144 ad art. 356b CO). Il s'ensuit que
le Tribunal fédéral, qui est tenu d'appliquer d'office le
droit fédéral (art. 63 al. 1 et 3 OJ), doit prendre en
compte
le contenu de telles conventions, même s'il n'a pas été cons-
taté dans l'arrêt déféré.

c) Le 1er novembre 1988 est entrée en vigueur la
CCNT 1988. L'art. 34 ch. 1 de cette convention prévoit notam-
ment que le salarié, dont les rapports de travail chez le mê-
me employeur ont duré plus de quatre ans, a droit à une part
de treizième salaire fixée à 50% dès le 1er janvier 1989 et
à
75 % dès le 1er janvier 1990, l'intégralité du treizième sa-
laire lui étant accordée dès le 1er janvier 1991. A teneur
de
l'art. 34 ch. 1 in fine CCNT 1988, le treizième salaire est
calculé sur la base du salaire brut mensuel moyen de l'année
civile, et non pas sur le salaire mensuel minimum convention-
nel.

Cette disposition a donc clairement introduit
l'obligation pour l'employeur de payer annuellement dès le
1er janvier 1989, en sus des douze mois de salaire versés
jusqu'alors, un treizième salaire aux travailleurs qui, à
l'instar du demandeur, étaient au moins dans leur cinquième
année de service.

La CCNT 1992, entrée en vigueur le 1er juillet
1992, n'a pas modifié cette réglementation (cf. art. 34 ch.
1
CCNT 1992), pas plus que la CCCT (cf. art. 32) et la CCNT
1998 (cf. art. 12).

d) In casu, le demandeur réclame le paiement d'un
treizième mois pour les années 1994 à 1999. La défenderesse
s'oppose à cette prétention en faisant valoir qu'elle a of-
fert en 1988 un tel complément de rémunération conformément
à
la CCNT 1988, mais que les salariés n'en ont pas voulu, pré-
férant, lors de l'assemblée extraordinaire du 18 décembre
1989, percevoir un salaire fixe plus une participation au
chiffres d'affaires, à savoir un salaire variable sans trei-
zième salaire.

Il convient donc d'examiner si le demandeur a pu
valablement renoncer à l'octroi de la part de salaire en cau-
se à partir de 1994, année pendant laquelle la CCNT 1992 dé-
ployait ses effets.

aa) Selon l'art. 1 des Dispositions transitoires
CCNT 88/ CCNT 92, les contrats de travail qui ont été
conclus
conformément aux art. 31, 32 ou 33 ch. 2 CCNT 1988 - c'est-à-
dire qui prévoient une rémunération basée sur le chiffre
d'affaires - doivent être établis par écrit au plus tard au
début de la saison d'hiver 1992/93. En cas d'absence
d'accord
écrit, est applicable dès le début de la saison d'hiver
1992/93 ou dès le 1er janvier 1993 l'art. 28 ch. 3 de la
CCNT
1992, lequel a la teneur suivante :

"Si le contrat ne prévoit pas exclusivement un sa-
laire fixe, le système de rémunération doit être
défini par écrit. Le salaire mensuel minimum conve-
nu doit clairement ressortir.

En cas d'absence d'accord écrit et lorsque la rému-
nération d'un employé de service n'est pas unique-
ment basée sur un salaire fixe, l'application de
l'art. 32 est obligatoire".

L'art. 32 ch. 1 CCNT 1992 dispose pour sa part ce
qui suit:

"En cas d'absence d'accord écrit prévoyant un autre
modèle de rémunération sur la base du chiffre d'af-
faires, le personnel de service doit se voir boni-
fier:

1.1 une part d'au moins 13,04 % du chiffre d'affai-
res brut découlant de la cuisine et de la cave
(caisses enregistreuses, banquets, manifestations
diverses), ainsi que

1.2 une part de salaire fixe égale à Fr. 660.-- au
moins par mois.

Ces deux éléments de salaire forment le salaire
brut.

La part du chiffre d'affaires et celle du salaire
fixe sont deux minimums distincts qui ne peuvent
être inférieurs aux prescriptions susmentionnées.

Lorsque le service est dirigé de manière permanente
par un cadre, le taux prévu au chiffre 1.1 est ra-
mené à 11,5 %".

bb) Il ne résulte pas de l'arrêt critiqué que les
parties aient passé un contrat de travail écrit. Le 18 décem-
bre 1989, les plaideurs sont certes convenus que le salaire
du demandeur se composerait toujours d'un pourcentage du
chiffre d'affaires auquel s'ajoutait une part de salaire
fixe, cela sans versement d'un treizième salaire, comme l'at-
teste le courrier adressé le même jour par le directeur
d'alors de la défenderesse au recourant, pli que celui-ci a
signé sous la mention "Bon pour accord". Mais, cette conven-
tion, pour respecter l'art. 28 ch. 3 al. 1 CCNT 1992,
devait,
dès lors qu'elle ne prévoyait pas exclusivement un salaire
fixe, définir par écrit le système de rémunération et faire
clairement ressortir le salaire mensuel minimum convenu. Il
n'est nul besoin de longues explications pour admettre que
l'accord du 18 décembre 1989 ne satisfaisait pas à ces exi-
gences formelles. Et il n'est pas constaté que les parties

aient établi par écrit un nouveau contrat de travail
conforme
aux réquisits de l'art. 28 ch. 3 al. 1 CCNT 1992 dans le dé-
lai de l'art. 1 des Dispositions transitoires CCNT 88/ CCNT
92. Il suit de là que l'accord susmentionné a cessé de dé-
ployer des effets juridiques lorsque la CCNT 1992 est entrée
en vigueur, soit le 1er juillet 1992.

Dans ces conditions, la rémunération du demandeur
de 1994 au 28 février 1999 est fonction uniquement des diver-
ses conventions collectives qui se sont succédé dans l'inter-
valle, lesquelles, comme on l'a vu, prévoient toutes le ver-
sement d'un treizième salaire.

cc) Le recourant a donc bien droit au versement
d'un treizième salaire pendant la période considérée. Pour
calculer la quotité de ce treizième salaire, encore faudrait-
il connaître le salaire brut mensuel moyen perçu par le tra-
vailleur à l'époque déterminante (cf. art. 34 ch. 1 in fine
CCNT 1992).

Pour le début de 1994 au 30 septembre 1996, période
pendant laquelle les rapports de travail du demandeur
étaient
régis par la CCNT 1992, l'art. 28 ch. 3 al. 2 de la Conven-
tion collective renvoie, en l'absence d'accord écrit, à
l'art. 32, dont l'application est obligatoire, qui prescrit
que la rémunération du travailleur se décompose en une part
de salaire fixe égale à 660 fr. au moins par mois et en une
part d'au minimum de 13,04 % du chiffre d'affaires brut dé-
coulant de la cuisine et de la cave, voire de 11,5 % lorsque
le service est dirigé de manière permanente par un cadre.

Du 1er octobre 1996 au 31 décembre 1998, c'est la
CCCT qui est applicable; celle-ci prévoit, à son art. 31,
les
mêmes parts minimales de salaire fixe et variable que la
CCNT
1992, sous la réserve que la participation au chiffre d'af-

faires de 13,04 % est réduite de 6,5 % pour tenir compte de
la TVA, d'où un pourcentage de 12,24 %.

S'agissant du 1er janvier 1999 au 28 février 1999,
la CCNT 1998 doit être appliquée; son art. 10 instaure des
salaires minimaux, toutefois inférieurs à la rémunération
mensuelle de 4744 fr.90 qu'a perçue alors le demandeur.

Si la Chambre d'appel a retenu que le salaire fixe
qui était versé au recourant se montait à 660 fr. par mois,
elle n'a pas constaté le pourcentage qui était accordé au de-
mandeur sur le chiffre d'affaires qu'il a réalisé de 1994 à
1998. Autrement dit, on ne sait si le demandeur s'est vu
alors octroyer un pourcentage dépassant les taux minimums ar-
rêtés par la CCNT 1992 et la CCCT. Le Tribunal fédéral n'est
ainsi pas à même de calculer le salaire brut mensuel moyen
du
demandeur de 1994 à 1998 et, par conséquent, de fixer le mon-
tant de son treizième salaire pendant cette période. Confor-
mément à l'art. 64 al. 1 OJ, il y a lieu d'admettre partiel-
lement le recours, d'annuler l'arrêt attaqué et de retourner
la cause à l'autorité cantonale pour qu'elle complète l'état
de fait quant à la détermination du pourcentage applicable
au
chiffre d'affaires obtenu par le recourant, puis fixe le
treizième salaire sur la base du salaire brut mensuel moyen
du demandeur pour les années 1994 à 1999.

4.- Le recourant obtient gain de cause sur le
principe de l'allocation d'un treizième salaire. C'est donc
à
sa partie adverse de payer l'émolument de justice (art. 156
al. 1 OJ) et de lui verser des dépens (art. 159 al. 1 OJ).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Admet partiellement le recours, annule l'arrêt
attaqué et renvoie la cause à l'autorité cantonale pour nou-
velle décision dans le sens des considérants;

2. Met un émolument judiciaire de 2000 fr. à la
charge de l'intimée;

3. Dit que l'intimée versera au recourant une in-
demnité de 2500 fr. à titre de dépens;

4. Communique le présent arrêt en copie aux manda-
taires des parties et à la Chambre d'appel de la juridiction
des prud'hommes du canton de Genève.

______________

Lausanne, le 26 septembre 2000
ECH

Au nom de la Ie Cour civile
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président,

Le Greffier,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4C.71/2000
Date de la décision : 26/09/2000
1re cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-09-26;4c.71.2000 ?
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