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22/09/2000 | SUISSE | N°U.235/99

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 22 septembre 2000, U.235/99


«AZA 7»
U 235/99 Mh

IIIe Chambre

composée des Juges fédéraux Schön et Spira, Jaeger,
suppléant; Beauverd, Greffier

Arrêt du 22 septembre 2000

dans la cause

A.________, recourant, représenté par Me Jean-Jacques
Hodel, avocat, rue du Mont-de-Sion 8, Genève,

contre

Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents,
Fluhmattstrasse 1, Lucerne, intimée,

et

Tribunal administratif du canton de Genève, Genève

A.- A.________ a travaillé dès le mois d'aoÃ

»t 1995
comme monteur de tableaux électriques au service de
l'entreprise X.________. A ce titre, il était assuré contre
le risque ...

«AZA 7»
U 235/99 Mh

IIIe Chambre

composée des Juges fédéraux Schön et Spira, Jaeger,
suppléant; Beauverd, Greffier

Arrêt du 22 septembre 2000

dans la cause

A.________, recourant, représenté par Me Jean-Jacques
Hodel, avocat, rue du Mont-de-Sion 8, Genève,

contre

Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents,
Fluhmattstrasse 1, Lucerne, intimée,

et

Tribunal administratif du canton de Genève, Genève

A.- A.________ a travaillé dès le mois d'août 1995
comme monteur de tableaux électriques au service de
l'entreprise X.________. A ce titre, il était assuré contre
le risque d'accident professionnel et non professionnel,
ainsi que de maladie professionnelle auprès de la Caisse
nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (ci-après :
la CNA).

De 1986 à 1990, A.________ avait travaillé dans le
domaine de la galvanoplastie, activité au cours de laquelle
il avait été atteint de troubles oto-rhino-laryngologiques.
La CNA ayant pris en charge le cas au titre des prestations
en cas de maladie professionnelle, il avait bénéficié d'une
mesure d'orientation professionnelle sous la forme d'un
apprentissage de monteur en tableaux électriques dans
l'entreprise susmentionnée.
Lors d'un traitement de troubles lombaires dus à un
accident survenu au mois d'octobre 1995, le docteur
R.________, spécialiste en chirurgie orthopédique, a posé
le diagnostic d'épicondylite droite radiale aiguë extrême-
ment invalidante due à des traumatismes à répétition subis
au cours du travail, à considérer comme maladie profession-
nelle (rapport du 8 mars 1996).
Licencié au mois de novembre 1995, A.________ a
bénéficié de prestations de chômage. En dépit d'une cure
d'épicondylite, à laquelle a procédé le docteur H.________
le 16 juillet 1996, l'assuré n'a jamais repris d'activité
professionnelle.
Par décision du 24 juin 1996, la CNA a nié tout droit
à des prestations au motif que l'épicondylite ne pouvait
pas être considérée comme une maladie professionnelle. Une
opposition contre cette décision a été rejetée le 10 dé-
cembre 1996.

B.- Saisi d'un recours, le Tribunal administratif du
canton de Genève a confié une expertise au docteur
B.________, spécialiste en médecine du travail et médecine
interne, et professeur associé à la Faculté de médecine de
l'Université Y.________. Se fondant sur les conclusions de
l'expert, la juridiction cantonale a rejeté le recours par
jugement du 31 mai 1999.

C.- A.________ interjette recours de droit adminis-
tratif contre ce jugement, dont il demande l'annulation, en
concluant, sous suite de dépens, au renvoi de la cause à la
juridiction cantonale pour complément d'instruction, subsi-
diairement à l'annulation de la décision sur opposition de
la CNA.
La CNA conclut au rejet du recours. Ni la Caisse-mala-
die INTRAS, invitée à se déterminer en qualité d'intéres-
sée, ni l'Office fédéral des assurances sociales n'ont
présenté de détermination.

Considérant en droit :

1.- Le litige porte sur le point de savoir si l'épi-
condylite dont souffre le recourant est une maladie profes-
sionnelle au sens de l'art. 9 LAA.

a) Cette affection ne figure pas dans la liste
- exhaustive (RAMA 1988 n° U 61 p. 449) - des affections
dues au travail, contenue à l'annexe 1 à l'OLAA. Aussi,
comme le reconnaît d'ailleurs le recourant, le présent cas
ne relève-t-il pas de l'art. 9 al. 1 LAA.
Aux termes de l'art. 9 al. 2 LAA, sont aussi réputées
maladies professionnelles les autres maladies dont il est
prouvé qu'elles ont été causées exclusivement ou de manière
nettement prépondérante par l'exercice de l'activité pro-
fessionnelle. Cette clause générale répond au besoin de
combler d'éventuelles lacunes qui subsisteraient dans la
liste établie par le Conseil fédéral conformément aux
art. 9 al. 1 LAA et 14 OLAA. L'exigence d'une relation
exclusive ou nettement prépondérante est réalisée lorsque
la maladie professionnelle résulte à 75 % au moins de l'ac-
tivité professionnelle (ATF 119 V 201 consid. 2b). En d'au-
tres termes, il faut que les cas d'atteinte pour un groupe
professionnel déterminé soient quatre fois plus nombreux

que ceux enregistrés dans la population en général (ATF
116 V 143 consid. 5c; RAMA 1997 n° U 273 p. 179 con-
sid. 3a).

b) En ce qui concerne la valeur probante d'un rapport
médical, ce qui est déterminant c'est que les points liti-
gieux importants aient fait l'objet d'une étude approfon-
die, que le rapport se fonde sur des examens complets,
qu'il prenne également en considération les plaintes expri-
mées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dos-
sier (anamnèse), que la description du contexte médical
soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient
bien motivées (ATF 125 V 352 consid. 4a, 122 V 160 con-
sid. 1c et les références).
En principe le juge ne s'écarte pas sans motif impéra-
tif des conclusions d'une expertise médicale judiciaire, la
tâche de l'expert étant précisément de mettre ses connais-
sances spéciales à la disposition de la justice afin de
l'éclairer sur les aspects médicaux d'un état de fait donné
(ATF 125 V 352 s. consid. 3b/aa et les références).

2.- a) Les premiers juges se sont fondés essentielle-
ment, sinon exclusivement, sur les conclusions du docteur
B.________, dont le rapport d'expertise (du 15 mars 1999),
particulièrement fouillé, a emporté leur conviction. Le
niveau scientifique, le caractère complet de l'anamnèse,
comprenant une vision approfondie du poste de travail et
des activités qu'il comprend, ainsi que les réponses clai-
res apportées au questionnaire les dispensaient sans nul
doute de procéder à une audition de l'expert, comme le
demandait le recourant.
Pour l'essentiel, celui-ci rappelle tout d'abord que
dans son rapport du 8 mars 1996, le docteur R.________
assimile les symptômes et leur genèse à une maladie
professionnelle. Le recourant relève ensuite que cet avis,
bien qu'écarté par les médecins de la CNA, est corroboré

par un rapport (du 10 juillet 1997) de la doctoresse
E.________, médecin adjoint au Département de médecine
Z.________, médecin qui, en outre, a été entendu par la
juridiction cantonale.

b) Indépendamment du fait que le juge ne peut s'écar-
ter sans motif impératif des conclusions d'une expertise
judiciaire pour accorder la primauté à un simple rapport
médical (cf. consid. 1b), l'opinion de la doctoresse
Bernstein ne convainc pas. Cet avis - qui, au demeurant,
s'inspire d'une notion de maladie professionnelle tirée
d'une législation étrangère - ne saurait en effet prévaloir
en l'occurrence, la clause générale - qui découle de
l'art. 9 al. 2 LAA - ayant une valeur subsidiaire (arrêt
v.B. du 3 août 2000, U 114/99, destiné à la publication).

c) Dans sa jurisprudence récente, le Tribunal fédéral
des assurances a examiné à plusieurs reprises le point de
savoir si l'exigence d'une relation exclusive ou nettement
prépondérante au sens de l'art. 9 al. 2 LAA est à apprécier
principalement sur le vu des bases épidémiologiques médica-
lement reconnues ou si, au contraire, ce sont les circons-
tances particulières de l'occupation professionnelle con-
sidérées selon les critères retenus par la pratique admi-
nistrative de la CNA - tels que documentés dans Médecine
des accidents n° 3, CNA/Lucerne 1987 - qui doivent préva-
loir (cf. ATF 116 V 143; RAMA 1999 n° U 326 p. 106; arrêt
v.B. du 3 août 2000, déjà cité).
C'est précisément à cette question, entre autres, que
le docteur B.________ a répondu en des termes clairs et
mesurés :

«(...) je pense que l'activité professionnelle a sans
aucun doute contribué au syndrome douloureux, entrant dans
la catégorie des CTD («cumulative trauma disorders») men-
tionnés précédemment, mais j'estime que l'activité profes-
sionnelle n'est pas le seul élément qui a surchargé la
musculature épicondylienne. Cette dernière a davantage joué
le rôle de révélateur et de facteur aggravant d'une affec-

tion fréquente dans la population, dont l'origine première
est souvent inconnue. Pour retenir une cause profession-
nelle unique ou prépondérante, on aurait dû trouver, dans
l'anamnèse et aussi dans les rapports des médecins trai-
tants, une séquence d'événements bien plus précise, par
exemple une opération particulière, exécutée sur une pé-
riode donnée, ayant conduit à une symptomatologie aiguë
nette exigeant probablement un arrêt de travail. En essa-
yant de comprendre l'hypothèse d'une seule étiologie pro-
fessionnelle, on peut alors s'interroger sur le fait que
les troubles n'aient pas été annoncés plus tôt à l'assureur
LAA, qu'il s'agisse de la période où le patient était en
apprentissage ou de ceux qui sont apparus en octobre 1995
et qui ont fait l'objet d'une déclaration le 8 mars 1996.
Dans la jurisprudence actuelle (LAA) appliquant la
règle des 75 %, cela signifie que l'épicondylite devrait
être au minimum quatre fois plus fréquente dans le métier
exercé par A.________ que dans la population générale. Nous
ne disposons malheureusement pas de données épidémiolo-
giques susceptibles d'aider à approcher la question de
cette manière-là. C'est pourquoi nous devons nous rabattre
sur les données cliniques qui, en fonction du commentaire
ci-dessus, n'écartent pas un certain rôle du travail dans
l'évolution des douleurs du patient. Toutefois, ces données
ne permettent pas de conclure à un degré de vraisemblance
suffisant pour répondre affirmativement à la question. En
effet, en l'état actuel de la législation suisse, une épi-
condylite entrant dans la catégorie des atteintes de type
CTD (exposition prolongée à des activités répétitives) ne
répond pas au critère de causalité exigé de plus de 75 %».

Cet avis autorisé se trouvant par ailleurs largement
corroboré par l'étude du docteur Meine (Contribution à
l'appréciation de la causalité des tendinoses d'insertion
du coude en médecine des assurances) parue dans la Revue de
traumatologie, d'assicurologie et des maladies profession-
nelles, vol. 87/1994 (p. 169 ss), produite par l'intimée,
l'épicondylite dont souffre le recourant n'apparaît pas due
exclusivement ou de manière nettement prépondérante à l'ac-
tivité exercée.
Aussi la CNA était-elle fondée, par sa décision sur
opposition du 10 décembre 1996, à nier tout droit à presta-
tions. Le jugement entrepris n'est dès lors pas critiquable
et le recours se révèle mal fondé.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est rejeté.

II. Il n'est pas perçu de frais de justice.

III. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tri-
bunal administratif du canton de Genève, à la Caisse-
maladie INTRAS et à l'Office fédéral des assurances
sociales.

Lucerne, le 22 septembre 2000

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la IIIe Chambre :

Le Greffier :


Synthèse
Numéro d'arrêt : U.235/99
Date de la décision : 22/09/2000
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-09-22;u.235.99 ?
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