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21/09/2000 | SUISSE | N°U.149/00

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 21 septembre 2000, U.149/00


«AZA 7»
U 149/00 Sm

IIe Chambre

composée des Juges fédéraux Meyer et Ferrari, Maeschi,
suppléant; Beauverd, Greffier

Arrêt du 21 septembre 2000

dans la cause

P.________, recourant, représenté par la Fédération suisse
pour l'intégration des handicapés, place Grand-Saint-
Jean 1, Lausanne,

contre

Zurich Assurances SA, Zürich, intimée,

et

Tribunal administratif du canton de Genève, Genève

A.- P.________, né en 1967, a exercé la profession de
gar

çon d'office dans un restaurant. A ce titre, il était
assuré obligatoirement contre le risque d'accident profes-
sionnel et non professio...

«AZA 7»
U 149/00 Sm

IIe Chambre

composée des Juges fédéraux Meyer et Ferrari, Maeschi,
suppléant; Beauverd, Greffier

Arrêt du 21 septembre 2000

dans la cause

P.________, recourant, représenté par la Fédération suisse
pour l'intégration des handicapés, place Grand-Saint-
Jean 1, Lausanne,

contre

Zurich Assurances SA, Zürich, intimée,

et

Tribunal administratif du canton de Genève, Genève

A.- P.________, né en 1967, a exercé la profession de
garçon d'office dans un restaurant. A ce titre, il était
assuré obligatoirement contre le risque d'accident profes-
sionnel et non professionnel auprès de la Zurich, Compagnie
d'assurances (ci-après : la Zurich).
Le 4 décembre 1991, il a été victime d'un accident de
la circulation, au cours duquel il a subi notamment une
fracture ouverte à la jambe gauche.

La Zurich a pris en charge le cas. Par décision du
7 avril 1992, elle a réduit de 35 % les prestations en es-
pèces, au motif que l'accident était dû à une négligence
grave de l'assuré (excès de vitesse). Celui-ci n'a pas fait
opposition à cette décision en temps utile.

B.- Au mois de décembre 1993, P.________ a déposé une
demande tendant à la mise en oeuvre par l'assurance-invali-
dité d'une mesure de réadaptation sous la forme d'une
orientation professionnelle et d'un reclassement dans une
nouvelle profession. L'assurance-invalidité a pris en
charge diverses mesures, en particulier une formation dans
le domaine du travail de montage fin auprès de la société
C.________ SA (du 9 février au 2 août 1998). Dès le 3 août
1998, l'assuré a été engagé par cette société à raison d'un
horaire de travail à mi-temps pour un salaire annuel de
18 850 fr. (13 x 1450 fr.).
Par des décisions des 24 août et 17 novembre 1998,
l'Office cantonal AI de Genève (ci-après : l'office AI) a
alloué à P.________ une rente entière pour la période du
1er décembre 1992 au 30 septembre 1995, et une demi-rente,
fondée sur un taux d'invalidité de 50 %, du 1er janvier au
31 mars 1998, puis à partir du 1er août 1998.

C.- De son côté, la Zurich a recueilli divers rensei-
gnements d'ordre médical, en particulier, elle a requis
l'avis du docteur B.________, spécialiste en chirurgie
(rapports des 27 janvier 1993, 3 mars 1994 et 20 février
1995).
Par décision du 24 décembre 1998, la Zurich a dénié à
l'assuré le droit à une rente d'invalidité, motif pris
qu'il était apte à réaliser, malgré l'atteinte à sa santé,
un gain équivalent, voire supérieur au revenu obtenu avant
la survenance de l'accident assuré.
Saisie d'une opposition, la Zurich l'a rejetée par
décision du 20 mai 1999.

D.- Par jugement du 7 mars 2000, le Tribunal adminis-
tratif du canton de Genève a rejeté le recours formé par
l'assuré contre cette dernière décision.

E.- P.________ interjette recours de droit administra-
tif contre ce jugement, dont il requiert l'annulation, en
concluant, sous suite de dépens, à l'octroi d'une rente
d'invalidité fondée sur un taux d'incapacité de gain de
50 %.
La Zurich conclut au rejet du recours. L'Office fédé-
ral des assurances sociales n'a pas présenté de détermina-
tion.

Considérant en droit :

1.- Le jugement entrepris expose de manière exacte et
complète les dispositions légales et la jurisprudence con-
cernant les conditions du droit à la rente d'invalidité,
l'évaluation de l'invalidité par comparaison des revenus,
le rôle du médecin dans l'appréciation des effets d'une
atteinte à la santé sur la capacité de travail d'un assuré,
ainsi que la valeur probante de rapports médicaux. Il
suffit donc d'y renvoyer.

2.- Bien que l'assuré ait obtenu une rente entière (du
1er décembre 1992 au 30 septembre 1995), et une demi-rente
(du 1er janvier au 31 mars 1998, puis à partir du 1er août
1998) de l'assurance-invalidité, la juridiction cantonale
s'est écartée de l'évaluation de l'invalidité effectuée par
les organes de cette assurance, motif pris que l'évaluation
en cause ne repose sur aucune argumentation médicale qui
permettrait de s'écarter des avis de spécialistes requis
par la Zurich.
De son côté, le recourant fait valoir que l'assureur-
accidents ne devait pas s'écarter de l'évaluation de

l'office AI, laquelle était fondée sur une comparaison des
revenus conforme à la loi et sur le fait que selon un
rapport (du 5 septembre 1997) du docteur L.________, spé-
cialiste en médecine interne, l'incapacité de travail était
de 50 % à partir du 5 septembre 1997.

3.- Dans un arrêt récent, G. du 26 juillet 2000
(I 512/98), destiné à la publication, le Tribunal fédéral
des assurances a précisé sa jurisprudence concernant la
coordination de l'évaluation de l'invalidité dans les
différentes branches de l'assurance sociale. Il a notamment
confirmé le caractère uniforme de la notion d'invalidité
dans ces différentes branches (cf. art. 22 du projet de Loi
fédérale sur la partie générale du droit des assurances
sociales [LPGA] du 27 septembre 1990), ainsi que son effet
de coordination dans l'évaluation de l'invalidité. En
revanche, il a renoncé à la pratique consistant à accorder
en principe plus d'importance à l'évaluation effectuée par
l'un des assureurs sociaux, indépendamment des instruments
dont il dispose pour instruire le cas et de l'usage qu'il
en a fait dans un cas concret. Certes, il faut éviter que
des assureurs procèdent à des évaluations divergentes dans
un même cas. Mais même si un assureur ne peut en aucune
manière se contenter de reprendre, sans plus ample examen,
le taux d'invalidité fixé par un autre assureur, une éva-
luation entérinée par une décision entrée en force ne peut
pas rester simplement ignorée. Toutefois, il convient de
s'écarter d'une telle évaluation lorsqu'elle repose sur une
erreur de droit ou sur une appréciation insoutenable
(ATF 119 V 471 consid. 2b) ou encore lorsqu'elle résulte
d'une simple transaction conclue avec l'assuré (ATF
112 V 175 s. consid. 2a). A ces motifs de divergence déjà
reconnus antérieurement par la jurisprudence, il faut
ajouter des mesures d'instruction extrêmement limitées et
superficielles, ainsi qu'une évaluation pas du tout con-
vaincante ou entachée d'inobjectivité (arrêt G. du
26 juillet 2000, déjà cité). Dans l'arrêt ATF 119 V 468, le

Tribunal fédéral des assurances a considéré comme insoute-
nable une appréciation des organes de l'assurance-invalidi-
té, au motif qu'elle s'écartait largement de l'évaluation
de l'assureur-accidents, laquelle reposait sur des conclu-
sions médicales convaincantes concernant la capacité de
travail et l'activité exigible, ainsi que sur une compa-
raison des revenus correctement effectuée (ATF 119 V 474
consid. 4a).

4.- a) En l'espèce, l'office AI a fixé le taux d'inva-
lidité du recourant à 50 % dès le 1er janvier 1998, compte
tenu du fait qu'en raison de son état de santé, l'intéressé
ne pouvait travailler qu'à 50 % dans une activité adaptée,
comme le travail de montage fin pour lequel il avait reçu
une formation au titre des mesures de réadaptation de
l'assurance-invalidité. L'office AI s'est fondé pour cela
sur un rapport du docteur L.________ (du 5 septembre 1997),
selon lequel l'incapacité de travail du recourant était de
50 % à partir du 5 septembre 1997. Cette appréciation n'est
toutefois nullement motivée et ne contient aucune indica-
tion sur le genre d'activité exigible. Cela étant, il est
douteux que les mesures d'instruction mises en oeuvre par
l'office AI soient suffisantes pour que l'on puisse s'en
tenir, sans plus ample examen, à l'évaluation de l'invali-
dité effectuée par cet office.

b) De son côté, la Zurich a nié le droit du recourant
à une rente d'invalidité en se fondant essentiellement sur
l'appréciation du docteur B.________, selon laquelle la
capacité de travail de l'intéressé est entière dans un
emploi sédentaire (rapport du 20 février 1995). Dès lors,
l'intimée a considéré que le recourant est apte, en
exerçant une activité exigible - comme celles de caissier
ou de préposé au tri ou à l'emballage - de réaliser un gain
au moins équivalent à celui qu'il obtenait dans sa profes-
sion de garçon d'office.

En principe, il n'y a pas de raison de mettre en doute
les conclusions du rapport du docteur B.________, lequel a
été établi par un spécialiste reconnu, sur la base d'obser-
vations approfondies et d'investigations complètes, ainsi
qu'en pleine connaissance du dossier (cf. ATF 122 V 161
consid. 1c). Cependant, ce rapport a été rédigé plus de
quatre ans avant le prononcé de la décision sur opposition
litigieuse et il est possible que la situation dont il fait
état se soit modifiée dans l'intervalle. En effet, le doc-
teur L.________ a constaté une aggravation des troubles de
l'assuré au mois de septembre 1997. Or, les autres éléments
ressortant du dossier ne permettent pas de savoir si cette
aggravation est en relation avec les séquelles de l'acci-
dent, si elle perdurait au moment du prononcé de la déci-
sion litigieuse et encore si elle avait une influence sur
la capacité de travail de l'assuré dans une activité
sédentaire.
Il convient donc de renvoyer le dossier à l'intimée
pour qu'elle rende une nouvelle décision, après avoir pro-
cédé à un complément d'instruction.

5.- Le recourant, qui obtient gain de cause, est
représenté par un avocat du service juridique de la Fédé-
ration suisse pour l'intégration des handicapés. Il a droit
à une indemnité de dépens pour la procédure fédérale
(art. 159 al. 1 en liaison avec l'art. 135 OJ; arrêts non
publiés P. du 15 mai 1997, I 124/96, et P. du 21 février
1997, I 94/96).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est admis en ce sens que le jugement du
Tribunal administratif du canton de Genève du 7 mars

2000 et la décision sur opposition de la Zurich du
20 mai 1999 sont annulés, la cause étant renvoyée à
l'assureur pour instruction complémentaire au sens des
considérants et nouvelle décision.

II. Il n'est pas perçu de frais de justice.

III. La Zurich versera au recourant la somme de 2000 fr. (y
compris la taxe à la valeur ajoutée) à titre de dépens
pour l'instance fédérale.

IV. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tri-
bunal administratif du canton de Genève et à l'Office
fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 21 septembre 2000

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Juge présidant la IIe Chambre :

Le Greffier :


Synthèse
Numéro d'arrêt : U.149/00
Date de la décision : 21/09/2000
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-09-21;u.149.00 ?
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