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19/09/2000 | SUISSE | N°C.73/00

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 19 septembre 2000, C.73/00


«AZA 7»
C 73/00 Co

IIIe Chambre

composée des Juges fédéraux Schön, Spira et Widmer;
Beauverd, Greffier

Arrêt du 19 septembre 2000

dans la cause

Caisse cantonale genevoise de chômage, rue de
Montbrillant 40, Genève, recourante,

contre

S.________, intimé,

et

Commission cantonale de recours en matière d'assurance-
chômage, Genève

A.- S.________, a bénéficié d'indemnités de chômage
durant la période du 1er décembre 1995 au 31 janvier 1997.

Le 21 janvier 1997, il a été entendu par la section
des enquêtes de l'Office cantonal genevois de l'emploi au
sujet notamment de son domicil...

«AZA 7»
C 73/00 Co

IIIe Chambre

composée des Juges fédéraux Schön, Spira et Widmer;
Beauverd, Greffier

Arrêt du 19 septembre 2000

dans la cause

Caisse cantonale genevoise de chômage, rue de
Montbrillant 40, Genève, recourante,

contre

S.________, intimé,

et

Commission cantonale de recours en matière d'assurance-
chômage, Genève

A.- S.________, a bénéficié d'indemnités de chômage
durant la période du 1er décembre 1995 au 31 janvier 1997.
Le 21 janvier 1997, il a été entendu par la section
des enquêtes de l'Office cantonal genevois de l'emploi au
sujet notamment de son domicile et lieu de résidence. A

réception d'un rapport d'enquête établi le 25 avril 1997,
la Caisse cantonale genevoise de chômage (ci-après : la
caisse) a soumis le cas pour examen à l'office cantonal de
l'emploi (ci-après : l'OCE).
Par décision du 17 octobre 1997, l'OCE a déclaré l'as-
suré apte au placement du 1er décembre 1995 au 31 octobre
1996 et inapte du 1er novembre 1996 au 31 janvier 1997,
motif pris qu'il n'était pas domicilié en Suisse durant
cette seconde période.
Saisi d'une réclamation de l'assuré contre cette dé-
cision, le groupe réclamations de l'OCE l'a rejetée par
décision du 14 juillet 1998.

B.- Par jugement du 16 septembre 1999, la Commission
cantonale genevoise de recours en matière d'assurance-chô-
mage a admis un recours formé par l'assuré contre cette dé-
cision. Il a annulé cette dernière et constaté que l'inté-
ressé avait conservé son domicile en Suisse durant la pé-
riode du mois d'octobre 1996 au mois de janvier 1997
inclus.

C.- La caisse interjette recours de droit administra-
tif contre ce jugement, dont elle requiert l'annulation, en
concluant au rétablissement de la décision de l'OCE du
14 juillet 1998.
L'intimé n'a pas répondu au recours. Le Secrétariat
d'Etat à l'économie n'a pas présenté de détermination.

D.- Par décision du 5 janvier 1998, fondée sur la dé-
cision de l'OCE, la caisse a réclamé à l'assuré la restitu-
tion d'un montant de 8437 fr. 50, somme représentant les
prestations perçues durant la période du 1er novembre 1996
au 31 janvier 1997. L'assuré ayant recouru contre cette dé-
cision de restitution devant l'OCE, celui-ci a suspendu la
procédure jusqu'à l'issue du présent procès devant le
Tribunal fédéral des assurances.

Considérant en droit :

1.- a) La décision sur réclamation de l'OCE du
14 juillet 1998 est une décision de constatation par
laquelle cet office a nié rétroactivement l'existence d'un
domicile de l'assuré en Suisse durant la période du
1er novembre 1996 au 31 janvier 1997.

b) Aux termes de l'art. 85 al. 1 let. e LACI, les au-
torités cantonales statuent sur les cas qui leur sont
soumis par les caisses de chômage, concernant le droit de
l'assuré à l'indemnité (art. 81 al. 2 let. a LACI). Le cas
échéant, elles sont appelées à se prononcer sur l'existence
d'un domicile en Suisse, qui est l'une des conditions du
droit à l'indemnité de chômage (cf. art. 8 al. 1 let. c
LACI). A cet effet, elles statuent sous la forme d'une dé-
cision de constatation.
Dans un arrêt récent, L. du 8 août 2000, C 416/98,
destiné à la publication, le Tribunal fédéral des assu-
rances a précisé sa jurisprudence concernant les décisions
de constatation rendues par les autorités cantonales de
chômage. Lorsqu'une telle décision est en force, la caisse
de chômage est liée par les constatations de l'autorité
cantonale (ou du juge en cas de recours) au sujet - par
exemple - de l'existence ou de l'inexistence d'un domicile
en Suisse. Mais cette règle n'est valable que dans la me-
sure où la caisse doit examiner si et, le cas échéant, pour
quelle période cette condition matérielle du droit à pres-
tation est réalisée dans un cas concret. Trois situations
peuvent dès lors se présenter. Premièrement, si l'existence
d'un domicile en Suisse est constatée (les autres condi-
tions du droit étant réalisées), la caisse doit allouer ses
prestations, le cas échéant rétroactivement, et elle ne
peut pas réclamer des prestations déjà allouées. Dans
l'éventualité, deuxièmement, où l'existence d'un domicile
en Suisse est niée, la caisse, qui n'a pas encore alloué de

prestations, ne peut en octroyer pour la période en cause.
Troisièmement, il se peut que l'autorité cantonale, appelée
à statuer sur un cas soumis à examen par la caisse, consta-
te que les conditions du droit à des indemnités de chômage
- déjà allouées par la caisse dans un cas concret -
n'étaient pas réalisées. Dans ce cas, les prestations en
cause apparaissent comme indûment perçues et la caisse est
tenue, aux termes de l'art. 95 al. 1 LACI, d'en exiger la
restitution, pour autant que les conditions d'une reconsi-
dération ou d'une révision procédurale soient réalisées
(ATF 122 V 368 consid. 3, 138 consid. 2c, 21 consid. 3a et
les arrêts cités; DTA 1996/97 no 43 p. 237 consid. 3b). Or,
ce dernier point n'a pas à être examiné ni tranché par
l'autorité cantonale appelée à se prononcer sur un cas
soumis à examen, puisque sa tâche consiste exclusivement à
trancher le point de savoir - le cas échéant rétroactive-
ment - si les conditions du droit à prestation sont réali-
sées. Si l'autorité cantonale constate que tel n'est pas le
cas, il appartient encore à la caisse d'examiner la ques-
tion de la restitution sous l'angle de la reconsidération
ou de la révision procédurale.

2.- a) Aux termes de l'art. 8 al. 1 let. c LACI, l'as-
suré a droit à l'indemnité de chômage s'il est domicilié en
Suisse. D'après la jurisprudence, ce droit suppose, selon
cette disposition légale, la résidence effective en Suisse,
ainsi que l'intention de conserver cette résidence pendant
un certain temps et d'en faire, durant cette période, le
centre de ses relations personnelles (ATF 125 V 469 con-
sid. 5, 115 V 449).

b) La juridiction cantonale a considéré que, dans la
mesure où il n'avait pas été établi que l'assuré avait
quitté le territoire suisse et abandonné son domicile légal
dans ce pays pour vivre en France durant la période liti-
gieuse, les conditions posées à l'art. 8 al. 1 let. c LACI

étaient réalisées et que l'intéressé avait droit à l'indem-
nité de chômage.
Cette argumentation est erronée. Dans le domaine des
assurances sociales, il n'existe pas, en effet, un principe
selon lequel l'administration ou le juge devrait statuer,
dans le doute, en faveur de l'assuré (RAMA 1999 no U 349
p. 478 consid. 2b). Sauf dispositions contraires de la loi,
le juge fonde sa décision sur les faits qui, faute d'être
établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus
vraisemblables, c'est-à-dire qui présentent un degré de
vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu'un
fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse
possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envi-
sageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui
lui paraissent les plus probables (ATF 125 V 195 consid. 2,
121 V 47 consid. 2a, 208 consid. 6b et la référence).

c) En l'espèce, entendu par la section des enquêtes de
l'OCE, l'intimé a déclaré, le 21 janvier 1997, qu'il était
locataire, depuis le mois d'octobre 1996, d'un studio situé
à Genève. Il y résidait une ou deux fois par semaine,
vivant le reste du temps en France dans un appartement dont
il est locataire. A l'appui de ses dires, il a produit en
instance cantonale la copie d'un contrat de bail à loyer
pour la période du 15 septembre 1995 au 30 septembre 1996,
renouvelable d'année en année. Dans sa réclamation contre
la décision de l'OCE du 17 octobre 1997, l'intimé a
toutefois allégué avoir vécu dans sa propre maison située
à P.________ (GE) jusqu'au 13 mai 1997, date à laquelle il
avait vendu cet immeuble. Par ailleurs, le dossier contient
un extrait du fichier informatique de l'Office cantonal ge-
nevois de la population (OCP) selon lequel l'intéressé a
quitté Genève le 31 octobre 1996 pour s'établir en France.
Celui-ci ayant toutefois produit un nouvel extrait du
fichier de la population (du 10 mars 1998) attestant qu'il

n'avait jamais quitté Genève depuis sa naissance, la
juridiction cantonale a requis des renseignements
complémentaires auprès de l'OCP. Par courrier du 8 avril
1999, ledit office a informé la juridiction cantonale que
le départ de l'assuré avait été enregistré dans le fichier
de la population à la suite d'une enquête de ses services.
Celle-ci avait permis d'établir notamment que l'appartement
à P.________ (GE), était vide au mois de novembre 1996.
Toutefois, le départ de Genève avait été radié du fichier
de la population lorsque l'intimé avait communiqué
ultérieurement son adresse actuelle, accompagnée d'une
lettre de sa belle-mère indiquant que l'intéressé et son
épouse étaient domiciliés à son adresse, à Genève.
Vu ce qui précède, il n'est pas établi, au degré de
vraisemblance requis par la jurisprudence, que l'intimé
avait, durant la période litigieuse, sa résidence effective
en Suisse, ainsi que l'intention de conserver cette rési-
dence pendant un certain temps et d'en faire, durant cette
période, le centre de ses relations personnelles. En effet,
même s'il louait effectivement un studio à Genève durant
cette période, force est de constater qu'en l'occupant
- comme il l'allègue - une ou deux fois par semaine, il ne
satisfait pas aux conditions posées à l'art. 8 al. 1 let. c
LACI. Il en est de même par rapport à l'appartement sis à
P.________ (GE), puisque celui-ci était inoccupé lors de la
visite des enquêteurs de l'OCP au mois de novembre 1996.
Par ailleurs, la juridiction cantonale a dûment administré
les preuves commandées par la nature du litige,
conformément au principe inquisitoire (ATF 125 V 195
consid. 2 et les références). Etant donné l'absence
d'éléments permettant d'établir les faits allégués au degré
de vraisemblance requis, elle devait cependant nier
l'existence, durant la période litigieuse, d'un domicile de
l'intimé en Suisse, au sens de l'art. 8 al. 1 let. c LACI.

Cela étant, la décision sur réclamation rendue par
l'OCE le 14 juillet 1998 n'est pas critiquable et le
recours se révèle dès lors bien fondé.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est admis et le jugement de la Commission
cantonale genevoise de recours en matière d'assuran-
ce-chômage du 16 septembre 1999 est annulé.

II. Il n'est pas perçu de frais de justice.

III. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, à la
Commission cantonale genevoise de recours en matière
d'assurance-chômage, à l'Office cantonal genevois de
l'emploi et au Secrétariat d'Etat à l'économie.

Lucerne, le 19 septembre 2000

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la IIIe Chambre :

Le Greffier :


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.73/00
Date de la décision : 19/09/2000
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-09-19;c.73.00 ?
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