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11/09/2000 | SUISSE | N°H.84/00

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 11 septembre 2000, H.84/00


«»
H 84/00 Kt

IIIe Chambre

composée des Juges fédéraux Schön, Spira et Widmer; Berset,
Greffière

Arrêt du 11 septembre 2000

dans la cause

B.________, recourant, représenté par Me Marc von
Niederhäusern, avocat, av. Léopold-Robert 73, La
Chaux-de-Fonds,

contre

Caisse cantonale neuchâteloise de compensation, Faubourg de
l'Hôpital 28, Neuchâtel, intimée,

et

Tribunal administratif du canton de Neuchâtel, Neuchâtel

A.- La société U.________ SA é

tait affiliée à la
Caisse cantonale neuchâteloise de compensation (ci-après :
la caisse). A partir du 24 janvier 1996, son conseil
d'admi...

«»
H 84/00 Kt

IIIe Chambre

composée des Juges fédéraux Schön, Spira et Widmer; Berset,
Greffière

Arrêt du 11 septembre 2000

dans la cause

B.________, recourant, représenté par Me Marc von
Niederhäusern, avocat, av. Léopold-Robert 73, La
Chaux-de-Fonds,

contre

Caisse cantonale neuchâteloise de compensation, Faubourg de
l'Hôpital 28, Neuchâtel, intimée,

et

Tribunal administratif du canton de Neuchâtel, Neuchâtel

A.- La société U.________ SA était affiliée à la
Caisse cantonale neuchâteloise de compensation (ci-après :
la caisse). A partir du 24 janvier 1996, son conseil
d'administration a été formé de C.________, président,
B.________, vice-président, et J.________, secrétaire. Ce
dernier a, par lettre du 15 novembre 1996, résilié son
mandat d'administrateur avec effet immédiat, mais ses

pouvoirs n'ont pas été radiés du registre du commerce. De
son côté, par lettre du 25 juillet 1997, B.________ a mis
fin au contrat de travail qui le liait à la société
U.________ SA, pour le 31 octobre 1997.
La faillite de cette dernière a été prononcée par le
Président du Tribunal du Val-de-Ruz, avec effet au 2 juin
1998. Le 4 septembre 1998, la caisse a produit des créances
pour un montant total de 12 041 fr. 75, correspondant no-
tamment à des cotisations paritaires restées impayées. La
faillite a été clôturée le 8 février 1999 et la caisse
s'est vu délivrer un acte de défaut de biens pour le mon-
tant de sa production.
Par trois décisions séparées du 3 mars 1999, elle a
réclamé aux trois prénommés le paiement de la somme de
10 892 fr. 15 représentant le dommage qu'elle a subi jus-
qu'au jour de la faillite.
B.________ et J.________ ont fait opposition à la
décision les concernant.

B.- Par écriture du 23 avril 1999, la caisse a porté
les cas devant le Tribunal administratif du canton de Neu-
châtel, en concluant à ce que B.________ et J.________
soient solidairement condamnés à lui payer la somme de
10 892 fr. 15 ou à réparer le dommage qu'elle a subi dans
la faillite, «à tout le moins jusqu'à concurrence du
montant resté impayé au jour de la démission effective des
administrateurs».
Par jugement du 24 janvier 2000, la juridiction can-
tonale a partiellement donné suite à la demande. D'une
part, elle a admis le principe de la responsabilité soli-
daire des prénommés envers la caisse jusqu'au 15 novembre
1996 et celui de la responsabilité personnelle de
B.________ jusqu'à la date de la faillite. D'autre part,
elle a renvoyé la cause à la caisse pour qu'elle détermine
le montant exact du dommage et rende une nouvelle décision
sujette à recours.

C.- B.________ interjette recours de droit adminis-
tratif contre ce jugement dont il demande l'annulation, en
concluant, sous suite de frais et dépens, principalement à
ce que sa responsabilité dans le dommage de la caisse soit
niée. Subsidiairement, il sollicite la réforme du jugement
cantonal, en ce sens que sa responsabilité n'est engagée
que jusqu'au 31 octobre 1997. Il demande en outre à la Cour
de céans d'accorder l'effet suspensif à son recours.
La caisse intimée conclut au rejet du recours. Dans sa
détermination du 25 avril 2000, J.________ s'est déclaré
peu concerné par l'action de la caisse, dès lors que, selon
lui, toutes les cotisations paritaires proprement dites
étaient payées, à la date où il a résilié son mandat
d'administrateur. L'Office fédéral des assurances sociales
ne s'est pas déterminé.

Considérant en droit :

1.- La décision litigieuse n'ayant pas pour objet
l'octroi ou le refus de prestations d'assurance, le Tribu-
nal fédéral des assurances doit se borner à examiner si les
premiers juges ont violé le droit fédéral, y compris par
l'excès ou par l'abus de leur pouvoir d'appréciation, ou si
les faits pertinents ont été constatés d'une manière mani-
festement inexacte ou incomplète, ou s'ils ont été établis
au mépris de règles essentielles de procédure (art. 132 en
corrélation avec les art. 104 let. a et b et 105 al. 2 OJ).

2.- Le jugement entrepris expose de manière exacte et
complète les dispositions légales et réglementaires, ainsi
que les principes jurisprudentiels applicables au présent
cas. Il suffit donc d'y renvoyer.

3.- Le recourant demande tout d'abord au Tribunal
fédéral des assurances d'accorder l'effet suspensif à son

recours. Il explique que la caisse a rendu, le 2 février
2000, une décision en réparation du dommage à son encontre
et que le délai pour recourir contre cet acte administratif
échoit le 3 mars 2000. En réalité, le recourant voudrait
obtenir la suspension du délai de recours contre la déci-
sion que l'intimée lui a notifiée le 2 février 2000, en
application du chiffre 2 du dispositif du jugement attaqué.
Or, cette requête sort de l'objet de la contestation, qui
est déterminé par la décision de la caisse du 3 mars 1999
dirigée contre lui (cf. ATF 119 Ib 36 consid. 1b, 118 V 313
consid. 3b et les références).
Par ailleurs, il n'appartient pas au Tribunal fédéral
des assurances de dire s'il était opportun, pour la caisse,
de rendre une nouvelle décision alors que le jugement can-
tonal n'était pas entré en force. De toute manière, le
recourant pouvait demander au juge saisi du recours formé
contre cette nouvelle décision de suspendre l'instruction
jusqu'à droit connu dans la présente procédure.
La requête d'effet suspensif est dès lors sans objet.

4.- a) Le recourant fait valoir en premier lieu le
moyen tiré de la péremption du droit de la caisse de lui
réclamer la réparation du dommage qu'elle invoque. La cour
cantonale aurait violé son droit d'être entendu et abusé de
son pouvoir d'appréciation, en considérant que le délai de
l'art. 82 al. 1 RAVS avait été respecté, sans procéder à un
examen de cette question.

b) En l'espèce, le recourant avait admis, dans sa
réponse du 15 juin 1999 devant la cour cantonale - par son
mandataire de l'époque - que la caisse avait bien agi dans
le délai légal d'une année à compter du moment à partir
duquel elle pouvait avoir connaissance du dommage. Il ne
saurait dès lors se prévaloir d'une violation de son droit
d'être entendu sur ce point.

Par ailleurs, on doit retenir que, conformément à la
règle générale applicable en matière de faillite (ATF
121 III 388 consid. 3b et les références), la caisse de
compensation a eu connaissance de son dommage, au plus tôt,
au moment du dépôt de l'état de collocation. Or, le dossier
ne contient pas d'information sur la date à laquelle a été
colloquée la créance de la caisse. Ce point n'est pas déci-
sif, dès lors que l'administration a agi dans le délai
d'une année à partir de l'ouverture même de la faillite
(2 juin 1998), dont la date est de toute évidence anté-
rieure à celle de l'état de collocation. En rendant sa
décision le 3 mars 1999, la caisse a donc agi dans le délai
d'une année prévu par l'art. 82 al. 1 RAVS.

5.- a) Les premiers juges ont constaté les faits sui-
vants :
J.________ a cessé d'exercer les fonctions et respon-
sabilités attachées à son mandat d'administrateur à la date
à laquelle il a démissionné du conseil d'administration,
soit le 15 novembre 1996, bien que ses pouvoirs n'aient été
radiés que plus tard du registre du commerce. En revanche,
si B.________ a mis fin au contrat de travail le liant à
U.________ SA pour le 31 octobre 1997, il n'a pas résilié
son mandat d'administrateur et l'on doit considérer qu'il
n'a jamais cessé d'exercer cette charge.
J.________ et B.________ ne pouvaient pas (ou n'au-
raient pas dû) ignorer que les cotisations sociales étaient
payées de façon irrégulière, dès lors qu'elles faisaient,
depuis plusieurs mois, l'objet de sommations de la part de
la caisse. Ils n'ont, cependant, rien entrepris pour remé-
dier à la situation, alors même qu'ils étaient suscepti-
bles, à eux d'eux, d'engager valablement la société. S'ils
se trouvaient dans l'incapacité d'agir dans ce sens en
raison de l'opposition de C.________, ils auraient alors dû
démissionner de leur fonction.

Le montant du dommage réclamé par la caisse comprend,
à tort, des allocations familiales. Par ailleurs, le détail
des postes composant la somme de 10 892 fr. 15 n'est pas
précisé. De surcroît, les relevés de compte déposés par la
caisse ne permettent pas d'établir exactement la part du
dommage dont répondent respectivement J.________ et
B.________.

b) Les allégations du recourant ne sont pas de nature
à démontrer que les faits constatés par la juridiction
cantonale sont manifestement inexacts ou incomplets, ou
qu'ils ont été établis au mépris de règles essentielles de
procédure. Par ailleurs, le recourant n'invoque aucun argu-
ment apte à infirmer que les conditions de l'art. 52 LAVS
sont remplies. Sa seule argumentation sur le fond consiste
à dire que la cour cantonale a violé cette disposition en
le considérant comme un organe au-delà du 31 octobre 1997.

c) D'après la jurisprudence, la responsabilité de
l'administrateur dure, en règle ordinaire, jusqu'au moment
de sa sortie (par suite de démission ou de révocation) du
conseil d'administration et non jusqu'au moment de la ra-
diation de ses pouvoirs au registre du commerce (arrêt C.
du 19 mai 2000, destiné à la publication, consid. 4a,
H 113/99; ATF 123 V 173 consid. 3a et les références). En
l'espèce, J.________ et le recourant étaient encore ins-
crits au registre du commerce comme membres du conseil
d'administration au moment de la faillite de la société.
Contrairement à J.________, le recourant n'a pas résilié
son mandat d'administrateur. On ne saurait donc le suivre
dans son argumentation selon laquelle la résiliation de son
contrat de travail pour le 31 octobre 1997 impliquait celle
(avec effet immédiat) de son mandat d'administrateur. En
effet, la régularité d'une démission suppose une manifesta-
tion unilatérale de volonté dans ce sens (Kommentar zum
Schweizerischen Privatrecht, Obligationenrecht II,

[Honsell/Vogt/Watter Éd.], Bâle 1994, Dreifuss/Lebrecht,
N. 1 et 2 ad art. 705 CO; Bürgi, Zürcher Kommentar, 1969,
N. 7 ad art. 705 CO). Cette condition n'est pas remplie en
l'occurrence, dès lors que la lettre du 25 juillet 1997 du
recourant ne se réfère qu'au contrat de travail, par ses
termes et son contenu. L'allégué de son précédent mandatai-
re selon lequel «à tort il était convaincu en effet qu'en
résiliant son contrat de travail, il sortait automatique-
ment du conseil d'administration de la société» confirme
bien que la lettre du recourant du 25 juillet 1997 ne
constituait pas une manifestation de volonté de sa part de
démissionner de ses fonctions d'administrateur (lettre de
Me B.________ du 20 avril 1999 à la caisse).

d) La situation du recourant doit être distinguée de
celle de l'arrêt C. du 19 mai 2000, déjà cité, où le con-
trat de travail avait été résilié par l'employeur, dans un
contexte litigieux. Dans ce dernier cas, le Tribunal fédé-
ral des assurances a jugé que n'était pas soumis à la res-
ponsabilité de l'art. 52 LAVS - dans le cadre d'une fail-
lite survenue en 1994 - l'employé dont le contrat de tra-
vail avait été résilié par la société en 1981, sans que le
mandat d'administrateur de l'intéressé ait été révoqué. La
Cour de céans a admis que dans une telle situation, si la
société avait procédé à une réélection formelle, le mandat
de l'administrateur concerné n'aurait de toute évidence pas
été renouvelé; on pouvait dès lors considérer qu'il avait
pris fin à l'expiration de la durée (statutaire ou légale)
des fonctions de l'intéressé qui suivait la fin du contrat
de travail (consid. 4b de l'arrêt précité).

e) Par ailleurs, contrairement à ce que soutient le
recourant, la cour cantonale n'a pas statué ultra petita,
dans la mesure où l'intimée a conclu à ce que B.________ et
J.________ soient condamnés solidairement à lui payer soit

le montant de 10 892 fr. 15 ou (alternativement) le montant
resté impayé au jour de leur démission effective de leur
fonction.
Sur le vu des constatations de la juridiction cantona-
le, qui lient le Tribunal fédéral des assurances, force est
dès lors de considérer que le recourant a gravement violé
les devoirs que lui imposait son mandat de membre du con-
seil d'administration. Cela étant, sa responsabilité est
engagée sous l'angle de l'art. 52 LAVS, jusqu'à la date de
la faillite de la société. Le recours se révèle dès lors
mal fondé.

6.- La procédure n'est pas gratuite (art. 134 OJ a
contrario). Le recourant, qui succombe, supportera les
frais de justice (art. 156 al. 1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. La requête d'effet suspensif est irrecevable.

II. Le recours est rejeté.

III. Les frais de justice, d'un montant total de 1000 fr.,
sont mis à la charge du recourant et sont compensés
avec l'avance de frais qu'il a effectuée.

IV. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tri-
bunal administratif de la République et canton de
Neuchâtel, à l'Office fédéral des assurances sociales
et à J.________.

Lucerne, le 11 septembre 2000

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la IIIe chambre :

La Greffière :


Synthèse
Numéro d'arrêt : H.84/00
Date de la décision : 11/09/2000
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-09-11;h.84.00 ?
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