La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/09/2000 | SUISSE | N°4P.62/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 08 septembre 2000, 4P.62/2000


«AZA 3»

4P.62/2000

Ie C O U R C I V I L E
****************************

8 septembre 2000

Composition de la Cour: MM. Walter, président, Leu et
Corboz,
juges. Greffière: Mme Godat Zimmermann.

_________________

Statuant sur le recours de droit public formé
par

Marcelino R o d r i g u e z, rue du Jura 16, à Delémont,

contre

le jugement rendu le 9 février 2000 par la Cour civile du
Tribunal cantonal de la République et canton du Jura dans
la cause qui oppose

le recourant aux hoirs de Rémy
E s c h m a n n, soit: 1. Marie-Louise Eschmann-Vogel, à
Delémont, 2. Jacques Eschmann, à Fr...

«AZA 3»

4P.62/2000

Ie C O U R C I V I L E
****************************

8 septembre 2000

Composition de la Cour: MM. Walter, président, Leu et
Corboz,
juges. Greffière: Mme Godat Zimmermann.

_________________

Statuant sur le recours de droit public formé
par

Marcelino R o d r i g u e z, rue du Jura 16, à Delémont,

contre

le jugement rendu le 9 février 2000 par la Cour civile du
Tribunal cantonal de la République et canton du Jura dans
la cause qui oppose le recourant aux hoirs de Rémy
E s c h m a n n, soit: 1. Marie-Louise Eschmann-Vogel, à
Delémont, 2. Jacques Eschmann, à Fribourg, 3. Evelyne
Bykov-Eschmann, à Delémont, 4. Marie-Anne
Schneider-Eschmann,
à Delémont, 5. Véronique Milani-Eschmann, au Bémont, 6. Vi-
viane Wolff-Eschmann, à Courroux, tous représentés par Me
François Boillat, avocat à Delémont;

(art. 9 Cst.; arbitraire dans l'appréciation des preuves)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- Le 31 mai 1990, Rémy Eschmann a confié à Marce-
lino Rodriguez les travaux de construction d'une annexe con-
tiguë à sa villa; selon le devis établi par l'entrepreneur
les 28 mars/14 mai 1990, le prix des travaux
d'agrandissement
se montait à 61 955 fr. Le chantier a duré du 20 août 1990
au
printemps 1991. L'entrepreneur a également effectué des tra-
vaux non prévus par l'offre précitée, notamment dans
l'ancien
bâtiment.

Rodriguez a adressé trois factures à Eschmann pour
un montant total de 168 541 fr.30, soit:

- facture du 21 décembre 1990 31 517 fr.
- facture du 28 février 1994 90 463 fr.60
- facture du 28 février 1994 46 560 fr.70

Les acomptes versés s'élèvent à 103 105 fr. Eschmann
a contesté devoir un montant supérieur.

B.- Par demande du 3 avril 1996, Rodriguez a ouvert
action en paiement contre Eschmann devant la Cour civile du
Tribunal cantonal du canton du Jura; dans ses dernières con-
clusions, le demandeur réclamait le versement du montant de
63 754 fr.55 avec intérêts à 5% dès le 1er avril 1994, ainsi
que le remboursement de frais de poursuites par 98 fr.

La cour cantonale a désigné Roméo Sironi, architec-
te, comme expert chargé d'examiner la facturation des
travaux
exécutés par l'entreprise Rodriguez. L'expert a rendu son
rapport le 15 avril 1999 et répondu aux questions complémen-
taires du demandeur en date du 10 août 1999. Il arrive à la
conclusion que les factures de l'entrepreneur sont
justifiées

à concurrence de 113 356 fr.60, somme de laquelle il
convient
de déduire le montant de 2120 fr.50 représentant les fourni-
tures payées par le maître de l'ouvrage.

Par jugement du 9 février 2000, la Cour civile a
condamné le défendeur à payer au demandeur la somme de
6083 fr. avec intérêts à 5% dès le 25 mai 1994, ainsi que
25 fr. de frais de poursuites. Reprenant les conclusions de
l'expert, les juges cantonaux sont partis du montant arrondi
de 111 416 fr. (113 356 fr.60 moins 2120 fr.50) dont ils ont
retranché les acomptes versés et un escompte de 2% sur
111 416 fr.

C.- Rodriguez forme un recours de droit public. Il
conclut à l'annulation du jugement du 9 février 2000.

Eschmann est décédé le 17 février 2000, laissant
pour héritiers son épouse et leurs cinq enfants. L'hoirie
Eschmann propose le rejet du recours.

Invitée à se prononcer sur le recours, la cour can-
tonale confirme les considérants de son jugement.

Après que la réponse lui a été communiquée, le re-
courant a écrit au Tribunal fédéral pour contester l'affirma-
tion des intimés selon laquelle il aurait été d'accord avec
les métrés effectués par l'expert. Il a joint à sa lettre
les
factures des matériaux employés sur le chantier Eschmann,
ainsi que le relevé des heures de main d'oeuvre consacrées
auxdits travaux.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- En tant qu'héritiers d'un défendeur condamné à
payer un montant très largement inférieur à celui réclamé
par
le demandeur, la veuve et les enfants de Rémy Eschmann se-
raient indéniablement touchés par une annulation du jugement
attaqué. Ils revêtent sans aucun doute la qualité d'intimés
dans la procédure de recours de droit public (cf. art. 93
al.
1 OJ; Messmer/Imboden, Die eidgenössischen Rechtsmittel in
Zivilsachen, p. 202).

2.- Aucun échange supplémentaire d'écritures n'a été
ordonné après le dépôt de la réponse des intimés (cf. art.
93
al. 3 OJ). La lettre du recourant du 13 juin 2000 et les
pièces qui l'accompagnaient sont ainsi d'emblée irrecevables.

3.- a) Invoquant l'art. 8 (sic) Cst., le recourant
reproche à la cour cantonale d'avoir établi les faits de
manière arbitraire, en contradiction évidente avec la situa-
tion de fait telle qu'elle ressort du dossier. Il est d'avis
que l'expertise judiciaire sur laquelle les juges jurassiens
se sont fondés est entachée d'irrégularités et d'inexactitu-
des qui justifiaient de donner suite à la requête de contre-
expertise formée lors de l'audience du 9 février 2000 et
d'admettre les pièces déposées en relation avec cette deman-
de.

b) Le recourant se prévaut de l'art. 8 Cst. relatif
à l'égalité. Or, tout son recours s'articule manifestement
autour du grief d'appréciation arbitraire des preuves, qui
relève de l'art. 9 Cst. Dans la mesure où l'intention du
recourant ressort clairement de son mémoire, cette inadver-
tance ne porte pas à conséquence.

L'interdiction de l'arbitraire, déduite de l'art. 4
aCst., est expressément consacrée à l'art. 9 Cst., déjà en
vigueur lors du prononcé du jugement attaqué. Selon la juris-
prudence rendue sous l'ancien droit et toujours valable ac-
tuellement, une décision n'est pas arbitraire du seul fait
qu'une autre solution pourrait se défendre, voire même être
préférable. Le Tribunal fédéral n'annulera la décision atta-
quée que lorsque celle-ci est manifestement insoutenable,
qu'elle se trouve en contradiction évidente avec la
situation
de fait, qu'elle viole gravement une norme ou un principe
juridique clair et indiscuté ou encore lorsqu'elle heurte de
manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité.
Par ailleurs, il ne suffit pas que la motivation critiquée
soit insoutenable; encore faut-il que la décision apparaisse
arbitraire dans son résultat (ATF 125 I 166 consid. 2a; 125
II 10 consid. 3a p. 15, 129 consid. 5b p. 134; 124 I 247
consid. 5 p. 250; 124 V 137 consid. 2b).

En matière d'appréciation des preuves, il y a arbi-
traire lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans
raison
sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la
décision,
lorsqu'elle se trompe manifestement sur le sens et la portée
d'un tel élément, ou encore lorsqu'elle tire des constata-
tions insoutenables des éléments recueillis. Il appartient
au
recourant de chercher à démontrer, par une argumentation
précise, que la décision incriminée est insoutenable (art.
90
al. 1 let. b OJ; ATF 122 I 70 consid. 1c p. 73; 119 Ia 197
consid. 1d p. 201; 117 Ia 393 consid. 1c p. 395; 110 Ia 1
consid. 2a p. 3); le Tribunal fédéral n'entre pas en matière
sur les griefs motivés de façon insuffisante ou sur des cri-
tiques purement appellatoires (ATF 125 I 492 consid. 1b p.
495; 117 Ia 412 consid. 1c p. 415).

L'appréciation in concreto de la valeur probante
d'une expertise ressortit au fait. Elle peut donc être revue

dans le cadre d'un recours de droit public pour arbitraire
(cf. ATF 107 II 222 consid. II/2 p. 225 in fine; 103 Ia 55
consid. 1b p. 58; consid. 4b non publié de l'ATF 117 II 47).
Lorsque, faute de posséder les connaissances spécifiques
nécessaires, il ordonne une expertise, le juge n'est en prin-
cipe pas lié par les conclusions de l'expert. Même s'il ap-
précie librement les preuves, il ne saurait toutefois, sans
motifs sérieux (triftig), substituer son opinion à celle de
l'expert; en l'absence de tels motifs, il s'expose au repro-
che d'arbitraire (ATF 118 Ia 144 consid. 1c/bb p. 149; 101
IV
129 consid. 3a; consid. 4a non publié de l'ATF 121 III 274;
arrêt non publié du 12 août 1996, consid. 2a, reproduit in
SJ
1997, p. 58). A l'inverse, s'il éprouve des doutes sur
l'exactitude d'une expertise judiciaire, le juge doit re-
cueillir des preuves supplémentaires, en ordonnant par exem-
ple une expertise complémentaire ou une contre-expertise; en
effet, une décision fondée sur une expertise non concluante
peut être entachée d'arbitraire (ATF 118 Ia 144 consid. 1c
p.
146; arrêt non publié du 27 avril 2000 dans la cause
1P.153/2000, consid. 2b).

Il n'en demeure pas moins que le juge dispose d'un
large pouvoir d'appréciation dans ce domaine. Le Tribunal
fédéral n'admettra un recours pour violation de l'art. 9
Cst.
que si les conclusions que l'autorité cantonale tire d'une
expertise considérée comme concluante se révèlent non seule-
ment inexactes, mais encore insoutenables. Tel est le cas
lorsque l'expert n'a pas répondu aux questions qui lui ont
été posées, lorsque ses conclusions sont contradictoires ou
lorsque l'expertise souffre de défauts évidents et reconnais-
sables sans connaissances spéciales de sorte qu'ils ne de-
vaient pas échapper à l'autorité cantonale (arrêt non publié
du 23 novembre 1994 dans la cause 4P.45/1994, consid. 3a).

4.- a) Dans un considérant des plus succincts, la
cour cantonale s'en est entièrement remise à l'appréciation
de l'expert judiciaire; elle précise qu'aucun motif ne
permet
de mettre en doute ni l'impartialité de l'architecte Sironi,
ni le sérieux avec lequel il a rempli son mandat. Le
jugement
attaqué reprend ainsi le montant de la facture selon métrage
tel que légèrement rectifié par l'expert dans son rapport
complémentaire, soit 113 536 fr. (arrondi); de cette somme,
elle déduit 2120 fr. (arrondi) représentant les fournitures
payées par le maître de l'ouvrage, selon une précision de
l'expert du 7 décembre 1999. Le montant total de la facture
retenu par la Cour civile sur la base de l'expertise s'élève
dès lors à 111 416 fr., sans escompte.

Le recourant adresse à l'expertise divers griefs,
qui seront examinés ci-après. Invoquant au surplus les deux
contre-expertises privées qu'il a déposées dans la procédure
cantonale, il paraît soutenir que le refus d'une contre-
expertise dans ces conditions était arbitraire.

b) Tout d'abord, le recourant fait observer que,
dans son rapport complémentaire, l'expert a corrigé les mon-
tants retenus pour certaines positions et a admis plusieurs
oublis.

Par rapport à l'expertise du 15 avril 1999, l'exper-
tise complémentaire du 10 août 1999 retient une différence
de
1996 fr.85 en faveur du recourant. Contrairement à ce que ce
dernier sous-entend, le fait que ses questions aient conduit
l'expert à rectifier et compléter certains points n'est pas
de nature à établir le caractère insoutenable de l'ensemble
des calculs figurant dans l'expertise. Au contraire, en ad-
mettant partiellement les critiques du recourant, l'expert a
démontré qu'il était prêt à reconnaître ses erreurs, qui

concernaient au demeurant un montant peu important en compa-
raison de la facture globale.

c) Le recourant reproche également à l'expert de
n'avoir pas répondu de manière convaincante à ses questions
dans le rapport complémentaire. L'architecte n'aurait ainsi
pas expliqué pour quelle raison il reprend parfois sans
autre
les montants du devis pour s'en éloigner sur d'autres
postes.
De même, pour les positions 60 et 63, il aurait refusé sans
motif pertinent de prendre en considération les bulletins n°
19, respectivement n° 20, alors qu'il a tenu compte d'autres
bulletins.

Sur le premier point, le recourant n'indique même
pas les postes pour lesquels l'expert n'aurait
arbitrairement
pas pris en compte les prix figurant dans le devis. Sa criti-
que ne répond pas aux exigences de motivation de l'art. 90
al. 1 let. b OJ. Sur le second point, l'expert a dûment ex-
pliqué, à la p. 4 de son rapport complémentaire, qu'il avait
écarté les bulletins n° 19 et 20 - signés du reste
uniquement
par l'entrepreneur, comme les autres bons - parce que les
heures indiquées étaient totalement disproportionnées par
rapport au travail effectué. Là encore, le grief
d'arbitraire
ne peut être que rejeté.

d) Selon le recourant, le prix unitaire de 145 fr.
le m2 retenu par l'expert pour la dalle Lauper (position 86)
est arbitraire, car les parties avaient convenu d'un prix de
250 fr. le m2, comme en témoignerait la modification opérée
sur le devis par le maître de l'ouvrage.

Il convient de noter au passage que le prix unitaire
par m2 admis par l'expert n'est pas de 145 fr., mais de
212 fr.67 (cf. expertise, p. 5). En ce qui concerne un éven-
tuel prix convenu par les parties, il y a lieu de relever
que

celles-ci ont produit chacune une photocopie du devis. Sur
l'exemplaire fourni par le recourant, les prix relatifs aux
travaux de la dalle sur rez ont été tracés et remplacés par
un prix unique de 250 fr. le m2. Cette modification ne se
retrouve toutefois pas sur le document remis par Eschmann;
elle est en outre dépourvue de toute signature. Dans ces
conditions, on ne voit pas que le choix de l'expert de ne
pas
tenir compte du montant de 250 fr. soit insoutenable.

e) Le recourant fait grief à l'expert d'avoir omis
d'inclure, sous position 103 de l'expertise, les matériaux
d'excavation qui résultaient des travaux de réglage à la
main
répertoriés sous position 1.

A la p. 5 de son rapport complémentaire, l'expert a
expliqué que le réglage du fond de fouille inscrit sous posi-
tion 1 n'était pas du creusage et n'avait
donc pas à être
pris en compte sous position 103. L'expert ayant répondu à
la
critique du recourant et le juge n'ayant aucune raison de
mettre en doute l'exactitude de sa réponse, le grief d'arbi-
traire se révèle là aussi mal fondé.

f) Selon le recourant, l'expert a commis une autre
erreur très grave en déduisant de la facture finale, au
titre
des fournitures payées directement par le maître de l'ouvra-
ge, une facture de Matériaux Sabag par 864 fr.50 adressée à
Eschmann; cette facture, dont la production comme moyen de
preuve a été refusée à l'audience du 9 février 2000, porte-
rait sur des carreaux de galandages et des matériaux d'isola-
tion, soit des matériaux qui n'auraient pas été utilisés par
le recourant.

Rien ne permet d'affirmer que l'expert, qui cite la
facture de 864 fr.50 à la p. 3 de son rapport, n'a pas vu ce
document. Au surplus, le recourant se borne à alléguer que
la

spécificité des matériaux mentionnés sur le document incrimi-
né prouve qu'ils ont été employés par d'autres corps de mé-
tier. Sur la base de cette seule affirmation, il n'est à
l'évidence pas possible d'admettre que l'expert a déduit
arbitrairement le montant de 864 fr.50 de la facture totale.

g) Il reste à examiner si les deux contre-expertises
privées produites, qui n'ont juridiquement que la portée
d'allégations de partie, justifiaient la mise en oeuvre
d'une
contre-expertise judiciaire ou étaient de nature à démontrer
que l'expertise Sironi n'était pas concluante (cf. arrêt non
publié du 11 février 1999 dans la cause 6P.158/1998, consid.
3b).

Au préalable, il convient de relever que l'expert a
décidé de procéder à un métrage complet des travaux de maçon-
nerie et de carrelage exécutés par le recourant, après avoir
constaté une grande confusion dans les documents de factura-
tion de l'entrepreneur; les quantités ainsi obtenues ont été
multipliées par les prix du devis pour les prestations fai-
sant l'objet de l'offre, par les prix de l'indice zurichois
au 1er avril 1990 pour les prestations non prévues et par un
prix horaire pour les positions de détail. L'expert a
ensuite
établi, position après position, la facture finale selon le
métrage effectué.

Dans sa réponse du 9 novembre 1999 au complément
d'expertise du 10 août 1999, l'ingénieur Francis Silvant
examine plusieurs positions et, le plus souvent, reprend
le point de vue du recourant. Ainsi, sous position 58, il
explique que l'expert Sironi a procédé aux métrages sans
tenir compte de l'avis du recourant ou, sous position 60,
que
l'entrepreneur a omis de mentionner la fermeture de la fenê-
tre de la cave dans le descriptif du bulletin n° 19 ou enco-
re, sous position 63, que le nombre d'heures inscrites dans

le bulletin n° 20 correspond non seulement à l'ouverture
d'une porte, comme indiqué expressément, mais encore à des
travaux dans la cage d'escalier. A d'autres endroits, l'ingé-
nieur consulté par le recourant se borne à affirmer que les
montants facturés par l'entrepreneur doivent être maintenus
alors que, dans son rapport complémentaire, l'expert avait
expliqué pourquoi ils ne pouvaient l'être. Ainsi en va-t-il
notamment des arasages, de la maçonnerie de pignons, de la
dalle Lauper, de la pose de deux poteaux métalliques ou du
chargement à la main et de l'évacuation à la décharge. En
conclusion, l'orientation manifestement unilatérale du rap-
port Silvant ne permet pas de mettre en doute les
conclusions
de l'expert judiciaire.

Quant à l'analyse à laquelle Rotilio Ingénierie
s'est livrée, elle se révèle très générale. Sans explica-
tions, le bureau d'ingénieurs qualifie de «légère» la partie
de l'expertise judiciaire consacrée aux travaux supplémentai-
res, aux travaux de démolition et aux autres travaux. Sans
remettre en cause la méthode de calcul adoptée par l'expert,
Rotilio Ingénierie suggère d'établir le prix de revient glo-
bal du chantier, par le relevé des fournitures destinées à
l'ouvrage et de la totalité des heures passées sur le chan-
tier. A ses yeux, une telle vérification, que l'ingénieur
consulté désigne pourtant lui-même comme insolite, permet-
trait peut-être de justifier les factures dressées par le
recourant. Il va sans dire que cette argumentation n'est pas
de nature à insinuer le doute sur la qualité du travail de
l'expert judiciaire. Le bureau mis en oeuvre par le
recourant
estime également que l'expertise aurait dû être confiée à
des
«entrepreneurs/maçons», et non à un architecte. Cette criti-
que toute générale n'autorise pas non plus à douter du tra-
vail effectué en l'espèce par l'expert. Au demeurant, la
désignation d'un architecte comme expert n'a pas été contes-
tée par le recourant.

h) En résumé, la cour cantonale n'a éprouvé aucun
doute sur l'exactitude de l'expertise confiée à l'architecte
Sironi. Après examen des divers griefs soulevés par le recou-
rant, il n'apparaît pas qu'elle devait en concevoir. Le ca-
ractère non concluant de l'expertise n'est absolument pas
démontré. Les documents produits par le recourant étant inu-
tilisables, comme l'ingénieur Rotilio le reconnaît du reste,
l'expert judiciaire a procédé, en présence des parties, à un
métrage complet des travaux réalisés par l'entrepreneur. Il
a
ensuite appliqué aux quantités obtenues soit le prix
unitaire
convenu par les parties, soit l'indice zurichois pour les
prestations non prévues, soit un tarif horaire pour les posi-
tions de détail. Ni le choix de la méthode, ni son applica-
tion n'apparaissent arbitraires en l'espèce. L'expert a ré-
pondu de manière complète aux questions, y compris à celles
faisant l'objet de son rapport complémentaire. On ne décèle
par ailleurs pas de contradictions dans les conclusions de
l'expertise qui, de manière générale, n'est pas affectée de
défauts manifestes.

Force est dès lors de constater que le jugement
attaqué ne repose pas sur une appréciation arbitraire des
preuves. Le recours ne peut être que rejeté.

5.- Vu l'issue de la procédure, le recourant suppor-
tera les frais judiciaires (art. 156 al. 1 OJ) et versera
aux
intimés une indemnité à titre de dépens (art. 159 al. 1 OJ).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Rejette le recours;

2. Met un émolument judiciaire de 2500 fr. à la
charge du recourant;

3. Dit que le recourant versera aux intimés, créan-
ciers solidaires, une indemnité de 3000 fr. à titre de dé-
pens;

4. Communique le présent arrêt en copie aux parties
et à la Cour civile du Tribunal cantonal de la République et
canton du Jura.

____________

Lausanne, le 8 septembre 2000
ECH

Au nom de la Ie Cour civile
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président,

La Greffière,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4P.62/2000
Date de la décision : 08/09/2000
1re cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-09-08;4p.62.2000 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award