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08/09/2000 | SUISSE | N°1P.240/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 08 septembre 2000, 1P.240/2000


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1P.240/2000

Ie C O U R D E D R O I T P U B L I C
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8 septembre 2000

Composition de la Cour: MM. les Juges Aemisegger, Président,
Féraud et Favre. Greffier: M. Kurz.

Statuant sur le recours de droit public
formé par

la Masse en faillite de A.________ , p.a. Office des pour-
suites et des faillites Arve-Lac, à Genève, représentée par
Me Eric C. Stampfli, avocat à Genève,

contre

l'arrêt rendu le 8 février 2000 par le Tribun

al administra-
tif du canton de Genève, dans la cause qui oppose la recou-
rante et B.________ Sàrl , représentée pa...

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1P.240/2000

Ie C O U R D E D R O I T P U B L I C
**********************************************

8 septembre 2000

Composition de la Cour: MM. les Juges Aemisegger, Président,
Féraud et Favre. Greffier: M. Kurz.

Statuant sur le recours de droit public
formé par

la Masse en faillite de A.________ , p.a. Office des pour-
suites et des faillites Arve-Lac, à Genève, représentée par
Me Eric C. Stampfli, avocat à Genève,

contre

l'arrêt rendu le 8 février 2000 par le Tribunal administra-
tif du canton de Genève, dans la cause qui oppose la recou-
rante et B.________ Sàrl , représentée par Mes François
Bellanger et Olivier Péclard, avocats à Genève, à
l'A s l o c a , association genevoise de défense des loca-
taires, à Genève, représentée par Me Karin Grobet Thorens,
avocate à Genève, et au Département de l'aménagement, de
l'équipement et du logement du canton de G e n è v e ;

(interdiction d'aliéner un appartement)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- Propriétaire de l'immeuble situé à D.________, à
Genève (parcelle n° 4304 de la commune de Genève) et consti-
tué dès 1983 en propriété par étage, la société A.________
est tombée en faillite le 15 juin 1995. Liquidateur de la
masse, l'Office des poursuites et des faillites Arve-Lac
(ci-après: l'OP) a été amené à vendre de gré à gré les dif-
férentes parts de copropriété. Le 23 mars 1998, il a requis
du Département genevois de l'aménagement, de l'équipement et
du logement (ci-après: le Département) la vente de la part
n° 3.02, correspondant à un appartement de quatre pièces au
premier étage, à la société B.________ Sàrl. L'autorisation
a été accordée le 9 avril 1998.

B.- Sur recours de l'Association genevoise de défense
des locataires (Asloca), la Commission de recours en matière
de construction (ci-après: la Commission) a annulé cette
autorisation et renvoyé la cause au Département afin qu'il
examine si une vente de gré à gré était admissible, ou s'il
était préférable de n'autoriser qu'une vente en bloc, compte
tenu notamment du nombre de parts de copropriété détenues
par A.________.

C.- Par arrêt du 8 février 2000, le Tribunal adminis-
tratif genevois a rejeté les recours formés par B.________
Sàrl et la Masse en faillite de A.________: l'aliénation
forcée d'appartements pouvait être soumise à autorisation en
vertu de la LDTR et, même si aucune des conditions prévues
par la loi n'était réalisée, il convenait encore d'effectuer
une pesée des intérêts en présence.

D.- Agissant par la voie du recours de droit public, la
Masse en faillite de A.________ demande au Tribunal fédéral

d'annuler l'arrêt cantonal, frais et dépens à la charge de
l'Asloca.

L'Asloca conclut au rejet du recours, de même que le
Département. Le Tribunal administratif persiste dans les
termes de son arrêt. B.________ Sàrl, qui a également re-
couru contre l'arrêt attaqué, conclut à l'admission du re-
cours.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- Le Tribunal fédéral examine d'office la recevabili-
té des recours qui lui sont soumis (ATF 126 I 81 consid. 1,
125 I 253 consid. 1a, 412 consid. 1a p. 414 et les arrêts
cités).

a) Selon l'art. 87 OJ dans sa teneur du 8 octobre 1999,
entrée en vigueur le 1er mars 2000 (RO 2000 p. 416-418), le
recours de droit public est recevable contre les décisions
préjudicielles et incidentes sur la compétence et sur les
demandes de récusation, prises séparément; ces décisions ne
peuvent être attaquées ultérieurement (al. 1); le recours de
droit public est recevable contre d'autres décisions préju-
dicielles et incidentes prises séparément s'il peut en ré-
sulter un dommage irréparable (al. 2); lorsque le recours de
droit public n'est pas recevable selon l'art. 87 al. 2 OJ ou
qu'il n'a pas été utilisé, les décisions préjudicielles et
incidentes peuvent être attaquées avec la décision finale
(al. 3). La novelle du 8 octobre 1999 a pour effet d'étendre
le champ d'application de l'art. 87 OJ à tous les recours de
droit public formés contre des décisions préjudicielles et
incidentes, alors que l'ancien art. 87 OJ s'appliquait uni-
quement aux recours formés pour la violation de l'art. 4
aCst. (Message du 11 août 1999, FF 1999 p. 7145, 7160).

b) En l'espèce, le recours a été formé après l'entrée
en vigueur du nouvel art. 87 OJ. L'arrêt attaqué a été rendu
le 8 février 2000, mais n'a été notifié que le 17 mars 2000.
Selon un principe général, les dispositions de procédure
s'appliquent dès leur entrée en vigueur aux instances encore
pendantes (Grisel, Traité de droit administratif, Neuchâtel
1984, p. 155 et la jurisprudence citée; Moor, Droit adminis-
tratif, Berne 1988 I, p. 146; Gygi, Verwaltungsrecht, Berne
1986, p. 112 s.). La jurisprudence, fondée sur le principe
de la proportionnalité, fait certaines exceptions à cette
règle par exemple lorsqu'un recours a été déposé sous l'em-
pire de l'ancien droit, et que son examen a été indûment re-
tardé (cf. ATF 107 Ib 133 consid. 2, 101 Ib 297). Le recours
de droit public a été déposé après l'entrée en vigueur du
nouvel art. 87 OJ. Le principe de la proportionnalité n'exi-
ge pas l'application de l'ancienne disposition, plus favora-
ble, car, en cas d'irrecevabilité du recours, son auteur au-
ra encore la faculté de recourir contre la décision finale
(art. 87 al. 3 OJ).

c) Une décision est finale, au sens de l'art. 87 OJ,
lorsqu'elle met un terme à la procédure dans laquelle elle
s'inscrit, et incidente lorsqu'elle ne représente qu'une
étape sur la voie de la décision finale (ATF 122 I 39 con-
sid. 1a/aa p. 41 et les arrêts cités).

En l'espèce, le Tribunal administratif était saisi d'un
recours dirigé contre une décision de la Commission, qui a
annulé l'autorisation de vente et renvoyé la cause au Dépar-
tement, afin que ce dernier instruise et se détermine sur la
possibilité d'une vente de gré à gré. Il s'agit dès lors
d'une décision de renvoi qui ne met nullement fin à la pro-
cédure d'autorisation et est, partant, incidente (ATF 117 Ia
251 consid. 1a p. 253 et la jurisprudence citée). Le Tribu-
nal administratif a certes émis des considérations à propos
des intérêts respectifs du vendeur et de l'acquéreur de

l'appartement, au regard de l'intérêt public au maintien de
l'affectation locative. Néanmoins, outre que ces considéra-
tions sont d'ordre général, la cour cantonale ne paraît pas
avoir procédé à l'instruction requise par la Commission dans
sa décision de renvoi. L'arrêt cantonal, qui confirme pure-
ment et simplement la décision de la Commission, constitue
dès lors lui aussi un arrêt de renvoi. Le Département semble
au surplus disposer encore d'une certaine marge de manoeuvre
dans l'évaluation des intérêts en présence, de sorte que le
refus opposé à la recourante n'apparaît pas définitif. Il y
a lieu dès lors de s'interroger sur l'existence d'un préju-
dice irréparable au sens de l'art. 87 OJ.

d) Un tel préjudice irréparable n'est réalisé que lors-
que l'intéressé subit un dommage qu'une décision favorable
sur le fond ne ferait pas disparaître complètement. Le dom-
mage doit en outre être de nature juridique, un inconvénient
matériel, comme par exemple l'allongement de la procédure,
étant insuffisant (ATF 122 I 39 consid. 1a/bb p. 42). Or,
en dépit des considérations émises par le Tribunal adminis-
tratif concernant les intérêts respectifs des vendeur et
acheteur de l'appartement, le Département devra encore pro-
céder à une instruction relative à la possibilité de vendre
en bloc, et à une nouvelle pesée des intérêts. L'octroi de
l'autorisation ferait entièrement cesser le préjudice ac-
tuel. Par ailleurs, en cas de refus, la recourante aura en-
core la faculté de recourir en reprenant intégralement, au
besoin, l'argumentation soulevée dans son recours de droit
public.

2.- Sur le vu de ce qui précède, le recours doit être
déclaré irrecevable. Conformément à l'art. 156 al. 1 OJ, un
émolument judiciaire réduit est mis à la charge de la recou-
rante, de même qu'une indemnité de dépens, elle aussi rédui-
te, allouée à l'Asloca, intimée, qui obtient gain de cause
(art. 159 al. 1 OJ).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l ,

vu l'art. 36a OJ:

1. Déclare le recours irrecevable.

2. Met à la charge de la recourante un émolument
judiciaire de 2000 fr.

3. Alloue à l'Asloca une indemnité de dépens de
1000 fr., à la charge de la recourante.

4. Communique le présent arrêt en copie aux manda-
taires des parties, au Département de l'aménagement, de
l'équipement et du logement et au Tribunal administratif
du canton de Genève.

Lausanne, le 8 septembre 2000
KUR/mnv

Au nom de la Ie Cour de droit public
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président,

Le Greffier,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 1P.240/2000
Date de la décision : 08/09/2000
1re cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-09-08;1p.240.2000 ?
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