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05/09/2000 | SUISSE | N°6S.565/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 05 septembre 2000, 6S.565/2000


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6S.565/2000/ROD

C O U R D E C A S S A T I O N P E N A L E
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5 septembre 2000

Composition de la Cour: M. Schubarth, Président, Président
du Tribunal fédéral, MM. Schneider et Kolly, Juges.
Greffier: M. Fink.
__________

Statuant sur le pourvoi en nullité
formé par

X.________, représenté par Me Cyrille Piguet, avocat à
Lausanne,

contre

l'arrêt rendu le 24 janvier 2000 par la Cour de cassa-
tion pénale du Tribunal

cantonal vaudois dans la cause
qui oppose le recourant au Ministère public du canton de
V a u d;

(escroquerie; fixat...

«»
6S.565/2000/ROD

C O U R D E C A S S A T I O N P E N A L E
*************************************************

5 septembre 2000

Composition de la Cour: M. Schubarth, Président, Président
du Tribunal fédéral, MM. Schneider et Kolly, Juges.
Greffier: M. Fink.
__________

Statuant sur le pourvoi en nullité
formé par

X.________, représenté par Me Cyrille Piguet, avocat à
Lausanne,

contre

l'arrêt rendu le 24 janvier 2000 par la Cour de cassa-
tion pénale du Tribunal cantonal vaudois dans la cause
qui oppose le recourant au Ministère public du canton de
V a u d;

(escroquerie; fixation de la peine, art. 66 bis CP)

Considérant en fait et en droit:

1.- Par un jugement du 23 septembre 1999, le
Tribunal correctionnel du district de Lausanne a condamné
X.________ pour escroquerie à une peine de 5 mois d'em-
prisonnement avec sursis durant 4 ans.

2.- Statuant le 24 janvier 2000, la Cour de
cassation pénale du Tribunal cantonal vaudois a rejeté le
recours du condamné. Les faits retenus à la charge de
celui-ci sont en résumé les suivants.

L'accusé était travailleur social polyvalent au
service d'une fondation dont l'un des buts est la réin-
sertion professionnelle de personnes alcooliques. Il y a
retrouvé un ami de longue date, qui suivait une cure et
devint le "référent" de celui-ci. Il lui a conseillé de
vendre sa voiture et obtint de son protégé, qui l'admi-
rait beaucoup, deux prêts successifs de 2000 fr. en in-
voquant des frais professionnels à rembourser par la
fondation.

Le prêteur a tenté en vain d'obtenir la restitu-
tion de son argent puis a informé la direction de la
fondation des faits. Celle-ci a considéré que son employé
avait agi de façon "totalement contraire à la déontologie
professionnelle" et l'a congédié avec effet immédiat le
12 décembre 1996.

3.- En temps utile, le condamné a déclaré se
pourvoir en nullité au Tribunal fédéral. Par lettre du
22 mars 2000, son avocat d'alors a informé le président

de la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal
vaudois que le pourvoi était retiré.

4.- Le 13 avril 2000, l'avocat actuel du condam-
né a écrit au Tribunal cantonal que le retrait du pourvoi
était nul, car son confrère n'était pas mandaté pour
cette question précise et il y avait eu une confusion à
l'origine de cette erreur.

5.- Dans le délai de 20 jours prévu à l'art. 272
al. 2 PPF, le recourant a motivé son pourvoi. D'après
lui, en résumé, l'autorité cantonale aurait dû appliquer
l'art. 66 bis CP puisque la perte de l'emploi résultant
de l'escroquerie serait une punition suffisante. La fonc-
tion expiatoire de la peine serait déjà remplie (ATF 117
IV 245 consid. 2a p. 248).

Le condamné conclut à l'annulation de l'arrêt du
24 janvier 2000 et au renvoi de la cause aux instances
cantonales pour qu'elles le libèrent de toute peine ou
qu'elles la réduisent librement sur la base de l'art.
66 bis CP.

Le recourant sollicite l'effet suspensif.

6.- La question de la portée du retrait du
pourvoi par l'ancien avocat du recourant, qui aurait agi
sans mandat et par erreur, peut demeurer indécise, car
les conclusions présentées sont mal fondées pour les
motifs qui suivent.

7.- a) Selon l'art. 66 bis al. 1 CP, si l'auteur
a été atteint directement par les conséquences de son
acte au point qu'une peine serait inappropriée, l'auto-
rité compétente renoncera à le poursuivre, à le renvoyer
devant un tribunal ou à lui infliger une peine. L'at-
teinte subie par l'auteur doit être en relation directe
avec les conséquences de son acte délictueux (colpito
dalle conseguenze dirette del suo atto; durch die
unmittelbaren Folgen seiner Tat ... betroffen).

La jurisprudence publiée se rapporte à des cas où
le délinquant a subi des atteintes physiques, à la suite
de son assoupissement au volant ou de coups de feu tirés
par la police lors d'une prise d'otage (ATF 117 IV 245;
121 IV 162); il peut s'agir également d'atteintes psycho-
logiques, comme celles qui affectent une mère de famille
devenue veuve lors d'un accident de la circulation dont
elle est responsable (ATF 119 IV 280). Dans ces cas,
l'auteur porte atteinte à un bien pénalement protégé - la
sécurité de la route, la liberté, la vie - et il est, du
même coup, touché par les conséquences de l'atteinte à ce
bien (les lésions corporelles dues à l'accident, celles
causées par les balles de la police défendant la liberté
de l'otage, le deuil résultant d'un dépassement téméraire
commis en voiture). Il existe donc un lien étroit entre
le bien pénalement protégé par la norme pénale transgres-
sée et l'atteinte subie par le délinquant. Celui-ci est
ainsi touché de manière directe par les conséquences de
son acte délictueux.

D'après la doctrine, l'art. 66 bis CP n'est pas
applicable en présence de conséquences indirectes de
l'infraction telles que les désagréments dus à l'ouver-
ture d'une instruction pénale contre l'auteur, la répa-
ration du préjudice, le paiement des frais de procédure,
le divorce et la perte de l'emploi due à l'acte délic-

tueux (Rehberg, StGB - commentaire de poche - Zurich
1999, art. 66 bis; Trechsel, Kurzkommentar, 2e éd. Zurich
1997, art. 66 bis n. 2; Favre, Pellet, Stoudmann, Code
pénal annoté, Lausanne 1997, art. 66 bis n. 1; Rehberg,
Strafrecht II, Zurich 1994, p. 69). D'après les arrêts
cantonaux cités notamment par Favre, Pellet, Stoudmann
(loc. cit.), il semble qu'un préjudice purement écono-
mique subi par l'auteur ne justifierait pas l'application
de l'art. 66 bis CP.

b) En l'espèce, le licenciement du recourant
n'est pas en relation suffisamment directe avec
l'escroquerie commise, pour imposer l'application de
l'art. 66 bis CP.

En effet, le bien pénalement protégé ici est le
patrimoine de la victime; or, le licenciement n'avait pas
pour but d'aider la victime à défendre son bien, au con-
traire de l'intervention de la police lors de la prise
d'otage précitée. Le licenciement ne résulte pas non plus
immédiatement - c'est-à-dire sans l'intervention d'autrui
et sans délai - de l'atteinte portée par l'acte de
l'escroc au patrimoine de la dupe, alors que, dans les
cas d'accidents de la circulation objets de la juris-
prudence citée, l'atteinte au bien pénalement protégé a
immédiatement touché son auteur.

Ainsi, on doit admettre que la perte de l'emploi
du recourant n'est pas une conséquence de son acte qui
l'atteint directement, au sens de l'art. 66 bis CP. Dès
lors, l'autorité cantonale n'a pas violé le droit fédéral
en n'examinant pas l'éventuelle application de cette
disposition.

Le pourvoi doit être rejeté, dans la mesure où il
est recevable.

8.- Un émolument judiciaire est mis à la charge
du recourant qui n'obtient pas gain de cause.

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l ,

1. Rejette le pourvoi dans la mesure où il est
recevable;

2. Met à la charge du recourant un émolument
judiciaire de 2000 fr.;

3. Communique le présent arrêt en copie au manda-
taire du recourant, au Ministère public du canton de Vaud
et à la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal
vaudois.
__________

Lausanne, le 5 septembre 2000

Au nom de la Cour de cassation pénale
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président,

Le Greffier,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 6S.565/2000
Date de la décision : 05/09/2000
Cour de cassation pénale

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-09-05;6s.565.2000 ?
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