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05/09/2000 | SUISSE | N°1P.270/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 05 septembre 2000, 1P.270/2000


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1P.270/2000

Ie C O U R D E D R O I T P U B L I C
**********************************************

5 septembre 2000

Composition de la Cour: MM. les Juges Aemisegger, Président,
Féraud et Mme Pont Veuthey, Juge suppléante.
Greffier: M. Parmelin.

Statuant sur le recours de droit public
formé par

A.________ , représenté par Me Jean-Marie Allimann, avocat à
Delémont,

contre

l'arrêt rendu le 14 mars 2000 par la Cour pénale du Tribunal
cantonal du canton du Jura, dans l

a cause qui oppose le re-
courant à B.________ , au nom de qui agit son curateur,
C.________, représenté par Me Christ...

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1P.270/2000

Ie C O U R D E D R O I T P U B L I C
**********************************************

5 septembre 2000

Composition de la Cour: MM. les Juges Aemisegger, Président,
Féraud et Mme Pont Veuthey, Juge suppléante.
Greffier: M. Parmelin.

Statuant sur le recours de droit public
formé par

A.________ , représenté par Me Jean-Marie Allimann, avocat à
Delémont,

contre

l'arrêt rendu le 14 mars 2000 par la Cour pénale du Tribunal
cantonal du canton du Jura, dans la cause qui oppose le re-
courant à B.________ , au nom de qui agit son curateur,
C.________, représenté par Me Christophe Schaffter, avocat
à Delémont, et au Substitut du Procureur général du canton
du J u r a ;

(procédure pénale; appréciation des preuves)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- D.________ et E.________ se sont mariés le 25 octo-
bre 1991. Un garçon prénommé B.________ est issu de cette
union le 26 janvier 1993. Les époux D.________ et E.________
se sont séparés le 1er septembre 1995. L'enfant a par la
suite été placé auprès d'une famille d'accueil durant la
journée et un curateur lui a été désigné en la personne de
C.________, assistant social au Service social régional du
district de Delémont. Depuis le 6 juillet 1998, il est pen-
sionnaire de l'Institut F.________, à Delémont, et voit ses
parents dans le cadre de leur droit de visite respectif.

B.- Le 25 juin 1997, C.________ a requis l'ouverture
d'une instruction pénale contre l'ami de E.________,
A.________, qu'il accusait de s'être livré à des masturba-
tions et à divers attouchements sur B.________. Cette dénon-
ciation faisait suite aux propos tenus le 18 juin 1997 par
l'enfant à sa maman d'accueil, G.________, en présence des
deux garçons de celle-ci, à savoir, H.________ et
I.________, nés respectivement les 1er septembre 1984 et 3
septembre 1986. Selon G.________, B.________ serait venu se
frotter contre H.________ alors que ce dernier était couché
à plat ventre sur un divan. Interrogé sur son comportement,
il aurait prétendu avoir vu A.________ faire cela à sa maman
alors qu'ils étaient nus. Il aurait ensuite affirmé que
l'ami de sa mère lui caressait les bras, le devant du corps,
le dos, les jambes et entre les jambes aussi, qu'il lui ti-
rait le "zizi" en imitant une masturbation, qu'il lui met-
tait son sexe dans le derrière, dans la bouche, sur le ven-
tre et sur le dos et qu'il l'avait piqué dans le "zizi" à
l'aide d'une aiguille à coudre. L'enfant aurait précisé que
sa mère était présente lorsque A.________ lui tripotait le
"zizi" et qu'elle lui disait d'arrêter. Il aurait encore

ajouté que l'ami de sa mère lui donnait des coups sur les
jambes la nuit quand il dormait. I.________ et H.________
ont confirmé la teneur des propos de B.________, lequel au-
rait toutefois précisé par la suite, en l'absence de leur
mère, que "ce n'était pas vrai".

A.________ a contesté les faits qui lui sont reprochés,
reconnaissant tout au plus avoir appliqué à plusieurs repri-
ses une crème médicale sur le sexe de l'enfant avant qu'il
ne se couche car celui-ci avait des rougeurs. Il a en outre
indiqué que B.________ avait parlé d'une aiguille que son
père lui aurait plantée dans le "zizi".

Selon la mère de l'enfant, ce dernier lui aurait décla-
ré que son père l'avait piqué avec une aiguille dans le "zi-
zi", alors qu'il se trouvait chez elle à l'occasion de son
droit de visite, le 20 juin 1997. B.________ a tenu des pro-
pos identiques à la mère de A.________, J.________. Les deux
femmes ont alors pris la décision d'amener le jour même
l'enfant en consultation auprès du Docteur K.________; ce
praticien n'a constaté aucune lésion visible des organes
sexuels et de l'anus de l'enfant ni aucune trace de sang
dans l'urine consécutive à une éventuelle lésion urétrale.
Il a précisé que le garçon avait affirmé spontanément à
plusieurs reprises durant la visite médicale que "le papi"
l'avait piqué avec une aiguille, tout en lui montrant son
sexe.

D.________ a contesté avoir piqué le sexe de son fils à
l'aide d'une aiguille ou l'avoir caressé ou encore frappé.
B.________ ne lui aurait par ailleurs jamais avoué que
A.________ se serait livré à des attouchements ou à des ac-
tes de sodomie.

Entendu le 1er juillet 1997 par un inspecteur et une
inspectrice de la Police de sûreté, B.________ a réaffirmé

que A.________ l'avait piqué sur le sexe à l'aide d'une ai-
guille et qu'il avait saigné. A la question de savoir si son
père ne le piquait pas, il a répondu "Elle a dit oui la ma-
mi, elle a dit oui". L'enfant aurait également réitéré à
deux reprises ses accusations contre A.________ à
L.________, éducateur spécialisé à l'Institut F.________.

Le 9 juillet 1997, le Juge d'instruction du district de
Delémont (ci-après, le Juge d'instruction) a confié au Cen-
tre de recherches familiales et systémiques (Cerfasy), à
Neuchâtel, le soin de procéder à une expertise pédopsychia-
trique de l'enfant. La Doctoresse M.________, psychiatre-
psychothérapeute, a rendu son rapport le 11 novembre 1997
sur la base de deux entretiens avec B.________, des dossiers
pénaux et civils dans le cadre de la procédure de divorce et
d'un examen psychologique effectué par le Docteur
N.________, psychologue. Elle est parvenue à la conclusion
qu'il existait des signes clairs permettant d'admettre la
réalité des abus sexuels dénoncés sur la base de la révéla-
tion de l'enfant, constituée par un ensemble d'énoncés
brefs, répétés, cohérents et spontanés, de son comportement
de sexualisation traumatique, caractérisé par une masturba-
tion excessive et par une identification à l'agresseur dans
des mises en scène sexuelles, ainsi que des comportements de
victimisation, d'agressivité, d'instabilité et d'irritabili-
té alliés à une reprise des décompensations sous la forme de
régression ou d'insubordination, notamment lorsque l'enfant
est seul avec sa mère ou avec A.________.

Le 13 janvier 1998, le Juge d'instruction a inculpé
E.________ de violation du devoir d'assistance, éventuelle-
ment de complicité de mise en danger du développement de mi-
neurs pour avoir intentionnellement laissé son fils en pré-
sence de A.________ alors qu'elle savait que celui-ci
s'était livré à des actes de mise en danger du développement
de mineurs sur l'enfant, subsidiairement d'avoir assisté son

concubin lors de la commission de tels actes et mis ainsi en
danger le développement psychique de B.________.

Par ordonnances concordantes des 15 et 17 juillet 1998,
le Juge d'instruction et le Substitut du Procureur général
ont décidé de renvoyer A.________ devant le Tribunal correc-
tionnel du district de Delémont sous les préventions de mise
en danger du développement de mineurs, d'actes d'ordre
sexuel sur une personne incapable de discernement et de ré-
sistance ainsi que de voies de fait; ils ont en revanche
rendu un prononcé de non-lieu, faute de charges suffisantes,
en faveur de E.________, que la Chambre d'accusation du Tri-
bunal cantonal du canton du Jura a confirmé le 11 décembre
1998 sur recours de B.________.

C.- Par jugement du 17 août 1999, le Tribunal correc-
tionnel du district de Delémont n'a pas donné suite à la
prévention de voies de fait commises sur la personne de
B.________ pour cause de prescription. Il a en revanche re-
connu A.________ coupable de mise en danger du développement
de mineurs et d'actes d'ordre sexuel sur une personne inca-
pable de discernement ou de résistance, et l'a condamné à
une peine de dix mois d'emprisonnement avec sursis pendant
quatre ans, sous déduction de la détention préventive subie.
Les premiers juges ont retenu que l'accusé s'était rendu
coupable, dans le courant de l'année 1997, de masturbations
et d'attouchements sur la personne de B.________ en lui pi-
quant le sexe avec une aiguille et en lui prodiguant des ca-
resses sur les parties sexuelles, mais qu'il ne s'était pas
livré à des actes de sodomie ou à d'autres attouchements
avec le sexe.

Statuant le 14 mars 2000 sur appel du condamné, la Cour
pénale du Tribunal cantonal du canton du Jura (ci-après, la
cour cantonale) a constaté que le jugement de première ins-
tance était entré en force dans la mesure où il ne donnait

pas suite à la prévention de voies de fait pour cause de
prescription; elle l'a confirmé pour le surplus.

D.- Agissant par la voie du recours de droit public
pour violation des art. 9, 32 al. 1 Cst. et 6 § 2 CEDH,
A.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler cet arrêt.
Il reproche à l'autorité intimée d'avoir procédé à une ap-
préciation arbitraire des preuves et d'avoir violé le prin-
cipe de la présomption d'innocence. Il requiert l'assistance
judiciaire.

La cour cantonale et le Substitut du Procureur général
concluent au rejet du recours. L'intimé n'a pas déposé d'ob-
servations.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- a) Le pourvoi en nullité à la Cour de cassation pé-
nale du Tribunal fédéral n'est pas ouvert pour se plaindre
d'une appréciation arbitraire des preuves et des constata-
tions de fait qui en découlent (ATF 124 IV 81 consid. 2a
p. 83 et les arrêts cités) ou pour invoquer la violation di-
recte d'un droit constitutionnel ou conventionnel (ATF 120
IV 113 consid. 1a p. 114). Au vu des arguments soulevés,
seul le recours de droit public est ouvert en l'occurrence.

b) Le recourant est personnellement touché par l'arrêt
attaqué qui confirme sa condamnation pénale à une peine de
dix mois d'emprisonnement avec sursis pendant quatre ans,
sous déduction de la détention préventive subie; il a un
intérêt actuel et juridiquement protégé à ce que cet arrêt
soit annulé et a, partant, qualité pour recourir selon
l'art. 88 OJ.

Les autres conditions de recevabilité du recours de
droit public sont par ailleurs réunies, de sorte qu'il y a
lieu d'entrer en matière sur le fond.

2.- Le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir
procédé à une appréciation arbitraire des preuves et d'avoir
violé le principe de la présomption d'innocence garanti aux
art. 32 al. 1 Cst. et 6 § 2 CEDH. Toutefois, tel qu'il est
invoqué, ce dernier grief n'a pas de portée par rapport à
celui d'arbitraire (ATF 120 Ia 31 consid. 2d p. 37/38).

a) L'art. 293 du Code de procédure pénale jurassien
(CPP jur.), applicable par analogie à la Cour pénale en ver-
tu de l'art. 343 CPP jur., prévoit que le juge ou le tribu-
nal apprécie librement les preuves administrées au cours des
débats. Le droit cantonal de procédure ne fixe donc pas la
force probante des preuves, le juge ayant seulement l'obli-
gation de motiver, dans sa décision, en quoi elles ont eu
pour effet d'emporter sa conviction (cf. art. 295 al. 3 CPP
jur.; Gérard Piquerez, Procédure pénale suisse, Lausanne
2000, n. 1941 et 1944, p. 408/409). Cette liberté d'appré-
ciation, dans l'exercice de laquelle le juge dispose d'une
grande latitude (ATF 118 Ia 28 consid. 1b p. 30; 115 Ib 446
consid. 3a p. 450; 112 Ia 369 consid. 3 p. 371), trouve sa
limite dans l'interdiction de l'arbitraire (ATF 124 IV 86
consid. 2a p. 88; 120 Ia 31 consid. 2d p. 38; 118 Ia 28 con-
sid. 1b p. 30; 116 Ia 85 consid. 2b p. 88 et les arrêts ci-
tés). Le Tribunal fédéral n'intervient que si le juge a abu-
sé de ce pouvoir, en particulier lorsqu'il admet ou nie un
fait pertinent en se mettant en contradiction évidente avec
les pièces et éléments du dossier, lorsqu'il méconnaît des
preuves pertinentes ou qu'il n'en tient arbitrairement pas
compte, lorsque les constatations de fait sont manifestement
fausses ou encore lorsque l'appréciation des preuves se ré-
vèle insoutenable (ATF 124 IV 86 consid. 2a p. 88; 118 Ia 28

consid. 1b p. 30; 117 Ia 133 consid. 2c p. 39, 292 consid.
3a p. 294).

Concernant plus particulièrement l'appréciation du ré-
sultat d'une expertise, le juge n'est en principe pas lié
par ce dernier. Mais s'il entend s'en écarter, il doit moti-
ver sa décision et ne saurait, sans motifs déterminants,
substituer son appréciation à celle de l'expert, sous peine
de verser dans l'arbitraire. En d'autres termes, le juge qui
ne suit pas les conclusions de l'expert n'enfreint pas
l'art. 9 Cst. lorsque des circonstances bien établies vien-
nent en ébranler sérieusement la crédibilité (ATF 122 V 157
consid. 1c p. 160; 119 Ib 254 consid. 8a p. 274; 118 Ia 144
consid. 1c p. 146 et les arrêts cités). Si, en revanche, les
conclusions d'une expertise judiciaire lui apparaissent dou-
teuses sur des points essentiels, il doit recueillir des
preuves complémentaires pour tenter de dissiper ses doutes.
A défaut, en se fondant sur une expertise non concluante, il
pourrait commettre une appréciation arbitraire des preuves
et violer l'art. 9 Cst. (ATF 118 Ia 144 consid. 1c p. 146).

b) En l'occurrence, la cour cantonale a considéré que
le recourant s'était rendu coupable de masturbations et
d'attouchements sur la personne de B.________ en lui piquant
le sexe avec une aiguille et en lui prodiguant des caresses
sur les parties sexuelles. Elle s'est déclarée convaincue de
la véracité des faits dénoncés, parce que l'enfant les avait
relatés spontanément à sa maman d'accueil en présence des
enfants de cette dernière et qu'il les avait réitérés au
Docteur N.________, à la Doctoresse M.________, à
L.________, au Docteur K.________ et à O.________. Elle a
par ailleurs exclu que B.________ ait pu inventer de tels
propos en se fondant sur les avis de l'expert et des méde-
cins du Centre médico-psychologique entendus dans le cadre
de la procédure. Elle a en outre relevé que l'enfant avait
toujours désigné le recourant comme l'auteur des faits in-

criminés, sauf au Docteur K.________ et à J.________;
elle
n'a cependant pas vu dans cette circonstance un élément de
nature à remettre en cause la crédibilité des premières dé-
clarations de l'enfant, car ces propos lui auraient été sug-
gérés par sa mère. Elle s'est également fondée sur les con-
clusions de l'expertise pédopsychiatrique réalisée par la
Doctoresse M.________ en collaboration avec le Docteur
N.________, pour conclure à la réalité des abus sexuels su-
bis par B.________, en l'absence d'éléments permettant de
s'en écarter.

Aux yeux du recourant, les déclarations de B.________
seraient émaillées d'incohérences qui auraient dû amener la
cour cantonale à douter de sa culpabilité et à le libérer de
toute peine. L'enfant n'aurait, selon lui, pas identifié de
manière claire son abuseur et l'autorité intimée aurait fait
preuve d'arbitraire en tenant les accusations portées contre
lui pour plus crédibles que celles lancées contre le père du
garçon.

L'autorité intimée n'a pas ignoré que B.________ avait
également accusé son père de l'avoir piqué à l'aide d'une
aiguille à coudre; elle a toutefois estimé que ces accusa-
tions avaient été induites par la mère de l'enfant parce
qu'elles avaient été portées à chaque fois en présence de
celle-ci, qu'il ressortait clairement de l'audition de l'en-
fant par la police que sa mère lui avait suggéré de tels
propos et que l'expert partageait également cette opinion
car l'intimé avait répété ses premières déclarations ulté-
rieurement dans un contexte neutre et extérieur. Le recou-
rant se borne à affirmer que cette interprétation des faits
ne reposerait sur aucune preuve et que les allégations du
plaignant lors de son audition par la police n'auraient pas
été d'une grande précision s'agissant des faits constitutifs
des infractions retenues à son encontre; il ne prétend tou-
tefois pas que les déclarations faites par l'enfant aux ins-

pecteurs de police auraient été interprétées de manière ar-
bitraire; de même, il ne tente pas de démontrer en quoi les
motifs retenus par l'expert pour parvenir à la conclusion
que les accusations de l'enfant avaient été suggérées par sa
mère seraient insoutenables, comme il lui appartenait de le
faire (ATF 125 I 492 consid. 1b p. 495 et les arrêts cités).
Sur ce point, le recours ne répond pas aux exigences de mo-
tivation de l'art. 90 al. 1 let. b OJ. Au demeurant, les
raisons avancées par l'expert et la cour cantonale permet-
tent d'expliquer d'une manière convaincante les déclarations
divergentes de l'enfant sur la personne qui l'aurait abusé
sexuellement. L'autorité intimée n'a dès lors pas fait preu-
ve d'arbitraire en considérant que les accusations portées
contre son père avaient été suggérées par la mère et qu'il
n'y avait ainsi aucun doute dans l'esprit de l'enfant sur
l'auteur des sévices sexuels qu'il prétend avoir subis.

Le recourant voit un élément de nature à nier la réali-
té des sévices subis par l'intimé dans le fait qu'aucune
trace de piqûres ou de saignement n'a été relevée sur le
sexe de l'enfant, que ce soit par le Docteur K.________, par
le père de B.________ ou par G.________. Il perd toutefois
de vue que la date exacte des faits incriminés n'a pas pu
être déterminée et qu'un constat médical n'était dès lors
plus envisageable lorsque l'enfant en a parlé la première
fois à sa maman d'accueil le 18 juin 1997, respectivement
lorsque le Docteur K.________ l'a examiné deux jours plus
tard à l'initiative de la mère. Par ailleurs, B.________
n'a jamais confié à son père les abus sexuels qu'il aurait
subis de la part de l'ami de sa mère, de sorte que celui-ci
n'avait aucune raison de porter une attention particulière
au sexe de l'enfant lorsqu'il l'hébergeait dans l'exercice
de son droit de visite.

Le recourant prétend que la scène mimée au domicile de
G.________ ne pouvait être tenue pour une révélation d'un

vécu sexuel correspondant à une agression sexuelle, comme
l'a retenu l'expert, car il aurait été constaté que l'enfant
n'avait pas été victime d'actes de sodomie. Cette affirma-
tion repose toutefois sur une interprétation erronée de
l'arrêt attaqué et de l'expertise. La cour cantonale s'est
en effet bornée à relever que l'attitude suggestive et imi-
tative de B.________ avec les enfants de G.________ sur le
canapé ainsi que les mots utilisés par l'enfant pour décrire
la situation qu'il avait vécue renforçaient la crédibilité
des premières déclarations. Elle ne retient nullement que le
plaignant aurait réellement vécu la relation sexuelle mise
en scène. Il en va de même de l'expert pour qui la relation
sexuelle mimée par l'enfant était la mise en actes d'un vécu
visuel, qui a permis la révélation et la reproduction des
actes sexuels dont l'enfant avait personnellement été la
victime; c'est cette reproduction que l'expert qualifie
d'identification à l'agresseur. Au demeurant, à supposer
même que l'expert ou l'autorité intimée ait retenu à tort
que le dévoilement s'était effectué par une mise en scène
d'un acte sexuel vécu par le plaignant, on ne voit pas en
quoi cette appréciation erronée des faits ôterait toute cré-
dibilité à l'expertise. Celle-ci se base en effet sur d'au-
tres éléments, dont le recourant ne remet nullement en cause
la pertinence, pour conclure à la réalité des abus sexuels
dont l'enfant prétend avoir été l'objet, tels que la révéla-
tion constituée par un ensemble d'énoncés brefs, répétés,
cohérents et spontanés, le comportement de sexualisation
traumatique, caractérisé par une masturbation excessive, les
comportements de victimisation, d'agressivité, d'instabilité
et d'irritabilité conjugués à une reprise des décompensa-
tions sous la forme de régression ou d'insubordination, no-
tamment lorsque l'enfant est seul avec sa mère ou avec
A.________. La cour cantonale n'a dès lors pas fait preuve
d'arbitraire en tenant les accusations portées contre le re-
courant pour établies sur la base de l'expertise.

Ce dernier ne saurait par ailleurs tirer aucun argument
en sa faveur du fait que l'enfant n'aurait rien dit à son
père au sujet des sévices dont il aurait fait l'objet, cette
situation pouvant s'expliquer par le conflit de loyauté au-
quel le plaignant était confronté. Enfin, ce n'est pas parce
que les premiers juges n'ont pas retenu à la charge du re-
courant des actes de sodomie que celui-ci n'aurait pas com-
mis les autres actes qui lui sont reprochés.

Le recourant a également remis en cause les conditions
dans lesquelles s'était déroulée l'audition de l'enfant de-
vant les inspecteurs de la Police de sûreté. Hormis les af-
firmations selon lesquelles les accusations proférées contre
son père auraient été suggérées par sa mère, l'enfant s'est
borné à cette occasion à confirmer le fait que A.________
l'avait piqué à l'aide d'une aiguille, sans faire d'autres
déclarations. Les irrégularités dénoncées, pour autant qu'il
faille leur accorder un quelconque crédit, n'ont donc pas
porté à conséquence quant à la culpabilité du recourant et
ne sauraient justifier l'annulation de l'arrêt attaqué. Les
autres griefs invoqués ne sont pas de nature à établir le
caractère arbitraire de l'arrêt attaqué, dans la mesure où
ils répondent aux exigences de motivation de l'art. 90 al. 1
let. b OJ (cf. ATF 125 I 492 consid. 1b précité).

c) En définitive, le recourant ne parvient pas à démon-
trer que sa condamnation reposerait sur une appréciation ar-
bitraire des preuves ou qu'un examen objectif de l'ensemble
de la cause aurait dû inciter la cour cantonale à concevoir
des doutes sur sa culpabilité au point que sa condamnation
soit contraire au principe de la présomption d'innocence.

3.- Le recours doit ainsi être rejeté dans la mesure où
il est recevable. Les conditions de l'art. 152 al. 1 OJ
étant réunies, il convient de faire droit à la demande d'as-
sistance judiciaire présentée par le recourant et de statuer

sans frais. Me Jean-Marie Allimann est désigné comme avocat
d'office de A.________ pour la présente procédure et une in-
demnité lui sera versée (art. 152 al. 2 OJ). Il n'y a pas
lieu d'allouer des dépens à l'intimé qui n'a pas déposé
d'observations.

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Rejette le recours dans la mesure où il est receva-
ble;

2. Admet la demande d'assistance judiciaire et désigne
Me Jean-Marie Allimann en qualité d'avocat d'office du re-
courant;

3. Dit qu'il est statué sans frais, ni dépens;

4. Dit que la Caisse du Tribunal fédéral versera au
mandataire du recourant une indemnité de 1'200 fr. à titre
d'honoraires;

5. Communique le présent arrêt en copie aux mandataires
des parties, au Substitut du Procureur général et à la Cour
pénale du Tribunal cantonal du canton du Jura.

Lausanne, le 5 septembre 2000
PMN/mnv

Au nom de la Ie Cour de droit public
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président, Le Greffier,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 1P.270/2000
Date de la décision : 05/09/2000
1re cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-09-05;1p.270.2000 ?
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