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21/08/2000 | SUISSE | N°2A.156/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 21 août 2000, 2A.156/2000


2A.156/2000
«»

IIe C O U R D E D R O I T P U B L I C
***********************************************

21 août 2000

Composition de la Cour: MM. et Mme les Juges Wurzburger,
président, Hartmann, Hungerbühler, Müller et Yersin.
Greffier: M. Dayer.

______________

Statuant sur le recours de droit administratif
formé par

E.________, représentée par Me Didier Bottge, avocat à
Genève,

contre

la décision prise le 6 mars 2000 par la Commission fédérale
des banqu

es;

(entraide administrative internationale demandée par la
Commission française des opérations de bourse)

Vu les pièc...

2A.156/2000
«»

IIe C O U R D E D R O I T P U B L I C
***********************************************

21 août 2000

Composition de la Cour: MM. et Mme les Juges Wurzburger,
président, Hartmann, Hungerbühler, Müller et Yersin.
Greffier: M. Dayer.

______________

Statuant sur le recours de droit administratif
formé par

E.________, représentée par Me Didier Bottge, avocat à
Genève,

contre

la décision prise le 6 mars 2000 par la Commission fédérale
des banques;

(entraide administrative internationale demandée par la
Commission française des opérations de bourse)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- Le 19 août 1999, la société A.________ a ann-
oncé une offre publique d'échange sur le solde du capital
de sa filiale, la société D.________.

La Commission française des opérations de bourse
(ci-après: la COB) a ouvert une enquête pour s'assurer que
les transactions réalisées avant cette annonce n'avaient
pas été effectuées dans des conditions contraires aux dis-
positions légales et réglementaires françaises relatives,
notamment, à l'usage d'une information privilégiée. Ses in-
vestigations lui ont notamment permis de découvrir que la
banque C.________ à Genève avait acquis 1'015 titres
D.________ le 17 août 1999.

B.- Le 24 décembre 1999, la COB a requis l'assis-
tance de la Commission fédérale des banques (ci-après: la
Commission fédérale) afin d'obtenir des informations sur
l'identité du (ou des) donneur (s) d'ordre (s) final (s)
pour le compte du (ou desquels) ces actions avaient été
acquises; elle souhaitait également connaître l'identité
des personnes ayant pris l'initiative d'acheter ces titres,
les motivations ayant conduit à ces acquisitions, les ca-
ractéristiques des ordres reçus avec mention de leurs date
et heure et, dans le cas où ces actions avaient été reven-
dues, la date et l'heure de transmission des ordres de ven-
te ainsi que le volume exécuté sur le marché. Elle s'enga-
geait à ce que l'information reçue soit traitée de manière
confidentielle et précisait que si les renseignements four-
nis révélaient des faits susceptibles d'une qualification
pénale, elle pourrait avoir à les transmettre au Procureur
de la République.

Le 30 décembre 1999, la Commission fédérale a de-
mandé à la banque C.________ de lui transmettre les infor-
mations souhaitées par la COB ainsi que les documents d'ou-
verture de compte et de dépôt de titres. Le 13 janvier
2000, cette banque l'a notamment informée qu'une partie des
actions en cause (675) avait été acquise pour le compte de
E.________, domiciliée à Paris et titulaire d'un compte au-
près de sa succursale de Nassau (Bahamas), le donneur d'or-
dre étant Y.________ gestionnaire de fortune travaillant
pour la société Z.________, à Paris. Ces actions avaient
été revendues pour le prix de 246,80 Euros le 24 août 1999
à 10h17.

C.- Le 2 février 2000, E.________ s'est déterminée
sur la demande d'entraide de la COB en demandant à la Com-
mission fédérale ne pas y donner suite. Elle a soutenu
qu'elle avait la qualité de tiers non impliqué au sens de
l'art. 38 al. 3 de la loi fédérale du 24 mars 1995 sur les
bourses et le commerce des valeurs mobilières (LBVM; RS
954.1), dans la mesure où, bien que titulaire d'un compte
bancaire auprès de la succursale de Nassau de la banque
C.________, ce n'était pas elle-même mais son gérant de
fortune qui avait donné l'ordre d'effectuer la transaction
litigieuse. Par ailleurs, le fait que son compte bancaire
était ouvert auprès d'une succursale "bahamienne" d'une
banque suisse constituait un élément d'extra-territorialité
qui ne permettait pas à la Commission fédérale de transmet-
tre à l'autorité requérante des informations recueillies
dans le cadre de ses activités de surveillance consolidée
des banques suisses; il appartenait en effet à la COB de
saisir les autorités des Bahamas.

D.- Le 14 février 2000, l'autorité requérante a
informé la Commission fédérale de l'avancement de son en-
quête. Elle a tout d'abord précisé que l'ouverture de cette
dernière avait été justifiée par le fait que, le 17 août

1999, après avoir été coté en début de séance au cours de
222 Euros et s'être comporté de manière peu active durant
la matinée avec un volume moyen de 123 titres par transac-
tion, l'action D.________ avait, dès 14h16, évolué subite-
ment à la hausse pour atteindre 234 Euros à la clôture de
la séance. Elle avait en outre découvert que les premiers
achats importants avaient été effectués par Y.________ dont
le premier ordre d'achat avait été exécuté sur le marché à
14h16 et qui avait encore acquis 7'000 titres à 14h37 et
4'000 autres à 15h11. La société qui l'employait avait en
outre acquis 1'000 actions à 14h59 et l'ordre d'achat de
1'015 titres par la banque C.________ avait été exécuté à
15h13. Elle relevait que ces achats pourraient être "coor-
donnés" avec ceux d'un autre investisseur ayant acquis
33'000 actions cette même après-midi du 17 août 1999, dans
la mesure où Y.________ gérait deux comptes titres de so-
ciétés appartenant à celui-ci et avait attribué à ces comp-
tes un tiers des actions acquises le 17 août 1999. L'ensem-
ble de ces achats manifestaient une intervention inhabi-
tuelle quant au volume sur le marché d'un titre tradition-
nellement étroit (8'000 actions échangées en moyenne par
mois en 1999). Le moment des interventions ne permettait en
outre pas d'imputer ces acquisitions à des rumeurs de mar-
ché puisqu'il s'agissait des premiers achats significatifs.

Le 21 février 2000, E.________ s'est déterminée
sur ces éléments et s'est déclarée d'accord avec une trans-
mission à la COB d'une version anonymisée - à l'exception
de l'identité de Y.________ - des documents fournis par la
banque C.________.

Le 1er mars 2000, l'Office fédéral de la police -
dont le préavis avait été d'abord négatif - a donné son ac-
cord à une éventuelle transmission aux autorités pénales
françaises compétentes des renseignements qui seraient
fournis à la COB.

E.- Par décision du 6 mars 2000, la Commission
fédérale a accordé l'entraide administrative à l'autorité
requérante et a accepté de lui transmettre les informations
communiquées par la banque C.________ (chiffre 1 du dispo-
sitif). Elle a précisé que ces informations ne devaient
être utilisées qu'à des fins de surveillance directe des
bourses et du commerce des valeurs mobilières (chiffre 2 du
dispositif). De plus, en accord avec l'Office fédéral de la
police, leur éventuelle communication aux autorités pénales
françaises compétentes était autorisée, la COB devant tou-
tefois leur rappeler que leur utilisation était limitée à
la poursuite du délit d'usage d'une information privilégiée
(chiffre 3 du dispositif). En outre, en vertu de l'art. 38
al. 2 lettre c LBVM, leur transmission à des autorités
tierces, autres que celles mentionnées au chiffre 3 du dis-
positif, ne pouvait se faire qu'avec l'assentiment préala-
ble de la Commission fédérale (chiffre 4 du dispositif).
Enfin, les chiffres 1 à 4 du dispositif ne seraient exécu-
tés qu'à l'échéance d'un délai de trente jours après la no-
tification de la décision à l'intéressée, si aucun recours
n'était déposé dans ce délai auprès du Tribunal fédéral
(chiffre 5 du dispositif).

F.- Agissant par la voie du recours de droit admi-
nistratif, E.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler
cette décision et de dire qu'il n'y a pas lieu d'accorder
l'entraide requise. Subsidiairement, elle lui demande de
prendre une nouvelle décision accordant l'entraide adminis-
trative à la COB et lui transmettant les informations sui-
vantes: "L'acquisition de 675 titres D.________ le 17 août
1999 a été effectuée pour le compte de Mme X, identité con-
nue de la Commission Fédérale des Banques; en ce qui con-
cerne les raisons qui ont conduit cette personne à procéder
à ces transactions, Mme X expose qu'elle n'a aucune con-
naissance de cet ordre, qui a été donné par Y.________,
gérant de fortune"; elle demande également de rappeler à

l'autorité requérante que les informations transmises ne
peuvent être utilisées qu'à des fins de surveillance direc-
te des bourses et du commerce des valeurs mobilières, de
l'autoriser à éventuellement transmettre lesdites informa-
tions aux autorités pénales françaises compétentes avec
l'indication que leur utilisation est limitée à la poursui-
te du délit d'usage d'une information privilégiée et de lui
rappeler que, conformément à l'art. 38 al. 2 lettre c LBVM,
la transmission à des autorités tierces non pénales ne peut
se faire qu'avec l'assentiment de la Commission fédérale.
Plus subsidiairement, elle demande que la décision de cette
dernière soit annulée et que la cause lui soit renvoyée
pour qu'elle statue "dans le sens des considérants du Tri-
bunal fédéral". Elle prétend que l'autorité intimée a cons-
taté des faits pertinents de manière manifestement inexac-
te, qu'elle a violé les art. 35 al. 2 et 38 al. 3 LBVM de
même que le principe de la proportionnalité.

La Commission fédérale conclut au rejet du re-
cours.

G.- Par ordonnance du 9 mai 2000, le Président de
la IIe Cour de droit public a admis la requête d'effet sus-
pensif formulée par la recourante.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- a) La décision par laquelle la Commission fé-
dérale accorde l'entraide administrative en application de
l'art. 38 LBVM et ordonne la transmission de documents et
de renseignements à une autorité étrangère, peut directe-
ment faire l'objet d'un recours de droit administratif au
sens des art. 97 ss OJ (cf. art. 39 LBVM; ATF 125 II 65
consid. 1 p. 69, 79 consid. 2 p. 80).

b) Titulaire du compte bancaire faisant l'objet
des renseignements dont la communication est litigieuse,
l'intéressée a qualité pour recourir (art. 103 lettre a OJ;
ATF 125 II 65 consid. 1 p. 69).

2.- Le 5 mai 2000, la recourante a, sans y avoir
été invitée, rédigé une écriture complémentaire. Déposée
après l'échéance du délai de recours (cf. art. 106 OJ) et
sans qu'un second échange d'écritures au sens de l'art. 110
al. 4 OJ n'ait été ordonné, elle ne peut être prise en con-
sidération.

3.- a) Saisi d'un recours de droit administratif,
le Tribunal fédéral vérifie d'office l'application du droit
fédéral, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'apprécia-
tion (cf. art. 104 lettre a OJ; ATF 125 II 497 consid.
1b/aa p. 500). Il examine en particulier librement si les
conditions pour accorder l'entraide administrative sont
remplies et dans quelle mesure la coopération internationa-
le doit être accordée. S'il est lié par les conclusions des
parties, il ne l'est pas en revanche par leurs motifs et
peut admettre le recours pour d'autres raisons que celles
avancées par l'intéressée ou, au contraire, confirmer l'ar-
rêt attaqué pour d'autres motifs que ceux retenus par l'au-
torité intimée (cf. art. 114 al. 1 OJ; ATF 125 II 497 con-
sid. 1b/aa p. 500 et la jurisprudence citée).

b) Bien qu'elle soit indépendante de l'administra-
tion, la Commission fédérale n'est pas une autorité de re-
cours au sens de l'art. 105 al. 2 OJ, de sorte que le Tri-
bunal fédéral n'est pas lié par ses constatations de fait
(cf. ATF 115 Ib 55 consid. 2a p. 57).

La recourante prétend que l'autorité intimée a
constaté des faits pertinents de manière manifestement
inexacte en retenant que son compte bancaire était géré à

Genève. En effet, comme l'attesteraient les pièces produi-
tes en annexe à son recours, son compte aurait été ouvert
non pas auprès de la banque C.________ à Genève mais de sa
succursale des Bahamas, la banque C.________ (Nassau) Ltd,
et sa gestion serait effectuée exclusivement par cette der-
nière. Le siège de Genève n'effectuerait certaines transac-
tions qu'en qualité d'auxiliaire pour des raisons techni-
ques dues au décalage horaire, soit lorsque, comme en l'es-
pèce, un ordre d'achat de titres doit être exécuté alors
que l'établissement sis au Bahamas est fermé.

Il ressort des documents bancaires qui ont été
produits par l'intéressée - et dont la Commission fédérale
n'avait pas connaissance -, qu'elle est effectivement titu-
laire d'un compte bancaire auprès de la banque C.________
(Nassau) Ltd. Selon l'art. 18 des conditions générales de
ladite banque signées par la recourante le 8 juillet 1999,
une part importante de la gestion de ce compte est toute-
fois effectuée au siège de Genève. Un courrier de la banque
C.________ (Nassau) Ltd du 4 avril 2000 confirme également
la collaboration instaurée entre les deux banques pour pal-
lier au décalage horaire. L'affirmation de l'autorité inti-
mée selon laquelle ledit compte n'est manifestement pas gé-
ré à Nassau dans la mesure où l'ordre d'achat des titres en
cause a été exécuté par la banque C.________ à Genève, est
ainsi partiellement inexacte. Ainsi qu'on va le voir (cf.
consid. 4 ci-dessous), cette inexactitude reste toutefois
sans conséquence sur le droit de la Commission fédérale
d'obtenir des renseignements sur ce compte bancaire.

4.- a) L'art. 35 al. 2 LBVM oblige les personnes
et les sociétés soumises à surveillance à fournir à la Com-
mission fédérale tous les renseignements et les documents
qu'elle exige afin d'accomplir sa tâche.

b) Invoquant la violation de l'art. 35 al. 2 LBVM,
l'intéressée soutient que la Commission fédérale n'était
pas autorisée à demander, sous peine de violer la souverai-
neté des Bahamas, des informations sur son compte bancaire
géré par la banque C.________ (Nassau) Ltd, quand bien même
l'achat des titres en cause a été effectué par le siège de
Genève. Ce dernier aurait en effet uniquement agi en quali-
té d'auxiliaire
technique fournissant à sa succursale un
support logistique.

c) Ce point de vue ne peut être suivi. En effet,
dans la mesure où l'autorité intimée est chargée de l'as-
sistance administrative au sens de l'art. 38 LBVM, il lui
appartient de recueillir toutes les informations utiles à
l'exécution de sa tâche (cf. ATF 125 II 450 consid. 2a p.
453). A cet égard et conformément à la jurisprudence de
l'autorité de céans, elle était autorisée à demander à la
banque C.________ des renseignements sur la recourante dont
le compte était, du moins en partie (cf. consid. 3b ci-des-
sus), géré par sa succursale des Bahamas et qui, en plus,
avait eu recours à ses services pour réaliser l'opération
financière en cause. Le secret bancaire garanti par le
droit des Bahamas n'y faisait en particulier pas obstacle,
dans la mesure où ladite succursale avait effectué en Suis-
se la transaction dont elle était chargée et se trouvait
dès lors soumise à la souveraineté de ce pays (cf. ATF 125
II 450 consid. 2c-2d p. 455; 108 Ib 513 consid. 2b p. 519;
cf. également Hans Peter Schaad, in Kommentar zum Schwei-
zerischen Kapitalmarktrecht, Bâle 1999, n. 5 ad art. 38).
Reste à déterminer si la Commission fédérale pouvait trans-
mettre à la COB les informations qu'elle avait recueillies,
ce qui doit être examiné au regard de l'art. 38 LBVM.

5.- a) Selon l'art. 38 al. 2 LBVM, l'entraide ad-
ministrative internationale peut être accordée à des auto-

rités étrangères de surveillance des bourses et du commerce
des valeurs mobilières, à condition, notamment, qu'elles
utilisent les informations transmises exclusivement à des
fins de surveillance directe des bourses et du commerce des
valeurs mobilières (lettre a; principe de spécialité) et
qu'elles soient liées par le secret de fonction ou le se-
cret professionnel (lettre b).

b) Comme le Tribunal fédéral a déjà eu l'occasion
de le dire, la COB est une autorité de surveillance des
marchés financiers au sens de l'art. 38 al. 2 LBVM à la-
quelle l'entraide administrative peut être accordée. Elle
respecte en outre l'exigence de confidentialité imposée par
l'art. 38 al. 2 lettre b LBVM (cf. ATF 126 II 86 consid. 3
p. 88-89).

6.- a) La transmission d'informations sur des per-
sonnes qui, de manière évidente, ne sont pas impliquées
dans une affaire nécessitant l'ouverture d'une enquête est
interdite (cf. art. 38 al. 3 LBVM).

b) L'intéressée soutient n'avoir eu aucune con-
naissance des placements effectués par Y.________ confor-
mément au mandat de gestion qu'elle lui a confié. Elle
ignorait en particulier l'acquisition des titres en cause
jusqu'au moment où elle a appris l'existence de la demande
d'entraide de la COB. Elle n'aurait en outre aucune compé-
tence dans les domaines bancaires et de gestion de fortune,
raison pour laquelle elle aurait mandaté Y.________. Elle
ne recevrait par ailleurs aucun document bancaire en rela-
tion avec la gestion de son compte auprès de la banque
C.________ (Nassau) Ltd. Vu ces éléments, elle devrait être
considérée comme un tiers non impliqué au sens de l'art. 38
al. 3 LBVM.

c) La notion de tiers non impliqué au sens de cet
article est identique à celle qui était prévue à l'art. 10
de la loi fédérale du 20 mars 1981 sur l'entraide interna-
tionale en matière pénale (EIMP; RS 351.1) avant son abro-
gation le 31 janvier 1997 (cf. RO 1997 p. 115 et 131). Elle
doit dès lors être interprétée à la lumière de la jurispru-
dence concernant cette dernière disposition (cf. Manfred
Küng/Felix M. Huber/Matthias Kuster, Kommentar zum Börsen-
gesetz, Vol. II, n. 16 ad art. 38; Claude Rouiller, La coo-
pération internationale en matière de surveillance des ban-
ques et des bourses, in RVJ 1997 p. 223 ss, p. 233-234).
Cette jurisprudence a notamment précisé que celui dont le
compte bancaire pourrait avoir servi, même à son insu, à
commettre une infraction, voire à transférer ou à dissimu-
ler le produit d'une infraction ne peut en principe être
considéré comme un tiers non impliqué (cf. ATF 126 II 126
consid. 6a/bb p. 137 et la jurisprudence citée).

Dans le cas particulier, l'autorité requérante
soupçonne l'existence d'un délit d'initié réalisé par
l'achat de titres D.________ au moyens des fonds se trou-
vant sur le compte de la recourante auprès de la banque
C.________ (Nassau) Ltd. Conformément à la jurisprudence
mentionnée ci-dessus, dont il n'y a pas lieu de se dépar-
tir, dès l'instant où le compte bancaire de l'intéressée
pourrait avoir servi à la commission d'une infraction, même
à son insu, elle peut être considérée comme impliquée dans
la procédure d'entraide, ainsi que l'a relevé à juste titre
la décision attaquée (cf. consid. 7d de celle-ci).

7.- a) Dans le domaine de l'entraide administrati-
ve internationale, le principe de la proportionnalité dé-
coule de l'art. 38 al. 2 LBVM (cf. également l'art. 5 al. 2
Cst. ainsi que Schaad, op. cit., n. 90 ad art. 38 BEHG) qui
autorise uniquement la transmission d'informations et de
documents liés à l'affaire. Selon ce principe, l'entraide

administrative ne peut être accordée que dans la mesure né-
cessaire à la découverte de la vérité recherchée par l'Etat
requérant. La question de savoir si les renseignements de-
mandés sont nécessaires ou simplement utiles à la procédure
étrangère est en principe laissée à son appréciation.
L'Etat requis ne dispose généralement pas des moyens lui
permettant de se prononcer sur l'opportunité de l'adminis-
tration des preuves déterminées au cours de l'instruction
menée à l'étranger, de sorte que, sur ce point, il ne sau-
rait substituer sa propre appréciation à celle de l'autori-
té étrangère chargée de l'enquête. Il doit uniquement exa-
miner s'il existe suffisamment d'éléments suspects pouvant
justifier la demande d'entraide. La coopération internatio-
nale ne peut être refusée que si les actes requis sont sans
rapport avec l'infraction poursuivie et manifestement im-
propres à faire progresser l'enquête, de sorte que ladite
demande apparaît comme le prétexte à une recherche indéter-
minée de moyens de preuve ("fishing expedition"; ATF 126 II
86 consid. 5a p. 90-91 et les références citées).

b) L'intéressée prétend que le principe de la pro-
portionnalité - qu'elle estime à tort, découler des art. 9
et 29 Cst. (sur la portée de ces dispositions, cf. Jörg
Paul Müller, Grundrechte in der Schweiz, 3ème éd. Berne
1999, p. 467 ss et 495 ss) - empêche la communication de
son identité à l'autorité requérante. En effet, cette au-
torité aurait uniquement intérêt à connaître l'identité de
Y.________ qui, pour l'acquisition des titres en cause, est
intervenu en qualité de "gérant externe". La communication
de sa propre identité ne permettrait aucune progression de
l'enquête dans la mesure où elle n'a pas eu connaissance
des transactions financières effectuées pour son compte par
son mandataire. Enfin, les secrets bancaires suisse et "ba-
hamien" feraient obstacle à la communication aux autorités
françaises de l'existence de ses avoirs bancaires en Suis-
se.

c) Ayant constaté un mouvement inhabituel du cours
du titre D.________ dans l'après-midi du 17 août 1999 -
soit deux jours avant l'annonce officielle par la société
A.________ de son offre publique d'échange du solde du ca-
pital de sa filiale - de même qu'une augmentation subite et
considérable du volume d'acquisition de ces titres, la COB
disposait d'éléments suffisants lui permettant de soup-
çonner l'existence d'un délit d'initié. Elle avait en outre
découvert qu'une des ces acquisitions avait été effectuée
par l'intermédiaire de la banque C.________ à Genève. Elle
pouvait dès lors légitimement demander à la Commission fé-
dérale des précisions sur cette acquisition (cf. dans le
même sens ATF 126 II 86 consid. 5b p. 91 et la jurispruden-
ce citée), notamment la communication de l'identité du don-
neur d'ordre ainsi que celle de la personne pour le compte
de laquelle celui-ci avait agi. Comme l'a relevé à juste
titre l'autorité intimée, même si l'ordre d'achat des ti-
tres en cause n'a pas été donné par la recourante, aucun
élément du dossier ne permet, en l'état, d'exclure qu'elle
soit à l'origine de l'opération et puisse être soupçonnée
de délit d'initié. La communication de son identité à l'au-
torité requérante n'est dès lors pas contraire au principe
de la proportionnalité (cf. dans ce sens ATF 125 II 65 con-
sid. 6a p. 73). Par ailleurs, les explications de l'inté-
ressée concernant les modalités du mandat de gestion confé-
ré à Y.________ et la manière dont celui-ci a pris la déci-
sion d'acquérir des titres D.________ ne font pas obstacle
à ce que son identité soit transmise à la COB. L'autorité
chargée de se prononcer sur la demande d'entraide n'est en
effet pas tenue d'examiner si les soupçons justifiant la
demande d'entraide sont confirmés ou infirmés par les in-
formations ou les explications recueillies à la demande de
l'autorité requérante. Seule cette dernière pourra, sur la
base de ses propres investigations et des informations
transmises par la Commission fédérale, décider si ses soup-
çons initiaux étaient ou non fondés. Au surplus, contraire-

ment à ce que pense la recourante, le secret bancaire suis-
se ne fait pas obstacle à l'octroi de l'entraide adminis-
trative lorsque les conditions posées par l'art. 38 LBVM
sont, comme en l'espèce, satisfaites (cf. ATF 125 II 83 et
les références citées). Il en va de même du secret bancaire
garanti par le droit des Bahamas, ainsi qu'on l'a vu ci-
dessus (cf. consid. 4c).

8.- A juste titre, l'intéressée ne soulève aucun
grief à l'encontre des chiffres 3 et 4 du dispositif de la
décision attaquée; elle s'y rallie même expressément en les
reprenant en substance dans les conclusions du présent re-
cours. En effet, selon la jurisprudence, le simple rappel à
la COB (cf. chiffre 4 du dispositif de la décision atta-
quée) de son obligation (cf. art. 38 al. 2 lettre c LBVM)
de requérir l'accord préalable de la Commission fédérale
avant toute transmission d'informations à des autorités non
pénales est suffisant (cf. ATF 126 II 86 consid. 7c p.
93-94). Par ailleurs, l'autorité intimée a estimé à bon
droit que toutes les conditions de l'entraide judiciaire en
matière pénale étaient remplies (cf. art. 38 al. 2 lettre c
in fine LBVM), de sorte que l'autorité requérante peut être
autorisée à transmettre, le cas échéant, des informations
aux autorités pénales françaises compétentes (cf. chiffre 3
du dispositif de la décision attaquée). De surcroît, le
consentement de l'Office fédéral de la police a été re-
cueilli conformément aux exigences posées par la jurispru-
dence (cf. ATF 126 II 86 consid. 7d/bb p. 94-95).

9.- Mal fondé, le présent recours doit être reje-
té.

Succombant, la recourante supporte les frais judi-
ciaires (art. 156 al. 1, 153 et 153a OJ) et n'a pas droit à
des dépens (art. 159 al. 1 OJ).

La Commission fédérale n'a pas droit à des dépens
(art. 159 al. 2 OJ).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Rejette le recours.

2. Met un émolument judiciaire de 3'000 fr. à la
charge de E.________.

3. Dit qu'il n'est pas alloué de dépens.

4. Communique le présent arrêt en copie au manda-
taire de la recourante ainsi qu'à la Commission fédérale
des banques.
____________

Lausanne, le 21 août 2000
DBA/elo

Au nom de la IIe Cour de droit public
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président,

Le Greffier,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2A.156/2000
Date de la décision : 21/08/2000
2e cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-08-21;2a.156.2000 ?
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