La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/08/2000 | SUISSE | N°1A.201/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 17 août 2000, 1A.201/2000


«»

1A.201/2000

Ie C O U R D E D R O I T P U B L I C
**********************************************

17 août 2000

Composition de la Cour: MM. les Juges Aemisegger, Président,
Féraud et Catenazzi. Greffier: M. Zimmermann.

Statuant sur le recours de droit administratif
formé par

A.X.________ et B.X.________, représentés par Me Maurice
Harari, avocat à Genève,

contre

l'arrêt rendu le 4 mai 2000 par la Chambre d'accusation du
canton de Genève;

(entraide judi

ciaire à la République italienne;
principe de la proportionnalité)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i ...

«»

1A.201/2000

Ie C O U R D E D R O I T P U B L I C
**********************************************

17 août 2000

Composition de la Cour: MM. les Juges Aemisegger, Président,
Féraud et Catenazzi. Greffier: M. Zimmermann.

Statuant sur le recours de droit administratif
formé par

A.X.________ et B.X.________, représentés par Me Maurice
Harari, avocat à Genève,

contre

l'arrêt rendu le 4 mai 2000 par la Chambre d'accusation du
canton de Genève;

(entraide judiciaire à la République italienne;
principe de la proportionnalité)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- Le 30 mars 1998, la banque American Express à
Genève (ci-après: la Banque), se fondant sur l'art. 305ter
al. 2 CP, a signalé au Procureur général du canton de Genève
que A.X.________ et B.X.________, titulaires auprès d'elles
des comptes n°aaa et bbb, seraient poursuivis en Italie no-
tamment pour corruption.

Le Procureur général a ouvert une information pénale
du chef de blanchissage d'argent (art. 305bis CP) et
ordonné,
le 3 avril 1998, le saisie conservatoire des comptes n°aaa
et
bbb.

Le 4 mai 1998, le Procureur général a informé le
Parquet de Pérouse des mesures qu'il avait prises, en appli-
cation de l'art. 67a de la loi fédérale sur l'entraide inter-
nationale en matière pénale, du 20 mars 1981 (RS 351.1;
EIMP).

B.- Le 28 mai 1998, Nicola Miriano, Procureur de la
République auprès du Tribunal de Pérouse, a adressé directe-
ment au Procureur général une demande d'entraide judiciaire
fondée sur la Convention européenne d'entraide judiciaire en
matière pénale, conclue à Strasbourg le 20 avril 1959 et en-
trée en vigueur le 12 juin 1962 pour l'Italie et le 20 mars
1967 pour la Suisse (CEEJ; RS 0.351.1.), ainsi que sur la
Convention européenne relative au blanchiment, au dépistage,
à la saisie et à la confiscation des produits du crime, con-
clue à Strasbourg le 8 novembre 1990, entrée en vigueur le
1er septembre 1993 pour la Suisse et le 1er mai 1994 pour
l'Italie (CBl; RS 0.311.53). La demande était présentée pour
les besoins de la procédure ouverte par le Procureur Miriano
notamment contre S.________, A.X.________, D.________ et
E.________, du chef de corruption dans les actes judiciaires

("corruzione in atti giudiziari"), délit réprimé par les
art.
319ter et 321 du Code pénal italien (CP it.), mis en
relation
avec les art. 81 et 110 de la même loi.

Selon l'exposé des faits joints à la demande, l'af-
faire s'insérait dans le complexe de la reprise, par la so-
ciété Y.________, de sociétés appartenant à l'entrepreneur
D.________. Celui-ci serait impliqué, avec le dénommé
U.________, dans la vente frauduleuse à Y.________ de biens
immobiliers appartenant à l'ancienne société d'Etat
Z.________, pour un prix surfait, et dans la corruption de
fonctionnaires y relative. Cette affaire dite des "Palais
d'Or" ("Palazzi d'Oro") avait conduit notamment à l'inculpa-
tion de l'avocat P.________, ainsi que des juges romains
Q.________ et V.________. Le produit de ces délits, d'un mon-
tant estimatif de 66'000'000'000 LIT, aurait permis de cons-
tituer un fonds secret destiné notamment à corrompre plu-
sieurs magistrats, dont S.________, juge à la Cour d'Appel
de
Rome. S.________ serait intervenu auprès de Procureur
I.________, chargé de l'affaire des "Palais d'Or", afin que
ses investigations épargnent D.________, E.________ et
X.________. En contrepartie, D.________ et E.________ au-
raient versé à S.________, par l'entremise de A.X.________,
des montants considérables (de l'ordre de plusieurs
milliards
de lires), opérés notamment sous le couvert de la société
O.________ gérée par X.________. S.________ aurait également
manoeuvré pour que la procédure concernant Z.________, qui
lui était attribuée, reste entièrement dans le for de la ju-
ridiction romaine, en vue d'assurer l'impunité de
D.________,
de X.________ et d'autres personnes impliquées dans l'affai-
re. X.________ était en outre poursuivi du chef de recel et
de blanchiment, pour avoir caché le produit de ces délits,
par l'intermédiaire du compte n°ccc, dont il était le titu-
laire auprès de la "Banca popolare" de Spolète. M.________
et
B.X.________, frère de A.X.________, étaient également pour-
suivis comme complices des délits mis à la charge de ce der-

nier. A la demande étaient joints des extraits de procès-
verbaux d'auditions ordonnées dans le cadre de la procédure
italienne.

La demande tendait à la transmission de la documen-
tation relative aux comptes ouverts auprès de la Banque au
nom de A.X.________ et B.X.________, ainsi que de
M.________,
à la saisie des fonds qui se trouveraient sur ces comptes,
ainsi que de la documentation relative aux comptes qui
auraient approvisionné les comptes des frères X.________ ou
de M.________, ou qui auraient reçu des fonds provenant de
ces comptes.

Le 5 juin 1998, l'Office fédéral de la police (ci-
après: l'Office fédéral), auquel le Procureur Miniano avait
adressé parallèlement la demande, en a confié l'exécution au
Juge d'instruction du canton de Genève.

Le 12 juin 1998, le Juge d'instruction est entré en
matière. Il a ordonné la saisie de la documentation bancaire
visée par la demande, ainsi que le séquestre des comptes ou-
verts au nom de A.X.________, B.X.________ et M.________.

Le 16 juillet 1998, la Banque a remis au Juge d'ins-
truction la documentation requise.

Le 21 septembre 1998, le Juge d'instruction a enten-
du les frères X.________. Ceux-ci ont consenti à une exécu-
tion simplifiée de la demande, au sens de l'art. 80c EIMP,
en
acceptant la transmission sans formalité des documents d'ou-
verture des comptes n°bbb et aaa, ainsi que des extraits de
ces comptes, à l'exclusion du détail des opérations effec-
tuées. Ils ont aussi acquiescé à la communication de deux dé-
clarations, datées du 21 septembre 1998, remises au Juge
d'instruction, seulement pour le cas où celui-ci serait dis-
posé à clore la procédure sans remettre d'autres documents

que ceux remis en application de l'art. 80e (recte: 80c)
EIMP. Ils ont demandé que toute transmission mentionne la
réserve de la spécialité. Selon les déclarations du 21 sep-
tembre 1998, les comptes n°bbb et aaa auraient été ouverts
uniquement dans des buts fiscaux, porteraient sur des opéra-
tions compensatoires entre les deux frères X.________, et ne
concerneraient en rien les faits et les personnes évoqués
dans la demande.

Le 5 novembre 1998, le Procureur Miniano a demandé
la remise de la documentation demandée. Il a indiqué que la
procédure concernant S.________ avec conduit à la saisie de
montants considérables et qu'il était nécessaire de procéder
à l'examen détaillé des comptes des frères X.________ et
de M.________.

Le 5 novembre 1998, la Banque a confirmé au Juge
d'instruction l'état des comptes n°bbb et aaa.

Le 4 janvier 1999, le Juge d'instruction a ordonné,
en application de l'art. 80c EIMP, la remise d'une partie de
la documentation bancaire concernant les comptes n°bbb et
aaa, des procès-verbaux des auditions du 21 septembre 1998
ainsi que des deux déclarations annexées. Le Juge d'instruc-
tion a réservé le principe de la spécialité.

Le 4 janvier 1999, le Juge d'instruction a rendu une
décision de clôture partielle de la demande et ordonné la
transmission de la documentation remise par la Banque, con-
cernant le compte de M.________. Le Juge d'instruction a
réservé le principe de la spécialité.

C.- Le 22 juillet 1999, le Ministère de la justice
et des Grâces de la République italienne a adressé au Dépar-
tement fédéral de justice et police une demande complémen-
taire fondée sur la CEEJ et la CBl.

Selon l'exposé des faits joint à la demande, rédigé
par le Procureur Miniano et daté du 2 juillet 1999,
A.X.________ et M.________ étaient inculpés désormais de
corruption lors d'actes judiciaires, de faux bilan et d'ap-
propriation indue, alors que B.X.________ était inculpé de
recel. Le renvoi des inculpés en jugement avait été demandé
le 5 janvier 1999. L'enquête ouverte en Italie avait permis
de confirmer les faits mis à la charge de A.X.________ et de
M.________, en relation avec S.________ et D.________.
M.________ aurait fait transférer tous les fonds se trouvant
sur son compte ouvert auprès de la Banque sur un compte ou-
vert au nom d'une société R.________, auprès de la Republic
National Bank à Guernesey. De même, avait été mis en
évidence
le rôle de A.X.________ dans l'affaire dites des "Palais
d'Or", consistant à assister non seulement D.________ et
E.________, mais aussi les dénommés F.________, A.G.________
et B.G.________. A.X.________ était aussi soupçonné de
n'avoir pas seulement agi à titre d'intermédiaire, mais
aussi
à des fins personnelles. L'entraide judiciaire accordée par
la Suisse au sujet de I.________, laissait apparaître que
les
fonds avaient passé du compte "W.________" dont P.________
était l'ayant droit, sur les comptes ouverts à Genève au nom
de A.X.________. La demande tendait à la remise de la docum-
entation intégrale relative aux comptes détenus auprès de la
Banque par A.X.________ et B.X.________, ainsi qu'à la
saisie
des fonds se trouvant sur ces comptes, notamment en vue de
leur confiscation.

Le 23 août 1999, le Juge d'instruction a rendu une
décision de clôture de la procédure d'entraide. Il a
confirmé
le séquestre des comptes dont A.X.________ et B.X.________
étaient les titulaires auprès de la Banque et ordonné la
transmission de la totalité de la documentation y relative.

Le 4 mai 2000, la Chambre d'accusation du canton de
Genève a rejeté le recours formé par A.X.________ et

B.X.________ contre la décision du 23 août 1999, qu'elle a
confirmée.

D.- Agissant par la voie du recours de droit admi-
nistratif, A.X.________ et B.X.________ demandent au
Tribunal
fédéral d'annuler la décision du 4 mai 2000, ainsi que les
décisions des 12 juin 1998 et 23 août 1999, et de refuser la
transmission de la documentation visées dans cette dernière
décision. Ils invoquent le principe de la proportionnalité.

La Chambre d'accusation se réfère à sa décision. Le
Juge d'instruction et l'Office fédéral proposent le rejet du
recours.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- a) La présente procédure d'entraide est régie
par la CEEJ et la CBl. Les dispositions de ces traités l'em-
portent sur le droit autonome qui régit la matière, soit
l'EIMP et son ordonnance d'exécution (OEIMP), qui sont appli-
cables aux questions non réglées, explicitement ou implicite-
ment, par le droit conventionnel et lorsque cette loi est
plus favorable à l'entraide que celui-ci (ATF 123 II 134
consid. 1a p. 136; 122 II 140 consid. 2 p. 142; 120 Ib 120
consid. 1a p. 122/123, 189 consid. 2a p. 191/192, et les ar-
rêts cités), sous réserve du respect des droits fondamentaux
(ATF 123 II 595 consid. 7c p. 617).

b) La voie du recours de droit administratif est
ouverte contre la décision confirmant la transmission de la
documentation bancaire à l'Etat requérant et la saisie de
comptes bancaires (art. 25 al. 1 EIMP).

c) Les conclusions qui vont au-delà de l'annulation
de la décision sont recevables (art. 25 al. 6 EIMP; art. 114
OJ; ATF 122 II 373 consid. 1c p. 375; 118 Ib 269 consid. 2e
p. 275; 117 Ib 51 consid. 1b p. 56, et les arrêts cités). Le
Tribunal fédéral examine librement si les conditions pour
accorder l'entraide sont remplies et dans quelle mesure la
collaboration internationale doit être prêtée (ATF 123 II
134
consid. 1d p. 136/137; 118 Ib 269 consid. 2e p. 275). Il sta-
tue avec une cognition pleine sur les griefs soulevés sans
être toutefois tenu, comme le serait une autorité de surveil-
lance, de vérifier d'office la conformité de la décision at-
taquée à l'ensemble des dispositions applicables en la ma-
tière (ATF 123 II 134 consid. 1d p. 136/137; 119 Ib 56
consid. 1d p. 59). L'autorité suisse saisie d'une requête
d'entraide en matière pénale n'a pas à se prononcer sur la
réalité des faits invoqués et ne peut que déterminer s'ils
constituent une infraction, tels qu'ils sont présentés dans
la demande. Cette autorité ne peut s'écarter des faits dé-
crits par l'Etat requérant qu'en cas d'erreurs, lacunes ou
contradictions évidentes et immédiatement établies (ATF 118
Ib 111 consid. 5b p. 121/122, 117 Ib 64 consid. 5c p. 88 et
les arrêts cités). Lorsque, comme en l'espèce, la décision
attaquée émane d'une autorité judiciaire, le Tribunal
fédéral
est lié par les faits constatés dans la décision, sauf s'ils
sont manifestement inexacts ou incomplets ou s'ils ont été
établis au mépris des règles essentielles de la procédure
(art. 105 al. 2 OJ; ATF 123 II 134 consid. 1e p. 137; 113 Ib
257 consid. 3d p. 266; 112 Ib 576 consid. 3 p. 585).

d) Les recourants ont qualité pour agir selon l'art.
80h let. b EIMP, mis en relation avec l'art. 9a let. a
OEIMP,
contre la transmission de la documentation relative aux comp-
tes n°bbb et aaa dont ils sont titulaires, ainsi qu'à la
saisie de ceux-ci (ATF 125 II 356 consid. 3b/bb p. 362; 123
II 161 consid. 1d/aa p. 164; 122 II 130 consid. 2a p.
132/133).

2.- Les recourants reprochent à la Chambre d'accusa-
tion d'avoir violé le principe de la proportionnalité.

a) Ne sont admissibles, au regard des art. 3 CEEJ et
64 EIMP, que les mesures de contrainte conformes au principe
de la proportionnalité. L'entraide ne peut être accordée que
dans la mesure nécessaire à la découverte de la vérité re-
cherchée par les autorités pénales de l'Etat requérant. La
question de savoir si les renseignements demandés
sont néces-
saires ou simplement utiles à la procédure pénale instruite
dans l'Etat requérant est en principe laissée à l'apprécia-
tion des autorités de cet Etat. L'Etat requis ne disposant
généralement pas des moyens lui permettant de se prononcer
sur l'opportunité de l'administration des preuves
déterminées
au cours de l'instruction menée à l'étranger, il ne saurait
substituer sur ce point sa propre appréciation à celle du ma-
gistrat chargé de l'instruction. La coopération internatio-
nale ne peut être refusée que si les actes requis sont sans
rapport avec l'infraction poursuivie et manifestement impro-
pres à faire progresser l'enquête, de sorte que la demande
apparaît comme le prétexte à une recherche indéterminée de
moyens de preuve (ATF 122 II 367 consid. 2c p. 371; 121 II
241 consid. 3a p. 242/243; 120 Ib 251 consid. 5c p. 255). Le
principe de la proportionnalité empêche aussi l'autorité re-
quise d'aller au-delà des requêtes qui lui sont adressées et
d'accorder à l'Etat requérant plus qu'il n'a demandé (ATF
121
II 241 consid. 3a p. 243, 118 Ib 111 consid. 6 p. 125, 117
Ib
64 consid. 5c p. 68 et les arrêts cités). Au besoin, il lui
appartient d'interpréter la requête selon le sens que l'on
peut raisonnablement lui donner; rien ne s'oppose à une in-
terprétation large de la requête s'il est établi que, sur
cette base, toutes les conditions à l'octroi de l'entraide
sont remplies; ce mode de procéder évite aussi une
éventuelle
demande complémentaire (ATF 121 II 241 consid. 3a p. 243).
Sur cette base, peuvent aussi être transmis des renseigne-
ments et des documents non mentionnés dans la demande d'en-

traide (arrêt non publié D. du 7 décembre 1998, consid. 5).
Il incombe à la personne visée de démontrer, de manière
claire et précise, en quoi les documents et informations à
transmettre excéderaient le cadre de la demande ou ne présen-
teraient aucun intérêt pour la procédure étrangère (ATF 122
II 367 consid. 2c p. 371/372). Lorsque la demande vise à
éclaircir le cheminement de fonds d'origine délictueuse, il
convient d'informer l'Etat requérant de toutes les transac-
tions opérées au nom des sociétés et des comptes impliqués
dans l'affaire (ATF 121 II 241 consid. 3c p. 244).

b) Dans un premier moyen, les recourants soutiennent
que la demande constituerait une recherche indéterminée de
preuves ("fishing expedition"), parce que la demande du 22
juillet 1999 ne se fonderait, selon eux, sur aucun fait nou-
veau par rapport à celle du 28 mai 1998.

La demande du 22 juillet 1999 complète celle du 28
mai 1998. Elle vise le même complexe de faits et concerne
les
mêmes suspects. Cela étant, la demande complémentaire ne se
limite pas à une simple réitération de ce qui avait été de-
mandé initialement. Dans son exposé du 2 juillet 1999, le
Procureur Miniano a mis en évidence, de manière détaillée,
les progrès de l'enquête conduite dans l'Etat requérant, qui
confortent les soupçons conçus au sujet des recourants. Des
déclarations à charge avaient été recueillies, attestant les
rapports étroits entre A.X.________, I.________, D.________
et les frères G.________ (dont l'implication n'était pas
signalée dans la demande du 28 mai 1998). De même, avait été
découvert le lien entre le compte "W.________", dont
P.________ était l'ayant droit, et les comptes n°bbb et aaa.
La nécessité d'éclaircir exactement les mouvements opérés
entre ces divers comptes justifie à elle seule de
transmettre
l'intégralité de la documentation saisie auprès de la
Banque.
La remise des documents d'ouverture, ainsi que de simples
relevés trimestriels, n'y suffit pas, contrairement à ce que

prétendent les recourants. Il est en effet indispensable que
le juge du fond ait un accès direct à l'intégralité de la
documentation bancaire saisie, afin de déterminer l'origine,
la nature et le but de chaque opération effectuée sur les
comptes n°bbb et aaa et de retracer le cheminement exact des
fonds. Cet examen détaillé est nécessaire pour confirmer ou
infirmer les soupçons qui pèsent sur les recourants.

c) Dans un deuxième moyen fondé sur le principe de
la proportionnalité, les recourants font valoir que le décès
de I.________, principal accusé, aurait diminué considérable-
ment l'intérêt de la procédure. Comme les recourants l'admet-
tent eux-mêmes, l'action pénale n'est pas éteinte contre
eux.
Elle conserve toute son importance, eu égard à la gravité
des
faits reprochés aux accusés.

d) Dans un troisième moyen, les recourants préten-
dent qu'il n'existerait aucun lien entre leurs comptes et
les
faits à l'origine de la procédure ouverte dans l'Etat requé-
rant. La demande complémentaire infirme cette allégation, le
Procureur Miniano indiquant avoir établi un lien entre l'un
des comptes de P.________ et ceux des recourants. Pour véri-
fier ce point, la remise de l'intégralité de la
documentation
bancaire est indispensable. Conformément à la jurisprudence
qui vient d'être rappelée, le juge de l'entraide n'a pas à
substituer sur ce point son appréciation à celle de l'auto-
rité de poursuite étrangère. Les pièces dont la transmission
a été ordonnée révèlent en outre que de nombreux mouvements
ont été effectués sur les comptes n°bbb et aaa. Ces opéra-
tions concernent des clients d'établissements bancaires
étrangers et portent souvent sur des montants élevés. Les
autorités italiennes soupçonnent les recourants, comme mem-
bres d'un réseau organisé à grande échelle, d'avoir organisé
l'exportation du produit des délits patrimoniaux commis au
détriment notamment de Y.________. La vérification de ce
soupçon exige que soient clarifiés tous les mouvements effec-

tués sur les comptes litigieux, y compris les opérations sur
devises, afin de retracer exactement le cheminement des
fonds
suspects. Pour le surplus, les recourants qui ont eu l'occa-
sion de se déterminer sur le sort et le tri de la documenta-
tion, n'indiquent pas précisément quelles pièces ne
devraient
pas être transmises et pour quel motif.

e) Dans un quatrième moyen, les recourants se préva-
lent de la levée, dans l'Etat requérant, des séquestres or-
donnés au premier stade de l'enquête en Italie. Ils en dédui-
sent, de manière implicite, que les fonds bloqués sur les
comptes n°bbb et aaa ne présenteraient aucune relation avec
les faits à l'origine de la demande.

Cette conception ne peut être partagée. Le fait que
des séquestres opérés dans l'Etat requérant aient dû être
levés faute d'indication que les fonds visés constitueraient
le produit des délits reprochés aux recourants, ne signifie
pas pour autant qu'il en irait de même, ipso facto, des
fonds
se trouvant sur les comptes n°bbb et aaa. Il apparaît au
contraire plausible que les auteurs des délits visés par la
demande aient cherché à en cacher le produit à l'étranger,
en
vue d'un rapatriement ultérieur.

f) Contrairement à ce qu'affirment les recourants,
au moins l'un d'eux (B.X.________) est prévenu de recel
("ricettazione" au sens de l'art. 648 CP it.) pour les faits
décrits dans les demandes des 28 mai 1998 et 22 juillet
1999,
comme l'indique la demande de renvoi en jugement du 5
janvier
1999. Au demeurant, si les recourants devaient être reconnus
coupables des autres délits pour lesquels il sont recherchés
(corruption et appropriation indue), la confiscation des
fonds se trouvant sur les comptes n°bbb et aaa pourrait de
toute manière être envisagée, comme produits de ces délits,
en application de la CBl.

3.- Le recours doit ainsi être rejeté. Les frais en
sont mis à la charge des recourants qui succombent (art. 156
al. 1 OJ). Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens (art. 159
al. 1 OJ).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Rejette le recours.

2. Met à la charge des recourants un émolument judi-
ciaire de 10'000 fr.

3. Dit qu'il n'est pas alloué de dépens.

4. Communique le présent arrêt en copie au manda-
taire des recourants, au Juge d'instruction et à la Chambre
d'accusation du canton de Genève ainsi qu'à l'Office fédéral
de la justice (B 110 662).

Lausanne, le 17 août 2000
ZIR/col
Au nom de la Ie Cour de droit public
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président, Le Greffier,


1re cour de droit public

Références :

Origine de la décision
Date de la décision : 17/08/2000
Date de l'import : 14/10/2011

Numérotation
Numéro d'arrêt : 1A.201/2000
Numéro NOR : 33677 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-08-17;1a.201.2000 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award