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06/07/2000 | SUISSE | N°B.10/00

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 06 juillet 2000, B.10/00


«»
B 10/00 Mh

IIe Chambre

composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, Meyer
et Ferrari; Beauverd, Greffier

Arrêt du 6 juillet 2000

dans la cause

G.________, recourant, représenté par Maître Pierre Bauer,
avocat, avenue Léopold-Robert 88, La Chaux-de-Fonds,

contre

La Bâloise-Fondation collective pour la prévoyance profes-
sionnelle obligatoire, Aeschengraben 21, Bâle, intimée,

et

Tribunal administratif du canton de Fribourg, Givisiez

A.- G.___

_____, marié et père de famille, sous cu-
ratelle volontaire, a bénéficié d'une mesure de formation
professionnelle initiale de l'...

«»
B 10/00 Mh

IIe Chambre

composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, Meyer
et Ferrari; Beauverd, Greffier

Arrêt du 6 juillet 2000

dans la cause

G.________, recourant, représenté par Maître Pierre Bauer,
avocat, avenue Léopold-Robert 88, La Chaux-de-Fonds,

contre

La Bâloise-Fondation collective pour la prévoyance profes-
sionnelle obligatoire, Aeschengraben 21, Bâle, intimée,

et

Tribunal administratif du canton de Fribourg, Givisiez

A.- G.________, marié et père de famille, sous cu-
ratelle volontaire, a bénéficié d'une mesure de formation
professionnelle initiale de l'assurance-invalidité, en tant
qu'aide soignant à l'institut C.________. Au terme de cette
période de formation, qui a duré du mois de mars 1987 au
mois de juillet 1988, il a obtenu un certificat d'aptitude

professionnelle délivré par la Croix-Rouge. Il a ensuite
travaillé comme aide-soignant, à raison d'un horaire de
travail complet, du 1er août au 31 décembre 1988, au
service du home médicalisé Z.________. Durant toute l'année
1989, il a travaillé au service de l'Hôpital X.________. Du
1er février 1990 au 28 février 1991, il a oeuvré pour le
compte du home médicalisé X.________. A ce titre, il était
affilié au Fonds de prévoyance en faveur du personnel du
home médicalisé X.________ (ci-après : le Fonds de pré-
voyance X.________). Dès le 1er mars 1991, il a travaillé à
la Résidence M.________. Il y a d'abord exercé une activité
à plein-temps jusqu'au 30 novembre 1991. Puis, son
employeur ayant estimé que son rendement était insuffisant,
l'assuré a vu son salaire réduit à 80 % à partir du
1er décembre 1991. Enfin, son salaire a été ramené à 25 %
du 1er novembre 1992 au 28 février 1993, date à laquelle il
a été licencié par son employeur. Durant son activité au
service de la Résidence M.________, il était affilié à la
Fondation collective LPP de la Bâloise Vie pour la pré-
voyance professionnelle (ci-après : la Fondation collective
LPP).
Le 31 mars 1992, G.________ a présenté une demande
tendant à l'octroi d'une rente de l'assurance-invalidité.
Par décision du 15 octobre 1992, la Caisse de compensation
du canton de Fribourg lui a accordé, à partir du 1er mars
1991 - soit pour les douze mois précédant le dépôt de la
demande - une rente entière d'invalidité, assortie de
rentes complémentaires correspondantes. Cette décision
était fondée sur un prononcé de la Commission de l'assu-
rance-invalidité (CAI) du canton de Fribourg, du 30 juillet
1992, laquelle avait constaté un taux d'invalidité de 82 %
à partir du 1er septembre 1986, conformément à une
proposition du secrétariat de la CAI du 24 juillet 1992.

Invitée à se déterminer sur le droit éventuel de
l'assuré à des prestations d'invalidité, la Fondation
collective LPP a nié tout droit à prestations et a révoqué
l'affiliation, motif pris que, sur le vu de la décision de
la Caisse de compensation du canton de Fribourg du 15 octo-
bre 1992, l'intéressé était invalide à 80 % le 1er mars
1991, date de son engagement par la Résidence M.________
(lettre du 20 octobre 1992).

B.- Par jugement du 26 juin 1996, le Tribunal adminis-
tratif du canton de Fribourg a rejeté une action intentée
par G.________ contre le Fonds de prévoyance X.________,
tendant à l'octroi de prestations d'invalidité. Le prénommé
n'a pas recouru contre ce jugement.

C.- En revanche, il a ouvert action contre la Fonda-
tion collective LPP, en concluant à l'octroi, dès le
1er novembre 1992, subsidiairement dès le 1er mars 1993,
d'une rente entière d'invalidité LPP d'un montant mensuel
de 658 fr. 50 (supplément d'adaptation à l'évolution des
prix et augmentation liée au début de l'assurance fixée au
1er mars 1991, non compris), avec intérêt à 5 % l'an.
Par jugement du 16 décembre 1999, le Tribunal adminis-
tratif du canton de Fribourg a rejeté l'action dont il
était saisi.

D.- G.________, dûment autorisé par l'autorité tuté-
laire, interjette un recours de droit administratif contre
ce jugement, dont il requiert l'annulation, en reprenant,
sous suite de dépens, ses conclusions formées devant la
juridiction cantonale.
La Fondation collective LPP conclut au rejet du re-
cours, sous suite de dépens, ce que propose également
l'Office fédéral des assurances sociales.

Considérant en droit :

1.- Le présent litige relève des autorités juri-
dictionnelles mentionnées à l'art. 73 LPP, tant du point de
vue de la compétence ratione temporis (ATF 117 V 52,
115 V 228 consid. 1b et 247 consid. 1a et les références)
que de celui de la compétence ratione materiae (ATF
117 V 51, 114 V 105 consid. 1b), et le recours de droit
administratif est recevable de ce chef.

2.- Dans la procédure de recours concernant l'octroi
ou le refus de prestations d'assurance, le pouvoir d'examen
du Tribunal fédéral des assurances n'est pas limité à la
violation du droit fédéral - y compris l'excès et l'abus du
pouvoir d'appréciation - mais s'étend également à l'oppor-
tunité de la décision attaquée. Le tribunal n'est alors pas
lié par l'état de fait constaté par la juridiction infé-
rieure, et il peut s'écarter des conclusions des parties à
l'avantage ou au détriment de celles-ci (art. 132 OJ).

3.- Le jugement entrepris expose de manière exacte et
détaillée les dispositions légales et les principes juris-
prudentiels concernant le droit aux prestations d'invalidi-
té des personnes qui étaient assurées lors de la survenance
de l'incapacité de travail dont la cause est à l'origine de
l'invalidité (art. 23 LPP). Il suffit donc d'y renvoyer. Il
convient d'ajouter que l'incapacité de travail est la perte
ou la diminution de la capacité de rendement de l'assuré
dans sa profession ou son champ d'activités habituels. Pour
être prise en considération, la diminution du rendement
professionnel doit être sensible et indiscutable; en outre,
cet état de fait doit être durable. En revanche, l'inca-
pacité éventuelle de gains n'est pas pertinente (ATF
105 V 159 consid. 2a).

Lorsque, dans la prévoyance obligatoire, une insti-
tution de prévoyance reprend la même notion d'invalidité
que l'assurance-invalidité, elle est liée par le prononcé
des organes d'application de la LAI en ce qui concerne non
seulement la fixation du degré d'invalidité (ATF
115 V 208), mais également le moment de la survenance d'une
incapacité de travail invalidante (ATF 118 V 36). Elle ne
peut s'en écarter que si les constatations des organes de
l'assurance-invalidité apparaissent d'emblée insoutenables
(ATF 115 V 208).

4.- a) Les premiers juges ont nié le droit de
G.________ à des prestations d'invalidité de la Fondation
collective LPP, motif pris que «les troubles psychiques
dont souffre (le prénommé) depuis son enfance ... sont les
mêmes qui l'ont handicapé dans sa formation professionnelle
et qu'il n'a pu dépasser que grâce à un encadrement tout à
fait particulier en dehors des voies d'apprentissage ordi-
naires et qui le handicapent et continuent à le handicaper
dans la vie active, mais cette fois avec effet négatif vu
l'absence de ce même encadrement, de cette même protection
sécurisante pour lui».

b) Cette motivation est erronée. Ce qui est détermi-
nant, au sens de l'art. 23 LPP et de la jurisprudence y
relative, c'est le moment non pas de l'apparition de
l'atteinte à la santé, mais de la survenance de l'incapa-
cité de travail qui en résulte. Par ailleurs, même si
l'institution de prévoyance intimée a repris la notion
d'invalidité de l'assurance-invalidité, le prononcé de la
Commission de l'assurance-invalidité du canton de Fribourg
du 30 juillet 1992 ne saurait, en l'espèce, lier les
organes d'application de la LPP ni le juge, en ce qui
concerne le moment de la survenance de l'incapacité de

travail invalidante. En effet, dans la mesure où la CAI a
fixé au 1er septembre 1986 le début de l'incapacité de gain
(tout en arrêtant au 1er mars 1991, soit 12 mois avant le
dépôt de la demande, le début du droit à prestations),
cette constatation apparaît d'emblée insoutenable. L'assuré
a bénéficié, du mois de mars 1987 au mois de juillet 1988,
d'une mesure de formation professionnelle initiale de
l'assurance-invalidité, à l'issue de laquelle il a obtenu
son certificat d'aptitude professionnelle. Auparavant, il
avait suivi, du 25 août 1986 au 28 février 1987, un stage
d'observation en vue d'une orientation professionnelle. Les
organes de l'assurance-invalidité ne pouvaient donc pas
faire état de la survenance d'une incapacité de travail
invalidante, avant même que n'aient été entreprises et
menées à chef les mesures de réadaptation nécessaires (cf.
art. 28 al. 2 LAI).

5.- En l'espèce, le recourant a occupé quatre emplois
après l'obtention de son certificat d'aptitude profes-
sionnelle. En premier lieu, il a travaillé, à un taux
d'occupation de 100 %, au service du Home médicalisé
Z.________ (du 1er août au 31 décembre 1988), puis de
l'Hôpital Y.________ (du 1er janvier au 31 décembre 1989).
Pendant toute cette période, il a été incapable de
travailler à diverses reprises en raison d'une opération au
nez (du 29 septembre au 10 octobre 1988), d'une opération
de l'appendicite (du 10 au 30 avril 1989) et des suites
d'un accident (du 22 octobre au 8 novembre 1989). Ensuite,
le recourant a travaillé, toujours à un taux d'occupation
de 100 %, au service du Home médicalisé X.________ (du
1er février 1990 au 28 février 1991). Au cours de cet
emploi, il n'a subi qu'une courte période d'incapacité de
travail en raison d'une hospitalisation (du 13 au 20 juin
1990). Enfin, le recourant a été engagé au service de la

Résidence M.________ à partir du 1er mars 1991, à un taux
d'occupation de 100 %. Ce n'est qu'à partir du 1er décembre
1991 que son employeur a réduit le salaire à 80 %, au motif
que le rendement du recourant ne correspondait pas à un
horaire de travail complet. Finalement, le salaire a été
ramené à 25 % à partir du 1er novembre 1992. Les rapports
de travail ont été résiliés par l'employeur avec effet au
28 février 1993. G.________ a bénéficié, à partir du
1er mars 1991 - soit pour les 12 mois précédant le dépôt de
la demande (cf. art. 48 al. 2 LAI) - d'une rente entière
d'invalidité en raison de troubles de la personnalité
(histrionique et dépendante) chez une personne d'intel-
ligence limite avec suspicion de somatisations, notamment
d'épilepsie (rapport du docteur T.________ du 19 juin
1992).
Cela étant, force est de constater que l'incapacité de
travail dont la cause est à l'origine de l'invalidité du
recourant est survenue durant la période de son affiliation
à l'institution de prévoyance intimée. En effet, les at-
teintes à la santé qui ont entraîné des périodes d'inca-
pacité de travail au cours de ses deux premiers emplois (du
1er août au 31 décembre 1988, puis du 1er janvier au 31 dé-
cembre 1989) sont sans aucun rapport avec les troubles à
l'origine de l'invalidité. Il en va de même de la période
d'incapacité de travail du 13 au 20 juin 1990, comme l'a
pertinemment constaté le Tribunal administratif cantonal
dans son jugement du 26 juin 1996 dans le litige opposant
le recourant à l'institution de prévoyance du Home médi-
calisé X.________.
Certes, sur le vu des pièces versées au dossier, le
recourant présentait déjà certains troubles de la person-
nalité avant son engagement au service de la Résidence
M.________. Il n'en demeure pas moins que c'est seulement à
partir du mois de décembre 1991 que ces troubles ont été

d'une gravité telle qu'ils ont entraîné une incapacité de
travail au sens de la jurisprudence exposée au consid. 3.
Vu ce qui précède, force est de constater que l'in-
capacité de travail dont la cause est à l'origine de
l'invalidité est survenue durant la période où le recourant
était affilié à l'institution de prévoyance intimée. Le
taux d'invalidité étant par ailleurs supérieur à 50 %, le
recourant a droit à des prestations d'invalidité de la
prévoyance professionnelle. Le recours se révèle ainsi bien
fondé.

6.- Le recourant, qui obtient gain de cause, est
représenté par un avocat. Il a droit à une indemnité de
dépens (art. 159 al. 1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est admis et le jugement du Tribunal
administratif du canton de Fribourg du 16 décembre
1999 est annulé; le recourant a droit à des presta-
tions d'invalidité de la prévoyance professionnelle.

II. La cause est renvoyée à ladite juridiction, afin
qu'elle statue sur le montant des prestations dues par
la Fondation collective LPP de la Bâloise Vie pour la
prévoyance professionnelle.

III. Il n'est pas perçu de frais de justice.

IV. L'intimée versera au recourant la somme de 2500 fr.
(y compris la taxe à la valeur ajoutée) à titre
d'indemnité de dépens pour l'instance fédérale.

V. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au
Tribunal administratif du canton de Fribourg, Cour des
assurances sociales, et à l'Office fédéral des assu-
rances sociales.

Lucerne, le 6 juillet 2000

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la IIe Chambre :

p. le Greffier :


Synthèse
Numéro d'arrêt : B.10/00
Date de la décision : 06/07/2000
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-07-06;b.10.00 ?
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