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26/06/2000 | SUISSE | N°I.711/99

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 26 juin 2000, I.711/99


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I 711/99 Mh

IIe Chambre

composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, Meyer
et Ferrari; Berset, Greffière

Arrêt du 26 juin 2000

dans la cause

Office de l'assurance-invalidité du canton de Vaud, avenue
Général-Guisan 8, Vevey, recourant,

contre

C.________, intimé, représenté par Maître Denis Bridel,
avocat, avenue C.-F.-Ramuz 60, Lausanne-Pully,

et

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

A.- a) C.________ a travaillé en qualité

de magasinier
chez P.________. A ce titre, il était assuré contre les
accidents professionnels et non professionnels auprès de la
...

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I 711/99 Mh

IIe Chambre

composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, Meyer
et Ferrari; Berset, Greffière

Arrêt du 26 juin 2000

dans la cause

Office de l'assurance-invalidité du canton de Vaud, avenue
Général-Guisan 8, Vevey, recourant,

contre

C.________, intimé, représenté par Maître Denis Bridel,
avocat, avenue C.-F.-Ramuz 60, Lausanne-Pully,

et

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

A.- a) C.________ a travaillé en qualité de magasinier
chez P.________. A ce titre, il était assuré contre les
accidents professionnels et non professionnels auprès de la
Zurich Compagnie d'assurances (ci-après : la Zurich). Le

8 mai 1995, il a été heurté par la porte d'un monte-charge
qui se refermait. Le docteur M.________ a diagnostiqué une
contusion du nez, une cervicalgie post-traumatique et une
distorsion P1-P2 de l'annulaire droit (rapport du 12 mai
1995). La Zurich a pris le cas en charge.

b) Dans un rapport du 13 octobre 1995, les docteurs
N.________ et L.________, médecins au service de neurologie
du Centre Hospitalier X.________, ont posé le diagnostic de
cervicalgies et post-traumatisme cervical indirect et fait
état d'une apparente symptomatologie dépressive liée à
l'accident.
Dans un rapport du 26 janvier 1996, les docteurs
O.________ et G.________, respectivement chef de clinique
et médecin assistant au Département Universitaire de
psychiatrie Y.________, ont diagnostiqué un syndrome
douloureux somatoforme persistant chez une personnalité
fruste à l'intelligence limite. A la suite d'un accident
mineur, l'assuré était devenu totalement invalide.
Une expertise a été confiée aux médecins du Centre
Multi-disciplinaire de la douleur. Dans un rapport du
23 juin 1996, le docteur R.________, spécialiste en
psychiatrie et psychothérapie, et B.________, psychologue,
ont diagnostiqué un processus de revendication chez une
personnalité prépsychotique, fruste, compensée. L'assuré
présentait les troubles définis au chiffre F 68.0 de la
Classification Internationale des Troubles Mentaux et des
Troubles du Comportement établie par l'OMS (CIM-10) :
majoration des symptômes physiques pour des raisons psy-
chologiques. Il n'existait plus de lien de causalité na-
turelle avec l'accident.
Par décision du 9 juillet 1996, la Zurich a mis un
terme au paiement de ses prestations, avec effet au 30 juin
1996. Cette détermination a été confirmée par décision sur
opposition du 17 décembre 1996.

c) Le 3 juillet 1996, C.________ a déposé une demande
de prestations de l'assurance-invalidité, tendant à
l'octroi d'une rente.
Par décision du 30 juin 1997, l'Office de l'assurance-
invalidité du canton de Vaud (ci-après : OAI) a rejeté la
demande de prestations de l'assuré, au motif qu'il ne pré-
sentait pas une atteinte invalidante à la santé.

B.- a) Par acte du 17 mars 1997, C.________ a recouru
devant le Tribunal des assurances du canton de Vaud contre
la décision sur opposition de la Zurich, en concluant à sa
réformation.
Par acte du 5 août 1997, C.________ a recouru devant
le même tribunal contre la décision de l'OAI du 30 juin
1997, en demandant qu'un degré d'invalidité de 75 % au
moins lui soit reconnu.
Les causes ont été jointes.

b) Dans le cadre de l'instruction, le Centre de trai-
tement psychiatrique de jour (ci-après : CTPJ) de
Y.________ produit un rapport d'expertise du 8 septembre
1997. Le diagnostic posé était celui d'un état de stress
post-traumatique (chiffre F 43.10 CIM-10) et d'une
organisation psychotique de la personnalité. L'accident de
travail avait compromis l'équilibre fragile du patient en
faisant resurgir une souffrance due aux deuils incomplets
de sa vie. C.________ avait accepté de reprendre le travail
à 50 %.
Dans un rapport du 27 octobre 1997, la doctoresse
T.________, psychiatre traitant, a confirmé qu'une reprise
de l'activité à 50 % avait pu avoir lieu, ce qui rendait le
pronostic moins défavorable. Par ailleurs, son patient ne
lui était jamais apparu simulateur, tout au plus très
démonstratif. Elle a précisé, le 5 mars 1998, qu'il avait
pu maintenir sa capacité de travail de 50 % dans une

activité adaptée, au prix d'importants efforts; elle
préconisait la mise en oeuvre d'une nouvelle expertise
psychiatrique.
Le 19 mai 1998, le docteur V.________ a confirmé que
le taux d'incapacité de travail de 50 % retenu par la
doctoresse T.________ lui paraissait approprié, dans les
circonstances actuelles et compte tenu de l'évolution
depuis mai 1995.
Quant à l'employeur, il a donné des indications dont
il ressort que l'incapacité de travail de l'assuré oscil-
lait entre 100 % et 50 %, mais se situait le plus souvent
autour de 75 % (lettre du 12 mars 1998).

e) Statuant le 28 avril 1999, le Tribunal des assu-
rances du canton de Vaud a rejeté le recours formé par
l'assuré contre la décision sur opposition de la Zurich du
17 décembre 1996. En revanche, il a admis le recours dirigé
contre la décision de l'OAI du 30 juin 1997, en ce sens que
le recourant avait droit à une rente entière de l'assu-
rance-invalidité, à partir du 1er mai 1996. Le dossier
était renvoyé à cet office pour qu'il entreprenne immé-
diatement une révision et rende une nouvelle décision
(chiffres IV à VII du dispositif).

C.- L'OAI interjette un recours de droit administratif
contre ce jugement dont il demande l'annulation en con-
cluant, principalement, à la confirmation de sa décision du
30 juin 1997 et, subsidiairement, au renvoi du dossier à
l'administration pour mise en oeuvre d'une nouvelle
expertise.
Demandant l'assistance judiciaire, C.________ conclut
au rejet du recours avec suite de frais et dépens. La
Zurich conclut au maintien du jugement entrepris en ce qui
la concerne et s'en remet à dire de justice pour le
surplus. L'Office fédéral des assurances sociales ne s'est
pas déterminé.

Considérant en droit :

1.- Est litigieux le droit de l'intimé à une rente de
l'assurance-invalidité.

2.- a) Lorsque des expertises ordonnées au stade de la
procédure administrative sont établies par des spécialistes
reconnus, sur la base d'observations approfondies et d'in-
vestigations complètes, ainsi qu'en pleine connaissance du
dossier, et que les experts aboutissent à des résultats
convaincants, le juge ne saurait les écarter aussi long-
temps qu'aucun indice concret ne permet de douter de leur
bien-fondé (ATF 122 V 161 consid. 1c et les références).
En présence d'avis médicaux contradictoires, le juge
doit apprécier l'ensemble des preuves à disposition et
indiquer les motifs pour lesquels il se fonde sur une ap-
préciation plutôt que sur une autre. En ce qui concerne la
valeur probante d'un rapport médical, ce qui est détermi-
nant c'est que les points litigieux importants aient fait
l'objet d'une étude approfondie, que le rapport se fonde
sur des examens complets, qu'il prenne également en con-
sidération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en
pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la des-
cription des interférences médicales et l'analyse de la
situation médicale soient claires et enfin que les con-
clusions de l'expert soient bien motivées (ATF 125 V 352
consid. 3a).

b) En l'espèce, les avis médicaux relatifs aux affec-
tions psychiques sont totalement divergents. Les neuro-
logues de X.________ ont évoqué une possible symptomato-
logie dépressive liée à l'accident. Les docteurs O.________
et G.________ ont retenu un syndrome douloureux somatoforme
persistant chez une personnalité fruste à l'intelligence
limite. Le CTPJ a constaté l'existence d'un stress post-

traumatique et d'une organisation psychotique de la
personnalité. La doctoresse T.________ a fait état d'une
personnalité psychotique et d'une symptomatologie
dépressive «qui s'est partiellement amendée» (selon le
rapport du 27 octobre 1997). Enfin, l'expert R.________ a
retenu une majoration des symptômes physiques pour des
raisons psychologiques et une névrose de revendication.
Les conséquences de ces affections font également
l'objet d'appréciations divergentes. Alors que les docteurs
O.________ et G.________ considèrent l'intimé comme
totalement invalide, les médecins du CTPJ, sans fixer
expressément la capacité de travail effective de l'intimé,
ont pris note de son acceptation de travailler à 50 % à
partir d'août 1997. C'est ce taux qui est retenu par le
doctoresse T.________ dans ses rapports des 27 octobre 1997
et 5 mars 1998. Quant au premier médecin traitant, le
docteur M.________ - qui a suivi l'intimé du 12 mai 1995 au
10 juillet 1996 - il était d'avis que son patient aurait dû
pouvoir reprendre le travail à 100 %, à partir du
10 septembre 1996. Le docteur V.________, nouveau médecin
traitant, a fixé le taux d'incapacité de travail de son
patient à 75 %, dès le 15 juillet 1996. Par la suite, il a
fait état d'un taux d'incapacité de travail de 50 %
(rapport du 19 mai 1998). Pour sa part, le docteur
R.________ n'a pas indiqué si et dans quelle mesure les
troubles qu'il a diagnostiqués revêtaient un caractère
invalidant.
Dans ces circonstances, et contrairement à l'avis des
juges cantonaux, il n'est pas possible de statuer en fait
sur la situation de l'assuré ni d'en tirer les conséquences
en droit. On ne comprend d'ailleurs pas comment l'autorité
cantonale - qui déclare s'être fondée sur les conclusions
de la doctoresse T.________ et du CTPJ (p. 28 du jugement
cantonal) - a pu retenir une incapacité de travail de deux
tiers, alors que ni cette praticienne, ni le CTPJ ne font
état d'un taux d'incapacité de travail supérieur à 50 %. En

tout état de cause et contrairement à ce que laisse enten-
dre le jugement (p. 29 let. c), l'autorité cantonale
n'était pas fondée à assimiler le taux effectif du travail
fourni par l'intimé selon les déclarations de l'employeur
(25 % environ) à son degré de capacité de travail.
Un complément d'instruction s'impose dès lors, afin de
déterminer si et dans quelle mesure la capacité de travail
de l'assuré est diminuée par une atteinte à la santé
psychique.

3.- Vu la nature du litige, la procédure est gratuite
(art. 134 OJ). Dans la procédure, l'intimé est représenté
par un avocat dont l'assistance était nécessaire au vu des
circonstances et de la complexité du dossier. Dans ces
conditions, la requête d'assistance judiciaire peut être
admise, le requérant étant rendu attentif au fait qu'il
devra rembourser la caisse du tribunal s'il devient
ultérieurement en mesure de le faire (art. 152 al. 3 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est admis. Les chiffres IV à VI du jugement
du Tribunal des assurances du canton de Vaud du
28 avril 1999, ainsi que la décision de l'Office
cantonal vaudois de l'assurance-invalidité du 30 juin
1997 sont annulés, la cause étant renvoyée audit of-
fice pour complément d'instruction au sens des consi-
dérants et nouvelle décision sur le droit éventuel de
l'intimé à une rente ordinaire d'invalidité.

II. Il n'est pas perçu de frais de justice, ni alloué de
dépens.

III. L'assistance judiciaire est accordée. Les honoraires
de Me Bridel sont fixés à 2000 fr. pour la procédure
fédérale et seront supportés par la caisse du
tribunal.

IV. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tri-
bunal des assurances du canton de Vaud, à la Zurich
Compagnie d'assurances et à l'Office fédéral des
assurances sociales.

Lucerne, le 26 juin 2000

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la IIe Chambre :

La Greffière :


Synthèse
Numéro d'arrêt : I.711/99
Date de la décision : 26/06/2000
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-06-26;i.711.99 ?
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