La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/06/2000 | SUISSE | N°2A.54/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 23 juin 2000, 2A.54/2000


2A.54/2000
«»

IIe C O U R D E D R O I T P U B L I C
************************************************

23 juin 2000

Composition de la Cour: MM. les Juges Wurzburger, président,
Müller et Zappelli, juge suppléant. Greffière: Mme Rochat.

Statuant sur le recours de droit administratif
formé par

IS.________ et ses enfants A.________, B.________ et
C.________, tous représentés par Me Louis Bagi, avocat à
Lausanne,

contre

la décision prise le 23 décembre 1999 par le Tribunal ad

mi-
nistratif du canton de Vaud, dans la cause qui oppose les re-
courants au Service de la population du Départeme...

2A.54/2000
«»

IIe C O U R D E D R O I T P U B L I C
************************************************

23 juin 2000

Composition de la Cour: MM. les Juges Wurzburger, président,
Müller et Zappelli, juge suppléant. Greffière: Mme Rochat.

Statuant sur le recours de droit administratif
formé par

IS.________ et ses enfants A.________, B.________ et
C.________, tous représentés par Me Louis Bagi, avocat à
Lausanne,

contre

la décision prise le 23 décembre 1999 par le Tribunal admi-
nistratif du canton de Vaud, dans la cause qui oppose les re-
courants au Service de la population du Département des ins-
titutions et des relations extérieures du canton de Vaud;

(art. 17 al. 2 LSEE, 8 CEDH: regroupement familial)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- Les époux IS.________ et HS.________, ressortis-
sants du Kosovo, résident à Lausanne et sont au bénéfice
d'un
permis d'établissement. Au mois de juillet 1998, ils ont
fait
venir en Suisse leurs trois enfants, A.________, née en
1983,
B.________, né en 1985 et C.________, né en 1987, pour les-
quels ils ont formulé une demande de regroupement familial
et
d'autorisation de séjour auprès des autorités du canton de
Vaud.

Par décision du 20 janvier 1999, le Département des
institutions et des relations extérieures du canton de Vaud,
soit l'Office cantonal des étrangers, a rejeté la demande.
Il
a notamment retenu que la famille IS.________ bénéficiait
des
prestations de l'aide sociale vaudoise en complément d'une
rente de l'assurance invalidité pour incapacité de gain de
60% de IS.________ et qu'en conséquence, des raisons d'assis-
tance publique s'opposaient à l'octroi de l'autorisation sol-
licitée.

Le 16 février 1999, le Bureau communal des étrangers
de Lausanne a cependant retourné la décision à l'Office can-
tonal pour le motif que l'intéressé avait refusé de signer
le
procès-verbal de notification et de payer la taxe requise.
Dans sa lettre du 25 février 1999, l'Office cantonal des
étrangers a invité le Bureau communal à préciser si
IS.________ avait lu ladite décision ou si, au contraire, il
n'avait même pas daigné lire le courrier qui lui était pré-
senté. Le Bureau communal a répondu par la note manuscrite
suivante: "Monsieur S.________ nous a dit ne pas savoir
lire.
Une de mes collaboratrices lui a donc lu la notification du
refus. Non seulement il a refusé de signaler (sic!) mais a
fait preuve d'une certaine agressivité à l'endroit de mon
employée qui a dû faire recours au soussigné pour arbitrage".

Donnant suite à la requête de l'Office cantonal des
étrangers du 9 mars 1999, le Bureau communal a alors
attesté,
sur un exemplaire de la décision, la date de la
communication
orale de celle-ci, soit le 16 février 1999 avec, sous la ru-
brique: "signature de l'étranger", la mention manuscrite:
"Refusé de signer".

B.- Le 5 novembre 1999, réagissant à une convoca-
tion-rappel l'invitant à procéder au départ de ses enfants,
IS.________ a prétendu n'avoir jamais reçu de décision ordon-
nant l'éloignement de ces derniers. Par l'entremise de son
avocat, il a requis les formulaires à remplir aux fins de dé-
poser une demande d'autorisation de séjour pour ses enfants.

L'Office cantonal lui ayant répondu qu'une décision
de refus avait déjà été notifiée, IS.________ et ses enfants
ont, le 6 décembre 1999, formé un recours auprès du Tribunal
administratif du canton de Vaud contre la "prétendue notifi-
cation de la décision rendue le 20 janvier 1999 par l'Office
cantonal de contrôle des habitants et de police des
étrangers
à l'encontre des recourants", concluant à ce que ladite déci-
sion soit notifiée à leur représentant légal ou à leur avo-
cat.

Par décision du 23 décembre 1999, le Juge instruc-
teur du Tribunal administratif a déclaré le recours irrece-
vable pour cause de tardiveté.

C.- IS.________ et ses enfants forment un recours de
droit administratif auprès du Tribunal fédéral contre la dé-
cision du 23 décembre 1999 et concluent à son annulation,

avec suite de frais et dépens. Ils demandent au Tribunal fé-
déral, principalement d'ordonner la notification de la déci-
sion de l'Office cantonal des étrangers du 20 janvier 1999,
subsidiairement de renvoyer la cause à l'autorité cantonale
pour statuer sur le fond. Les recourants ont également pré-
senté une demande d'assistance judiciaire complète pour la
procédure devant le Tribunal fédéral. Ils ont cependant ef-
fectué l'avance de frais requise.

Le Tribunal administratif conclut au rejet du re-
cours et le Département des institutions et des relations
extérieures s'en remet à ses déterminations. L'Office
fédéral
des étrangers propose aussi de rejeter le recours.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- a) Dirigé contre une décision de non entrée en
matière pour cause de tardiveté du recours cantonal au sujet
d'une autorisation de séjour pour regroupement familial, le
présent recours est recevable comme recours de droit adminis-
tratif, en vertu des art. 97ss OJ (ATF 123 I 275 consid. 2c
p. 277). Il échappe en particulier à la clause d'irrecevabi-
lité de l'art. 100 al. 1 lettre b ch. 3 OJ, dans la mesure

l'art. 17 al. 2 de la loi fédérale sur le séjour et l'éta-
blissement des étrangers (LSEE; RS 142.20) confère aux en-
fants célibataires de moins de dix-huit ans un droit d'être
inclus dans l'autorisation d'établissement de leurs parents,
aussi longtemps qu'ils vivent auprès d'eux (ATF 124 II 361
consid. 1b p. 364 et les arrêts cités).

Il y a donc lieu d'entrer en matière sur le recours.

b) Saisi d'un recours de droit administratif dirigé
contre une décision émanant, comme en l'espèce, d'une autori-
té judiciaire, le Tribunal fédéral est lié par les faits
constatés dans cette décision, sauf s'ils sont manifestement
inexacts ou incomplets, ou s'ils ont été établis au mépris
de
règles essentielles de procédure (art. 105 al. 2 OJ).

2.- Le recourant soutient principalement que la dé-
cision de l'Office cantonal des étrangers du 20 janvier 1999
ne lui a pas été notifiée valablement. Comprenant mal le
français, il n'aurait pas saisi la portée exacte de cette dé-
cision. En se contentant d'une communication orale, l'autori-
té cantonale aurait donc agi contrairement au principe de la
bonne foi.

a) Une décision ou une communication de procédure
est notifiée, non pas au moment où le justiciable en prend
connaissance, mais le jour où elle est dûment communiquée;
s'agissant d'un acte soumis à réception, la notification est
réputée parfaite au moment où l'envoi entre dans la sphère
d'influence de son destinataire. Il suffit que celui-ci puis-
se en prendre connaissance (ATF 118 II 42, consid. 3b p. 44,
115 Ia 12 consid. 3b p. 17 et les références citées; Grisel,
Traité de droit administratif, vol. II p. 876; Knapp, Précis
de droit administratif, 4ème éd., n. 704 p. 153; Kölz/Häner,
Verwaltungsverfahren und Verwaltungsrechtspflege des Bundes,
n. 148 p. 96).

b) Selon un principe général du droit administratif
(art. 38 PA et 107 al. 3 OJ), une notification irrégulière
ne
peut entraîner aucun préjudice pour les parties, de sorte
que
la décision affectée d'un tel vice doit en principe être con-
sidérée comme nulle. Toutefois, selon la jurisprudence, on
ne
peut dire que toute notification irrégulière soit nécessaire-

ment nulle; le principe légal a bien plutôt pour effet que
la
protection juridique recherchée est déjà réalisée lorsqu'une
notification objectivement irrégulière atteint son but
malgré
cette irrégularité; c'est pourquoi il faut, d'après les cir-
constances concrètes du cas d'espèce, examiner si la partie
intéressée a réellement été induite en erreur par l'irrégula-
rité de la notification et a, de ce fait, subi un préjudice.
A cet égard, il y a lieu de s'en tenir aux règles de la
bonne
foi, qui imposent une limite à l'invocation d'un vice de for-
me (ATF 111 V 149 consid. 4c p. 150 et les références ci-
tées). Actuellement contenu à l'art. 5 al. 3 Cst., le princi-
pe de la bonne foi s'impose en effet aux organes de l'Etat
comme aux particuliers.

c) En l'espèce, le droit cantonal ne contient aucune
prescription quant au mode de notification des décisions ad-
ministratives (cf. art. 31 de la loi vaudoise du 18 décembre
1989 sur la juridiction et la procédure administrative; RSV
1.5), de sorte que l'Office cantonal des étrangers pouvait
charger le Bureau des étrangers de Lausanne de notifier sa
décision du 20 janvier 1999 au père des enfants concernés
par
la demande de regroupement familial personnellement. Il res-
sort ainsi du dossier que le recourant IS.________ a été con-
voqué le 16 février 1999 et qu'une collaboratrice du Bureau
des étrangers lui a donné lecture de la décision rejetant sa
requête. Il s'est alors tout de suite emporté, puis a refusé
de signer le procès-verbal de notification et de payer la ta-
xe de 60 fr. qui lui était demandée.

Au vu de ces faits qui lient le Tribunal fédéral
(art. 105 al. 2 OJ), le recourant IS.________ ne saurait sé-
rieusement soutenir qu'il n'avait pas compris le sens de la
décision qui lui était communiquée. Tout laisse au contraire
présumer qu'il n'avait nullement été induit en erreur par la

lecture de la décision du 20 janvier 1999, mais qu'il avait
délibérément choisi de ne pas s'y conformer, plutôt que de
recourir contre elle. Il y a lieu dès lors de traiter son re-
fus d'accepter la notification de la même façon que le refus
d'un pli recommandé (Poudret, Commentaire de la loi fédérale
d'organisation judiciaire, n. 1.3.5 ad art. 32, p. 202 et la
jurisprudence citée) et d'admettre que les circonstances
n'obligeaient pas l'autorité à procéder à une nouvelle noti-
fication par d'autres voies.

En refusant de signer le procès-verbal de notifica-
tion de la décision qui venait de lui être lue, le recourant
IS.________ a ainsi entravé le cours de la communication qui
lui était faite au sujet de sa demande de regroupement fami-
lial et doit en supporter les conséquences.

Il s'ensuit que la décision du 20 janvier 1999 a été
valablement notifiée le 16 février 1999. Partant, le recours
adressé au Tribunal administratif le 6 décembre 1999 était
tardif et a été déclaré à juste titre irrecevable.

3.- Vu ce qui précède, le présent recours doit être
rejeté. Il y a lieu en outre de considérer qu'il était dé-
pourvu de toutes chances de succès, de sorte que la demande
d'assistance judiciaire présentée par les recourants doit
être rejetée (art. 152 al. 1 OJ).

Dans ces conditions, les frais judiciaires doivent
être mis à la charge des recourants, solidairement entre eux
(art. 156 al. 1 et 7 OJ).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l ,

1. Le recours est rejeté.

2. La demande d'assistance judiciaire est rejetée.

3. Un émolument judiciaire de 1'500 fr. est mis à la
charge des recourants, solidairement entre eux.

4. Communique le présent arrêt en copie au mandatai-
re des recourants, au Service de la population du
Département
des institutions et des relations extérieures et au Tribunal
administratif du canton de Vaud, ainsi qu'à l'Office fédéral
des étrangers.

_______________

Lausanne, le 23 juin 2000
ROC/elo

Au nom de la IIe Cour de droit public
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président,

La Greffière,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2A.54/2000
Date de la décision : 23/06/2000
2e cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-06-23;2a.54.2000 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award