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15/06/2000 | SUISSE | N°1P.28/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 15 juin 2000, 1P.28/2000


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1P.28/2000/odi

Ie C O U R D E D R O I T P U B L I C
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15 juin 2000

Composition de la Cour: MM. les Juges Aemisegger, Président,
Nay et Jacot-Guillarmod. Greffier: M. Kurz.

__________

Statuant sur le recours de droit public
formé par

l'Ordre des avocats neuchâtelois, représenté par sept avo-
cats à Neuchâtel, agissant également en leur nom personnel,

contre

le règlement d'exécution de la loi neuchâteloise sur l'as-> sistance judiciaire et administrative, adopté le 1er décem-
bre 1999 par le Conseil d'Etat du canton de Neuchâtel;

(...

«»
1P.28/2000/odi

Ie C O U R D E D R O I T P U B L I C
*********************************************

15 juin 2000

Composition de la Cour: MM. les Juges Aemisegger, Président,
Nay et Jacot-Guillarmod. Greffier: M. Kurz.

__________

Statuant sur le recours de droit public
formé par

l'Ordre des avocats neuchâtelois, représenté par sept avo-
cats à Neuchâtel, agissant également en leur nom personnel,

contre

le règlement d'exécution de la loi neuchâteloise sur l'as-
sistance judiciaire et administrative, adopté le 1er décem-
bre 1999 par le Conseil d'Etat du canton de Neuchâtel;

(indemnité de l'avocat d'office)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- Le 1er décembre 1999, le Conseil d'Etat du can-
ton de Neuchâtel a adopté le règlement d'exécution de la loi
sur l'assistance judiciaire et administrative (ci-après:
RELAJA), dont les art. 8 à 11 ont la teneur suivante:

Rémunération de l'avocat d'office
a) principes
Art. 8.-1La rémunération de l'avocat d'office tient
compte de la nature de l'importance et de la difficulté de
la cause, ainsi que du temps que l'avocat y a consacré et de
la responsabilité qu'il a assumée.
2Elle est limitée à l'activité nécessaire à
la défense des intérêts confiés.

b) tarif horaire
Art. 9.-L'indemnité versée à l'avocat d'office est
en principe calculée selon le tarif horaire suivant:
a) pour l'activité d'un avocat
indépendant Fr. 135.-
b) pour l'activité d'un
collaborateur titulaire du
brevet d'avocat Fr. 100.-
c) pour l'activité d'un avocat-
stagiaire Fr. 60.-
taxe sur la valeur ajoutée (TVA)
non comprise.

c) frais de déplacement
Art. 10.-S'il est appelé à exercer son activité
hors de la commune où il a son étude, l'avocat d'office a
droit au remboursement de ses frais de déplacement, confor-
mément à la réglementation applicable aux titulaires de
fonctions publiques.

d) autres débours
Art. 11.-Le montant des autres débours dus à l'avo-
cat d'office est fixé selon le principe du coût effectif
dans la mesure où ils sont justifiés et en rapport avec les
besoins de la cause.

B.- L'Ordre des avocats neuchâtelois (ci-après:
OAN), ainsi que sept avocats, forment un recours de droit
public contre ce règlement. Ils concluent à l'annulation de
son art. 9, pour violation des art. 4 aCst., 8 et 9 Cst.

Le Conseil d'Etat conclut au rejet du recours dans
la mesure où il est recevable. Les parties ont répliqué et
dupliqué.

Par ordonnance du 17 février 2000, le juge prési-
dant la Ie Cour de droit public a rejeté une demande d'effet
suspensif formée le 21 janvier 2000.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- a) Les recourants exposent, sans être contre-
dits, qu'il n'existe aucun moyen de droit cantonal permet-
tant d'attaquer un arrêté cantonal. La condition posée à
l'art. 84 al. 2 OJ est dès lors respectée.

b) La qualité pour recourir contre un acte normatif
cantonal appartient à toute personne dont les intérêts juri-
diquement protégés sont effectivement ou pourraient un jour
être touchés par l'acte attaqué. Une simple atteinte vir-
tuelle suffit, pourvu qu'il y ait un minimum de vraisemblan-
ce que le recourant puisse se voir un jour appliquer la dis-
position prétendument inconstitutionnelle (art. 88 OJ). Par
ailleurs, une association a qualité pour former un recours
de droit public lorsque ses membres, pris individuellement,
ont eux-mêmes qualité pour agir, que l'acte attaqué lèse la
majorité ou du moins un grand nombre d'entre eux et que la

défense des intérêts ainsi atteints figure parmi ses buts
statutaires (ATF 125 I 71 consid. 1b p. 75 et les arrêts ci-
tés).

aa) Les recourants, tous avocats pratiquant à Neu-
châtel, ont manifestement qualité pour agir. Le recours de
droit public tend en effet à l'annulation de l'art. 9 du rè-
glement, au motif que les indemnités versées aux avocats
d'office seraient insuffisantes. Or, tout avocat établi dans
le canton peut, à teneur de l'art. 15 de la loi neuchâteloi-
se sur l'assistance judiciaire et administrative, être dési-
gné comme avocat d'office. Il ne peut refuser ce mandat,
sauf s'il invoque de justes motifs. On peut aussi envisager
que les avocats soient amenés à requérir eux-mêmes l'assis-
tance judiciaire pour un client sans ressources.

L'avocat qui assume la fonction de défenseur d'of-
fice accomplit une tâche étatique régie par le droit public
cantonal, laquelle, même si elle est exercée par une person-
ne de profession libérale, n'entre pas, en tant que telle,
dans le cadre constitutionnel de la liberté économique (art.
31 aCst., 27 Cst.) Toutefois, l'obligation d'exercer cette
fonction constitue une restriction du libre exercice de la
profession qui, pour être compatible avec la Constitution,
doit respecter le principe de la proportionnalité (art. 36
al. 2 et 3 Cst.; ATF 113 Ia 69 consid. 6 p. 71). La juris-
prudence a ainsi déduit de l'art. 4 aCst. le droit de l'avo-
cat d'office à une rétribution équitable (ATF 122 I 1 con-
sid. 3a p. 2-3 et les arrêts cités). Les recourants dispo-
sent d'un intérêt juridique suffisant au respect de cette
garantie.

bb) L'OAN est une association au sens des art. 60
ss CC, dont les membres sont des avocats établis dans le
canton et pratiquant le barreau. Ses buts statutaires sont,

notamment, la sauvegarde des intérêts professionnels et éco-
nomiques de ses membres (art. 2 let. c des statuts). Il peut
donc également se voir reconnaître la qualité pour agir.

2.- a) Les recourants invoquent les art. 8 et 9
Cst., ainsi que l'art. 4 aCst. Selon eux, l'art. 9 RELAJA
distinguerait, de manière inéquitable et arbitraire, la ré-
munération de l'avocat indépendant, du collaborateur ou du
stagiaire.

S'agissant des avocats-stagiaires, la situation se-
rait différente de celle de Genève, où ceux-ci peuvent plai-
der en leur propre nom. En effet, l'art. 14 al. 1 LAJA pré-
voit que seuls les avocats autorisés à plaider peuvent être
désignés comme avocats d'office. Le stagiaire interviendrait
donc toujours pour le nom et sous le contrôle du maître de
stage, et ce dernier verrait alors sa rémunération diminuer,
sans qu'il soit tenu compte du temps passé à la formation et
à la surveillance de l'activité du stagiaire. Quant au col-
laborateur, lié par un contrat de travail, les frais géné-
raux liés à son activité ne seraient pas inférieurs à ceux
de l'avocat indépendant: il utiliserait l'infrastructure de
l'étude et, généralement, verserait les sommes perçues à son
employeur, conformément à l'art. 321b CO. La nature et la
difficulté des causes, la responsabilité encourue et les
charges seraient les mêmes pour les collaborateurs et les
avocats indépendants.

Dans un second argument, les recourants font valoir
que les tarifs retenus seraient en eux-mêmes insuffisants.
Une indemnité de 135 fr. l'heure correspondrait à une rému-
nération de 25 fr. (compte tenu d'un tarif horaire de base
de 220 fr., dont 50 % de frais généraux). L'indemnité de 100
fr. allouée aux collaborateurs permettrait à peine la cou-
verture des frais généraux.

b) Dans sa réponse, le Conseil d'Etat considère
comme justifiée la rémunération différenciée des avocats in-
dépendants, qui assument la responsabilité d'une étude, no-
tamment le paiement des frais généraux, des collaborateurs
qui sont au bénéfice d'un contrat de travail, et des sta-
giaires qui sont en formation et ne reçoivent qu'une modeste
rémunération.

S'agissant du tarif proprement dit, le Conseil
d'Etat conteste que le nouveau règlement soit plus défavora-
ble que l'ancien tarif car, si ce dernier pouvait aboutir à
des indemnités de 150 fr. de l'heure, ce montant comprenait
la TVA, ce qui n'est pas le cas pour le nouveau règlement.
Le montant de 135 fr. ne serait pas inéquitable. Lorsqu'il
est personnellement désigné comme avocat d'office, le colla-
borateur n'a pas à payer les frais généraux de l'étude qui
l'emploie. Lorsqu'il exerce son activité dans le cadre d'un
mandat confié au chef d'étude, sa rémunération ne saurait
excéder son salaire, y compris les charges sociales et une
participation à la couverture des frais généraux. Dans l'un
ou l'autre cas, une rémunération de 100 fr. de l'heure appa-
raîtrait suffisante. L'indemnité due pour l'activité de
l'avocat-stagiaire ne saurait excéder le salaire versé, y
compris les frais et les charges.

3.- a) L'avocat nommé d'office et l'Etat sont liés
par un rapport juridique spécial en vertu duquel l'avocat a
contre l'Etat une prétention de droit public à être rétribué
dans le cadre des prescriptions cantonales applicables. Il
ne s'agit dès lors pas d'examiner à quelle rémunération
l'avocat pourrait prétendre dans le cadre d'une activité li-
brement consentie et pleinement rétribuée, mais de savoir ce
que l'avocat peut exiger de l'Etat au titre de l'assistance
judiciaire. Dans l'élaboration des normes cantonales, l'au-
torité dispose d'une certaine marge de manoeuvre, mais elle

doit respecter le droit à une rétribution équitable: un ré-
gime excessivement ingrat pour l'avocat d'office ne favorise
pas une conduite optimale des affaires qui lui sont attri-
buées. Une rémunération insuffisante peut ainsi, indirecte-
ment, entraver l'assistance judiciaire qui est garantie au
citoyen par les art. 4 aCst. et 29 al. 3 Cst.

b) L'avocat d'office a droit au remboursement inté-
gral de ses débours (ATF 117 Ia 22 consid. 4b-e p. 24-26;
109 Ia 112 consid. 3d), ainsi qu'à une indemnité s'apparen-
tant aux honoraires perçus par le mandataire plaidant aux
frais de son client (ATF 117 Ia 22 consid. 3a, 109 Ia 107
consid. 3b p. 110/111). Pour fixer cette indemnité, l'auto-
rité doit tenir compte de la nature et de l'importance de la
cause, des difficultés particulières que celle-ci peut pré-
senter en fait et en droit, du temps que l'avocat lui a con-
sacré, de la qualité de son travail, du nombre des conféren-
ces, audiences et instances auxquelles il a pris part, du
résultat obtenu et de la responsabilité qu'il a assumée (ATF
117 Ia 22 consid. 3a; 109 Ia 107 consid. 3b p. 110). L'auto-
rité doit aussi prendre en considération les charges inhé-
rentes à l'activité indépendante de l'avocat, telles les ab-
sences dues aux maladies, au service militaire et aux vacan-
ces, ainsi que la nécessité de s'assurer une retraite conve-
nable (ATF 93 I 122 consid. 5a; arrêt non publié G., du 9
novembre 1988). A condition d'être équitable, il est admis
que la rémunération de l'avocat d'office puisse être infé-
rieure à celle du défenseur choisi (ATF 118 Ia 133 consid.
2b p. 134; 117 Ia 22 consid. 3a p. 23; 109 Ia 107 consid. 3c
p. 111 et les arrêts cités).

4.- Avant d'examiner si les montants prévus dans le
règlement sont suffisants au regard des principes rappelés
ci-dessus, il sied de rechercher si, comme le soutiennent

les recourants, le traitement inégal entre les trois catégo-
ries de mandataires d'office est compatible avec le principe
d'égalité de traitement.

a) Le principe de l'égalité de traitement (art. 4
al. 1 aCst., 8 Cst.) est étroitement lié à celui de l'inter-
diction de l'arbitraire (art. 9 Cst.). Une réglementation
est ainsi arbitraire lorsqu'elle ne repose pas sur des mo-
tifs sérieux et objectifs ou n'a ni sens ni but, alors
qu'elle viole le principe de l'égalité de traitement, lors-
qu'elle établit des distinctions juridiques qui ne se justi-
fient par aucun motif raisonnable au regard de la situation
de fait à réglementer ou lorsqu'elle omet de faire des dis-
tinctions qui s'imposent au vu des circonstances, c'est-à-
dire lorsque ce qui est semblable n'est pas traité de maniè-
re identique et lorsque ce qui est dissemblable ne l'est pas
de manière différente. Il faut que le traitement différent
ou semblable injustifié se rapporte à une situation de fait
importante (ATF 125 I 1 consid. 2b/aa p. 4 et les références
citées).

b) Le Conseil d'Etat estime que les statuts respec-
tifs des avocats indépendants, des collaborateurs et des
stagiaires seraient fondamentalement différents au regard
des responsabilités financières qui s'y attachent. Les col-
laborateurs liés à une étude par un contrat de travail ne
pourraient prétendre à une rémunération couvrant les frais
généraux de l'étude dans laquelle ils travaillent; lors-
qu'ils effectuent un mandat confié au chef d'étude, l'indem-
nité versée ne saurait excéder le salaire versé, y compris
les charges sociales et la participation aux frais généraux
liée à la place de travail. Il en irait de même pour l'in-
demnité versée à l'avocat-stagiaire, qui ne lui est pas due
personnellement.

Les recourants relèvent que la responsabilité fi-
nancière ne fait pas partie des critères déterminants, rete-
nus par la jurisprudence et par l'art. 17 al. 2 LAJA, pour
le calcul de l'indemnité. Les frais généraux liés à l'acti-
vité du collaborateur - lié par un contrat de travail et
tenu de reverser à son employeur les indemnités perçues au
titre de l'assistance judiciaire - ne seraient pas diffé-
rents de ceux du chef d'étude. L'étude qui emploie un ou
plusieurs collaborateurs se retrouverait ainsi pénalisée,
alors que les mandats attribués ne seraient pas différents
par leur nature, leur difficulté et la responsabilité assu-
mée. Le fait que le droit genevois connaisse des distinc-
tions identiques ne changerait rien à l'inconstitutionnalité
de la norme.

c) Si la responsabilité financière ne fait pas par-
tie des critères dégagés par la jurisprudence pour évaluer
l'indemnité proprement dite de l'avocat d'office, elle peut
toutefois être prise
en considération dans la fixation d'un
barème différencié. Or, on ne saurait nier que la situation
du chef d'étude est, sous cet angle, suffisamment différente
de celle de ses collaborateurs et stagiaires pour justifier
un traitement différencié. Le chef d'étude assume en effet
la responsabilité financière de l'entreprise, avec toutes
les responsabilités supplémentaires que comporte le statut
d'indépendant (absences dues à la maladie, service militai-
re, vacances, risque d'insolvabilité de certains clients,
mesures de prévoyance en vue d'une retraite convenable; ATF
109 Ia 107 consid. 3e p. 112). Il est chargé de la rétribu-
tion de ses collaborateurs, en tenant compte dans une cer-
taine mesure des frais généraux que ceux-ci occasionnent. Il
est d'ailleurs fréquent que le tarif horaire facturé soit
plus élevé que celui des collaborateurs. Ces derniers ont un
statut de salarié, et ne participent pas aux risques finan-
ciers de l'étude. Lorsque le mandat d'office est confié au

collaborateur, l'indemnité allouée ne saurait couvrir l'in-
tégralité des frais généraux, puisque qu'il n'en est tenu
compte que partiellement dans la rétribution ordinaire.
Quant à la rémunération de l'avocat-stagiaire, qui se trouve
en formation et perçoit une rétribution modeste, elle peut
être sensiblement inférieure à celle des avocats brevetés:
le stagiaire ne supporte pas les frais généraux de son étu-
de, et son inexpérience peut le contraindre à passer un
temps anormalement long à certaines démarches (ATF 109 Ia
107 consid. 3e p. 113).

L'argumentation des recourants relative à la cou-
verture nécessaire des frais généraux méconnaît que l'indem-
nité d'avocat d'office est fixée en fonction de la personne
qui exécute effectivement le mandat, sans qu'il y ait à te-
nir compte de la gestion de l'étude dans son ensemble, et
des rapports - d'ailleurs variables - entre le chef d'étude
et ses employés. Comme le relève le Conseil d'Etat, lors-
qu'un avocat délègue l'exécution d'un mandat d'office à un
collaborateur ou à un stagiaire, il peut pour sa part se li-
vrer à des activités rétribuées selon le tarif ordinaire.

Le premier grief des recourants doit par conséquent
être écarté.

5.- Les recourants critiquent ensuite le montant
des indemnités allouées aux défenseurs d'office de chaque
catégorie. Sans être contredits, ils exposent que, selon les
"usages pour la fixation des honoraires du barreau neuchâte-
lois" adoptés en juin 1999 par l'OAN, le tarif horaire de
base est de 220 fr. Déduction faite des frais généraux, es-
timés à 40-50%, voire à 50-60% des honoraires, soit à 110
fr. au moins, la rémunération des avocats indépendants se-
rait de 25 fr. de l'heure, ce qui serait manifestement in-

suffisant. Le collaborateur devrait travailler pour 12 fr.
de l'heure, et le stagiaire coûterait à son étude 10 fr. de
l'heure. Ces rémunérations seraient inéquitables.

a) En principe, l'indemnité allouée au défenseur
d'office devrait couvrir les frais généraux de l'avocat,
dont on estime qu'ils correspondent d'ordinaire à au moins
40% du revenu professionnel brut, voire la moitié de celui-
ci (ATF 109 Ia 107 consid. 3d in fine p. 112). Une indemnité
qui ne correspond pas au moins à la fraction des honoraires
de l'avocat choisi, normalement destinée à couvrir les frais
généraux de l'étude, doit en principe être considérée comme
inéquitable (arrêt non publié P. du 26 février 1986). Dans
cette dernière affaire, le Tribunal fédéral, retenant un
coût horaire d'un avocat genevois de 220 fr., a tenu pour
arbitraire une rémunération horaire de l'avocat d'office in-
férieure à 80 fr. En 1992 et 1995, le Tribunal fédéral a
considéré comme admissible, sur le vu des circonstances des
espèces examinées, une indemnité horaire de 100 fr., infé-
rieure à la norme réglementaire de 120 fr. (arrêts J., du 20
janvier 1992, et S., du 6 février 1995; cf. aussi ATF 118 Ia
133 consid. 2b p. 134/135). Dans un arrêt du 31 janvier 1996
(publié in SJ 1996 667), il a actualisé les données de l'ar-
rêt P. précité en adaptant le coût horaire des avocats gene-
vois à l'indice cantonal des prix à la consommation, pour
aboutir à un tarif horaire de 304 fr. L'indemnité devait se
situer entre 121 fr. 60 (40%) et 152 fr. (50%). Dans un ar-
rêt D. du 27 octobre 1997, le Tribunal fédéral a jugé qu'un
avocat valaisan commis d'office pouvait prétendre à une ré-
munération horaire oscillant entre 92 et 115 fr. Enfin, dans
un arrêt P. du 5 février 1997, il a pris acte du fait que le
Tribunal administratif neuchâtelois avait estimé justifié un
tarif horaire de l'ordre de 120 à 130 fr.

b) Ce rappel de jurisprudence conduit au rejet du
présent recours. Il n'est pas contesté que le tarif horaire
des avocats neuchâtelois s'élève à 220 fr. Les recourants
affirment que les frais généraux oscilleraient entre 50 et
60% des honoraires, sans pour autant étayer cette affirma-
tion. Ils estiment, dans leur réplique, que les études em-
ployant des collaborateurs et des stagiaires auraient des
frais généraux en sus, mais passent sous silence le revenu
proportionnel que leur fournissent ces emplois. En définiti-
ve, il n'y a pas lieu de revenir sur l'appréciation de la
part des honoraires relative aux frais généraux, située en-
tre 40 et 50%.

Compte tenu du tarif horaire de 220 fr., l'ensemble
de l'argumentation des recourants tombe à faux. Ce montant,
qui correspond au tarif en vigueur à Genève en 1986, n'en
est pas moins déterminant en l'espèce. On ne voit pas en ef-
fet pour quelle raison il y aurait lieu de revenir sur les
considérations qui fondent l'arrêt P. précité. Si l'on esti-
me les frais généraux de l'avocat entre 88 fr. (40% de 220
fr.) et 110 fr. (50% de 220 fr.), il apparaît que les indem-
nités prévues à l'art. 9 du RELAJA se situent dans la limi-
te, certes inférieure, de ce qui est admissible.

6.- Sur le vu de ce qui précède, le recours de
droit public doit être rejeté. Un émolument judiciaire est
mis à la charge des recourants, qui succombent (art. 156 al.
1 OJ).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Rejette le recours.

2. Met à la charge des recourants un émolument ju-
diciaire de 5'000 fr.

3. Communique le présent arrêt en copie aux recou-
rants et au Conseil d'Etat du canton de Neuchâtel.
_____________

Lausanne, le 15 juin 2000
KUR

Au nom de la Ie Cour de droit public
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président,

Le Greffier,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 1P.28/2000
Date de la décision : 15/06/2000
1re cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-06-15;1p.28.2000 ?
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