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13/06/2000 | SUISSE | N°4C.86/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 13 juin 2000, 4C.86/2000


«AZA 3»

4C.86/2000

Ie C O U R C I V I L E
************************

13 juin 2000

Composition de la Cour: MM. Walter, président, Leu
et Corboz, juges. Greffière: Mme Aubry Girardin.

___________

Dans la cause civile pendante
entre

Vaca Lechera S.A., demanderesse et recourante, à Lausanne,
Anne Wuillommet, demanderesse et recourante, à Lausanne,
ainsi que Luc-Alexandre Macherel, demandeur et recourant, à
Lausanne, tous trois représentés par Me Jean-Marc Reymond,
avocat à Laus

anne,

et

Aeschbach Fritz Techniques Laser S.A., défenderesse et
intimée, à Goumoens-la-Ville, représentée pa...

«AZA 3»

4C.86/2000

Ie C O U R C I V I L E
************************

13 juin 2000

Composition de la Cour: MM. Walter, président, Leu
et Corboz, juges. Greffière: Mme Aubry Girardin.

___________

Dans la cause civile pendante
entre

Vaca Lechera S.A., demanderesse et recourante, à Lausanne,
Anne Wuillommet, demanderesse et recourante, à Lausanne,
ainsi que Luc-Alexandre Macherel, demandeur et recourant, à
Lausanne, tous trois représentés par Me Jean-Marc Reymond,
avocat à Lausanne,

et

Aeschbach Fritz Techniques Laser S.A., défenderesse et
intimée, à Goumoens-la-Ville, représentée par Me Bernard
Katz, avocat à Lausanne-Pully, ainsi qu'Éric Dessous
L'Église, défendeur et intimé, à Lausanne, représenté par
Me Paul Marville, avocat à Lausanne;

(droit d'auteur; concurrence déloyale; droit des marques)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- Anne Wuillommet, diplômée de l'École des arts
décoratifs de Genève, exploitait la raison individuelle Vaca
Lechera.

En automne 1992, elle a fait des recherches afin
d'aboutir au logo définitif de "Vaca Lechera", représentant
le profil d'une vache dont la tête est légèrement tournée
vers la gauche. La vache reproduite n'existe pas dans la na-
ture, mais résulte de la combinaison de caractéristiques
morphologiques de différentes races de vaches.

Dès 1993, la raison individuelle Vaca Lechera a mis
sur le marché une ligne de vêtements, des articles de maro-
quinerie et d'autres objets, tels que des montres, des pen-
dentifs ou des vases.

Deux marques figuratives "Vaca Lechera", l'une re-
présentant la vache conçue par Anne Wuillommet juchée sur un
Cervin stylisé sur fond bleu, l'autre, la vache seule, sans
décor, ont été enregistrées auprès de l'Office fédéral de la
propriété intellectuelle aux noms de la raison individuelle
Vaca Lechera, d'Anne Wuillommet et de Luc-Alexandre
Macherel.
L'enregistrement a pris effet dès le 29 avril 1993 pour la
première marque et dès le 2 mai 1994 pour la seconde. Ces
deux marques portent sur des articles de maroquinerie en
cuir
et peau, des vêtements, des chaussures et des articles de
chapellerie.

A partir de 1993, Vaca Lechera Sàrl, qui avait suc-
cédé à la raison individuelle du même nom, a noué des rela-
tions contractuelles avec Aeschbach Fritz Techniques Laser

S.A. (ci-après: Laser S.A.), une entreprise exploitant notam-
ment des machines à découper au rayon laser.

Le 3 juin 1993, Vaca Lechera Sàrl a remis l'origi-
nal de son logo à Laser S.A., qui a conçu un programme de
découpe laser sur cette base et lui a délivré un prototype.
Le montant facturé à Vaca Lechera Sàrl par Laser S.A. pour
cette activité a été payé.

Le 9 mars 1995, Vaca Lechera Sàrl a commandé à
Laser S.A. mille vases "Vaca Lechera". Elle n'a pas contesté
avoir reçu la marchandise, ni prétendu que celle-ci ne cor-
respondait pas à la commande.

Le 20 avril 1995, Laser S.A. a adressé une facture
de 26'838 fr. à Vaca Lechera Sàrl, qui, après plusieurs rap-
pels, a versé un acompte de 7'000 fr. Bien qu'elle ait ex-
pressément reconnu devoir le solde de cette facture dans une
lettre du 2 octobre 1995, Vaca Lechera Sàrl ne s'est jamais
acquittée des 19'838 fr. restant. Laser S.A., qui lui avait
fixé un ultime délai de paiement au 31 janvier 1996, a in-
tenté des poursuites à son encontre à concurrence de ce
montant et a obtenu, le 3 octobre 1996, la mainlevée provi-
soire de l'opposition formée par Vaca Lechera Sàrl.

B.- Éric Dessous L'Église effectue des imitations
de "poyas" traditionnelles sur des plaques de métal oxydées,
dans lesquelles sont découpées plusieurs silhouettes de va-
ches montant à l'alpage. Certaines découpes de vaches sont
rattachées perpendiculairement au fond et retiennent le ca-
dre, alors que d'autres demeurent "libres". Ces réalisations
sont exposées à la vente, notamment au motel de la Gruyère.

Les pièces de métal ouvragées sont fabriquées à
partir d'un programme de découpe laser réalisé par Laser S.A.

Le 21 février 1996, Vaca Lechera Sàrl a reproché à
Laser S.A. d'avoir mis à la disposition d'Éric Dessous
L'Église le programme comprenant son logo de vache, ce que
celle-ci a toujours nié.

Le 23 février 1996, Éric Dessous L'Église a indiqué
à Vaca Lechera Sàrl qu'il était prêt à modifier le pourtour
de sa vache, afin d'éviter d'autres situations conflictuel-
les, ce qu'il a fait en ajoutant deux pattes à la silhouette
de la vache figurant sur ses "poyas".

C.- Le 17 octobre 1996, Vaca Lechera Sàrl (devenue
en cours de procédure Vaca Lechera S.A.), Anne Wuillommet et
Luc-Alexandre Macherel ont intenté une action en justice à
l'encontre de Laser S.A. et d'Éric Dessous L'Église, en se
prévalant de l'existence d'actes de concurrence déloyale,
ainsi que de violations du droit d'auteur et du droit des
marques. Ils ont conclu en substance à ce qu'il soit
prononcé
que Vaca Lechera S.A. n'est pas la débitrice de Laser S.A.
de
la somme de 19'838 fr., qu'Éric Dessous L'Église et Laser
S.A. soient condamnés à leur verser conjointement 10'000 fr.
représentant les honoraires d'avocat engagés. En outre, Vaca
Lechera S.A. a déclaré opposer en compensation de la préten-
tion de Laser S.A. une créance en dommages-intérêts de
23'000 fr. au minimum.

Tout en concluant au rejet des conclusions de la
demande la concernant, Laser S.A. a requis, à titre recon-
ventionnel, le versement par la société Vaca Lechera de la
somme de 19'838 fr. et la levée définitive de l'opposition
formée par cette dernière à la poursuite intentée à son en-
contre.

Éric Dessous L'Église a, pour sa part, conclu au
rejet des conclusions prises contre lui et à la constatation

de la nullité de la marque représentant le logo d'une vache
seule, sans Cervin, déposée par les demandeurs.

Par jugement du 8 juillet 1999, la Cour civile du
Tribunal cantonal vaudois a condamné Vaca Lechera S.A. à
payer à Laser S.A. la somme de 19'838 fr. plus intérêt et le-
vé définitivement l'opposition à la poursuite à concurrence
de ce montant. Elle a entièrement rejeté les conclusions des
demandeurs et considéré qu'Éric Dessous L'Église n'avait pas
qualité pour agir en constatation de la nullité de la marque
représentant la vache seule sans Cervin.

D.- Contre le jugement du 8 juillet 1999, Vaca
Lechera S.A., Anne Wuillommet et Luc-Alexandre Macherel in-
terjettent un recours en réforme au Tribunal fédéral. Ils
concluent principalement à l'admission de leur recours et au
renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouvelle
décision
dans le sens des considérants. A titre subsidiaire, ils de-
mandent la réforme du jugement attaqué en ce sens que Vaca
Lechera S.A. n'est pas débitrice de 19'838 fr. à l'égard de
Laser S.A., avec suite de frais et dépens divers. Ils requiè-
rent également la condamnation de Laser S.A. et d'Éric Des-
sous L'Église à leur verser la somme de 10'000 fr.

Laser S.A. conclut au rejet du recours, à l'instar
d'Éric Dessous L'Église.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- Le Tribunal fédéral examine d'office et li-
brement la recevabilité des recours en réforme qui lui sont
soumis (ATF 125 III 461 consid. 2 et l'arrêt cité).

a) Le présent recours a été déposé en temps utile
(art. 32 et 54 OJ; art. 1 de la Loi fédérale du 21 juin 1963
sur la supputation des délais comprenant un samedi [RS
173.110.3]).

b) Dès lors que les conditions d'application de
l'art. 451a al. 1 LPC vaud. ne sont pas réalisées en l'es-
pèce, le jugement rendu par la Cour civile du Tribunal canto-
nal revêt le caractère d'une décision finale qui ne peut fai-
re l'objet d'un recours ordinaire de droit cantonal, soit
d'un recours ayant effet suspensif et dévolutif (ATF 120 II
93 consid. 1b p. 94 s.), de sorte que la voie du recours en
réforme au Tribunal fédéral est ouverte (art. 48 al. 1 OJ).

c) Selon la jurisprudence, la conclusion tendant au
renvoi de la cause à l'autorité cantonale, sans autre conclu-
sion sur le fond, n'est suffisante au regard de l'art. 55
al.
1 let. b OJ que dans la mesure où le Tribunal fédéral, s'il
admettait le recours, ne serait pas à même de statuer au
fond, mais devrait renvoyer la cause à l'instance précédente
pour complément d'instruction (ATF 111 II 384 consid. 1 in
fine; 106 II 201 consid. 1 p. 203 et les arrêts cités).

Si elle devait suivre les demandeurs et reconnaître
l'existence d'une violation du droit d'auteur, la Cour de
céans n'aurait pas à disposition les éléments lui permettant
d'établir le dommage subi à ce titre. Dans cette mesure, la
conclusion principale du recours tendant au renvoi de la
cause à la juridiction cantonale est recevable.

d) Saisi d'un recours en réforme, le Tribunal fédé-
ral doit mener son raisonnement sur la base des faits conte-
nus dans la décision attaquée, à moins que des dispositions
fédérales en matière de preuve n'aient été violées, qu'il y
ait lieu de rectifier des constatations reposant sur une
inadvertance manifeste (art. 63 al. 2 OJ) ou qu'il faille

compléter les constatations de l'autorité cantonale parce
que
celle-ci n'a pas tenu compte de faits pertinents régulière-
ment allégués (art. 64 OJ; ATF 126 III 59 consid. 2a; 119 II
353 consid. 5c/aa; 117 II 256 consid. 2a). Celui qui s'en
prend à une constatation de fait, dans le cadre d'un recours
en réforme, doit établir les conditions de l'une de ces ex-
ceptions (ATF 115 II 399 consid. 2a p. 400). Sous réserve de
ces cas, il ne peut pas être présenté de griefs contre les
constatations de fait, ni de faits ou moyens de preuves nou-
veaux (art. 55 al. 1 let. c OJ; ATF 126 III 59 consid. 2a;
120 II 280 consid. 6c).

Dans la mesure où les demandeurs se fondent sur des
faits différents de ceux retenus dans le jugement attaqué,
sans se prévaloir de l'une des exceptions leur permettant de
s'en écarter, leur recours n'est pas admissible.

2.- Les demandeurs ne remettent en cause ni
l'existence, ni le montant de la créance de Laser S.A. à
l'encontre de Vaca Lechera S.A. se rapportant à la
confection
des vases. Ce point a donc été définitivement tranché par la
cour cantonale, de sorte qu'il ne sera pas revu dans la pré-
sente procédure (cf. art. 55 al. 1 let. b et c OJ).

Le litige porte ainsi exclusivement sur le bien-
fondé des dommages-intérêts réclamés par les demandeurs. A
cet égard, il convient de préciser que, si le Tribunal fédé-
ral ne peut aller au-delà des conclusions des parties, il
n'est pas lié par les motifs qu'elles invoquent (art. 63 al.
1 OJ), ni par ceux de la décision cantonale (art. 63 al. 3
OJ; ATF 126 III 59 consid. 2a in fine et les arrêts cités).
En l'espèce, cela signifie que la Cour de céans vérifiera
si,
en rejetant les prétentions des demandeurs, les juges canto-
naux ont fait une application correcte non seulement de la
législation sur la concurrence déloyale et sur le droit

d'auteur, ce qui est contesté, mais également du droit des
marques.

3.- A titre principal, les demandeurs se prévalent
d'une violation de la Loi fédérale du 9 octobre 1992 sur le
droit d'auteur et les droits voisins (RS 231.1; ci-après:
LDA), reprochant en premier lieu à la cour cantonale de ne
pas avoir admis que la vache créée par Anne Wuillommet cons-
tituait une oeuvre protégée.

a) La LDA est entrée en vigueur le 1er juillet
1993, mais elle s'applique également aux oeuvres qui ont été
créées avant cette date (art. 80 al. 1 LDA). Par conséquent,
c'est bien sous l'angle de cette loi qu'il convient d'appré-
cier la reproduction de vache en cause, même si Anne Wuillom-
met l'a conçue en 1992. Il faut cependant préciser que la no-
tion d'oeuvre telle que dégagée par la jurisprudence rendue
sous l'ancien droit est la même que celle retenue dans la
LDA
(arrêt du Tribunal fédéral du 25 août 1998 dans la cause G.
contre Z. S.A., consid. 3 publié in SIC 1999 p. 119).

b) La LDA règle notamment la protection des auteurs
d'oeuvres artistiques (cf. art. 1 al. 1 let. a LDA). Savoir
si l'on est en présence d'une oeuvre artistique relève du
droit (cf. ATF 125 III 328 consid. 4d/aa p. 333; 100 II 167
consid. 4), de sorte que cette question peut être revue dans
le cadre d'un recours en réforme.

En l'occurrence, il s'agit de se demander si le
logo de vache créé par Anne Wuillommet peut être qualifié
d'oeuvre artistique au sens où l'entend la LDA, étant
précisé
que cet examen se limitera à la seule représentation liti-
gieuse, à savoir le logo de vache seule, sans le décor du
Cervin stylisé.

c) Il découle de l'art. 2 al. 1 LDA, que "par oeu-
vre, quelles qu'en soient la valeur ou la destination, on
entend toute création de l'esprit, littéraire ou artistique,
qui a un caractère individuel". Sont notamment des créations
de l'esprit les oeuvres des beaux-arts, en particulier les
oeuvres graphiques (cf. art. 2 al. 2 let. c LDA). Selon la
jurisprudence, le droit d'auteur protège l'expression con-
crète de l'oeuvre, qui ne contient pas uniquement des élé-
ments relevant du domaine public, mais qui, dans son ensem-
ble, apparaît comme le résultat d'une création
intellectuelle
à caractère personnel ou l'expression d'une nouvelle idée
originale (ATF 125 III 328 consid. 4b p. 331). Pour autant
qu'elle remplisse les exigences de l'art. 2 al. 1 LDA, une
représentation graphique à but utilitaire, comme le logo
d'une société, peut constituer une oeuvre graphique protégée
(cf. arrêt du Tribunal fédéral du 23 novembre 1998 dans la
cause S. contre A., consid. 2 publié in SIC 1999 p. 403; cf.
Kamen Troller, Manuel de droit suisse des biens immatériels,
tome I,
2e éd., Bâle 1996, p. 286).

aa) La "création de l'esprit" suppose un effort in-
tellectuel. Celui qui se contente de choisir des objets exis-
tant et qui les expose comme s'il s'agissait d'oeuvres d'art
ne crée pas une oeuvre de l'esprit (Troller, op. cit., p.
252). Selon les faits retenus en l'espèce, la vache conçue
par Anne Wuillommet n'est pas la simple reproduction d'un
bovidé existant dans la nature, mais est constituée des ca-
ractéristiques de différentes races de vaches. Dans cette
mesure, on peut admettre qu'il s'agit d'une création de
l'esprit.

bb) Pour être protégée, celle-ci doit encore revê-
tir un "caractère individuel". Un degré élevé de créativité,
d'originalité ou d'individualité n'est pas nécessairement
exigé; il pourra être moindre lorsque la nature de l'objet
ne
laisse au créateur qu'une marge de manoeuvre réduite (cf.
ATF

125 III 328 consid. 4b; 117 II 466 consid. 2a; 113 II 190
consid. 2a p. 196 et les arrêts cités). Toutefois, la LDA
n'accorde pas sa protection à de simples activités artisana-
les, qui consistent uniquement à combiner et à modifier des
formes et des lignes connues (ATF 110 IV 102 consid. 2; 106
II 71 consid. 2a p. 73) ou lorsqu'il n'y a pas place pour
une
création individuelle dans les circonstances de l'espèce
(ATF
125 III 328 consid. 4b in fine). Ainsi, la représentation
graphique d'un personnage ou d'un animal doit être
considérée
comme individuelle lorsqu'un autre artiste, travaillant indé-
pendamment, n'aurait pu, selon toute probabilité, créer un
personnage ou un animal à l'apparence identique (cf. Anne-
Virginie Gaide, La protection des personnages fictifs par le
droit d'auteur, thèse Lausanne 1997, p. 40 s.).

Si l'on examine le logo de vache conçu par Anne
Wuillommet, force est de constater qu'il ne frappe pas par
son originalité. L'animal ne se distingue ni par sa couleur,
ni par sa morphologie ou sa posture à n'importe quel autre
dessin de vache. En effet, il représente une vache noire et
blanche, avec la tête légèrement tournée à gauche,
comportant
un pis et deux pattes. Le fait que l'auteur ait mélangé les
caractéristiques de différentes races de vaches ne suffit
pas
à rendre son animal original, dès lors qu'à moins d'être un
spécialiste en matière bovine, cette juxtaposition passe
inaperçue. Quant aux deux pattes, elles se justifient par la
position de l'animal. On est donc typiquement en présence
d'une représentation si proche d'une forme connue que chacun
pourrait en créer une semblable (cf. ATF 110 IV 102 consid.
3; 106 II 71 consid. 2b p. 74). Le logo de vache ne peut
donc
être qualifié d'oeuvre graphique au sens de la LDA, de sorte
que l'on ne peut reprocher à la cour cantonale d'avoir
rejeté
les prétentions des demandeurs fondées sur le droit d'auteur.

4.- A titre subsidiaire, les demandeurs soutien-
nent que les activités respectives des deux défendeurs tom-
bent sous le coup de l'art. 5 de la Loi fédérale du 19 décem-
bre 1986 contre la concurrence déloyale (RS 241; ci-après:
LCD).

Conformément à sa note marginale, cette disposition
suppose qu'il y ait exploitation d'une prestation d'autrui
(ATF 122 III 469 consid. 8b p. 484). Dans leur
argumentation,
les demandeurs s'écartent largement des faits ressortant du
jugement attaqué, ce qui n'est pas admissible (cf. supra con-
sid. 1d). Ainsi, ils perdent totalement de vue qu'il a été
constaté, d'une manière qui lie la Cour de céans en instance
de réforme (art. 63 al. 2 OJ), que rien n'indiquait que
Laser
S.A. aurait remis à Éric Dessous L'Église le logo "Vaca Le-
chera" ou le programme de découpe laser s'y référant, ni
que,
partant, ce dernier aurait imité ce logo ou délibérément ex-
ploité son programme. En outre, il a été souligné que le
logo
"Vaca Lechera" et la découpe de vache se trouvant sur les
"poyas" du défendeur n'étaient pas identiques. Sur la base
de
ces constatations, il n'est pas établi qu'il y ait eu exploi-
tation indue au sens de l'art. 5 LCD du logo Vaca Lechera
par
l'un ou l'autre des défendeurs. De plus, le jugement attaqué
ne contient aucun autre élément qui permettrait d'en déduire
de la part des défendeurs un comportement constitutif de
concurrence déloyale (cf. art. 2 à 8 LCD; Pedrazzini/von
Büren/Marbach, Immaterialgüter- und Wettbewerbsrecht, Berne
1998, no 844 et 848 ss). En particulier, le fait que
l'auteur
des "poyas" ait par la suite accepté de modifier quelque peu
le contour de sa propre vache, afin d'éviter tout conflit,
ne
peut être interprété comme tel. Dans la mesure où il ne re-
tient aucune violation de la LCD en l'espèce, le jugement
attaqué doit donc être confirmé.

5.- Quant au droit des marques, il ne permet pas
davantage aux demandeurs d'obtenir des dommages-intérêts. La
marque "Vaca Lechera" n'étant à l'évidence pas une marque de
haute renommée, elle n'offre une protection qu'en rapport
avec les produits ou services enregistrés (art. 13 al. 1 de
la Loi fédérale du 28 août 1992 sur la protection des
marques
et des indications de provenance [RS 232.11; ci-après: LPM];
Lucas David, Commentaire bâlois, art. 13 LPM no 9; Troller,
op. cit., p. 483), comme l'a relevé pertinemment la cour can-
tonale. Or, la marque en cause porte sur des articles de ma-
roquinerie en cuir et peau, des vêtements, des chaussures et
des articles de chapellerie, soit sur un genre d'objets dont
les poyas fabriquées par le défendeur ne font pas partie.

Dans ces circonstances, le recours doit être rejeté
et le jugement attaqué confirmé.

6.- Les demandeurs, qui succombent, supporteront
les frais et dépens, solidairement entre eux (art. 156 al. 1
et 7, 159 al. 1 et 5 OJ).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Rejette le recours et confirme le jugement atta-
qué;

2. Met un émolument judiciaire de 2'000 fr. à la
charge des demandeurs, solidairement entre eux;

3. Dit que les demandeurs, débiteurs solidaires,
verseront une indemnité de 2'000 fr. à la défenderesse,
Aeschbach Fritz Techniques Laser S.A., et une indemnité de
1'000 fr. au défendeur, Éric Dessous L'Église, à titre de
dépens;

4. Communique le présent arrêt en copie aux manda-
taires des parties et à la Cour civile du Tribunal cantonal
vaudois.

__________

Lausanne, le 13 juin 2000
ECH

Au nom de la Ie Cour civile
du TRIBUNAL FÉDÉRAL SUISSE:
Le Président,

La Greffière,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4C.86/2000
Date de la décision : 13/06/2000
1re cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-06-13;4c.86.2000 ?
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