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08/06/2000 | SUISSE | N°5A.2/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 08 juin 2000, 5A.2/2000


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5A.2/2000

IIe C O U R C I V I L E
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8 juin 2000

Composition de la Cour: MM. les juges Reeb, président,
Weyermann, Bianchi, Raselli et Merkli. Greffier: M. Abrecht.

_________

Statuant sur le recours de droit administratif
formé par

M.________, représenté par Me Christian Haag, avocat à La
Chaux-de-Fonds,

contre

l'arrêt rendu le 30 novembre 1999 par le Tribunal adminis-
tratif du canton de Neuchâtel dans la cause qui divise le
recouran

t d'avec P. et P.-A. S.________, représentés par Me
Eric-Alain Bieri, avocat à La Chaux-de-Fonds, ainsi que
d'avec la Com...

«»
5A.2/2000

IIe C O U R C I V I L E
**************************

8 juin 2000

Composition de la Cour: MM. les juges Reeb, président,
Weyermann, Bianchi, Raselli et Merkli. Greffier: M. Abrecht.

_________

Statuant sur le recours de droit administratif
formé par

M.________, représenté par Me Christian Haag, avocat à La
Chaux-de-Fonds,

contre

l'arrêt rendu le 30 novembre 1999 par le Tribunal adminis-
tratif du canton de Neuchâtel dans la cause qui divise le
recourant d'avec P. et P.-A. S.________, représentés par Me
Eric-Alain Bieri, avocat à La Chaux-de-Fonds, ainsi que
d'avec la Commission foncière agricole du canton de Neuchâ-
tel, à Cernier;

(autorisation d'acquisition au sens des art. 61 ss LDFR)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- L'hoirie B.________ était propriétaire d'un
domaine agricole affermé depuis de nombreuses années à P. et
P.-A. S.________, nés respectivement en 1931 et 1935. Après
avoir obtenu une autorisation de la Commission foncière agri-
cole du canton de Neuchâtel (ci-après: la Commission), elle
a
vendu ce domaine à M.________ le 11 décembre 1997.

B.- Le 22 mai 1998, la Commission a délivré une
autorisation d'acquisition, au sens des art. 61 ss LDFR, à
P.
et P.-A. S.________ qui faisaient valoir leur droit de pré-
emption de fermiers.

Statuant le 30 novembre 1998 sur recours de
M.________, le Tribunal administratif du canton de Neuchâtel
a annulé cette décision et renvoyé la cause à la Commission,
en invitant celle-ci à expliquer "pour quelles raisons elle
a[vait] estimé que l'âge usuel de la retraite ne devait pas
entrer en ligne de compte en l'espèce" dans l'application de
l'art. 63 al. 1 let. a LDFR en relation avec l'art. 9 LDFR.

C.- Lors d'une séance du 17 février 1999, il a été
convenu devant la Commission que "1. les requérants présen-
t[erai]ent une nouvelle requête motivée, tendant à obtenir
l'autorisation d'acquisition; 2. à réception de ladite re-
quête, l'autre partie sera[it] appelée à faire des observa-
tions avant que la commission statue."

Le 19 mars 1999, les requérants ont présenté une
nouvelle requête motivée, dans laquelle ils alléguaient
notamment que R.________, beau-fils de P.S.________, s'était
"engagé fermement et irrévocablement à reprendre le domaine
litigieux" à la suite des requérants.

Après que M.________ eut présenté des observations
le 12 avril 1999, la Commission a encore invité les requé-
rants à lui faire part de leurs commentaires sur ces observa-
tions. Les requérants ont donné suite à cette invitation le
3
mai 1999, en joignant à leurs observations complémentaires
une déclaration signée le 22 avril 1999 par R.________;
celui-ci y confirmait son très vif intérêt pour
l'acquisition
du domaine à une date indéterminée, mais dès que les requé-
rants cesseraient l'exploitation dudit domaine. Les commen-
taires et leur annexe n'ont pas été communiqués à M.________.

Le 8 juin 1999, la Commission a décidé qu'"il
n'exist[ait] aucun motif de refus à l'acquisition [...] par
les requérants, si bien qu'en cas d'aliénation
l'autorisation
d'acquérir p[ouvait] être accordée".

D.- Par arrêt du 30 novembre 1999, le Tribunal admi-
nistratif a rejeté le recours formé par M.________ contre
cette décision.

E.- Agissant par la voie du recours de droit admi-
nistratif au Tribunal fédéral, M.________ conclut avec suite
de frais et dépens à l'annulation de cet arrêt et au refus
de
l'autorisation d'acquisition sollicitée par les intimés.

P. et P.-A. S.________, de même que l'Office fédéral
de la Justice, proposent le rejet du recours.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- Le Tribunal fédéral examine d'office et avec une
pleine cognition la recevabilité des recours qui lui sont
soumis (ATF 125 I 412 consid. 1a, 253 consid. 1; 125 II 86

consid. 2c in fine, 293 consid. 1a; 124 III 44 consid. 1,
134
consid. 2 et les arrêts cités).

a) La décision de l'autorité cantonale rejetant le
recours du recourant est une décision au sens de l'art. 5 de
la loi fédérale sur la procédure administrative (PA; RS
172.021); prononcée en dernière instance cantonale, elle
peut
en principe faire l'objet d'un recours de droit
administratif
au Tribunal fédéral (art. 97 al. 1 et 98 let. g OJ), dès
lors
qu'un tel recours n'est pas exclu par les art. 99 à 102 OJ.
L'art. 89 LDFR prévoit d'ailleurs expressément la voie du
recours de droit administratif au Tribunal fédéral contre
les
décisions sur recours prises par les autorités cantonales de
dernière instance au sens des art. 88 al. 1 et 90 let. f
LDFR.

b) Selon la règle générale de l'art. 103 let. a OJ,
quiconque est atteint par la décision attaquée et a un inté-
rêt digne de protection à ce qu'elle soit annulée ou
modifiée
a qualité pour interjeter un recours de droit administratif.
L'art. 83 al. 3 LDFR restreint toutefois la qualité pour
interjeter un recours devant l'autorité cantonale de recours
(art. 88 LDFR) contre le refus ou l'octroi d'une
autorisation
au sens des art. 61 ss LDFR. Cette restriction vaut aussi
pour le recours de droit administratif au Tribunal fédéral;
en effet, celui qui n'a en vertu du droit fédéral pas
qualité
de partie devant l'autorité cantonale de recours ne saurait
avoir cette qualité dans la procédure de recours au Tribunal
fédéral (arrêt non publié K. c. G. du 23 octobre 1997,
consid. 2b; Christoph Bandli, Le droit foncier rural, Brugg
1998, n. 1 ad art. 89 LDFR).

c) Aux termes de l'art. 83 al. 3 LDFR, les parties
contractantes peuvent interjeter un recours devant
l'autorité

cantonale de recours (art. 88 LDFR) contre le refus d'auto-
risation, l'autorité cantonale de surveillance, le fermier
et
les titulaires du droit d'emption (cf. art. 25 ss LDFR), du
droit de préemption (cf. art. 42 ss LDFR) ou du droit à l'at-
tribution (cf. art. 11 ss LDFR), contre l'octroi de l'auto-
risation. La lettre de cette disposition ne confère ainsi
pas
à l'acquéreur d'une entreprise ou d'un immeuble agricole la
qualité pour recourir contre l'octroi d'une autorisation
d'acquisition à celui qui se prévaut d'un droit de préemp-
tion. Rien ne permet cependant d'admettre qu'il s'agisse là
d'un silence qualifié du législateur, qui lierait le juge
(ATF 125 III 277 consid. 2a; 118 II 199 consid. 2a et les
références citées).

En effet, la formulation de l'art. 83 al. 3 LDFR ré-
sulte d'un compromis entre l'opinion défendue par le Conseil
national, qui à la suite du Conseil fédéral voulait voir la
règle de l'art. 103 let. a OJ appliquée également à la LDFR,
et l'opinion du Conseil des États, selon lequel les
décisions
d'autorisation ne devraient pouvoir être attaquées que par
les parties au contrat et non par un tiers quelconque; le
compromis de l'art. 83 al. 3 LDFR vise ainsi à exclure du
cercle des personnes ayant qualité pour recourir les
voisins,
les organisations de protection de la nature et de l'envi-
ronnement ainsi que les organisations professionnelles comme
les associations paysannes (arrêt non publié H. c. K. et F.
du 8 juillet 1999, consid. 2a; cf. Bandli, op. cit., n. 3 ad
art. 88 LDFR; Beat Stalder, ibid., n. 15 et 17 ad art. 83
LDFR). À cet égard, le conseiller fédéral Koller a exposé
devant le Conseil des États que dans la recherche d'un com-
promis acceptable par les deux chambres, "[e]s geht ja vor
allem um den Pächter und um jene, die Kaufs-, Vorkaufs- und
Zuweisungsrechte geltend machen können. Wenn wir diese Par-
teien noch expressis verbis erwähnen, sollten wir den Kom-
promiss hergestellt haben" (BO CE 1991 p. 731).

Il s'avère ainsi que l'intention du législateur, en
adoptant l'art. 83 al. 3 LDFR dans sa formulation
définitive,
était avant tout d'assurer un droit de recours au fermier
ainsi qu'aux titulaires du droit d'emption, du droit de pré-
emption ou du droit à l'attribution en mentionnant expressé-
ment ces personnes, tout en excluant du cercle des personnes
ayant qualité pour recourir les voisins, les organisations
de
protection de la nature et de l'environnement ainsi que les
organisations professionnelles comme les associations pay-
sannes. Dès lors, l'art. 83 al. 3 LDFR ne doit pas être con-
sidéré - contrairement à ce que la formulation employée pour-
rait laisser supposer - comme contenant une énumération
exhaustive des personnes ayant qualité pour recourir contre
l'octroi de l'autorisation.

d) L'art. 83 al. 3 LDFR n'énumérant pas de manière
exhaustive les personnes habilitées à recourir contre l'oc-
troi de l'autorisation, il s'agit d'interpréter cette dispo-
sition conformément à l'intention du législateur. Au vu de
ce
qui a été dit plus haut (consid. c), il n'apparaît pas que
cette intention ait été de restreindre le droit de recours
de
l'acquéreur d'une entreprise ou d'un immeuble agricole. En
fait, il est vraisemblable que, comme le relève l'Office
fédéral de la Justice dans ses observations, la question du
droit de recours des parties contractantes contre une auto-
risation accordée au tiers titulaire d'un droit de
préemption
ait échappé au législateur. Si l'on ne voit guère quel inté-
rêt l'acquéreur et l'aliénateur d'une entreprise ou d'un im-
meuble agricole pourraient avoir à recourir contre l'octroi
de l'autorisation au premier cité - ce qui explique que le
législateur n'ait pas mentionné les parties contractantes
parmi les personnes habilitées à recourir contre l'octroi de
l'autorisation -, il en va différemment en cas d'octroi de
l'autorisation à un tiers se prévalant d'un droit de pré-

emption. En effet, en pareil cas, l'acquéreur contractuel
risque de perdre son acquisition au profit de ce tiers et
d'être ainsi lésé dans ses intérêts personnels et juridique-
ment protégés.

e) Il se justifie dès lors d'interpréter l'art. 83
al. 3 LDFR en ce sens que l'acquéreur contractuel d'une en-
treprise ou d'un immeuble agricole a qualité pour recourir
contre l'octroi de l'autorisation à celui qui se prévaut
d'un
droit de préemption (cf. dans ce sens Christina Schmid-
Tschirren, in Communications de droit agraire 1998 p. 41 ss,
n. 4 p. 43 et l'arrêt valaisan cité).

f) Le recourant ayant qualité pour recourir, il y a
lieu d'entrer en matière sur le recours.

2.- Le recourant se plaint d'abord de ce que l'au-
torité cantonale aurait constaté de manière manifestement
inexacte (cf. art. 105 al. 2 OJ) qu'une inspection locale a
eu lieu le 17 février 1999 (arrêt attaqué, lettre C p. 2),
que le domaine est exploité dans les règles de l'art (arrêt
attaqué, lettre D p. 3) et que l'exploitation se limite à
l'estivage du bétail (arrêt attaqué, consid. 4 in fine p. 7).

a) Le fait que l'autorité cantonale a constaté
inexactement que la procédure à suivre avait été convenue
lors d'une inspection locale le 17 février 1999, alors que
la
séance en question avait en réalité eu lieu dans les locaux
de la Commission, n'est pas déterminant pour la solution du
litige.

b) S'agissant de l'étendue de l'exploitation, le
fait que les intimés exploitent aussi une fosse à purin,
s'il
suppose que les intimés exploitent également des terres, ne
fait pas apparaître comme manifestement inexacte la constata-
tion selon laquelle l'exploitation du domaine litigieux se

limite à l'estivage du bétail. Le recourant allègue en effet
lui-même que les intimés exploitent également un autre domai-
ne dont ils sont propriétaires, de sorte que le purin pour-
rait tout aussi bien être utilisé sur cet autre domaine.

c) Devant l'autorité cantonale, le recourant s'était
plaint de ce que la Commission avait constaté à tort que les
intimés exploitaient le domaine litigieux dans les règles de
l'art (cf. arrêt attaqué, lettre E p. 3). Les juges
cantonaux
ne se sont pas prononcés sur ce grief, qui semble pourtant
avoir quelque consistance sur le vu des pièces présentées
par
le recourant. Il leur appartiendra dès lors d'éclaircir
l'état de fait sur ce point, l'arrêt attaqué devant de toute
manière être annulé pour violation du droit d'être entendu,
comme on va le voir (cf. consid. 3 infra).

3.- a) Selon le recourant, l'autorité cantonale au-
rait à la fois établi les faits au mépris des règles essen-
tielles de procédure (cf. art. 105 al. 2 OJ) et violé son
droit d'être entendu en fondant sa décision notamment sur la
constatation que les intimés avaient la perspective d'un
successeur prêt à reprendre l'exploitation du domaine liti-
gieux; en effet, le recourant n'a pas été informé du dépôt
du
mémoire complémentaire du 3 mai 1999, auquel était annexée
une attestation du successeur en question, et n'a pas eu
l'occasion de se déterminer sur cette pièce.

b) L'autorité cantonale a considéré que le droit
d'être entendu du recourant n'avait pas été violé du fait
qu'il n'avait pas été informé du dépôt le 3 mai 1999
d'observations complémentaires par les intimés et qu'il
n'avait pas pu se déterminer sur la déclaration écrite de
R.________ qui y était jointe. En effet, selon les juges
cantonaux, "cette déclaration ne faisait qu'attester les
allégations des intéressés, de sorte que l'on se trouv[ait]

en présence d'une question de pur droit (celle de savoir si
la possibilité d'une reprise éventuelle du domaine par le
prénommé constitu[ait] un fait déterminant pour la solution
du litige) et le renvoi de la cause à la commission ne
constituerait qu'un acte de procédure vain" (arrêt attaqué,
consid. 2 p. 5).

c) L'argumentation de l'autorité cantonale ne
résiste pas à l'examen. En effet, le droit d'être entendu,
tel qu'il était garanti par l'art. 4 aCst.
et maintenant par
l'art. 29 al. 2 de la nouvelle Constitution Fédérale du 18
avril 1999, comprend le droit pour le particulier de s'expli-
quer avant qu'une décision ne soit prise à son détriment, de
fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur
la décision, d'avoir accès au dossier, de participer à
l'administration des preuves, d'en prendre connaissance et
de
se déterminer à leur propos (ATF 124 I 49 consid. 3a, 241
consid. 2; 122 I 53 consid. 4a; 119 Ia 260 consid. 6a; 119
Ib
12 consid. 4; 118 Ia 17 consid. 1c; 117 Ia 262 consid. 4b;
115 Ia 8 consid. 2b et les arrêts cités). Le droit d'être en-
tendu est une garantie constitutionnelle de caractère
formel,
dont la violation entraîne l'annulation de la décision atta-
quée indépendamment des chances de succès du recours sur le
fond (ATF 122 II 464 consid. 4a; 121 I 230 consid. 2a; 121
III 331 consid. 3c; 119 Ia 136 consid. 2b et les arrêts ci-
tés).

En l'espèce, le recourant n'a pas pu se déterminer
sur une preuve - et non, comme le soutient l'autorité canto-
nale, sur "une question de pur droit" - dont on ne saurait
nier l'importance. Le recourant avait d'ailleurs souligné en
page 3 de ses observations du 12 avril 1999 que "toutes les
explications données par les requérants à propos de M.
R.________ [n'étaient] que des allégués et [n'étaient] pas
prouvées". Étant donné le caractère formel du droit d'être
entendu, il convient dès lors d'annuler l'arrêt attaqué et
de

renvoyer la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle déci-
sion dans le sens des considérants, sans qu'il soit néces-
saire d'examiner les griefs d'ordre matériel soulevés par le
recourant.

4.- Il sied en revanche de constater que, comme le
fait valoir à raison le recourant, les juges cantonaux ont
également violé son droit d'être entendu en limitant
indûment
leur pouvoir d'examen à l'excès ou à l'abus du pouvoir
d'appréciation (arrêt attaqué, consid. 4c p. 7).

En effet, l'art. 33 LJPA/NE (RSN 152.130) prévoit
que le recourant peut invoquer la violation du droit, y
compris l'excès ou l'abus du pouvoir d'appréciation. Cette
disposition correspond aux exigences de l'art. 98a al. 3 OJ,
selon lequel les motifs de recours doivent être admis au
moins aussi largement devant la dernière autorité judiciaire
cantonale que pour le recours de droit administratif devant
le Tribunal fédéral, lequel peut être formé notamment pour
violation du droit fédéral, y compris l'excès ou l'abus du
pouvoir d'appréciation (art. 104 let. a OJ).

Or selon la jurisprudence, l'autorité qui restreint
son pouvoir d'examen alors qu'elle dispose d'une pleine
cognition commet un déni de justice formel; ce n'est que si
la nature de l'objet du litige s'oppose à un réexamen illi-
mité de la décision attaquée que le Tribunal fédéral a admis
que l'autorité de recours puisse restreindre, sans violer
l'art. 4 aCst., le libre pouvoir d'examen qui lui est imposé
par la loi (ATF 115 Ia 5 consid. 2b et les arrêts cités).
Ainsi, pour les questions exigeant des connaissances techni-
ques spéciales et qui sont donc par nature difficilement
vérifiables, on peut admettre que l'autorité supérieure ne
substitue pas son appréciation à celle de l'autorité infé-
rieure disposant de connaissances spécifiques; cela ne vaut
cependant que dans les domaines où une retenue est objecti-

vement justifiée voire absolument nécessaire (ATF 116 Ib 270
consid. 3b et la jurisprudence citée).

En l'espèce, la question à trancher - à savoir la
capacité d'exploiter à titre personnel au sens de l'art. 63
al. 1 let. a LDFR en relation avec l'art. 9 LDFR - est une
question purement juridique ne nécessitant pas de connais-
sances techniques spéciales, de sorte que l'autorité ne
pouvait restreindre son plein pouvoir d'examen sans violer
le
droit d'être entendu du recourant. L'annulation de l'arrêt
attaqué se justifie ainsi également pour ce motif.

5.- En définitive, le recours, partiellement fondé,
doit être admis, l'arrêt entrepris annulé et l'affaire ren-
voyée à l'autorité cantonale pour nouvelle décision dans le
sens des considérants.

Eu égard aux motifs pour lesquels le recours doit
être admis, il convient de mettre les dépens auxquels le
recourant a droit à la charge du canton de Neuchâtel (ATF
125
I 389 consid. 5; 109 Ia 5 consid. 5); celui-ci sera en
revanche dispensé de payer les frais judiciaires (art. 156
al. 2 OJ).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Admet le recours, annule l'arrêt attaqué et
renvoie l'affaire à l'autorité cantonale pour nouvelle
décision dans le sens des considérants.

2. Dit que le canton de Neuchâtel versera au recou-
rant une indemnité de 2'000 fr. à titre de dépens.

3. Communique le présent arrêt en copie aux manda-
taires des parties, au Tribunal administratif du canton de
Neuchâtel, à la Commission foncière agricole du canton de
Neuchâtel et à l'Office fédéral de la Justice.

__________

Lausanne, le 8 juin 2000
ABR/frs

Au nom de la IIe Cour civile
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE :
Le Président,

Le Greffier,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 5A.2/2000
Date de la décision : 08/06/2000
2e cour civile

Analyses

Art. 83 al. 3 LDFR; qualité de l'acquéreur d'une entreprise ou d'un immeuble agricole pour recourir contre l'octroi au fermier d'une autorisation d'acquisition. L'art. 83 al. 3 LDFR doit être interprété en ce sens que l'acquéreur contractuel d'une entreprise ou d'un immeuble agricole a qualité pour recourir contre l'octroi de l'autorisation d'acquisition, au sens des art. 61 ss LDFR, à celui - en l'occurrence les fermiers - qui se prévaut d'un droit de préemption.


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-06-08;5a.2.2000 ?
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