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23/05/2000 | SUISSE | N°2A.202/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 23 mai 2000, 2A.202/2000


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2A.202/2000

IIe C O U R D E D R O I T P U B L I C
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23 mai 2000

Composition de la Cour: MM. et Mme les Juges Wurzburger,
président, Hartmann, Betschart, Hungerbühler et Yersin.
Greffière: Mme Revey.

Statuant sur le recours de droit administratif
formé par

X.________, né le 7 mai 1972, actuellement détenu au Centre
de détention LMC, à Granges (VS),

contre

l'arrêt rendu le 28 avril 2000 par le Juge unique de la Cour
de

droit public du Tribunal cantonal du canton du Valais,
dans la cause qui oppose le recourant au Service de l'état
ci...

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2A.202/2000

IIe C O U R D E D R O I T P U B L I C
***********************************************

23 mai 2000

Composition de la Cour: MM. et Mme les Juges Wurzburger,
président, Hartmann, Betschart, Hungerbühler et Yersin.
Greffière: Mme Revey.

Statuant sur le recours de droit administratif
formé par

X.________, né le 7 mai 1972, actuellement détenu au Centre
de détention LMC, à Granges (VS),

contre

l'arrêt rendu le 28 avril 2000 par le Juge unique de la Cour
de droit public du Tribunal cantonal du canton du Valais,
dans la cause qui oppose le recourant au Service de l'état
civil et des étrangers du canton du V a l a i s;

(art. 13b al. 1 et 4 LSEE:
levée de la détention en vue du refoulement)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- X.________, ressortissant d'Albanie né en 1972, a
été interpellé à Brig le 21 mars 2000.

Le 23 mars 2000, le Service cantonal valaisan de l'état
civil et des étrangers (ci-après: le Service cantonal) a or-
donné le refoulement immédiat à la frontière de X.________
au motif qu'il était entré en Suisse sans visa et y avait
séjourné illégalement.

Par décision du même jour, le Service cantonal a ensui-
te ordonné la mise en détention immédiate en vue du refoule-
ment de X.________ pour trois mois au plus, en vertu de
l'art. 13b al. 1 lettre c de la loi fédérale du 26 mars 1931
sur le séjour et l'établissement des étrangers (LSEE; RS
142.20), des indices faisant craindre qu'il entende se sous-
traire au renvoi. En effet, démuni de moyens d'existence
personnels et réguliers, l'intéressé était entré en Suisse
sans papiers d'identité ni visa. Il avait en outre pénétré
par effraction dans une cabane de montagne, où il avait volé
des vêtements et des chaussures.

Ce prononcé a été confirmé le lendemain par le Juge
unique de la Cour de droit public du Tribunal cantonal du
canton du Valais (ci-après: le Tribunal cantonal) au motif
que les circonstances de l'arrivée de l'intéressé en Suisse
dénotaient une habitude de la clandestinité qui suffisait à
remplir les réquisits de l'art. 13b al. 1 lettre c LSEE.

B.- Par lettre datée du 20 avril 2000, X.________ a re-
quis la levée de sa détention.

Entendu le 28 avril 2000 par le Tribunal cantonal,
l'intéressé a maintenu sa requête.

C.- Par arrêt du 28 avril 2000, le Tribunal cantonal a
refusé de libérer X.________, considérant que la situation
ne s'était pas sensiblement modifiée depuis la mise en dé-
tention. En outre, les autorités albanaises traitaient les
demandes de laissez-passer avec plus de célérité quand
l'identité des intéressés était certaine.

D.- Agissant lui-même par lettre non datée, parvenue au
Tribunal fédéral le 4 mai 2000 et rédigée en albanais,
X.________ conclut en substance à l'annulation de l'arrêt du
Tribunal cantonal du 28 avril 2000 et à sa libération immé-
diate.

Le Tribunal cantonal renonce à se déterminer. Le Servi-
ce cantonal propose le rejet du recours. L'Office fédéral
des étrangers n'a pas déposé d'observations. De son côté,
l'intéressé ne s'est pas exprimé sur la réponse des autori-
tés cantonales.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- a) Le Tribunal fédéral examine d'office et libre-
ment la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF
125 I 14 consid. 2a p. 16, 253 consid. 1a p. 254).

Selon l'art. 108 al. 2 OJ, le recours de droit adminis-
tratif doit contenir les conclusions, motifs et moyens de
preuve. La motivation doit être topique, à savoir se rappor-
ter au litige en question (ATF 118 Ib 134 ss). Lorsqu'il
s'agit d'un recours formé sans l'aide d'un professionnel
contre l'approbation d'une mise en détention, le Tribunal

fédéral ne pose pas d'exigences élevées de motivation (cf.
ATF 122 I 275 consid. 3b p. 277). Il suffit que l'on puisse
déduire de l'acte de recours, comme en l'espèce, que l'inté-
ressé s'oppose à sa détention.

Par ailleurs, s'il est vrai que le présent recours est
rédigé en albanais, en violation de l'art. 30 al. 1 OJ, il a
été traduit par les soins du Tribunal fédéral, de sorte
qu'il est recevable de ce point de vue.

Dans ces conditions, respectant les autres conditions
des art. 97 ss OJ, le recours est recevable.

b) Conformément à l'art. 104 lettre a OJ, le recours de
droit administratif peut être formé pour violation du droit
fédéral, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'apprécia-
tion. Le Tribunal fédéral revoit d'office l'application du
droit fédéral qui englobe notamment les droits constitution-
nels du citoyen (ATF 125 III 209 consid. 2 p. 211; 122 IV 8
consid. 1b p. 11). Comme il n'est pas lié par les motifs que
les parties invoquent, il peut admettre le recours pour
d'autres raisons que celles avancées par le recourant ou, au
contraire, confirmer l'arrêt attaqué pour d'autres motifs
que ceux retenus par l'autorité intimée (art. 114 al. 1 in
fine OJ; ATF 121 II 473 consid. 1b p. 477 et les arrêts ci-
tés, voir aussi ATF 124 II 103 consid. 2b p. 109).

En revanche, lorsque le recours est dirigé, comme en
l'occurrence, contre la décision d'une autorité judiciaire,
le Tribunal fédéral est lié par les faits constatés dans la
décision, sauf s'ils sont manifestement inexacts ou incom-
plets ou s'ils ont été établis au mépris de règles essen-
tielles de procédure (art. 104 lettre b et 105 al. 2 OJ; 125
II 633 consid. 1c p. 635). Aussi la possibilité d'alléguer
des faits nouveaux ou de faire valoir de nouveaux moyens de
preuve est-elle très restreinte (ATF 125 II 217 consid. 3a

p. 221; 124 II 409 consid. 3a p. 420; 121 II 97 consid. 1c
p. 99; 114 Ib 27 consid. 8b p. 33; Fritz Gygi, Bundesverwal-
tungsrechtspflege, 2e éd., Berne 1983, p. 286/287).

Ainsi, en principe, saisi d'un recours contre une déci-
sion de détention en vue du refoulement, le Tribunal fédéral
se fonde uniquement sur l'état de fait tel qu'il se présen-
tait devant le juge de la détention. Il ne saurait tenir
compte des faits que le recourant n'a pas expressément allé-
gués devant cette autorité ou qui ne ressortaient pas mani-
festement des pièces alors déposées. Les faits nouveaux doi-
vent être pris en considération par le juge cantonal de la
détention (pour autant que les conditions d'une révision ne
soient pas remplies) lors de l'examen d'une demande de levée
de détention ou, une fois écoulés les trois mois de déten-
tion, dans le cadre d'une procédure de prolongation de cel-
le-ci (ATF 125 II 217 consid. 3a p. 221).

2.- Selon l'art. 13b al. 1 LSEE, lorsqu'une décision de
renvoi ou d'expulsion de première instance a été notifiée à
un étranger, l'autorité cantonale compétente peut, aux fins
d'en assurer l'exécution, mettre cette personne en déten-
tion, en particulier lorsque "des indices concrets font
craindre qu'elle entend se soustraire au refoulement, notam-
ment si son comportement jusqu'alors mène à conclure qu'elle
se refuse à obtempérer aux instructions des autorités" (let-
tre c; sur les indices de danger de fuite, voir notamment
ATF 122 II 49 consid. 2a p. 50/51 et Alain Wurzburger, La
jurisprudence récente du Tribunal fédéral en matière de po-
lice des étrangers, in: RDAF 53/1997 I, p. 267 ss, spéc.
p. 332/333). La légalité et l'adéquation de la détention
doivent être examinées dans les nonante-six heures au plus
tard par une autorité judiciaire au terme d'une procédure
orale (art. 13c al. 2 LSEE). Une demande de levée de déten-
tion peut être déposée un mois plus tard (art. 13c al. 4
LSEE). A cet égard, le juge de la détention doit examiner si

les motifs de détention subsistent, même lorsque l'étranger
n'a pas recouru contre la décision initiale de mise en dé-
tention (art. 13c al. 5 lettre a LSEE); il peut toutefois se
référer à la motivation de ce prononcé (cf. ATF 122 I 275
consid. 3b p. 277). La détention doit être levée lorsque les
autorités n'ont pas entrepris avec la diligence requise les
démarches nécessaires à l'exécution du renvoi ou de l'expul-
sion (art. 13b al. 3 LSEE), ou lorsque l'exécution du renvoi
ou de l'expulsion s'avère impossible pour des raisons juri-
diques ou matérielles (art. 13c al. 5 lettre a LSEE). Enfin,
selon l'art. 13c al. 3 LSEE, le juge de la détention tient
compte de la situation familiale de la personne détenue et
des conditions d'exécution de la détention (voir, sur l'en-
semble de ces points, les arrêts cités in ATF 125 II 369
consid. 3a p. 374).

3.- Le recourant demande à être libéré afin de "cher-
cher un travail, pour assurer sa propre subsistance ou ren-
trer en Albanie".

a) Le recourant a été mis en détention administrative
le 23 mars 2000 afin d'éviter qu'il se soustraie à son re-
foulement (art. 13b al. 1 lettre c LSEE).

aa) Des indices suffisants permettent de conclure à un
danger de fuite.

En premier lieu, le recourant a adopté un comportement
pénalement répréhensible car, accompagné d'un compatriote,
il est entré par effraction dans une cabane de montagne et y
a dérobé des vêtements et des chaussures. Du reste, par or-
donnance pénale du 22 mars 2000 entrée en force et figurant
au dossier, le recourant a été condamné pour vol (et entrée
illégale en Suisse) à un mois d'emprisonnement avec sursis.
Or, selon la jurisprudence, un étranger condamné pénalement
est en principe plus susceptible qu'une personne sans anté-

cédents judiciaires de se soustraire à l'avenir aux injonc-
tions de l'autorité (ATF 119 Ib 193 consid. 2b p. 198). Cer-
tes, le recourant explique avoir été poussé par la fatigue
et le froid, mais cet élément ne saurait être pris en consi-
dération par le Tribunal fédéral, car le juge pénal en a
déjà tenu compte.

Puis, si le recourant affirme avoir dû se résigner à
jeter son passeport - ce document ayant été soi-disant trem-
pé pendant la traversée de l'Adriatique au point d'être il-
lisible -, ses déclarations à cet égard sont contradictoi-
res, partant, peu crédibles. En effet, selon le dossier, le
recourant a affirmé le 21 mars 2000 s'en être débarrassé à
son arrivée à Bari, alors qu'il allègue maintenant avoir agi
de la sorte à la frontière italo-suisse.

De plus, le recourant ne s'est pas contenté de refuser
de coopérer à l'obtention de documents de voyage, mais a
tenté de faire obstruction à l'action des autorités en s'en-
gageant à effectuer des démarches qu'il n'a finalement pas
accomplies. Ainsi, d'après le dossier, il a déclaré le 21
mars 2000 à la police cantonale pouvoir demander à son père
résidant en Albanie de lui procurer une attestation d'iden-
tité. En revanche, il a affirmé le 24 mars 2000 au Tribunal
cantonal qu'il refusait de s'adresser à sa famille à ce pro-
pos, sous prétexte que celle-ci lui créerait des ennuis en
apprenant sa mise en détention. Par ailleurs, il paraît dou-
teux qu'un cousin séjournant en Italie consente à se dépla-
cer à cet effet en Albanie, comme le recourant l'a prétendu
le même jour.

Enfin, le recourant est démuni de tout moyen d'existen-
ce en Suisse.

bb) D'un autre côté, le recourant ne s'oppose pas, ap-
paremment, à son rapatriement en Albanie. Selon le dossier,

il a affirmé le 24 mars 2000 au Tribunal cantonal qu'il sou-
haitait "rentrer au plus vite en Albanie". Cette volonté a
été confirmée le 20 avril 2000 dans sa requête de levée de
détention, puis le 28 avril 2000 devant le Tribunal canto-
nal. Enfin, il demande maintenant à ce qu'un délai de vingt-
quatre heures lui soit accordé afin de quérir lui-même un
laissez-passer auprès de la représentation albanaise en
Suisse.

Toutefois, d'après le dossier, il a déclaré le 21 mars
2000 à la police cantonale qu'il entendait travailler en Eu-
rope; ce but apparaissant difficile à réaliser, il préférait
rentrer en Albanie plutôt que d'être incarcéré. Dans ces
circonstances, sa volonté affirmée de rapatriement est su-
jette à caution, dès lors qu'elle semble ne se manifester
que par opposition à une détention. Le recourant paraît sur-
tout intéressé à travailler, sinon en Suisse, du moins en
Europe, ce qui n'est pas contredit par son écriture de re-
cours. Du reste, son peu d'empressement à obtenir un lais-
sez-passer tend à conforter cette présomption.

cc) Dans ces conditions, il est douteux qu'une fois li-
béré, le recourant reste à disposition des autorités en vue
de son renvoi, de sorte que le risque de fuite au sens de
l'art. 13b al. 1 lettre c LSEE subsiste.

b) Par ailleurs, il ressort du dossier que les autori-
tés ont mené avec la diligence voulue les démarches en vue
d'obtenir un laissez-passer, dès lors que, le 28 mars 2000,
la police cantonale a demandé à la représentation albanaise
en Suisse de délivrer un tel document.

Au demeurant, selon ses observations, le Service canto-
nal a encore requis le 11 mai 2000 - postérieurement à l'ar-
rêt attaqué - la nouvelle Division chargée des rapatriements
de l'Office fédéral des réfugiés (cf. ordonnance du 11 août

1999 sur l'exécution du renvoi et de l'expulsion d'étrangers
[OERE; RS 142.281], entrée en vigueur le 1er octobre 1999),
de solliciter la représentation suisse en Albanie d'examiner
l'identité de l'intéressé.

De plus, rien ne laisse supposer que ces démarches ne
pourraient aboutir avant l'échéance des trois mois de déten-
tion, d'autant que, pour l'instant, l'identité du recourant
est présumée correcte.

Enfin, le recourant ne s'étant pas plaint des condi-
tions de sa détention, il n'y a pas lieu de traiter ce
point.

c) En conséquence, il sied de confirmer le maintien en
détention du recourant.

4.- Vu ce qui précède, le recours est mal fondé et doit
être rejeté. Succombant, le recourant devrait en principe
supporter les frais
judiciaires (art. 156 al. 1 OJ). Compte
tenu de sa situation financière précaire, il se justifie ce-
pendant de statuer sans frais (art. 153 et 153a OJ).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Rejette le recours.

2. Dit qu'il n'est pas perçu d'émolument judiciaire.

3. Communique le présent arrêt en copie au recourant,
au Service de l'état civil et des étrangers et au Juge uni-

que de la Cour de droit public du Tribunal cantonal du can-
ton du Valais, ainsi qu'au Département fédéral de justice et
police.

Lausanne, le 23 mai 2000
RED/mnv

Au nom de la IIe Cour de droit public
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président,

La Greffière,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2A.202/2000
Date de la décision : 23/05/2000
2e cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-05-23;2a.202.2000 ?
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