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16/03/2000 | SUISSE | N°K.82/99

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 16 mars 2000, K.82/99


«AZA»
K 82/99 Mh

IIIe Chambre

composée des Juges fédéraux Schön, Spira et Widmer; Addy,
Greffier

Arrêt du 16 mars 2000

dans la cause

C.________, recourante, représentée par B.________, avocat,

contre

SWICA Organisation de santé, Römerstrasse 38, Winterthur,
intimée,

et

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

A.- Le 1er juin 1995, C.________ a commencé à tra-
vailler comme sommelière au service de R.________ au
restaurant X.________. L

e salaire convenu contractuellement
était de 3500 fr. par mois. A partir du 15 août 1995,
C.________ s'est trouvée en incapacité de t...

«AZA»
K 82/99 Mh

IIIe Chambre

composée des Juges fédéraux Schön, Spira et Widmer; Addy,
Greffier

Arrêt du 16 mars 2000

dans la cause

C.________, recourante, représentée par B.________, avocat,

contre

SWICA Organisation de santé, Römerstrasse 38, Winterthur,
intimée,

et

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

A.- Le 1er juin 1995, C.________ a commencé à tra-
vailler comme sommelière au service de R.________ au
restaurant X.________. Le salaire convenu contractuellement
était de 3500 fr. par mois. A partir du 15 août 1995,
C.________ s'est trouvée en incapacité de travail pour
cause de maladie. Son employeur l'a licenciée pour le
31 octobre 1995.

Pendant la durée des rapports de travail, C.________ a
été affiliée à la Caisse-Maladie Suisse d'Entreprises
(CMSE), une caisse-maladie de la SWICA Organisation de
santé (ci-après : la SWICA), dans le cadre d'un contrat
d'assurance collective conclu par son employeur, notamment
pour une indemnité journalière en cas d'incapacité de tra-
vail couvrant 80 pour cent du gain assuré (après un délai
d'attente de 4 jours). Après la résiliation de ses rapports
de travail, C.________ a été transférée dans l'assurance
individuelle de la SWICA à compter du 1er novembre 1995,
pour une indemnité journalière de 92 fr. dès le quatrième
jour. Au total, la SWICA lui a versé 720 indemnités journa-
lières, du 18 août 1995 au 31 octobre 1997.
Dans l'intervalle, C.________ a passé une transaction
judiciaire avec son ex-employeur, aux termes de laquelle ce
dernier a reconnu lui devoir la somme de 4500 fr. (procès-
verbal du 26 février 1996 du Tribunal civil du district de
Lausanne). A la suite de la conclusion de cette transac-
tion, C.________ a demandé à la SWICA de recalculer son
indemnité journalière en prenant comme salaire assuré, le
salaire mensuel contractuellement convenu (3500 fr.),
augmenté d'un montant de 900 fr. qui correspond, rapporté
sur un mois d'activité, au complément que son ex-employeur
a transactionnellement reconnu lui devoir pour la durée des
rapports de travail (4500 fr. : 5 mois d'activité). Elle
indiquait par ailleurs que des cotisations paritaires AVS
avaient été prélevées sur cette somme (cf. relevé de compte
complémentaire établi le 5 août 1997 par la Caisse de
compensation AVS Gastrosuisse).
Par décision du 11 décembre 1997, la SWICA a refusé de
donner suite à la demande de l'assurée, motif pris que le
montant reconnu transactionnellement par l'ex-employeur

n'avait pas la qualité de revenu du travail, mais «corres-
pondait à un versement unique, solde de tout compte».
Saisie d'une opposition, la SWICA l'a rejetée par décision
du 3 juillet 1998. Reprenant l'argumentation développée
dans sa première décision, elle a en outre ajouté que,
selon ses conditions générales d'assurance, elle était de
toute façon libérée de ses obligations à l'égard de l'assu-
rée, car celle-ci avait conclu un arrangement avec un tiers
sans avoir au préalable requis son consentement.

B.- Par jugement du 25 mars 1999, le Tribunal des
assurances du canton de Vaud a rejeté le recours formé par
l'assurée contre la décision sur opposition de la SWICA.

C.- C.________ interjette recours de droit adminis-
tratif contre ce jugement dont elle requiert l'annulation,
en concluant derechef, sous suite de dépens, à l'octroi
d'indemnités journalières fondées sur un salaire assuré de
4400 fr. (3500 fr. + 900 fr.). Elle demande par ailleurs le
bénéfice de l'assistance judiciaire gratuite.
La SWICA conclut au rejet du recours, tandis que
l'Office fédéral des assurances sociales ne s'est pas
déterminé.

Considérant en droit :

1.- Est litigieuse la prise en compte du montant de
4500 fr. (reconnu transactionnellement par l'ancien em-
ployeur de C.________) comme salaire assuré pour le calcul
des indemnités journalières versées à la recourante du
18 août 1995 au 31 octobre 1997. Dans cette mesure, le
litige doit être tranché en application des dispositions de
l'ancien droit, c'est-à-dire de la LAMA (en vigueur jus-
qu'au 31 décembre 1995), et des principes jurisprudentiels
dégagés à propos de ces dispositions (art. 103 al. 2
LAMal).

2.- a) Ni la LAMA (art. 12bis), ni les ordonnances qui
s'y rattachent (cf. en particulier les art. 27 et 28 de
l'ord. III) ne contiennent de disposition sur le calcul du
revenu déterminant pour les indemnités journalières. Cette
question est ainsi laissée aux dispositions internes des
caisses-maladie, lesquelles s'interprètent selon le prin-
cipe de la bonne foi (RAMA 1994 no K 934 p. 107, consid. 3;
RJAM 1982 no 491 p. 141).

b) Selon l'art. 6 ch. 1 du règlement de l'assurance
perte de gain SALARIA dans sa teneur en vigueur au 1er jan-
vier 1994 (ci-après : le règlement SALARIA), SWICA verse à
l'assuré la perte de salaire et de gain survenue, sur pré-
sentation des justificatifs, dont le montant correspond à
l'indemnité journalière assurée en cas de maladie et/ou
d'accident. L'indemnité journalière en cas de maladie et
d'accident peut être assurée selon la perte de gain
escomptée à partir du montant de 2 fr. Dans les contrats
d'assurance collective, des indemnités journalières en cas
de maladie et d'accident, fixées en pour cent du salaire,
peuvent être assurées (art. 2 ch. 1 et 2 du règlement
SALARIA).

aa) Pendant la durée de ses rapports de travail, la
recourante a été assurée auprès de l'intimée dans le cadre
d'un contrat d'assurance collective conclu par son ex-
employeur, «le contrat d'assurance-maladie et accidents
Wirte» (ci-après : le contrat Wirte). Selon le préambule du
contrat Wirte, «pour autant que le présent contrat ne
stipule pas d'autres dispositions, la Loi fédérale sur
l'assurance-maladie (LAMA), ainsi que les conditions
générales d'assurance (CGA) et les règlements de la CMSE
sont applicables».
La section Aa du contrat Wirte prévoit, à son
ch. II/1.1, le versement d'une indemnité journalière de
80 % du salaire assuré en cas d'incapacité de travail par

suite de maladie et attestée par un médecin ou un chiro-
praticien. Aux termes du ch. II/2.1, est considéré comme
salaire assuré le salaire déterminant pour l'AVS décompté
avec l'AVS-Wirte (sans déduction de la franchise pour les
rentiers AVS) jusqu'à un maximum de 10 000 fr. par mois (y
compris gratification et 13ème salaire).

bb) Après la fin des rapports de travail, la recou-
rante a demandé et obtenu, conformément au ch. IV/4.1 de la
section Aa du contrat Wirte, la continuation de l'assurance
à titre individuel pour une indemnité journalière de
92 fr., couverture qui correspond à celle dont elle béné-
ficiait dans l'assurance collective. Son rapport d'assu-
rance a depuis lors été régi par les CGA et les règlements
de la CMSE (ch. IV/4.2/section Aa du contrat Wirte).

3.- a) Selon les premiers juges, le montant de
4500 fr. reconnu par l'ex-employeur ne doit pas être pris
en compte comme salaire assuré, car la transaction passée
devant le Tribunal civil du district de Lausanne ne le
«qualifie pas expressément de salaire arriéré et, comme il
y a eu transaction, le tribunal n'a pas eu à se prononcer
sur les prétentions de la demanderesse». A leurs yeux,
l'intimée est au surplus libérée de toute obligation à
l'égard de la recourante, parce que celle-ci a conclu un
arrangement avec son ex-employeur sans le consentement
préalable de la SWICA (cf. art. 24 ch. 4 CGA).
Pour sa part, la recourante soutient que le conflit de
travail qui l'opposait à R.________ avait trait à des
prétentions salariales, si bien que la somme reconnue
transactionnellement par son ex-employeur doit être prise
en considération comme salaire assuré.

b) Contrairement à l'opinion des premiers juges, il
n'est pas décisif que le tribunal civil n'ait pas eu à

statuer formellement sur les prétentions de la travail-
leuse, en raison de la conclusion d'une transaction ju-
diciaire. Car, selon la jurisprudence de la Cour de céans,
on peut en règle générale présumer des transactions passées
devant les juridictions prud'homales qu'elles reflètent
pour l'essentiel la situation telle qu'elle se présente en
fait et en droit. Aussi bien, le juge des assurances so-
ciales n'examinera en principe pas de façon indépendante
les questions préjudicielles (dont il aurait à connaître)
qui seraient résolues par ces transactions. Il y a en effet
lieu d'attacher une présomption d'exactitude aux transac-
tions judiciaires conclues dans le cadre d'une procédure
civile ordinaire, après que les parties ont pu confronter
leur point de vue et présenter leurs offres de preuves (SVR
1995 UV 33 p. 102 consid. 4b).
En l'espèce, il ressort du procès-verbal du 26 février
1996 du Tribunal civil du district de Lausanne, que le juge
civil a entendu les parties et auditionné des témoins avant
d'instrumenter la transaction en cause. On peut donc présu-
mer que celle-ci consacre une solution juridiquement bien
fondée dans son résultat. On ne sait cependant pas à quel
titre l'ex-employeur s'est déclaré redevable d'une somme de
4500 fr. à l'égard de C.________, la transaction étant
muette sur ce point. Or, cette question est déterminante
pour l'issue du litige.

c) En effet, à supposer que cette somme représente,
comme le soutient la recourante, un complément de salaire
de 900 fr. par mois (pour cinq mois de travail), il fau-
drait alors l'inclure dans le salaire assuré aussi bien
- les règles sur la surindemnisation étant réservées - pour
le calcul de l'indemnité journalière due pendant la durée
des rapports de travail (vu le ch. II/2.1 de la section Aa
du contrat Wirte) que pour celui de l'indemnité journalière
due après la résiliation des rapports de travail (vu le
ch. IV/4.1 de la section Aa du contrat Wirte qui prévoit le

droit à «la continuation de l'assurance pour une couverture
n'excédant pas celle de l'assurance collective»). A cet
égard, il est sans importance que le complément de salaire
allégué ait été accordé et versé quelque huit mois après la
période à laquelle il se rapporte : au regard des disposi-
tions topiques précitées du contrat Wirte, seul compte le
fait que ce complément fasse effectivement partie du sa-
laire déterminant AVS de la période en cause (compar. SVR
1995 UV 33 p. 101 sv. au sujet du gain assuré de l'art. 15
al. 2 LAA). Par ailleurs, toujours dans l'hypothèse où le
montant reconnu transactionnellement par l'ex-employeur
aurait valeur de complément de salaire, l'intimée ne pour-
rait pas se prévaloir de l'art. 24 ch. 4 CGA pour refuser
de le prendre en considération comme salaire assuré.
Certes, cette disposition prévoit que si l'assuré conclut
un arrangement avec un tiers sans le consentement préalable
de SWICA, celle-ci est libérée de toute obligation à son
endroit. Cette limitation de la responsabilité ne vaut
toutefois qu'à l'égard des arrangement passés avec des
tiers qui, parallèlement à SWICA, sont également tenus à
prestations (cf. art. 24 ch. 1 CGA), ce qui n'est pas le
cas de l'ex-employeur de l'assurée.

d) Pour établir que le montant reconnu par son ex-
employeur correspond bien à un complément de salaire, la
recourante argüe du fait que la rémunération fixée dans son
contrat de travail ne respectait pas le salaire minimum
mensuel garanti par la convention collective. Elle fait
également observer que l'assurance-invalidité a recalculé
les indemnités journalières lui revenant en se fondant sur
un revenu journalier moyen de 150 fr. (ce qui équivaut à un
revenu mensuel moyen d'environ 4500 fr.). De son côté,
l'intimée réfute les allégués de la recourante, en faisant
valoir qu'il n'est nullement établi que c'est à titre de
complément de salaire que l'ex-employeur lui a versé une

somme de 4500 fr. A cet égard, elle fait notamment remar-
quer que, selon un rapport du 23 septembre 1995 de sa dé-
léguée du service médical, l'assurée aurait alors déclaré
que le litige avec son ex-employeur portait sur la validité
du congé.

e) En l'état, il n'est donc pas possible de dire à
quel titre le montant de 4500 fr. a été reconnu par l'ex-
employeur de la recourante. En conséquence, le dossier doit
être renvoyé à la juridiction cantonale afin qu'elle or-
donne les mesures d'instruction nécessaires pour élucider
cette question. A cet effet, elle requerra l'édition des
pièces produites devant la juridiction civile (singulière-
ment le mémoire de demande) et entendra l'ex-employeur de
la recourante ainsi que, si besoin est, les autres témoins
dont celle-ci a demandé l'audition en procédure cantonale.

4.- S'agissant d'un litige qui concerne l'octroi ou
le refus de prestations d'assurance, la procédure est
gratuite (art. 134 OJ). En outre, la partie qui obtient
gain de cause a droit à des dépens (art. l35 en corrélation
avec l'art. 159 OJ). La demande d'assistance judiciaire est
dès lors sans objet.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est admis et le jugement du 25 mars 1999 du
Tribunal des assurances du canton de Vaud est annulé,
la cause étant renvoyée à cette autorité pour instruc-
tion complémentaire et nouveau jugement au sens des
considérants.

II. Il n'est pas perçu de frais de justice.

III. L'intimée versera à la recourante une indemnité de
dépens de 2500 fr. pour l'instance fédérale.

IV. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tri-
bunal des assurances du canton de Vaud et à l'Office
fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 16 mars 2000

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la IIIe Chambre :

Le Greffier :


Synthèse
Numéro d'arrêt : K.82/99
Date de la décision : 16/03/2000
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-03-16;k.82.99 ?
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