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02/02/2000 | SUISSE | N°U.205/98

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 02 février 2000, U.205/98


«AZA»
U 205/98 Vr

IIe Chambre

composée des Juges fédéraux Meyer, Ferrari et Ribaux,
suppléant; Decaillet, Greffier

Arrêt du 2 février 2000

dans la cause

M.________, 1940, recourant, représenté par Maître
L.________,
contre

Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents,
Fluhmattstrasse 1, Lucerne, intimée,

et

Tribunal administratif du canton de Berne, Berne

A.- M.________, né en 1940, travaille en qualité
d'architecte et dirige la société B.__

______ SA. Il est
assuré auprès de la Caisse nationale suisse d'assurance en
cas d'accidents (ci-après : la CNA) contre les acciden...

«AZA»
U 205/98 Vr

IIe Chambre

composée des Juges fédéraux Meyer, Ferrari et Ribaux,
suppléant; Decaillet, Greffier

Arrêt du 2 février 2000

dans la cause

M.________, 1940, recourant, représenté par Maître
L.________,
contre

Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents,
Fluhmattstrasse 1, Lucerne, intimée,

et

Tribunal administratif du canton de Berne, Berne

A.- M.________, né en 1940, travaille en qualité
d'architecte et dirige la société B.________ SA. Il est
assuré auprès de la Caisse nationale suisse d'assurance en
cas d'accidents (ci-après : la CNA) contre les accidents
professionnels et non professionnels. Le 5 août 1994, il a
été victime d'un accident de circulation au cours duquel
son automobile, après un freinage d'urgence, a été heurtée
à l'arrière par un autre véhicule.

Dans son rapport médical initial du 19 août 1994, le
docteur C.________, interniste, a diagnostiqué un syndrome
vertébro-radiculaire algique sensitif et moteur à droite
post-traumatique. Le 18 août 1994, le docteur E.________,
radiologue, a mis en évidence une hernie discale para-
médiane droite avec un assez volumineux fragment luxé vers
le bas, associée à un ostéophyte du rebord supérieur du
plateau vertébral S1, une compression radiculaire S1 droite
au niveau de son émergence à la hauteur du disque L5-S1 et
un minime bombement discal postérieur en L4-L5. Dans un
rapport du 30 août 1994, le docteur O.________, neurologue,
a relevé que le patient avait déjà présenté douze ans
auparavant un épisode de lombalgies sévères associées à des
sciatalgies à droite et a confirmé le diagnostic de
syndrome vertébro-radiculaire S1 algique à droite. Le
docteur P.________, médecin d'arrondissement de la CNA, a
admis que le traumatisme du 5 août 1994 avait décompensé un
état antérieur (rapport du 9 janvier 1995).
Le 24 mars 1995, les médecins de la policlinique de
neurologie et neurochirurgie de l'Hôpital A.________ ont
conclu que les troubles du patient provenaient d'une
luxation traumatique d'une hernie discale L5-S1 pré-
existante à l'accident. Après deux nouveaux épisodes de
blocage lombaire, l'intéressé a été hospitalisé successi-
vement à l'hôpital X.________ du 3 décembre 1995 au 16
janvier 1996 puis du 17 janvier au 14 février 1996 à la
Clinique rhumatologique et de réhabilitation Y.________. Le
25 mars 1996 le docteur P.________ a estimé qu'il convenait
de laisser le soin au médecin traitant d'augmenter le taux
de rendement de l'assuré dès que possible. Le docteur
C.________ a fixé à 25 % la capacité de travail de
l'intéressé en relevant que celui-ci développait un trouble
dysthimique avec un état de stress en forme différée lié
essentiellement aux conséquences néfastes de l'accident
(rapports des 9 avril et 28 octobre 1996).
Sur mandat de la Mobilière Suisse, assurance en res-
ponsabilité civile de la détentrice du véhicule ayant em-

bouti la voiture de l'assuré, ce dernier a été soumis à une
expertise médicale au Centre multidisciplinaire de la dou-
leur de la Clinique Z.________. Dans un rapport du 30 sep-
tembre 1996, les médecins de ce centre ont diagnostiqué des
lombosciatalgies droites avec atteinte radiculaire S1 sur
hernie discale L5-S1 médio-latérale droite luxée vers le
bas, ainsi qu'un état anxio-dépressif dans le cadre d'une
personnalité prénévrotique à composante narcissique impor-
tante. Ils ont attribué à des facteurs maladifs les trou-
bles somatiques qui pouvaient subsister au-delà d'une pé-
riode d'un an et demi après l'accident et ont nié que des
troubles psychiques soient liés à ce dernier.
Par décision du 29 janvier 1997, la CNA a mis fin à
ses prestations à partir du 31 janvier 1997. M.________ a
formé opposition contre cette décision. La CNA a produit
une appréciation médicale du 24 juillet 1997 de son médecin
d'arrondissement, le docteur H.________, qui confirmait en
tout point les conclusions des experts de la Clinique
Z.________. Par décision sur opposition du 14 octobre 1997,
la CNA a confirmé sa précédente décision.

B.- M.________ a recouru contre cette décision sur
opposition devant le Tribunal administratif du canton de
Berne. Il a déposé un rapport médical du docteur O.________
du 9 décembre 1997 et une lettre du docteur C.________ du
19 janvier 1998, notamment. Par jugement du 12 juin 1998,
la Cour cantonale a rejeté le recours. Elle a considéré en
bref que le dossier avait été suffisamment instruit, de
sorte qu'il ne se justifiait pas de procéder à l'adminis-
tration d'une nouvelle expertise. Elle a relevé que le
recourant ne présentait pas le tableau clinique d'un
traumatisme de type «coup du lapin» et que l'atteinte lom-
baire qui l'affectait encore au-delà du 31 janvier 1997
n'était plus en relation de causalité naturelle avec l'ac-
cident du 5 août 1994. Elle a par ailleurs nié tout lien de
causalité entre les troubles psychiques de l'intéressé et
l'événement assuré.

C.- M.________ interjette recours de droit adminis-
tratif contre ce jugement dont il demande l'annulation, en
concluant, sous suite de dépens, à l'octroi de prestations
d'assurance-accidents au-delà du 31 janvier 1997,
subsidiairement, au renvoi de la cause aux premiers juges.
Il sollicite par ailleurs la mise en oeuvre d'une expertise
médicale. Il fait valoir qu'il n'a pas pu participer à
l'administration de l'expertise médicale réalisée par les
médecins du Centre de la douleur de la Clinique Z.________,
que celle-ci est contredite par l'opinion des autres
médecins consultés et repose sur des constatations de fait
inexactes, de sorte qu'il s'impose d'ordonner une nouvelle
expertise. Il soutient par ailleurs que ses affections sont
en relation de causalité naturelle et adéquate avec l'acci-
dent du 5 août 1994.
La CNA conclut au rejet du recours. L'Office fédéral
des assurances sociales ne s'est pas déterminé.

Considérant en droit :

1.- a) Si l'administration ou le juge, se fondant sur
une appréciation consciencieuse des preuves fournies par
les investigations auxquelles ils doivent procéder
d'office, sont convaincus que certains faits présentent un
degré de vraisemblance prépondérante et que d'autres mesu-
res probatoires ne pourraient plus modifier cette apprécia-
tion, il est superflu d'administrer d'autres preuves (ap-
préciation anticipée des preuves; Kieser, Das Verwaltungs-
verfahren in der Sozialversicherung, p. 212, no 450; Kölz/-
Häner, Verwaltungsverfahren und Verwaltungsrechtspflege des
Bundes, 2e éd., p. 39, no 111 et p. 117, no 320; Gygi,
Bundesverwaltungsrechtspflege, 2e éd., p. 274; cf. aussi
ATF 122 II 469 consid. 4a, 122 III 223 consid. 3c, 120 Ib
229 consid. 2b, 119 V 344 consid. 3c et la référence). Une
telle manière de procéder ne viole pas le droit d'être
entendu (ATF 124 V 94 consid. 4b, 122 V 162 consid. 1d et
l'arrêt cité).

b) En l'occurrence, les diagnostics formulés par les
médecins de la Clinique Z.________ ne sont contredits par
aucun des nombreux rapports médicaux figurant au dossier,
ni d'ailleurs mis en cause par le recourant. Par ailleurs,
lorsqu'elle se fonde sur des expertises ordonnées par des
tiers et jointes au dossier, la CNA n'a pas à tenir compte
des règles de procédure de la PA et de la PCF régissant la
mise en oeuvre d'expertises par ses soins; dans de tels cas
les droits de partie de l'assuré doivent être sauvegardés
dans le cadre du droit d'être entendu et des règles sur
l'appréciation des preuves (RAMA 1995 no U 351 p. 487 con-
sid. 4b). Or, l'expertise réalisée par les médecins de la
Clinique Z.________ à été soumise à l'assuré, lequel pou-
vait, le cas échéant, faire poser des questions complémen-
taires aux experts. Le recourant soutient encore que l'ex-
pertise litigieuse repose sur un état de fait erroné, dès
lors qu'elle qualifie de bénin l'accident dont il a été
victime. Or, d'une part, les médecins de la Clinique
Z.________ ne contestent pas que l'accident du 5 août 1994
a déclenché les troubles dorsaux de l'intéressé. D'autre
part, la manière dont les experts qualifient la gravité de
l'accident n'a guère d'importance pour les constatations
médicales. Il s'agit là d'une question de droit qu'il in-
combe à l'administration ou au juge de trancher, en parti-
culier, à l'occasion de l'examen du lien de causalité adé-
quate entre un accident et des troubles psychiques. La mise
en oeuvre d'un expertise médicale complémentaire apparaît
dès lors superflue.

2.- Le litige porte sur la question du lien de causa-
lité entre l'accident du 5 août 1994 et les troubles pré-
sentés par le recourant après le 31 janvier 1997.

3.- a) Le jugement entrepris expose correctement les
principes légaux et jurisprudentiels applicables en l'espè-
ce, de sorte qu'il suffit d'y renvoyer.

b) Les premiers juges ont principalement fondé leur
appréciation sur le rapport d'expertise du 30 septembre
1996 des médecins du Centre multidisciplinaire de la dou-
leur de la Clinique Z.________. Il n'y a pas de raison de
mettre en doute la valeur probante de ce rapport, dès lors
qu'il se fonde sur un examen complet, prend en considéra-
tion les plaintes exprimées par l'assuré, a été établi en
pleine connaissance du dossier, donne une description clai-
re du contexte médical et contient des conclusions bien mo-
tivées (ATF 122 V 160 consid. 1c et les références). Con-
formément à ce document, il est plus que vraisemblable que
l'accident du 5 août 1994 a entraîné la décompensation
d'une situation préalablement asymptomatique. Les experts
ont attribué de manière prépondérante les troubles dorsaux
du recourant à des facteurs traumatiques pendant une année
à partir de l'accident, puis à raison de 50 % pendant une
période de six mois. Au-delà d'une année et demie, les mé-
decins de la Clinique Z.________ ont retenu que les fac-
teurs maladifs entraient seuls en cause dans l'évolution du
cas. Le docteur H.________ a pleinement confirmé les
conclusions des experts précités (appréciation médicale du
24 juillet 1997). Certes, dans une lettre du 19 janvier
1998, le docteur C.________ a relevé qu'ensuite de l'acci-
dent le recourant avait subi une luxation d'un fragment
d'une ancienne hernie discale qui a entraîné d'une manière
évidente l'apparition du syndrome de compression
radiculaire en S1 traduite par la symptomatologie algique,
le déficit moteur et les troubles sensitifs constatés. Ce
médecin ne se prononce toutefois pas sur la question de
l'influence de l'état antérieur de la colonne du recourant
sur la luxation précitée, de sorte que son opinion ne
saurait emporter la conviction. Par conséquent, il faut
admettre au degré de la vraisemblance prépondérante requis
que, même si l'accident a joué un rôle dans l'apparition
des troubles organiques de l'assuré, ceux-ci relèvent au-
delà du 31 janvier 1997 de l'atteinte lombaire dégénérative
préexistante affectant le recourant.

c) Sur le plan psychique, les médecins de la Clinique
Z.________ ont diagnostiqué un état anxio-dépressif dans le
cadre d'une personnalité prénévrotique à composante nar-
cissique importante mais ont conclu qu'il était impossible
de mettre en évidence une pathologie psychiatrique en rap-
port avec l'accident. De leur côté, le docteur C.________
et le docteur O.________ ont évoqué la présence chez le
recourant de troubles psychiques sous la forme d'un état
anxio-dépressif réactionnel. Or, aucun de ces deux médecins
n'a posé un diagnostic clair à ce sujet. Au demeurant, à
l'instar des considérations des premiers juges (cf. consid.
6a du jugement attaqué), l'accident de circulation du 5
août 1994 peut être qualifié de banal. Il ne constitue dès
lors pas un événement stressant exceptionnellement menaçant
ou catastrophique propre à entraîner un stress post-
traumatique selon la Classification internationale des
troubles mentaux et des troubles du comportement CIM-10
établie par l'OMS. Les avis des médecins précités ne suffi-
sent donc pas à remettre en cause les conclusions de
l'expertise du 30 septembre 1996.
Il résulte de ce qui précède que depuis le 1er février
1997 aucun lien de causalité naturelle ne subsiste entre
les troubles du recourant et l'accident du 5 août 1994. Le
jugement attaqué n'apparaît pas critiquable et le recours
doit être rejeté.

4.- Le recourant, qui succombe, ne saurait prétendre
une indemnité de dépens (art. 159 al. 1 en corrélation avec
l'art. 135 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est rejeté.

II. Il n'est pas perçu de frais de justice.

III. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tri-
bunal administratif du canton de Berne, Cour des af-
faires de langue française, et à l'Office fédéral des
assurances sociales.

Lucerne, le 2 février 2000
Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Juge présidant la IIe Chambre :

Le Greffier :


Synthèse
Numéro d'arrêt : U.205/98
Date de la décision : 02/02/2000
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-02-02;u.205.98 ?
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