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10/01/2000 | SUISSE | N°2A.415/1999

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 10 janvier 2000, 2A.415/1999


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2A.415/1999

IIe C O U R D E D R O I T P U B L I C
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10 janvier 2000

Composition de la Cour: MM. et Mme les Juges Wurzburger,
président, Yersin et Berthoud, juge suppléant.
Greffière: Mme Revey.

Statuant sur le recours de droit administratif
formé par

E.________, né en 1963, représenté par Me Michel Voirol,
avocat à Delémont,

contre

l'arrêt rendu le 21 juin 1999 par la Chambre administrative
du Tribunal cantonal du c

anton du Jura, dans la cause qui
oppose le recourant à la Section de l'état civil et des ha-
bitants du canton du J u...

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2A.415/1999

IIe C O U R D E D R O I T P U B L I C
***********************************************

10 janvier 2000

Composition de la Cour: MM. et Mme les Juges Wurzburger,
président, Yersin et Berthoud, juge suppléant.
Greffière: Mme Revey.

Statuant sur le recours de droit administratif
formé par

E.________, né en 1963, représenté par Me Michel Voirol,
avocat à Delémont,

contre

l'arrêt rendu le 21 juin 1999 par la Chambre administrative
du Tribunal cantonal du canton du Jura, dans la cause qui
oppose le recourant à la Section de l'état civil et des ha-
bitants du canton du J u r a;

(art. 11 al. 3 LSEE: rapatriement,
autorité de la chose jugée)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- Par arrêt du 16 octobre 1995, la Chambre admi-
nistrative du Tribunal cantonal du canton du Jura (ci-après:
le Tribunal cantonal) a prononcé un avertissement à l'encon-
tre de E.________, ressortissant français né en 1963 et ti-
tulaire d'une autorisation d'établissement, en ce sens
qu'une décision d'expulsion (art. 10 al. 1 lettre d de la
loi fédérale du 26 mars 1931 sur le séjour et l'établisse-
ment des étrangers [LSEE; RS 142.20]) ou de rapatriement
(art. 11 al. 3 LSEE) serait prononcée s'il devait à nouveau
tomber à la charge de l'assistance publique dans un délai
déterminé.

Constatant que la situation financière de l'inté-
ressé s'était péjorée à l'échéance du délai d'épreuve impar-
ti, la Section jurassienne de l'état civil et des habitants
(ci-après: la Section cantonale) a rendu une décision d'ex-
pulsion le 21 mars 1997, confirmée le 24 avril suivant.

E.________ a déféré cette décision devant le Tribu-
nal cantonal. Selon le dispositif du jugement rendu sur ce
recours le 25 novembre 1997, le Tribunal cantonal a "admis
partiellement le recours, annulé la décision d'expulsion et
renvoyé le dossier à la Section cantonale pour procéder dans
le sens des considérants". A cet égard, le considérant 6 re-
tenait que la mesure d'expulsion devait être remplacée par
le rapatriement et le considérant 9 invitait la Section can-
tonale à "rendre une décision de rapatriement après avoir
effectué les démarches nécessaires avec les autorités fran-
çaises en vue du transfert (de l'intéressé)".

B.- A la suite de ce jugement, la Section cantonale
a prononcé une "décision de rapatriement" à l'encontre de
l'intéressé, les 26 janvier et 5 mars 1998.

E.________ a saisi le 9 avril 1998 le Tribunal can-
tonal d'un nouveau recours contre cette décision, faisant
valoir qu'il ne se trouvait plus durablement et dans une
large mesure à la charge de l'assistance publique et que les
conditions d'un rapatriement n'étaient plus réalisées.

Par arrêt du 16 juillet 1998, le Tribunal cantonal
a déclaré ce recours irrecevable, estimant que la décision
attaquée devant lui ne constituait qu'une simple mesure
d'exécution de son arrêt du 25 novembre 1997, entré en force
de la chose jugée. Seules les modalités d'exécution du rapa-
triement pouvaient encore faire l'objet d'un recours, soit
d'un recours administratif au Gouvernement, auquel il trans-
mettait le dossier.

Statuant le 21 juin 1999 suite à une requête en in-
terprétation de l'intéressé, le Tribunal cantonal a précisé
le dispositif de son arrêt du 16 juillet 1998 en ce sens
qu'il déclarait irrecevable le recours de droit administra-
tif déposé le 9 avril 1998 en raison de l'autorité de la
chose jugée de la décision de rapatriement qu'il avait lui-
même rendue le 25 novembre 1997.

C.- Agissant le 25 août 1999 par la voie du recours
de droit administratif, E.________ demande au Tribunal fédé-
ral d'annuler l'arrêt du Tribunal cantonal du 21 juin 1999
et de renvoyer le dossier à celui-ci pour qu'il entre en ma-
tière sur le recours formé le 9 avril 1998.

L'autorité intimée et la Section cantonale con-
cluent au rejet du recours. Le Département fédéral de justi-
ce et police propose de rejeter le recours dans la mesure où
il est recevable.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- Le Tribunal fédéral examine d'office et libre-
ment la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF
125 I 253 consid. 1a p. 254; 125 II 293 consid. 1a p. 299 et
la jurisprudence citée).

Selon l'art. 101 lettre a OJ, si le recours de
droit administratif est irrecevable contre une décision de
fond, il n'est pas non plus recevable contre les décisions
incidentes ou les décisions sur recours pour déni de justice
ou retard injustifié, ni contre les décisions de non-entrée
en matière qui doivent être traitées comme celles qui sont
visées par cette disposition (ATF 119 Ib 412 consid. 2a p.
414; 110 Ib 197 consid. 2b p. 199).

En l'espèce, le Tribunal cantonal déclare irreceva-
ble un recours, formé contre une "décision de rapatriement"
de la Section cantonale, en raison de l'autorité de la chose
jugée. Dès lors que le recours de droit administratif serait
ouvert contre la décision finale prononçant le rapatriement
- celle-ci se fondant sur la loi fédérale sur le séjour et
l'établissement des étrangers à l'exclusion de l'art. 121
al. 2 Cst. (cf. art. 70 de l'ancienne Constitution et art.
100 al. 1 lettre b ch. 4 OJ) -, le recours de droit adminis-
tratif est également recevable contre l'arrêt d'irrecevabi-
lité attaqué, les autres conditions formelles des art. 97 ss
OJ étant respectées.

2.- Le recourant soutient que l'autorité intimée
n'a pas rendu une décision formelle de rapatriement dans son
arrêt initial du 25 novembre 1997, seul le prononcé de la
Section cantonale des 26 janvier et 5 mars 1998 constituant
une telle décision. En conséquence, l'arrêt initial n'a pas
acquis la force de la chose jugée sur le principe du rapa-
triement, si bien qu'un recours formé contre le prononcé
précité de la Section cantonale ne peut se heurter à l'ex-
ception de l'autorité de la chose jugée.

a) Il y a autorité de la chose jugée quand la pré-
tention litigieuse est identique à celle qui a déjà fait
l'objet d'un jugement passé en force. Tel est le cas lors-
que, dans l'un et l'autre procès, les parties ont soumis au
juge la même prétention en se fondant sur les mêmes motifs
juridiques et les mêmes faits. L'autorité de la chose jugée
s'attache en principe au seul dispositif du jugement. Cela
n'empêche toutefois pas qu'il faille parfois recourir aux
motifs pour déterminer la portée exacte du dispositif (ATF
123 III 16 consid. 2a p. 18; 121 III 474 consid. 4a p. 477;
119 II 89 consid. 2a p. 90; 115 II 187 consid. 3b p. 189 ss;
106 II 117 consid. 1 p. 118; Fritz Gygi, Bundesverwaltungs-
rechtspflege, 2e éd., Berne 1983, p. 320 ss). De plus, lors-
que le dispositif du jugement se réfère expressément aux
considérants, ceux-ci en deviennent partie intégrante, par-
tant, acquièrent la force de la chose jugée. Ainsi, lors-
qu'un tel dispositif conclut un jugement de renvoi, les con-
sidérants lient les autorités auxquelles la cause est ren-
voyée (ATF 120 V 233 consid. 1a p. 237; 113 V 159; Gygi, op.
cit. p. 323).

b) En l'espèce, c'est à juste titre que le Tribunal
administratif a déclaré irrecevable le recours formé par le
recourant contre le prononcé de la Section cantonale des 26
janvier et 5 mars 1998 en raison de l'autorité de la chose
jugée.

Certes, le dispositif de l'arrêt initial du 25 no-
vembre 1997 peut prêter le flanc à la critique au sens où il
ne mentionne pas expressément une décision de rapatriement.
Cette absence ne permet toutefois pas d'affirmer que l'auto-
rité de première instance n'était pas liée par une telle me-
sure. En effet, le dispositif se réfère expressément aux
considérants et ceux-ci expriment clairement la volonté du
Tribunal cantonal de prononcer une décision de rapatriement.
De plus, l'arrêt initial ne laisse aucune latitude d'appré-
ciation sur le principe du rapatriement, mais uniquement sur
les modalités de celui-ci. Ainsi, l'arrêt initial constitue
une décision finale de rapatriement qui, en l'absence de re-
cours auprès du Tribunal fédéral, a acquis la force de la
chose jugée. La décision de la Section cantonale rendue à la
suite de cet arrêt ne peut donc qu'être une simple mesure
d'exécution de celui-ci. En conséquence, un recours formé
contre cette décision doit, dans la mesure où il conteste le
principe même du rapatriement, être écarté en raison de
l'autorité de la chose jugée.

3.- Le recourant reproche également à l'autorité
intimée de n'avoir pas examiné les faits invoqués à l'appui
de ses lettres adressées les 23 janvier et 2 mars 1998 à la
Section cantonale au sujet de sa situation financière.

Toutefois, ces arguments tendent uniquement à re-
mettre en cause la décision de rapatriement, de sorte que
l'autorité intimée était fondée à écarter le grief y rela-
tif.

4.- Vu ce qui précède, le recours est mal fondé et
doit être rejeté. les conclusions du recourant étant dénuées
de chances de succès, il convient de refuser l'assistance
judiciaire qu'il avait requise (art. 152 OJ). Succombant, le
recourant doit supporter les frais judiciaires, qui seront

fixés compte tenu de sa situation financière (art. 156 al.
1, 153 et 153a OJ). Il n'est pas alloué de dépens (art. 159
al. 1 OJ).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Rejette le recours.

2. Rejette la demande d'assistance judiciaire.

3. Met à la charge du recourant un émolument judiciaire
de 500 fr.

4. Communique le présent arrêt en copie au mandataire
du recourant, à la Chambre administrative du Tribunal canto-
nal et à la Section de l'état civil et des habitants du can-
ton du Jura, ainsi qu'au Département fédéral de justice et
police.
_____________

Lausanne, le 10 janvier 2000
RED/odi

Au nom de la IIe Cour de droit public
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président,

La Greffière,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2A.415/1999
Date de la décision : 10/01/2000
2e cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-01-10;2a.415.1999 ?
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