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05/01/2000 | SUISSE | N°2A.307/1999

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 05 janvier 2000, 2A.307/1999


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2A.307/1999

IIe C O U R D E D R O I T P U B L I C
***********************************************

5 janvier 2000

Composition de la Cour: MM. et Mme les Juges Wurzburger,
président, Hungerbühler et Pont Veuthey, suppléante.
Greffière: Mme Dupraz.

Statuant sur le recours de droit administratif
formé par

X.________, né le 27 mai 1958, et Y.________, tous deux re-
présentés par le Centre social protestant, rue du Village-
Suisse 14, à Genève,

contre

la décision pr

ise le 9 mars 1999 par la Commission cantonale
de recours de police des étrangers du canton de Genève, dans
la cause qu...

«»
2A.307/1999

IIe C O U R D E D R O I T P U B L I C
***********************************************

5 janvier 2000

Composition de la Cour: MM. et Mme les Juges Wurzburger,
président, Hungerbühler et Pont Veuthey, suppléante.
Greffière: Mme Dupraz.

Statuant sur le recours de droit administratif
formé par

X.________, né le 27 mai 1958, et Y.________, tous deux re-
présentés par le Centre social protestant, rue du Village-
Suisse 14, à Genève,

contre

la décision prise le 9 mars 1999 par la Commission cantonale
de recours de police des étrangers du canton de Genève, dans
la cause qui oppose les recourants à l'Office cantonal de la
population du canton de G e n è v e;

(autorisation de séjour)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- X.________ est un ressortissant français né en
1958. Il a eu une enfance difficile et a été placé vers
l'âge de quinze ans à A.________ dans un foyer de rééduca-
tion, dont il a été renvoyé parce qu'il consommait de la
drogue (haschich et héroïne). En 1974, il a été refoulé vers
la France alors qu'il essayait de passer la douane avec des
stupéfiants achetés en Suisse. Cela s'est reproduit le 21
novembre 1975. Le 8 juillet 1976, la Police fédérale des
étrangers a prononcé à son encontre une interdiction d'en-
trée en Suisse et au Liechtenstein valable du 8 juillet 1976
au 8 juillet 1978 pour "infractions à la loi fédérale sur
les stupéfiants". Le Tribunal correctionnel de T.________ a
condamné X.________ le 13 novembre 1985 à trois ans d'empri-
sonnement, pour usage illicite de stupéfiants et trafic de
stupéfiants par importation, exportation, fabrication ou
production de courant janvier 1985 à courant juillet 1985,
et le 12 juillet 1990 à cinq ans d'emprisonnement, pour dé-
tention non autorisée de stupéfiants et transport non auto-
risé de stupéfiants courant 1988 et courant 1989. Sorti de
prison en décembre 1992, X.________ a rencontré en février
1993 Y.________ qui, initialement française, avait acquis la
nationalité suisse par son mariage avec un toxicomane sidéen
déclaré. Au contact de ce dernier, Y.________ s'était mise à
se droguer et elle était devenue séropositive en 1986.
Y.________ a reçu un montant important de l'assurance-vie de
son mari à la suite de la mort accidentelle de celui-là en
décembre 1992. Elle-même et X.________ ont vécu de cet ar-
gent pendant plusieurs années. En 1996, ils sont partis vi-
vre en Inde, mais ont dû en revenir en 1997, malades et dé-
pendants de la drogue. Y.________ a alors été traitée pour
sa séropositivité. Elle a également suivi une cure de désin-
toxication à la méthadone du 5 juin 1997 à décembre 1998

comme d'ailleurs X.________ dont le traitement a duré du 5
juin au 1er décembre 1997.

En juillet 1997, Y.________ a déposé une demande visant
à bénéficier de prestations de l'assurance-invalidité (AI).
Elle perçoit une rente d'invalidité de la Caisse de pré-
voyance du personnel enseignant de l'instruction publique et
des fonctionnaires de l'administration du canton de Genève
(ci-après: la Caisse). Depuis novembre 1997, elle reçoit
mensuellement 81 fr. de l'Hospice général de Genève.

B.- X.________ a épousé Y.________ le 17 octobre 1997
et déposé une demande d'autorisation de séjour auprès de
l'Office cantonal de la population du canton de Genève (ci-
après: l'Office cantonal) le 20 octobre 1997. Par décision
du 9 décembre 1997, l'Office cantonal a rejeté la demande et
imparti à l'intéressé un délai échéant le 15 février 1998
pour quitter le territoire genevois. Il s'est notamment fon-
dé sur les condamnations prononcées à l'encontre de
X.________ pour des délits liés à la drogue.

C.- Le 9 mars 1999, la Commission cantonale de recours
de police des étrangers du canton de Genève (ci-après: la
Commission cantonale de recours) a rejeté le recours formé
par X.________ et sa femme contre la décision de l'Office
cantonal du 9 décembre 1997 et confirmé cette décision. Elle
s'est également référée aux condamnations pénales prononcées
à l'encontre de X.________, en ajoutant que, d'après leurs
déclarations, les intéressés étaient complètement à la char-
ge de l'assistance publique depuis juillet 1997.

D.- Agissant par la voie du recours de droit adminis-
tratif, X.________ et Y.________ demandent au Tribunal fédé-
ral, sous suite de frais et dépens, principalement d'annuler
la décision de la Commission cantonale de recours du 9 mars
1999, de dire que X.________ doit être mis au bénéfice d'une

autorisation de séjour lui permettant de vivre auprès de son
épouse et de renvoyer la cause à l'autorité cantonale de
première instance afin qu'une autorisation de séjour soit
délivrée sans délai à X.________; subsidiairement, ils de-
mandent de pouvoir prouver la vérité des faits qu'ils allè-
guent. Ils se plaignent en particulier de violation du prin-
cipe de la proportionnalité, d'arbitraire et de constatation
inexacte de faits pertinents. Ils invoquent notamment le
temps écoulé depuis la dernière condamnation prononcée con-
tre X.________. Ils font valoir qu'ils ne sont pas entière-
ment à la charge de l'assistance publique et que X.________
est en état de travailler. Ils relèvent que Y.________ est
enceinte et a besoin d'un suivi médical continu de ses méde-
cins de Genève et que X.________ n'a pas de chances de réin-
sertion sociale en France, de sorte qu'on ne pourrait les
faire déménager dans ce pays. Ils requièrent l'assistance
judiciaire.

La Commission cantonale de recours a expressément re-
noncé à formuler des observations. L'Office cantonal conclut
au rejet du recours. Au nom du Département fédéral de justi-
ce et police, l'Office fédéral des étrangers propose de re-
jeter le recours.

E.- Par ordonnance du 19 juillet 1999, le Juge prési-
dant la IIe Cour de droit public a admis la demande d'effet
suspensif présentée par les recourants.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- Le Tribunal fédéral examine d'office et librement
la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 124 II
499 consid. 1a p. 501).

a) Selon l'art. 100 al. 1 lettre b ch. 3 OJ, le recours
de droit administratif n'est pas recevable en matière de po-
lice des étrangers contre l'octroi ou le refus d'autorisa-
tions auxquelles le droit fédéral ne confère pas un droit.
D'après l'art. 4 de la loi fédérale du 26 mars 1931 sur le
séjour et l'établissement des étrangers (LSEE; RS 142.20),
les autorités compétentes statuent librement, dans le cadre
des prescriptions légales et des traités avec l'étranger,
sur l'octroi ou le refus d'autorisations de séjour ou d'éta-
blissement. En principe, l'étranger n'a pas de droit à l'oc-
troi d'une autorisation de séjour. Ainsi, le recours de
droit administratif est irrecevable, à moins que ne puisse
être invoquée une disposition particulière du droit fédéral
ou d'un traité, accordant le droit à la délivrance d'une
telle autorisation (ATF 124 II 361 consid. 1a p. 363/364).

aa) D'après l'art. 7 al. 1 LSEE, le conjoint étranger
d'un ressortissant suisse a droit à l'octroi et à la prolon-
gation de l'autorisation de séjour aux conditions fixées par
cette disposition. Selon la jurisprudence, pour juger de la
recevabilité du recours de droit administratif, seule est
déterminante la question de savoir si un mariage au sens
formel existe.

X.________ est marié avec Y.________ qui est suisse. Le
recours est donc recevable au regard de la disposition pré-
citée, le point de savoir s'il faut délivrer une autorisa-
tion de séjour à X.________ relevant du fond (ATF 120 Ib 6
consid. 1 p. 8).

bb) Un étranger peut, selon les circonstances, se pré-
valoir du droit au respect de sa vie privée et familiale ga-
ranti par l'art. 8 CEDH pour s'opposer à l'éventuelle sépa-
ration de sa famille et obtenir ainsi une autorisation de
séjour. Encore faut-il pour pouvoir invoquer l'art. 8 CEDH
que la relation entre l'étranger et une personne de sa fa-

mille ayant le droit de résider durablement en Suisse (en
principe nationalité suisse ou autorisation d'établissement)
soit étroite et effective (ATF 124 II 361 consid. 1b
p. 364). D'après la jurisprudence, les relations familiales
qui peuvent fonder, en vertu de l'art. 8 CEDH, un droit à
une autorisation de police des étrangers sont avant tout les
rapports entre époux ainsi qu'entre parents et enfants mi-
neurs vivant ensemble (ATF 120 Ib 257 consid. 1d p. 261).

Les recourants sont mariés et vivent ensemble. Il y a
donc lieu de considérer qu'ils entretiennent une relation
étroite et effective, de sorte que le recours est aussi re-
cevable au regard de l'art. 8 CEDH, puisque Y.________ est
suisse.

b) D'après l'art. 103 lettre a OJ, quiconque est at-
teint par la décision attaquée et a un intérêt digne de pro-
tection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée a qualité pour
recourir. La qualité pour recourir est donnée au justiciable
touché plus que quiconque ou que la généralité des adminis-
trés dans ses intérêts économiques, matériels ou idéaux; tel
est le cas chaque fois que sa situation de droit ou de fait
peut être influencée par le sort de la cause (ATF 123 V 113
consid. 5a p. 115; 119 Ib 56 consid. 2a p. 59/60).

La qualité pour recourir de X.________ ne fait pas de
doute. Quant à Y.________, elle est incontestablement tou-
chée plus que quiconque par la décision attaquée - qui con-
firme le refus de délivrer une autorisation de séjour à son
mari. Il y a donc lieu de lui reconnaître la qualité pour
agir devant l'autorité de céans.

c) Au surplus, déposé en temps utile et dans les formes
prescrites par la loi, le présent recours est en principe
recevable en vertu des art. 97 ss OJ.

2.- D'après l'art. 104 OJ, le recours de droit adminis-
tratif peut être formé pour violation du droit fédéral, y
compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (lettre
a) ainsi que pour constatation inexacte ou incomplète des
faits pertinents, sous réserve de l'art. 105 al. 2 OJ (let-
tre b). Le Tribunal fédéral vérifie d'office l'application
du droit fédéral, qui englobe notamment les droits constitu-
tionnels des citoyens (ATF 124 II 517 consid. 1 p. 519; 123
II 385 consid. 3 p. 388), sans être lié par les motifs invo-
qués par les parties (art. 114 al. 1 in fine OJ). En revan-
che, lorsque le recours est dirigé, comme en l'espèce, con-
tre la décision d'une autorité judiciaire, le Tribunal fédé-
ral est lié par les faits constatés dans cette décision,
sauf s'ils sont manifestement inexacts ou incomplets ou
s'ils ont été établis au mépris de règles essentielles de
procédure (art. 105 al. 2 OJ). La possibilité de faire va-
loir des faits nouveaux ou de nouveaux moyens de preuve est
dès lors très restreinte. Seules sont admissibles les preu-
ves que l'instance inférieure aurait dû retenir d'office et
dont le défaut d'administration constitue une violation de
règles essentielles de procédure (ATF 121 II 97 consid. 1c
p. 99). En particulier, les modifications ultérieures de
l'état de fait ne peuvent normalement pas être prises en
considération, car on ne saurait reprocher à une autorité
d'avoir mal constaté les faits, au sens de l'art. 105 al. 2
OJ, lorsque ceux-ci ont changé après sa décision (ATF 125 II
217 consid. 3a p. 221). En outre, le Tribunal fédéral ne
peut pas revoir l'opportunité de la décision entreprise, le
droit fédéral ne prévoyant pas un tel examen en la matière
(art. 104 lettre c ch. 3 OJ).

Ainsi, il convient de tenir compte des nouvelles pièces
produites par les recourants au sujet des traitements médi-
caux qu'ils ont entrepris en 1997 et de leur situation fi-
nancière, dans la mesure où elles permettent d'établir exac-
tement les faits au moment où la décision attaquée est tom-

bée (cf. lettre A ci-dessus). L'autorité intimée aurait, en
effet, dû compléter son information sur ces points, vu la
longueur de la procédure qui s'est déroulée devant elle. En
revanche, il y a lieu d'écarter toutes autres allégations et
preuves nouvelles des recourants portant notamment sur la
grossesse de Y.________. Au demeurant, une modification de
l'état de fait postérieure à la décision attaquée pourrait
être invoquée dans le cadre d'une nouvelle procédure devant
les autorités inférieures (Alfred Kölz/Isabelle Häner, Ver-
waltungsverfahren und Verwaltungsrechtspflege des Bundes, 2e
éd., Zurich 1998, n. 943, p. 334).

3.- Les recourants demandent subsidiairement de pouvoir
prouver "la vérité des faits allégués" dans leur mémoire.
Ils ne précisent cependant pas quels faits ils aimeraient
prouver. Comme il n'y a aucun motif d'ordonner une procédure
probatoire pour élucider les faits, au sens de l'art. 95 al.
1 OJ (applicable par renvoi de l'art. 113 OJ), la demande
subsidiaire des intéressés doit être rejetée.

4.- a) Selon l'art. 7 al. 1 in fine LSEE, le droit du
conjoint étranger d'un ressortissant suisse à l'octroi, res-
pectivement à la prolongation, d'une autorisation de séjour
s'éteint lorsqu'il existe un motif d'expulsion.

L'art. 10 al. 1 LSEE dispose qu'un étranger peut notam-
ment être expulsé de Suisse ou d'un canton s'il a été con-
damné par une autorité judiciaire pour crime ou délit (let-
tre a) ou si lui-même, ou une personne aux besoins de la-
quelle il est tenu de pourvoir, tombe d'une manière continue
et dans une large mesure à la charge de l'assistance publi-
que (lettre d). L'expulsion ne sera toutefois prononcée que
si elle paraît appropriée à l'ensemble des circonstances
(art. 11 al. 3 LSEE) et qu'elle respecte donc le principe de
la proportionnalité (ATF 116 Ib 113 consid. 3c p. 117); pour
apprécier ce qui est équitable, l'autorité tiendra notamment

compte de la gravité de
la faute commise par l'étranger, de
la durée de son séjour en Suisse et du préjudice qu'il au-
rait à subir avec sa famille du fait de l'expulsion (art. 16
al. 3 du règlement d'exécution du 1er mars 1949 de la LSEE -
RSEE; RS 142.201). Certaines dispositions légales tendent à
réduire les rigueurs d'une expulsion fondée sur l'art. 10
al. 1 lettre d LSEE. Ainsi, d'après l'art. 10 al. 2 LSEE,
une telle expulsion ne peut être prononcée que si le retour
de l'expulsé dans son pays d'origine est possible et peut
être raisonnablement exigé. De même, l'art. 11 al. 3 LSEE
dispose que des rigueurs inutiles seront évitées lors d'ex-
pulsions décidées en vertu de l'art. 10 al. 1 lettre d LSEE.

Il est possible que plusieurs causes d'expulsion soient
réalisées dans un cas particulier mais qu'aucune d'entre
elles n'autorise à elle seule l'expulsion au regard du prin-
cipe de la proportionnalité. Toutefois, il convient alors de
porter une appréciation d'ensemble qui, selon les circons-
tances, peut conduire à admettre que l'expulsion n'est pas
excessive au vu des faits découlant de ces différentes cau-
ses d'expulsion (Alain Wurzburger, La jurisprudence récente
du Tribunal fédéral en matière de police des étrangers, in
RDAF 1997 1 267, p. 308; arrêt non publié du 18 mai 1993 en
la cause Mustafa-Shala, consid. 3b).

Le refus d'octroyer, respectivement de prolonger, une
autorisation de séjour au conjoint étranger d'un ressortis-
sant suisse réalisant un motif d'expulsion suppose de même
une pesée de tous les intérêts publics et privés en présen-
ce. Cela résulte non seulement de la référence, contenue
dans l'art. 7 al. 1 LSEE, à un motif d'expulsion, mais enco-
re de l'art. 8 CEDH. En effet, le droit au respect de la vie
privée et familiale garanti par l'art. 8 par. 1 CEDH n'est
pas absolu. Une ingérence dans l'exercice de ce droit est
possible à certaines conditions selon l'art. 8 par. 2 CEDH.

b) Si le motif d'expulsion est la commission d'une in-
fraction, la peine infligée par le juge pénal est le premier
critère lorsqu'il s'agit d'évaluer la gravité de la faute et
de procéder à la pesée des intérêts. Pour ce qui est des
faits commis, la jurisprudence est rigoureuse notamment en
matière de trafic de drogue (cf. Alain Wurzburger, op. cit.,
p. 308). Le risque de récidive est un facteur important per-
mettant d'apprécier le danger que présente un étranger pour
l'ordre public (ATF 120 Ib 6 consid. 4c p. 15; arrêt non pu-
blié du 28 octobre 1999 en la cause Silluzio, consid. 4).
Selon la jurisprudence applicable au conjoint étranger d'un
ressortissant suisse, une condamnation à deux ans de priva-
tion de liberté constitue la limite à partir de laquelle, en
général, il y a lieu de refuser l'autorisation de séjour
lorsqu'il s'agit d'une demande d'autorisation initiale ou
d'une requête de prolongation d'autorisation déposée après
un séjour de courte durée (ATF 120 Ib 6 consid. 4b p. 14).
Ce principe vaut même lorsqu'on ne peut pas - ou difficile-
ment - exiger de l'épouse suisse de l'étranger qu'elle quit-
te la Suisse, ce qui empêche de fait les conjoints de vivre
ensemble d'une manière ininterrompue.

c) Le refus pour indigence d'octroyer, respectivement
de prolonger, une autorisation de séjour au titre du regrou-
pement familial implique que le risque que ce regroupement
fasse tomber les intéressés à la charge de l'assistance pu-
blique entre clairement et concrètement en considération
(ATF 119 Ib 81 consid. 2d p. 87). Dans la mesure où des mo-
tifs financiers s'opposent à un regroupement familial, il
faut supposer qu'il existe pour les personnes concernées un
danger concret de tomber d'une manière continue et dans une
large mesure à la charge de l'assistance publique au sens de
l'art. 10 al. 1 lettre d LSEE; de simples soupçons ne suffi-
sent cependant pas. Pour apprécier si une personne se trouve
dans une large mesure à la charge de l'assistance publique,
il faut tenir compte du montant total des prestations déjà

versées à ce titre. Pour évaluer si elle tombe de manière
continue à la charge de l'assistance publique, il faut exa-
miner sa situation financière à long terme et non pas seule-
ment au moment de la demande de regroupement familial. Il
convient en particulier d'estimer, en se fondant sur la si-
tuation financière actuelle de l'intéressé et sur son évolu-
tion probable, s'il existe des risques que, par la suite, il
se trouve à la charge de l'assistance publique (ATF 119 Ib 1
consid. 3c p. 6/7). Comme le regroupement familial vise à
réunir une même famille, il faut prendre en compte la dispo-
nibilité de chacun de ses membres à participer financière-
ment à cette communauté. Il faut évaluer si et dans quelle
mesure le revenu de chaque membre est réalisable. Il doit
être concret et vraisemblable et, autant que possible, ne
pas se limiter à une courte échéance (arrêt non publié du 18
novembre 1996 en la cause Morina-Balbi, consid. 4a).

5.- a) X.________ a fait l'objet de deux condamnations
pénales de respectivement trois et cinq ans d'emprisonnement
pour consommation et trafic de stupéfiants avec récidive. Il
s'agit de condamnations lourdes, sanctionnant des délits
graves, dont la dernière remonte certes à 1990. Cependant,
X.________ qui était parti faire sa vie en Inde en est reve-
nu en 1997 en raison notamment de sa dépendance envers la
drogue. A ce moment, il n'était donc pas encore sorti du mi-
lieu de la drogue. Ce n'est qu'en juin 1997 qu'il a entre-
pris une cure de désintoxication pour mettre fin à cette dé-
pendance. Or, la protection de la collectivité publique face
au développement du marché de la drogue constitue incontes-
tablement un intérêt public prépondérant justifiant l'éloi-
gnement de Suisse d'un étranger qui s'est rendu coupable de
délits graves liés à la drogue. Les étrangers qui sont ou
ont été mêlés au commerce des stupéfiants doivent donc s'at-
tendre à faire l'objet de mesures d'éloignement. L'intérêt
public à éloigner X.________ de Suisse en raison des graves

condamnations dont il a fait l'objet semble par conséquent
primer.

b) Pendant qu'il était incarcéré, X.________ a notam-
ment terminé sa formation générale et obtenu un certificat
de mécanicien sur autos. Depuis qu'il est sorti de prison en
décembre 1992, il n'a cependant jamais exercé cette profes-
sion. Il a fait la connaissance de Y.________ en février
1993 et a dès lors vécu avec elle des années durant de l'ar-
gent qu'elle avait reçu de l'assurance-vie de son premier
mari, à la suite du décès de celui-là. Après sa cure de dé-
sintoxication, X.________ n'a pas trouvé d'emploi et ses
chances de réinsertion professionnelle sont très incertai-
nes. Les recourants vivent de la rente d'invalidité que
Y.________ perçoit de la Caisse, complétée par une rente
mensuelle versée par l'Hospice général de Genève. Par ail-
leurs, Y.________ a présenté une demande de prestations AI,
car elle ne pourra vraisemblablement pas reprendre un tra-
vail. En outre, les primes d'assurance-maladie de X.________
sont payées "par les autorités françaises" en raison de son
indigence. Dès lors, X.________ n'apparaît pas à même de
subvenir à ses propres besoins ni, par conséquent, à ceux de
sa famille.

c) Ce n'est qu'en octobre 1997 que X.________ a présen-
té une demande d'autorisation de séjour en Suisse. On ne
saurait donc considérer qu'il a effectué un long séjour ré-
gulier en Suisse (cf. ATF 124 II 110 consid. 3 p. 113). Il
n'a pas pu y tisser des relations professionnelles stables;
quant à ses attaches familiales, sociales et culturelles,
elles ne se trouvent pas en Suisse. En ce qui concerne les
motifs qui sont à la base de sa demande d'autorisation de
séjour en Suisse, X.________ a expliqué en particulier qu'il
craignait de devoir payer 600'000 fr. français d'amende en
relation avec le trafic de stupéfiants. Une telle motivation
ne saurait être prise en compte pour justifier la demande

précitée car l'obtention d'une autorisation de séjour ne
doit pas permettre à un ressortissant étranger de se sous-
traire à ses obligations pécuniaires. En outre, des circons-
tances d'ordre thérapeutique sont également à l'origine de
la demande susmentionnée. X.________ a notamment invoqué
l'état de santé précaire de sa femme. Or, si cette dernière
était amenée à vivre en France, elle pourrait continuer le
traitement dont elle peut bénéficier en Suisse. En effet, la
France offre une qualité de soins équivalente à celle qui
existe en Suisse. Au demeurant, Y.________ a vécu plus de
trois ans avec X.________ avant de l'épouser et elle ne pou-
vait ignorer son passé quand elle s'est mariée avec lui.
Elle a donc pris le risque de devoir concrétiser sa vie fa-
miliale ailleurs qu'en Suisse avec tout ce que cela impli-
quait (cf. ATF 120 Ib 6 consid. 4c p. 15). De plus, elle a
passé toute une partie de sa vie en France, sa patrie ini-
tiale, et ne serait pas dépaysée si elle devait y retourner.

d) A l'issue d'une appréciation d'ensemble des circons-
tances rappelées ci-dessus, l'autorité intimée pouvait, sans
violer le droit fédéral, confirmer le refus d'accorder une
autorisation de séjour à X.________. En particulier, elle a
appliqué correctement les art. 4 aCst., 7, 10 et 11 LSEE, 16
RSEE, ainsi que 8 CEDH.

6.- Vu ce qui précède, le recours doit être rejeté.

Les recourants ont demandé l'assistance judiciaire, en
ce sens qu'ils soient dispensés de payer les frais judiciai-
res. On peut admettre, sur la base du dossier, que leur si-
tuation financière ne leur permet pas d'assumer les frais de
la présente procédure; par ailleurs, leurs conclusions
n'étaient pas dépourvues de toute chance de succès. Il con-
vient donc d'agréer leur demande, soit de renoncer à perce-
voir des frais judiciaires (art. 152 al. 1 OJ).

Succombant, les recourants n'ont pas droit à des dépens
(art. 159 al. 1 OJ).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Rejette le recours.

2. Admet la demande d'assistance judiciaire.

3. Dit qu'il n'est pas perçu d'émolument judiciaire.

4. Dit qu'il n'est pas alloué de dépens.

5. Communique le présent arrêt en copie au représentant
des recourants, à l'Office cantonal de la population et à la
Commission cantonale de recours de police des étrangers du
canton de Genève, ainsi qu'au Département fédéral de justice
et police.

Lausanne, le 5 janvier 2000
DAC/mnv

Au nom de la IIe Cour de droit public
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président,

La Greffière,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2A.307/1999
Date de la décision : 05/01/2000
2e cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2000-01-05;2a.307.1999 ?
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